Kafziel a écrit:
Amaltia me réponds sans vraiment le faire, elle semble chaleureuse, comme la couleur de ses yeux, néanmoins je reste sur ma faim, son histoire est un point d'interrogation.
La journée avance tandis que nous marchons, et bientôt le soir se montre, timide, à l'image du ciel rosissant, tandis que le soleil disparait peu à peu derrière la cime des plus hauts arbes. L'odeur de la forêt appaise les brûlures de ma fierté, les bruits de la vie florissante qui l'habitent envoutent mon esprit tandis que Naral nous guide.
Comme la lumière, mon coeur est entre chien et loup; Une sorte de clair obscur ou je ne distingue pas l'image tout en en saisissant la forme néanmoins, je ne sais trop quoi penser, et je me contente de faire abstraction de tout. Parfois pourtant, mes yeux se tournent vers Ezak, qui semble m'ignorer autant que je l'évite. Il n'a pas l'air faché. C'est bien. je n'aime pas quand les gens ne m'aiment pas. Pas que j'aie besoin de l'affection de tout le monde, mais je n'aime simplement pas être la cause des réactions de rejet. Etrange idée pour un voleur humoran de se vouloir sociable. Mais c'est ainsi, le destin a peint ces traits de caractère sur la toile de mon esprit, je ne cherche pas à en aller à l'encontre.
Tandis que mes griffes laissent de petites marques à chaque pas sur le sol, je les contemple, à coté des traces de pas que laissent les autres. C'est idiot mais ça me réconforte. Je me sens appartenir à un groupe, même si j'en suis à l'extrême limite. Tathar m'a porté quand j'étais inconscient, Ezak m'a cherché quand il me croyait perdu, j'ai ennuyé Rosbac et lui ait fait peur, sur le bateau dans la tempête, ces gens m'ont sauvé la vie, et Raesha s'en est remise à moi, comme une petite soeur le ferait. Elle n'en a pas conscience, mais en dépit d'avoir perdu son frère, elle en a trouvé un nouveau. Un sourire appaisé illumine mon visage, j'ai une sorte de chaleur dans la poitrine, je me sens... entouré, comme au sein d'une famille. J'en fais un peu trop, mais.. Je ne suis pas quelqu'un qui a connu beaucoup de gens qui étaient prets à l'accepter tel qu'il est, alors... Je me laisse bercer par cette idée sans en chercher les failles.
Je contemple mes mains, les griffes de mes doigts, les rayures qui en zèbrent le dos. Peu de gens ont accepté ces mains, alors, pour eux, je tenterais l'impossible. Je ne sais pas ce que veut Naral, mais s'il tente de leur faire du mal, je n'hesiterais pas à me servir de ces mains, même si c'est la dernière chose que je doive faire.
Trop de fois par le passé j'ai cherché à m'enfuir, a oublier, à laisser passer sans lever les yeux. Mais j'ai changé, car je ne m'en sens plus capable. Naral parlait de trésor, il ne pensait pas que je le trouverais avant tous.Quel idiot je fais, m'enticher de gens qui ne m'apprecient peut être même pas. Mais... ces quelques moments passés ensemble m'ont paru durer des années. Et j'en garde un bon souvenir, alors au final, qu'importe. A-t-on besoin d'une raison pour apprécier ceux que l'on cotoie?
Ma pensée continue de flotter tandis que les premières étoiles apparaissent.
Et... Naral dans tout ça.... qu'est-il et que nous veut-il? Tant de mystères qui restent en suspens, je ne sais pas quoi faire. Puis soudain, une pensée me traverse l'esprit, et je rigole tout seul, pas d'un rire méchant, mais d'un rire de surprise, quelque chose semble m'apparaitre évident tout à coup. Naral... Toi le puissant Naral... capable de fendre l'acier de tes mains, et d'ôter la vie comme on souffle une bougie, caché derrière ton snobisme et tes mannières... Naral, je te plains... Car au final, tu es plus seul qu'un chien, toi le tout puissant, tu n'as comme compagnons que Tiinis, qui tremble en entendant ta voix et Rosbac, l'idiot fini. Qui as-tu pour te comprendre, t'apprecier tel que tu es? Tu mène les gens par le bout du nez, par tes paroles ou par tes pouvoirs, mais qui reste-il pour t'apprecier sincèrement, qui as-tu comme égal pour être le fourreau de la lame de ta folie?Serait-il possible que tu aies vécu plus seul au milieu de la foule, habillé de tes bonnes mannières et de ta tenue propre et élégante, que moi le voleur, le pariat, le sous homme? Je ne troquerais pas ma fourrure pour tes dons Naral, car, homme ou démon, le jour ou tu expireras, tu n'auras personne pour t'accompagner vers ta dernière demeure, tu resteras prisonnier de ton pouvoir et de la crainte qu'il inspire, de ta prison de pierre froide, bâtie sur les piliers de la solitude. Naral, nous sommes tellements différents; peu d'êtres sont capables de nous accepter l'un l'autre, pourtant je ne serais plus seul, alors que toi, tu n'as rien. Tu as tout, mais ton coeur est plus vide que le néant, et plus froid que la glace. Naral, toi et ta voix d'outre tombe, sais-tu que les ailes de la mort se projettent sur ton ombre? Sa faux sera la seule chose qui te traversera le coeur, durant l'entier reste de ta vie.Est-il un être plus seul que celui qui n'a pour unique soutient que sa folie?
Je le contemple, lui, son allure, sa canne, ses habits, et le trouve différent. Il na plus cette aura qui m'effrayait, il a l'air... Je ne sais pas exactement.Naral, si tu es un démon, tu es sûrement le démon le plus pitoyable qui ait existé, ta vie n'est sans doute qu'une suite de façades et d'échecs, de tentatives désespérées pour qu'on te reconnaisse tel que tu es. Mais tu as perdu patience depuis longtemps, tu as décidé d'être ton propre compagnon, tu as accepté de rester tout entier ton propre secret, emmuré dans cette image que tu arbores.
Tandis que mes yeux se fixent sur lui il feint de ne pas me voir. je me tourne enfin vers Amaltia.
Et toi, Amaltia la divine, dont les yeux ont volé aux braises leur ardeur, qui es-tu? Par quel caprice du destin t'es tu retrouvée dans cette forêt saugrenue ou worans et sauvages se mèlent aux mystères et aux combats sanglants; alors que tes traits ne méritent que de vivre sur une toile de maitre? Pourquoi les cieux ont décidé que ta peau si douce doive se recouvrir de la carapace de courage que possèdent les combattants? Quel destin la vie t'a-t-elle donné pour que tu te retrouves auprès de moi, le vagabond au sang mélé? Et quelle est cette ombre qui émane de ton visage resplendissant? Ta douce odeur aurait-elle comme coût une vie parsemée de malheurs? Ou est-ce juste un choix de ta part? Au final, qui a jamais eu le choix.On ne choisit pas de vivre en tant que vagabond, ni en tant que démon, ni même en tant que créature divine.
Naral met fin à mes interrogations en annonçant que nous restons la pour ce soir. Le camp se met en place, le feu s'embrase dans son cercle de pierres. Chacun s'en va gagner sa couche, sauf deux désignés d'office pour garder le camp. Ainsi qu'Amaltia.
J'attends près du feu sans rien dire, puis après une bonne heure, je me dirige vers la couche de Raesha. Elle dort sur le coté, une main posée près de son doux visage assoupi.
Au creux de cette main se trouve une marque.Je la caresse doucement, puis effleure son visage de mes doigts, sa peau est douce et elle a l'air d'aller bien.C'est moi qui ne vais pas bien. Je me sens coupable de ne rien pouvoir faire.je reste ainsi quelques minutes, à contempler son visage, sur lequel les ombres que le feu anime dansent.
"Je suis désolé, Raesha, je ne te laisserais plus."
Je murmure d'une voix à peine audible pour moi même, mais j'ai l'illusion qu'elle m'entends, car un léger sourire apparait sur ses lèvres.
Je me lève, et me dirige vers le feu, devant lequel je passe sans m'arrêter, suivi des yeux par ceux présents.Je me dirige vers la forêt, plongée dans la nuit, et enmême temps éclairée par la lune argentée.
Une faicheur émane de la verdure,c'est agréable.Je m'élance à quatre pattes dans l'obscurité, profitant du calme et des senteurs. Tout semble transformé. Les feuilles semblent être de crystal, quelques rayons de lune filtrent à travers la cime des arbres. Ce spectacle magique s'offre à moi tandis que je prends de la vitesse, laissant mes griffes et mes instincs me guider à travers ce monde figé dans le sublime.Je parcoure ainsi quelques kilomètres, la fraicheur m'a envahi moi aussi, et ma vision a été transformée, le félin en moi contemplant chaque petit mouvement qu'il puisse interprêter.Un bruit agréable se fait bientôt entendre; Une rivière. Je continue dans la direction du bruit, quelques petits animaux se sauvent à mon approche tandis que je traverse à une allure surprenante buissons et petits chemins.
J'arrive bientôt à la rivière. Je me tapis dans l'ombre. Quelques lapins ont attiré mon attention, ils boivent à l'eau calme, protégés par le chant de l'eau.Mais mes yeux sont ceux d'un prédateur, ma queue remue doucement tandis que je prépare mes appuis pour bondir sur le petit groupe.J'attends, et compte les battements de mon coeur, horloge de mes instincs.U... deux.... trois...Puis d'un coup, quelque chose en moi ouvre les yeux, et je bondis de mon fourré pour me jetter sur celui en train de boire. Je lui brise le dos d'un coup de griffes, les autres détalent. Mais dans un mouvement brusque et précis, je lance le couteau qui était à ma ceinture en direction du dernier du groupe, et fais mouche.Je me saisis des deux proies, et entreprends de les dépecer ici même avec mon couteau.J'enlève la peau et les vicères, les têtes.
Je me frotte le visage, avant de constater que j'ai du sang plein les mains. Je pose mes proies et m'approche de l'eau.Mon reflet me contemple, une trace de sang à la joue droite.
(Suis-je vraiment plus qu'un animal au final..?)
Je me lave les mains et le visage, puis le corps tout entier, l'eau est limpide, le sang ainsi que les dernières taches de charbon me quittent, j'en profite également pour redonner un coup de propre à mes habits.Je sors de l'eau, pour constater qu'une forme s'approche lentement de mes lapins.C'est une espèce de tigre, il ne m'avait pas remarqué et semble surpris.Il reste, hésitant, m'attaquer ou fuir, ses narines palpiltent, il sent la viande.Je m'accroupis, je suis à moins d'un mètre de lui, il gronde sourdement.Je lui rends son grondement, découvrant les crocs qui ont tant effrayés mes camarades humains du temps de mon enfance.Il enfonce doucement ses griffes dans la terre meuble, il se prépare à attaquer.Sans prévenir, ses muscles phénomènalements souples se tendent et se détendent à une vitesse surprenante, il tends les pattes, toutes griffes sorties lors de son saut, il est l'orgueil du prédateur.
Je tends mes bras et attrappe la base de ses pattes, ses "poignets", me laisse rouler sur le dos, guidé par sa force, et tandis que je suis couché sur le sol et qu'il commence à m'atterir dessus, je lui décoche un puissant coup de pied dans le bas du torse, le propulsant par dessus moi, dans la rivière.
Ce dernier, penaud, nage malhabilement jusqu'a l'autre rive, et en sors, trempé, une haine meurtrière gravé dans les yeux.Je lève l'un de mes lapins et lui lance, appeuré, il s'évanouit dans la nature.Je soupire, et tandis que je baisse les yeux vers mon reflet, je distingue enfin mon humanité.
(Je ne suis pas un animal, j'ai une conscience qui me guide, je n'ai plus a avoir honte de moi même, mes mains sont capables d'écrire et de dessiner tout autant que mes griffes peuvent lacérer et tuer.)
C'est propre,bien dans ma peau que je regagne le campement, un lapin empalé sur un bout de bois.Je le plante près de la flamme incandescente tandis que les gardes m'observent sans mot dire.
"J'ai déja mangé, si ça vous tente n'hesitez pas, je l'ai lavé."
Je souris, sincèrement; je sais que tout n'est pas aussi simple qu'un sourire, mais... J'ai le sentiment que c'est ce que je dois faire.Je m'assois près d'Amaltia, main tendues vers le feu qui achève de me sécher.Ma queue se balance lentement tandis que les parfums de la viande qui cuit et de la douce peau de l'elfe me parviennent et se mèlent.
(C'est exactement ça être un humoran, un prédateur au coeur humain.)
Je frotte mon pelage pour me réchauffer.Ma queue qui se balance heurte doucement quelque chose de mou, je tourne la tête, abandonnant l'hypnotisante danse du feu, pour m'appercevoir que c'est bel et bien le fessier d'Amaltia, le "quelque chose de mou".
"Heu.... désolé....je.."
Je me confonds en excuses tandis que la gêne me traverse, puis au bout de quelques secondes, je rigole, d'un rire doux et détendu, mes yeux se tournant vers le ciel étoilé.
"Je suis défintivement humain."
Les autres me regardent sans comprendre, et je souris de plus belle, je ne m'étais pas senti aussi bien depuis bien des années.
Je retourne la viande, qui finit bientôt de cuire.
Je comprends enfin qu'il n'est pas de machinations du destin, même si ce fut un tavail d'orfèvre que de guérir les varices qui s'étaient formées dans ma conception de la vie, je peux désormais sans craintes convoquer le concil des doutes qui me rongeaient depuis trop longtemps pour lui rire au nez.