Ce fut une fois de plus sur un ton supérieur que l’elfe noir répondit à l’hinionne. Il considérait qu’elle accordait trop de confiance en Elurien, il rappela que ce dernier avait pris la place à Thensoor alors celui-ci combattait à ses côtés. Sibelle nota cette information, mais elle demeura prudente quant à sa véracité. Ce n’était pas la première fois qu’elle entendait Endar résumer des situations et les interpréter de telle façon pour les tourner à son avantage.
Sibelle s’était présentée à la nouvelle aventurière ayant pénétré dans la salle de convenance. Kivan arriva quelques secondes après, la questionnant de façon plutôt abrupte. Sans pour autant en prendre ombrage, l’intéressée les salua et son compagnon posa son regard sur Sibelle et Kivan. Répondant d’abord aux questions de Sibelle, elle les informa que retrouver Naral n’était pas son projet initial, bien qu’on l’est informé que ça lui permettrait peut-être de se déplacer ensuite plus facilement sur Aliaénon. Elle prévoyait se rendre à la tour d’Or, mais Elurien, dans un état second, lui parla de la Tour d’Orsam.
Tout en s’adressant tout particulièrement à Kivan, la combattante déclina son identité ainsi que celle de son compagnon à quatre pattes : Al-Ayrad. Sibelle demeura attentive afin de bien mémoriser le nom de la femme et celle de son compagnon. Elle attendit patiemment la fin de la présentation pour ramener la discussion sur un point qui l’intéressait : la tour d’Orsam.
« Oh ! Je croyais que vous étiez, tout comme nous tous, dépêché par la milice d'Oranan. ...la tour d'Orsan, que vous a-t-il dit à ce sujet ? Cette information pourrait nous aider... Oui Elurien nous a semblé étrange après sa sortie de l'infirmerie, je ne sais pas ce qui s'est passé là, mais il en est ressorti transformé. »Malheureusement, Arianne ne put apporter de réponses concrètes à Sibelle, Elurien lui ayant seulement annoncé sans plus de détail que son destin se trouvait à cet endroit.
Puis se tournant vers Sibelle, Ariane lui demanda si l’un parmi eux possédait une carte d’Aliaénon afin de lui indiquer le chemin vers la tour d’Orsan. Sibelle demeura perplexe se demandant si c’était un hasard qu’Ariane s’était adressé à elle. Cependant, elle n’en laissa rien paraître. Elle se contenta de secouer négativement la tête en affichant un air désolé.
« J’ai bien griffonné quelques noms et tracé quelques traits sur un bout de parchemin, mais ça n'a rien d'une carte... enfin, ça ne pourrait pas vraiment vous indiquer le chemin à suivre. J'ai fait ça afin de me donner une vue d'ensemble des différentes régions d’Aliaénon. »Cela dit, elle fouilla dans son sac et montra
ledit document. Kivan en profita alors pour préciser qu’ayant été téléporté tout récemment dans ce nouveau monde pour lui, il ne pouvait apporter son aide.
Comme il fallait s’y attendre, le bout de parchemin griffonné par Sibelle n’était à peu près lisible que d’elle puisque dans l’empressement, elle n’avait que transcrit le début des noms des villes. Ce fut donc sans hésitation que Sibelle pointa les lettres Ors, situées plus à l’ouest lorsqu’Ariane lui demanda aimablement de lui indiquer la ville d’Orsan. Conservant toujours la même politesse, Ariane remercia la guerrière. Elle dit avoir au moins une vue d’ensemble et savait désormais qu’elle devrait se diriger vers le sud-ouest.
Sibelle était en train de ranger sa carte, lorsque Ariane précisa qu’elle ferait le voyage avec Yurlungur et que cette dernière avait été accusée à tort par certains d’entre eux. Sibelle serra ses poings lorsqu’Ariane mentionna Yurlungur et ses jointures devinrent complètement blanches lorsqu'elle affirma que la fillette avait été accusée à tort.
Elle prit donc une grande respiration pour reprendre son calme et le demeurer, pour ensuite prendre la parole d'un ton calme.
« Je vais me contenter de vous énumérer les faits, que les faits, et ce sera à vous de juger si elle a été accusée à tort ou pas. » Elle s'arrêta un moment puis sur le même ton calme, elle exposa les faits:
« Nous étions dans la grande salle de la mystérieuse caverne où un étrange autel magique prenait place. Simaya, une magicienne d'Esseroth, était là, les yeux révulsés comme en transe. Par sa magie, elle a fait relever des cadavres de bestioles pour qu'ils s'amalgament et forment un monstre hideux qui s'est attaqué à nous. En utilisant nos forces respectives et en travaillant de concert, on a réussi à tuer la bête. Sirat, l'humoran qui est là-bas,... » Dit-elle en pointant discrètement Sirat
«… a tenté d'approcher Simaya, il la connaissait bien. Il l'a pris dans ses bras et a tenté de la calmer. Et puis, Yurlungur est apparu de derrière une roche et a planté son poignard dans le dos de Simaya. Celle-ci a lâché un cri, puis a fait déferler une quantité énorme de magie. Nous nous sommes réveillés ensuite à l'infirmerie. Sans l'intervention d’ Elurien et de ses mages, nous aurions péri dans cette caverne. »Sibelle n'avait pas l'intention de tenter de dissuader Ariane de suivre Yurlungur. Elle se doutait bien que le compagnon d'Ariane nommé Al-Ayrad protégerait ses arrières. Elle se tut donc, attendant la version de Kivan, ou les commentaires d’Ariane.
Kivan prit alors part à la conversation confirmant les propos de Sibelle quant à la bataille en elle-même. Puis, il poursuivit en parlant de la décision d’Elurien au sujet de la tentative de meurtre. Sibelle haussa un sourcil de surprise, elle ne parlait pas ici de la tentative de meurtre, mais bien de l’action de poignarder la magicienne. Et là, sa surprise grandit davantage lorsqu’à la voix basse, il rajouta que beaucoup d’aventuriers présents dans cette salle n’étaient pas des enfants de cœur.
(Qu’y a-t-il d’étonnant à ça ? Nous sommes des aventuriers.)Elle n’eut pas le temps de commenter cette dernière affirmation puisqu’Ariane réagit froidement à ses propres propos. L’humaine rappela à l’hinionne que cela ne la regardait pas… mais avait-elle oublié que c’était elle-même qui avait lancé le sujet ? La contrariété de Sibelle grandit encore plus lorsque l’humaine précisa, sans pour autant en avoir été témoin, qu’ils accusaient la petite de tous les torts, terminant en précisant qu’accuser de meurtre un compagnon d’armes revenait en quelque sorte à un coup de poignard symbolique dans le dos.
Sibelle écouta attentivement la réponse d'Ariane sans la couper, mais transparente comme elle était, il était clair qu'elle était contrariée par ce qu’elle venait d’entendre. Elle regarda Ariane droit dans les yeux et répliqua avec un agacement très perceptible dans la voix.
« Je vous rappelle que je vous ai énuméré les faits et que c'était à vous de faire votre propre jugement. Ce que vous avez fait. Pour ma part, je n'ai porté aucune accusation. Ni à mon réveil à l'infirmerie, ni par la suite, ni maintenant... Un seul compagnon l'a fait, et avant de le juger lui, il faudrait connaitre ses raisons, ce qui n'est plus utile, car la situation est close à présent. »SIbelle, honnête et loyale, était visiblement contrariée de se faire faire ainsi la morale alors qu'elle avait pris sur elle pour ne pas émettre son opinion sur la situation. L’humaine qui ne semblait pas comprendre la réaction de Sibelle haussa un sourcil et riposta en affirmant cette fois que Sibelle avait mal interprété ses dires et elle termina sur la même conclusion que Sibelle à savoir que la situation était close et passée.
Ce fut à ce moment que Sibelle comprit qu’il y avait eu un malentendu entre les deux femmes. Cependant, elle était à peu près certaine que la petite s’était plainte auprès de sa nouvelle amie. Ne voulant prolonger davantage cette discussion stérile, Sibelle ayant repris son calme se contenta d'un petit signe de tête comme quoi, elle avait compris le message.
Ce fut à ce moment enfin que Kivan se présenta enfin à Ariane, lui proposant de faire le voyage avec elles. En s'adressant à eux tous, la fière guerrière termina:
« Je ne vous accompagnerai point, je crois pouvoir trouver des réponses ici. »La présence d’Ariane, de son compagnon, et de Kivan aurait pu être agréable, mais il était hors de question qu’elle prenne le même chemin que Yurlungur. Et puis, elle n’avait pas menti, elle croyait trouver des réponses dans la cité, ou non loin de celle-ci.
Suite à la décision de la guerrière, la mimique de Kivan devint plus sérieuse, il était visiblement déçu que la guerrière ne les accompagne pas. Tout en ayant conscience de sa déception, elle ajouta à l’intention de ce dernier :
« Je vous remercie pour les soins que vous m'avez prodigués. »Ce dernier lui souhaita bon courage dans ses recherches et émit le souhait de la recroiser prochainement. La guerrière se contenta d’esquisser un sourire au guérisseur puis tourna les talons. C’est à ce moment qu’elle vit Xël sortir de la pièce un pain sous le bras. Une idée en tête, Sibelle prit alors la décision de le rejoindre.
Alors qu’elle n’avait fait que deux pas dans la direction de la sortie, Sirat, l’air grave, l’attrapa par le bras. Elle se dégagea froidement et planta son regard dans celui de l’humoran, questionnant ainsi la raison d’un tel geste. Pour toute réponse, il lui annonça qu’il partait à la recherche du dragon noir et qu’il voulait lui annoncer à elle avant les autres.
Endar avait déjà formulé l’idée de trouver le dragon, et Sibelle se doutait bien que Sirat ne ferait pas équipe avec l’elfe noir, alors elle lui demanda :
« Tu penses t'y prendre comment ? »L’humoran répondit ne pas avoir fait de plan. Il pensait d’abord se rendre sur les lieux où ils avaient croisé cet énorme dragon. Se rappelant de la puissance du dragon noir alors qu’il combattait contre le dragon d’Or, Sibelle perplexe quant à la faisabilité du plan de Sirat, lui dit ce qu’elle pensait d’une telle décision :
« Ce n’est pas prudent d’y retourner seul. »Sirat ne nia pas le fait, mais il confia n’avoir que peu de compagnons qui partageaient ses idées. Tout comme Sibelle, il ne tolérait pas le bavardage de l’elfe noir. Puis affichant un petit sourire narquois, il demanda à Sibelle si elle craignait pour lui.
La guerrière ignora la dernière remarque, ses joues s'empourprant légèrement.
« Je ne fais pas confiance en Endar, mais lui aussi veut trouver le dragon noir. Je t’accompagne... le dragon noir nous mènera sûrement à Naral. » Malgré les insinuations d’Endar quant à ses sentiments envers Sirat, Sibelle était persuadée avoir pris une décision de tête. En tant que guerrière, elle appréciait les qualités de combattants de Sirat, mais avait tiré un trait sur une possible liaison avec ce dernier, du moins le croyait-elle.
L’humoran fut surpris des intentions d’Endar, il pensait que l’elfe noir aurait plus tôt choisi de se rendre à la tour d’Orsam. Il était ennuyé qu’ils aient eu la même idée et affirma sérieusement devoir le tuer. Sibelle fronça alors les sourcils d’incompréhension, mais ne dit mot, laissant l’humoran poursuivre. Il demanda à Sibelle si elle voulait vraiment le suivre, lui rappelant qu’elle n’approuverait sûrement pas tous ces agissements. Il termina en affirmant que d’un autre côté, il préférait mourir de la main de la guerrière que de celle d’une autre.
Lorsqu’elle avait pris une décision, il était difficile de lui faire changer d’idée. Elle se contenta donc d’ajouter sérieusement.
« Nous voulons tous les deux retrouver Naral. Une fois là, je t'empêcherai de le tuer. »À présent qu’elle s’était entendue avec Sirat, Sibelle voulait aller questionner Xël et en fit part à l’humoran.
« Lorsque tu m’as arrêté je me m’apprêtais à aller rejoindre Xël, j’ai quelques questions à lui poser. Je reviens dans quelques minutes et je serai prête à partir. »Cela dit, elle ramassa un morceau de pain et sortit de la salle. Étant inconsciente à son arrivée, elle n’avait aucune idée de ce qui l’attendait en dehors de la salle de convenance. Elle se retrouva donc dans un vaste couloir souterrain, relativement sombre, à peine éclairé. Elle en déduisit qu’ils étaient sous terre, ce qui ne surprit pas plus que ça la maître d’armes, puisque les landes noires s’avéraient un milieu inhospitalier. Elle n’eut aucune peine à retrouver Xël, qui se tenait non loin de là, les yeux rêveurs. A l’approche de Sibelle, il sortit de ses réflexions pour avouer que Kendra Kâr lui manquait.
Aussitôt, la guerrière pensa que le magicien voulait abandonner leur recherche, sans comprendre les raisons d’une telle décision :
«Tu songes quitter Aliaenon ?» Dit-elle tout en s’approchant de lui.
Il répondit négativement, elle avait sans doute mal interprété ses propos.
En la présence de Xël, Sibelle se détendit. Le mage était un homme simple, qui dégageait une certaine sérénité et qui semblait toujours de bonne humeur. Pourtant, dans l’infirmerie, il avait montré une autre facette de lui, lorsqu’il s’en était pris, avec raison, à Yurlungur. La petite s’en était pris à une de ses amis... ou peut-être même une amoureuse passée. Sibelle avait rejoint Xël dans le but de lui poser une question bien précise :
« Elurien semblait tout chaviré à sa sortie de l'infirmerie. Que s'est-il passé ?»Mais une fois de plus, il secoua la tête, ils n’avaient pas vu la même chose qu’Elurien, il était également intrigué par la cause de cette soudaine fatigue et avait l’intention de questionner leur hôte à ce sujet.
« Bonne idée. Pendant que tu étais à l'infirmerie, le mage masqué a écrit que Naral avait posé des questions à Elurien… tu pourrais également le questionner à ce sujet... De mon côté, je pars avec Sirat, à la recherche du dragon noir. Je te communiquerai par la pierre verte pour te donner les informations qu'on aura trouvées. »Surpris, il craignait que le dragon noir les attaque de nouveau. Sibelle comprenait la crainte de Xël, car elle avait ressenti la même lorsque Sirat lui avait annoncé sa décision. Elle lui avoua donc qu’elle avait pris la décision de seconder l’humoran.
« Oui, je crains également une récidive de la part du dragon. C’est justement pour ça que je ne veux pas laisser Sirat y aller seul. »En fait, la guerrière ne connaissait pas vraiment la peur, pas celle de mourir. Si elle craignait la mort des autres, il en était autrement de la sienne. Elle ne se sentait jamais aussi vivante que durant un combat, moment où elle pouvait relâcher toute cette fougue et cette énergie qui l’habitait.
Tout en mâchonnant son pain, Xël prit un moment de réflexion avant de faire part à Sibelle de son désir de les accompagner. Sibelle ne voyait pas d’inconvénients à la présence de Xël, par contre, elle se demandait s’il n’était pas préférable qu’il s’en tienne à son plan initial.
« Et Elurien, tu ne vas pas le questionner pour faire avancer notre recherche ? »Après avoir souri à la rouquine, il riposta que le maître des lieux serait sûrement toujours là à leur retour.
Tout mangeant à son tour un bout de pain, elle réfléchit. Elle avait autrefois critiqué l’utilisation qu’il faisait de sa magie. Mais elle le savait tout de même puissant. Et puis, il pourrait mieux qu’elle raisonner Sirat si cela s’avérait nécessaire. Elle en conclut qu'ils ne seraient pas trop de trois pour approcher le dragon.
« Oui, tu n'as pas tort. Tu es le bienvenu, à trois nos chances de ne pas mourir augmentent »Le mage plongea son regard dans celui de Sibelle et d’un ton amusé, il salua l’optimisme de la guerrière ce qui l’a fit légèrement sourire. Xël interrogea Sibelle quant à l’heure de leur départ, et elle réalisa de fait qu’elle n’avait pas posé la question à l’humoran.
« Je ne sais pas… Je suppose que oui. »À quoi, Xël s’empressa de dire qu’il était prêt.
La discussion étant terminée, Sibelle repartit pour la salle de convenance pour annoncer à Sirat que Xël les accompagnerait et qu’il les attendait juste de l’autre côté.
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