Dragon Fantôme - Chapitre VIIIDragon Fantôme
Chapitre IX
Les fournitures entre les bras, l'étrange trio sorti du commerce d'un bon pas.
La capitaine annonça alors qu'elle allait chercher des artisans au port et que lui et Samrik rentre déposer leurs charges sur la Rascasse. L'humoran commençait à emboiter le pas dans cette direction, automatiquement, alors que ses pensées étaient dirigés vers la manière qu'il pourrait utiliser pour reformer une mâchoire correcte à Eliwin. Mais ce ne fut pas le cas de Samrik, qui se targua de répondre à la capitaine un "Non" sec et provocateur sorti de nulle part. Mercurio n'avait toujours pas saisi les motivations de ce bonhomme. Il était bien sur le navire de son plein gré, mais il ne causait à pratiquement personne, n'avait jamais décrocher que le semblant d'un sourire en coin, semblait être las et fatigué de tout, tout le temps. Il ne comprenait pas bien ce qu'il était venu faire dans l'équipage, même son rôle de maître d'arme n'était pour l'instant que du vent ; il n'avait entraîné personne à quoi que ce soit. Il fallait dire que le bonhomme n'était pas avenant, s'il n'initiait pas de lui-même quelques sessions d'entraînements, peu de monde oserait venir vers lui pour lui demander d'en faire.
Mais il devait avoir senti sa fierté bafouée pour s'opposer à l'oudio une nouvelle fois. Lorsqu'elle lui ordonna de lui obéir, il se pressa devant elle pour lui barrer le passage, la forçant à devoir lever la tête pour le regarder dans les yeux.
Bordel, ça allait encore partir en couille...
Bon, ben au moins ce n'était pas une embrouille dont il allait devoir se mêler. C'était entre la capitaine et lui. Mais bon, ça serait dommage de déjà devoir utiliser son matériel de guérisseur alors qu'ils n'étaient même pas encore arriver au navire. Autant les équipages de pirates étaient bien connus pour se foutre régulièrement sur la gueule entre eux, autant Mercurio commençait à trouver qu'ils devaient quand même faire parti du haut du panier à ce niveau là. Parce que pour réussir à se mettre sur la tronche juste quelques minutes après une escale... C'était qu'il fallait le chercher.
Et si Mercurio avait appris à respecter un tant soit peu la capitaine, celle-ci était toujours en manque d'autorité sur son propre navire. Elle l'avait bien compris et elle n'attendait plus que des occasions comme celle-ci pour prouver qu'elle méritait ses galons.
Mais même l'humoran ne s'attendait pas à une réaction aussi violente.
Après quelques insolences de plus, elle lui prit le coffre des mains avec ses longs doigts végétaux, qu'elle jeta aussi sec au sol. Il n'eût le temps d'être pris au dépourvu qu'en une prise, elle souleva le lourd gaillard au-dessus d'elle et le projeta à plusieurs mètres de là. Costaude, l'air de rien, la plante verte. Face contre le sol, le demi-garzok n'eût le temps de bouger que celle-ci vint lui apposer sa botte entre les omoplates en le rappelant à l'ordre une nouvelle fois.
Il était étranger de voir que le gaillard ne semblait même pas chercher à se défendre, à se débattre. Il aurait pu facilement se défaire de cette position, mais il n'en fit rien. Il se laissait humilier, purement et simplement. Mercurio se disait que quelque chose devait lui échapper. C'était vraiment étrange.
L'oudio se targua de mériter son titre de capitaine et de la chance qu'il avait de ne pas être tombé sur quelqu'un de plus cruel, l'incitant à le déclarer lui-même.
Mais le demi-orque n'en fit rien. Il se releva comme si de rien ne s'était passé et se contenta de se taire. Même l'oudio semblait se demander ce que voulait dire son silence soudain, mais elle se contenta de déclarer l'accident clos après avoir effrayé des passants qui lorgnaient sur le coffret qui gisait au sol... Non sans rajouter à Samrik de couvrir son torse et détournant soudainement le regard vers Mercurio.
Un regard froid en sa direction qu'il ne comprit pas.
Il avait rien dit, lui. Puis ça faisait longtemps qu'il l'avait pas emmerdé quand même.
Dans l'incompréhension, il se dit qu'elle voulait peut-être qu'il couvre son torse, lui aussi. Mais bon, elle savait à quel point c'était difficile de trouver une tunique pour un peau-velue comme lui ? C'était déjà pas facile à Dahràm, alors dans une ville d'elfes... C'était pas pour rien qu'ils se baladaient tous pratiquement à poil. C'était introuvable, inconfortable et ça faisait des frais inutiles en moins. Parce que, bordel, la fourrure ça donne déjà assez chaud comme ça pour se couvrir encore plus. Il s'était toujours balader comme ça et il s'en foutait pas mal de l'avis des autres. Alors suivre les ordres de la capitaine, il avait pas de mal lorsque ça avait du sens, mais si elle commençait à ne plus se sentir péter et ordonner des conneries juste pour le plaisir de se sentir obéi, ce n'était pas un Mercurio mutin qu'elle risquait de retrouver, mais plus de Mercurio du tout. Il s'était pas engagé dans un équipage de pirate pour qu'on le fasse chier avec des détails de discipline idiots, s'il avait voulu ça, il aurait plutôt rejoins la marine kendrâne. Il n'oubliait pas qu'il pouvait toujours se barrer à n'importe quel moment, au final rien ne le retenait vraiment sur ce navire.
En espérant pour eux deux qu'elle se sorte cette idée de la tête rapidement, il aurait quand même trouvé ça dommage.
Sur ce, il ne rajouta mot non plus, laissant la capitaine avec son sourire d'auto-satisfaction au visage prendre la tête vers le chemin du port avec entrain.
Durant le trajet, Mercurio dévisagea Samrik dans l'espoir de comprendre ce qui lui avait traversé la tête durant les derniers évènements, sans succès. Il se contentait de marcher le regard droit devant lui sans montrer l'once d'une émotion, semblant perdu dans quelques pensées indéchiffrables.
Lorsqu'ils se séparèrent de la capitaine, l'humoran lui demanda cependant :
"Hé, t'peux m'expliquer un peu c'qui vient d's'passer là-bas, ouais ?""Non.""Oh, gars, t'peux m'dire, non ? T'as bien dû comprend' que j'tais pas comme elle, d'puis l'temps. J'te connais pas des masses mais j'sais d'jà que ça là-bas, c'tait pas toi. T'pas l'genre d'gars à t'laisser mater comme ça. Dis t'jours ton soucis, en tant qu'bosco c'est mon boulot d'régler c'genre de prob' maint'nant.""Restez en dehors de ça."Bon, si ce grand cornichon ne voulait pas d'aide, il n'allait pas insister trois cent ans. Qu'il se démerde. Il avait déjà été bien gentil de vouloir s'en mêler.
Quelque peu vexé, Mercurio accéléra le pas jusqu'au navire, le fit descendre le matériel jusqu'à la cale et le libéra de son service. Qu'il aille se faire les nerfs sur quelques elfes dans la rue, à la baston ou avec quelques catins, mais qu'il ne traîne pas dans ses pattes.
Maintenant, il avait du rangement à faire et il devait encore se casser la tête avec ce problème de mâchoire...
Dragon Fantôme - Chapitre X
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Playlist de Mercurio
A propos, j'ai trouvé la morale de la fable que ton grand père racontait,
celle du petit oiseau que la vache avait recouvert de merde pour le tenir au chaud et que le coyote a sorti et croqué...
C'est la morale des temps nouveaux.
Ceux qui te mettent dans la merde, ne le font pas toujours pour ton malheur
et ceux qui t'en sortent ne le font pas toujours pour ton bonheur.
Mais surtout ceci, quand tu es dans la merde, tais-toi !
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Jack Beauregard (Henry Fonda), Mon nom est Personne, écrit par Sergio Leone, Fulvio Morsella et Ernesto Gastaldi