Retour à l'aubergeL'auberge était inhabituelle. Elle était construites dans un arbre, mais semblait faire partie intégrante de l'arbre, qui pour sa part devait avoir vu passer plusieurs siècles sous ses racines. Tout n'était que bois, et rien de jurait avec le reste, tout était harmonieux. Autours de l'auberge, un petit parc faisait honneur à la nature, et le soleil couchant ne rendait l'endroit que plus attirant. Les fenêtres de l'auberge laissaient passer la lumière intérieure, invitant le voyageur de passage à venir passer une agréable nuit.
Evangelina ne vit rien de tout cela, l'esprit tiraillé de pensées contradictoires, les yeux dans le vide... Elle avait tous les symptômes d'une grosse fatigue, sauf qu'elle était une Aniathy. Cependant il était vrai que son esprit était épuisé. Sa vision et ses réflexion sans solution faisaient tourner son esprit en rond sans qu'il n'entrevoit de sortie raisonnable. Mais demain, elle irait sûrement mieux.
Elle suivait Larhe, ne cherchant pas vraiment à savoir où il l'emmenait. Tant qu'elle était avec lui, elle n'avait pas de soucis à se faire. Il était son repère, sa raison de vivre. Il était à la fois sa raison et son but, sa vie. Il était sa conscience, ses sentiments. Il était tout ce qu'elle avait. Elle ne voulait pas le perdre, ne devait pas le perdre.
Elle se serra contre lui alors qu'il ouvrait la porte de l'auberge. L'intérieur était très agréable et chaleureux, lumineux et confortable. En un mot, l'auberge était agréable. Evangelina regarda autours d'elle, se rappelant qu'ils avaient rendez-vous avec Pénélope dans cette auberge, à peu près à cette heure là.
Elle la chercha des yeux quelques instants, mais ce fut ses oreilles qui la trouvèrent avant.
"Ah ... Mais c'est le couillon avec sa truie !"Elle commençait bien. Evangelina fronça les sourcils. Elle n'était vraiment pas en état de supporter les brimades de Pénélope très longtemps. Mais elle remarqua rapidement que l'elfe blanc se comportait bizarrement. Elle zigzaguait, parlait avec une voix hésitante, et n'arrivait pas à fixer son regard. De plus, elle avait une bouteille d'alcool à la main.
Elle était saoule. Il ne manquait plus que ça. Evangelina était dépitée. Déjà qu'elle n'arrivait pas à la supporter en temps normal...
"Oh ... T'es triste ? Oh ... Quel dommage ! Mais c'est bien fait pour ta gueule quand même."Evangelina ferma les yeux. Que pouvait-elle répondre ? De toute façon Pénélope ne voudrait rien entendre. De plus, Evangelina n'avait même pas envie de la frapper, ni de la faire souffrir. Enfin si, elle en avait envie. Les deux phrases de Pénélope avaient suffit pour la mettre en colère. Mais l'attitude de l'elfe blanc dans l'auberge suffisait à elle seule pour la discréditer et la punir. Demain, elle souffrirait sûrement plus que ce que l'Aniathy envisageait de lui faire.
Elle ne répondit donc rien, prenant sur elle.
"Et puis t'es moche. Ces habits ne te vont pas. Essais le sac de patates, ça ira mieux."Elle était complètement saoule, ce n'était sûrement pas la première bouteille qu'elle vidait. Evangelina n'avait jamais bu d'alcool. En fait, elle n'avait jamais bu. Un Aniathy n'en avait pas le besoin, elle n'avait donc jamais essayé.
"Tu te prends pour un être vivant alors que t'es rien de plus qu'une poupée, un jouet pour enfant de bas âge ! Tu te fais des illusions petite sotte ... Mais ... Puisque tu tiens à ressembler ce que tu n'es pas, et à me faire chier par la même occasion, je vais te donner ta chance !"Evangelina regarda autours d'elle avec un regard désolé. Personne ne parlait dans la pièce, tout le monde écoutait l'elfe blanc se ridiculiser et se discréditer seule. Elle regretta simplement que l'alcool n'endorme pas Pénélope, au lieu de la rendre complètement inconsciente.
"Pas vrai que je vais lui donner sa chance ?!""""Mais pourquoi hurle-t-elle ?"""Seulement, elle ne fit pas qu'hurler. Elle l'attrapa à la gorge et l'obligea à boire le contenu de la bouteille. Evangelina n'eut même pas le temps de réagir, elle n'était pas assez forte pour résister à Pénélope. Elle sentit sa magie s'animer en elle mais la retint. Elle ne pouvait pas lui faire de mal avec de l'alcool, les Aniathy n'avaient rien qui craignait l'alcool, et son esprit resterait sain.
Elle sentait le surplus d'alcool, quasiment toute la bouteille, les Aniathys ne disposant pas d'une trachée permettant le passage du liquide, couler sur son menton, dans son cou et sur sa poitrine. Elle voulut repousser Pénélope mais n'y parvint pas. Finalement ce fut cette dernière qui la lâcha, une fois que la bouteille fut vide. Evangelina secoua la tête et s'essuya la bouche, stupéfaite par la réaction de Pénélope.
Elle avait lâché la bouteille qui s'était brisée sur le sol, devant elle, en tombant. Le regard d'Evangelina passa de la stupéfaction à la colère, reflétant bien ce que ressentait l'Aniathy. Pénélope avait été trop loin, et Evangelina n'allait pas se laisser faire. Elle n'avait pas intérêt à revenir, sinon Evangelina n'aurai aucun scrupule à se servir des débris de la bouteilles, particulièrement coupants.
Seulement elle ne revint pas. Un homme venait de l'arrêter à quelques pas de la cheminée, et elle ne mit que quelques secondes à s'effondrer, après avoir bégayé et ressortit l'intégralité de ce qu'elle avait bu sur le pauvre homme.
La salle entière éclata de rire, excepté Evangelina, Larhe, le propriétaire et le pauvre homme qui s'en alla en claquant la porte. Le propriétaire ne semblait pas vraiment content, même si il n'était en colère que contre Pénélope. Il s'approcha des Aniathys, et s'adressa à Evangelina qui était elle aussi en colère contre Pénélope.
"Si vous la montez dans une chambre et que vous quittez les lieux dès demain matin, c'est demi-tarif ... J'ai des gros clients qui arrivent dans pas longtemps et là ... Ça va pas le faire."Puis il se retourna pour aller chercher de quoi nettoyer les dégâts causé par l'elfe blanc. Evangelina regarda Larhe qui haussa les épaules. Elle aurait bien laissé Pénélope dans ses problèmes, mais elle n'avait aucune raison d'en poser au propriétaire qui ne leur avait rien fait. Elle s'approcha donc du corps inerte reposant à même le sol et, avec l'aide de Larhe et un peu de difficulté, l'emmena dans une chambre libre, indiquée par l'aubergiste. Il déposèrent Pénélope à même le sol, sur un tapis, au pied du lit. Puis Evangelina sortit de la pièce pour retourner voir l'aubergiste.
"Excusez-nous pour le dérangement. Nous serons partit demain, ne vous inquiétez pas. Et si jamais elle recommence, elle le paiera plus cher qu'aujourd'hui."Son ton était sincère et aimable, mais ne laissait aucune place au doute quant à ses intentions.
"Euh... Entendu.""Sur ce, je vous souhaite une bonne nuit, et merci pour la chambre."Puis elle tourna les talons et retourna dans sa chambre. Elle sentait des regards posés sur elle, mais cela lui plaisait plus qu'autre chose. Elle était heureuse que Pénélope se soit discréditée complètement dans sa ville natale.
Elle retrouva Larhe allongé sur le lit, attendant le retour de sa bien aimée. Cette dernière passa au lavabo pour se nettoyer de l'alcool puis alla se coucher avec son compagnon. Ils se serrèrent l'un contre l'autre, se caressant doucement.
Ses caresses réveillèrent en Evangelina les images de sa vision, qui avaient disparue lors de échauffourée avec Pénélope. Elle ferma les yeux, se laissant bercer par les souvenirs des sensations qu'elle avait ressentit avant son réveil. Elle voulait les revivre, elle devait les revivre...
Nuit douce
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Les dieux ne sont qu'enfants, inconscients et inaptes. Ils souffriront comme j'ai souffert, perdront à jamais leur pouvoir et erreront, comme jamais personne n'avait encore erré. Ils pleureront, remplissant les mers, et saigneront, car tel est le sort que je leur réserve, car enfin ils vivront ce qu'ils ont fait vivre...
Merci à Itsvara
« Les hommes ne sont pas nés du caprice ou de la volonté des dieux, au contraire, les
dieux doivent leur existence à la croyance des hommes. Que cette foi s'éteigne et les dieux meurent. » Jean Ray