Désespoir puis l’espérance
Les premiers coups d’aile donnés, je me retrouvais rapidement au-dessus de la canopée. Le regard aux aguets à la recherche d’un danger, je continuais de m’élever, espérant trouver mon arbre et les miens facilement. Mais la réalité me rattrapa impitoyablement. J’avais beau monter et regarder autour de moi, rien… Il y avait des millions d’arbres répartis de façon anarchique, mais aucun ne semblait être chez moi.
Arrivée au plus haut de mon ascension, je me mis à faire des petits cercles. Un œil sur le sol, un autre sur le ciel. Au loin vers le soleil couchant, je voyais une trouée dans la forêt avec des fumées s’en échappant, je pouvais apercevoir depuis ce lieu une tranchée continuant vers le soleil levant. Au nord, il y avait des montagnes éloignées. On avait de la peine à les distinguer. Au sud, de la forêt à l’infini.
Une vague de désespoir m’envahit en voyant tout cela. Il me serait impossible de retrouver mon chez-moi sans aide. Trop de superficies, trop d’arbres et surtout, les miens étaient bons dans l’art de dissimuler leurs traces.
Mortifiée de ce retour à la réalité, je me laissai glisser dans les airs pour atterrir en douceur devant la cabane de mon hôte.
J’entrai dans la maison pour découvrir qu’elle était debout en train de mettre en place la table pour le repas du matin. D’un coup d’aile, je me retrouvai sur la table, à tenter de l’aider avec les faibles moyens à ma disposition. Je transportai une culière vers son assiette ce qui me prit bien du temps. Je la voyais sourire, indulgente à mon égard. Durant ce transport, elle finit de mettre la table et me proposa de prendre place devant un petit bol qu’elle avait disposé pour moi.
Ce vol m’ayant épuisée, je mangeai de bonne grâce. Ce repas me fit découvrir d’autres saveurs inconnues par mon peuple. C’était très spécial et très intéressant. Je passai mon repas à manger en silence, dégustant ces mets avec lenteur pour bien m’imprégner de leurs goûts si particuliers. Toujours très patiente, mon hôte me regarda faire sans un mot. J’avais l’impression qu’elle comprenait.
- Sylia… je suis sortie ce matin au lever du jour et je me suis élevée dans les airs pour essayer de retrouver mon village… Mais je n’ai rien vu, rien ne m’était familier. - C’est que la forêt est grande par ici, si tu ne sais pas où chercher, ça va être dur de trouver quelque chose je le crains. Je poussai un soupir profond. Ces paroles corroboraient les miennes. Je ne retrouverais jamais les miens sans aide extérieur. C’était peine perdue. Elle reprit :
- À voir, tu ne connais pas le chemin, mais est-ce qu’il n’y aurait pas quelqu’un quelque part qui saurait ? Sa question m’étonna.
Quelqu’un qui connaitrait le chemin de mon tronc… quelqu’un qui y serait passé… J’avais beau me creuser la mémoire, je ne voyais pas. De mon souvenir, je n’avais jamais vu d’autre race venir. À force de me creuser les méninges, je me suis souvenue d’une histoire qui circulait dans le tronc. Une histoire étrange.
- Je ne sais pas si cela peut m’aider, mais je me souviens d’une histoire qui circulait dans le tronc. On disait que la reine avait fait mander un sorcier elfe pour qu’il lui concocte une potion de longue vie… Mais c’était une histoire et jamais personne ne m’a dit qu’il avait vu un elfe circuler à proximité du tronc. Sylia me regarda un moment, un peu dubitative, la tête légèrement penchée sur le côté. Elle tapotait sa lèvre avec son index.
- Et bien petite Maeve, c’est peut-être ta libération. Si tu retrouves cet elfe, tu trouveras ton tronc !