Lelma a écrit:
La nuit se passe, seul au bout du monde, perdu sur un rocher en plein milieu du marais. Un rocher dans un marais ? Encore une curiosité ! Que fait cet unique rocher, haut de quelques mètres, large de plusieurs dizaines, plat en surface, au beau milieu de ce marais de boue, de vase et d'eau ? Enfin je ne dois pas m'attarder, je me lève un peu endolori par la pierre et m'étire. Je mange puis bois à ma gourde. Je manque de m'étouffer par l'eau avalée de travers quand je vois ce que je n'ai pas vu en arrivant hier soir. A moins d'une centaine de mètres s'étend un grand lac. L'eau est grise, le soleil perce les nuages à l'horizon et reflète ses rayons sur cette eau, comme sur un miroir, rendant au paysage une note glacée.
Je descend de mon rocher et m'approche de ce lac, tout au bord une très grande plante, toute noire, avec comme de grandes fleurs non ouvertes, le sommet croulant sous le poids, laissant ces fleurs pendre misérablement. Visiblement la plante est morte, comme brûlée.
(Une chose étrange...)
(Tu sais quelque chose ?)
(Cette plante est immense, bien trop grande pour avoir poussée sur cette terre pauvre. Un maléfice l'a emmenée ici, ou bien la créée... En tout cas tu dois être extrêmement prudent, des dangers plus terribles que l'acide ou le marais sont ici.)
(Et bien voila qui est rassurant !)
Je continu, laissant derrière moi cette étrange plante. Je m'éloigne à distance raisonnable du lac et prend un cap plein sud selon Aakia. La progression est lente est difficile, le terrain encore plus humide que la veille. Cependant, toujours selon Aakia, le danger de l'acide est écarté.
Lorsque le soleil est au zénith, je n'ai pas beaucoup progressé et je suis épuisé. J'ai atteint une petite zone presque au sec. Je me repose là, le soleil est caché par des nuages à nouveau, comme hier. Je prend une collation rapide et bois quelques gorgées d'eau. Lorsque je repars, une chose étrange se produit. A quelques mètres devant moi un monticule de boue et d'eau s'élève puis libère une plante immense, semblable à celle au bord du lac.
(Sauf que celle-ci est bien vivante ! On dirait des créations de Léona !)
(Qui ça ?)
(J'ai pas le temps de t'expliquer, reste hors de portée de ces choses, tu n'as pas la moindre chance !)
(Mais c'est quoi ??)
(Des plantes carnivores... Modifiées... Géantes et rapides. Des prédatrices à l'appétit vorace !)
Je recule et me mets hors de portée avant de faire demi-tour. Mais deux autres plantes sortent du marais, me coupant totalement de toute fuite. Je sors ma rapière, prêt à défendre chèrement ma vie !
(Attention !)
Je saute de coté, évitant une des gueules de la plante qui vient de tomber là où j'étais. Je frappe avec la rapière, cherchant à trancher la tige. Je ne parviens même pas à l'entamer, me faisant mal au bras sous le choc. La situation est désespérée. Je reste sur mes gardes, mes faibles protections et mon épée ne pourront rien faire pour défendre et combattre pareil adversaire !
(Reste la fuite, mais comment passer sans recevoir une attaque ?)
(Comme ça !)
J'essaye de courir, mais la vase me retient, je manque à nouveau de me faire gober par cette atrocité.
(Pardon mais j'ai échoué !)
Cette fois-ci, c'est la fin, je ne vais pas voir m'en sortir. Je suis incapable de me défendre, d'attaquer ou même de fuir !
(Rien à faire non plus, je peux pas les aveugler, elles n'ont pas de vision !)
Je reste droit, toujours en garde, pour vendre chèrement mes derniers instant quand une ombre plane au dessus moi. Un éclair violent de lumière blanche m'aveugle puis une détonation énorme me souffle et me projette à terre. Je recouvre la vue et suis très surpris... Un dragon jaune s'est posé à coté de moi, deux des plantes grésillent encore et sont devenues noires.
Le dragon me regarde intensément. Ais-je échappé à un danger pour succomber à un autre plus grand ?
(Tu cherches aussi l'enfant ?)
Une voix nouvelle résonne dans ma tête, qui est-ce ? Ca n'est pas la voix d'Aakia !
(Tu cherches aussi l'enfant, jeune humain ?)
(Qui es-tu ?)
Le dragon ? Il me parle ?
(C'est toi... Le dragon ?)
(Répond à ma question et je répondrai à la tienne...)
Tout semblait dire que c'était lui qui me parlais mentalement, il semblait ce méfier de moi. Il me regarde de ses yeux jaunes. Il semble plus petit que celui du volcan, il a une corne sur la tête.
(Je ne vois pas de quoi tu parles ? Quel enfant ?)
Une boule de lumière se concentre sur sa corne.
"ATTENDS !"
J'ai crié lorsque de sa corne à été lancé un éclair sur moi. Mais la cible était la troisième des plantes qui grille, touchée mortellement par le dragon.
(Tu ne devrais pas être là humain ! Même avec ta faera !)
(Mais qui es-tu dragon ? Pourquoi tu m'as aidé ? Comment tu sais que j'ai une faera ?)
(Tu poses beaucoup trop de questions. Et tu ne dois pas rester là. Je peux te conduire hors du marais, où veux tu aller ?)
(Dans le sud... Tu peux m'emmener ?)
(Evidemment, grimpe sur moi et accroches-toi bien !)
Je m'approche du dragon en me méfiant, Aakia sort du collier où elle était depuis le début de la matinée et vole autour du dragon.
"Ah ben ça alors, voila qui est exceptionnel, un dragon, d'éclair apparemment ! Que fais-tu là petit dragon ? Qui es-tu, d'où viens tu ? Et pourquoi nous aider ?"
(Dis à ta faera de se taire, trop de questions auquel je ne peux répondre...)
"Aakia... Il veut que tu te taises..."
"Ah tu es pas bavard je vois, et pourtant on pourrait parler des jours entiers ! Mais si c'est comme ça je dis plus rien."
Je monte enfin sur le dragon, proche de son cou, et m'accroche. Il bat des ailes et décolle. C'est la première fois que je m'envole. C'est merveilleux et terrifiant à la fois.
(N'ai pas peur jeune humain.)
Il commence à progresser puis accélère franchement, le vent cherche à me décoller de lui, de ses écailles jaunes. Mais qu'il est beau, mais qu'il est grand et fort. Mais qui est-il ?
(Un dragon ne donne jamais son nom, surtout que tu ne m'as pas donné le tien.)
(Je suis Lelma, Lelma Noteema et ma faera est Aakia.)
(Et je suis... Un dragon !)
(C'est malin... Tu m'as demandé pour un enfant, mais de quoi tu parlais ?)
(C'est peut-être ceux du groupe, comme il semblerait pour Seyra ?)
Aakia avait-elle vue juste, je demande au dragon.
(Réponds-moi, est-ce ceux du groupe que tu cherches ? Des enfants exceptionnels ? J'ai avec moi une enfant qui pourrait être de ceux là, en tout cas ma faera en est quasi certaine.)
(Avec toi je ne vois personne, je ne peux répondre à tes incessantes questions !)
(J'ai laissé mes compagnons au nord de l'île, je dois retrouver le bateau qui nous a mené ici, pour l'emmener les prendre.)
(Pour partir d'ici j'espère...)
(Non pour continuer, une autre île est à coté, ils l'ont vue !)
(Vous devez partir, c'est trop dangereux !)
(Mais pourtant nous devons continuer !)
(Humains têtus !)
(Il n'y a pas que des humains, y a des Sindels, des...)
(Shaakts, Taurions, Hinïons et une aniathy... T'y arriveras ?)
(…des Shaakts, Taurions, Hinïons et une aniathy !)
(Un échantillon des peuples de ce monde, toujours aussi imprudents !)
(Mais cet enfant, que voulais-tu savoir ?)
(...)
(Réponds !)
(Tu veux que je te dépose là ? Arrêtes tes questions !)
Ca c'est sûr, je n'allais pas énerver ce dragon, le privilège qu'il me laissait était déjà trop grand ! Très rapidement on arrive en fin du marais.
(Je vais te laisser là, je ne dois pas me montrer à d'autres...)
Il descend en plusieurs ronds et se pose, me laissant descendre.
(Tout ce que je peux dire c'est merci ! Tu m'as sauvé la vie et m'as fait gagner un temps précieux en me prenant sur ton dos ! Mais j'ai toujours mille questions à te poser. On a rencontré deux autres dragons, dont un a essayé de nous tuer en déclenchant la fureur du volcan. Est-ce que vous vous connaissez ? Qu'elles sont vos intentions ? Et l'enfant qui est-il ? Vous le cherchez ?)
(Va et part de cette île, tu es prévenu, les dangers sont trop important pour toi et les autres ! Je ne répondrai pas à tes questions !)
(Mais pourquoi ?)
Ma question restera à jamais sans réponse, le dragon bats des ailes et décolle sans me répondre.
"Aurevoir et merci !"
"Pas très bavard, il savait des choses mais n'a rien voulu dire ! Quel dommage !"
"Aakia, on en est où tu sais où est le bateau ?"
"Plus très loin, il faut courir vers le sud, quelques kilomètres encore ! Tiens mais la revoila !"
Une pie vient se poser sur mon épaule.
"Bonjour Lelma, tu as l'air d'aller bien ! Mais tu es vraiment très loin par rapport à hier, ça n'est pas possible que tu es marché autant en quelques heures !"
"Bonjour Lirelan ! Et bien il m'est arrivé quelque chose d'extraordinaire... J'ai voyagé à dos de dragon... Il m'a déposé ici il y a quelques minutes !"
"Je vois ! Pratique et étonnant ! Enfin là n'est pas la question, je suis là pour confirmer que tu vas bien et que tu es en vie ! Car là-bas ils veulent bouger !"
"Ah non surtout pas, demain j'arrive ! Le bateau part tout à l'heure, il ne reste plus que quelques kilomètres pour moi !"
"Très bien, je vais le dire à Lothindil, elle convaincra tout le monde !"
"Merci, patientez, j'ai presque réussi, et j'ai plein de choses à vous raconter !"
(Tout n'est pas à raconter non plus, la question de l'enfant il vaut mieux ne pas en parler à tout le monde...)
La pie me fait un salut de son aile et repart comme une flèche vers le nord ouest. Je repart et me mets à courir pour parcourir les derniers kilomètres. Qu'un plaisir de voir cette prairie et ces bosquets d'arbres, une nature riche et vivante. Finalement je débouche sur une plage. Cette fameuse plage du débarquement. Le bateau est là, à mouiller à l'abri des gros rouleaux de la mer, protégé par ce cap.
Je descend sur la plage, et rentre dans l'eau pour me laver de la boue qui me couvre, puis voyant que les barques ne sont plus là, je plonge pour rejoindre à la nage le bateau. Je grimpe grâce à la chaîne de l'ancre et me retrouve ruisselant sur le pont. Un des serviteurs à un mouvement de recul en me voyant dans cet état, croyant voir un fantôme.
"Nous devons partir immédiatement ! Mes compagnons ont besoin du bateau au nord-ouest d'ici ! Longeons les cotés, nous les trouverons sur une plage !"
Il se dépêche de trouver l'équipage. Et enfin je sens une secousse, l'ancre a été retirée et le bateau glisse sur l'eau. Mort de fatigue je m'allonge sur le pont. J'ai réussi ! Mais je n'ai plus de forces. Les serviteurs me relèvent et me conduisent dans une chambre, apparemment la mienne. Ils m'apportent de quoi me laver, me raser et me changer. Je n'ai pas la force pour ça, pas encore, je leur demande de quoi me restaurer. Changer de nourriture me fait du bien et me revigore vite.
Plus tard dans la soirée, avant que le soleil ne se couche, et alors qu'on est en pleine mer, suivant les côtes vers l'ouest, je rentre dans ma chambre pour plus en sortir. Et alors grâce aux brocs d'eau, un petit miroir et une lame, je me lave et me rase, me retrouvant propre et délassé. Je mets de coté mes vêtements fatigués et vais me coucher dans un bon lit. Le tangage du bateau et la fatigue m'endorment rapidement.