La petite porte en bois au Nord de la salle Gemme s’ouvre sans aucun souci. Derrière, une simple pièce, pas très grande, poussiéreuse et éclairée d’une très faible lueur de feu, même si aucune flamme n’est visible. Alors que la porte s’ouvre, un petit raclement de chaîne sur le sol de pierre se fait entendre. Les murs sont marqués de coups dont les éclats gisent sur le sol. Au centre de la pièce, contre le mur opposé à la porte, dos à vous, est assis un curieux personnage sur un petit mais robuste tabouret. De petite taille, l’apparence trapue, une longue tresse de cheveux ébouriffés de couleur poivre et sel, une armure solide et faite pour les batailles les plus rudes, rien ne peut vous tromper, c’est bien un nain qui repose là, tête baissée en avant. Celle-ci est retenue dans cette positon par une épaisse cagoule de cuir, l’attachant à une espèce de socle en métal rayonnant d’une chaude lueur, comme s’il était bouillant.

Le nain semble vous entendre débarquer dans la pièce et aussitôt, écarte les bras, dégageant une puissante aura magique. Aussitôt, ses mains et ses doigts lancent mille éclairs électriques qui viennent se briser contre les murs, arrachant encore d’autres éclats de la pierre. Visiblement, le nain prisonnier maîtrise avec perfection la foudre…

Après un instant, les éclairs se calment et le nain baisse les bras en signe de dénégation. Raesha n'ose visiblement pas entrer...

Par chance, la petite porte n’est pas verrouillée et je n’ai donc pas besoin de la défoncer comme celle de Shalim. Le battant n’est pas encore ouvert qu’un faible bruit de chaîne se fait entendre de l’autre coté, signalant que la présence d’un être vivant dans la pièce. Avec prudence, j’ouvre complètement la porte qui laisse apparaître une petite pièce éclairée faiblement au fond de laquelle se trouve une créature trapue dont l’armure lourde ne peut être que celle d’un nain. Apparemment, le pauvre bougre est attaché mais en tout cas ce n’est pas par les bras car il nous fait une magnifique démonstration de tir d’éclairs qui viennent éclater contre la paroi de pierre.

A la base, je n’avais pas très envie de libérer un nain mais devant les pouvoirs magiques non négligeables du nabot, il est évident que c’est l’un des Mages dont parlait Shalim. Contraint, donc, et forcé d’aider le petit bonhomme, je m’approche de lui calmement en parlant distinctement pour qu’il comprenne mes mots :

« Du calme, du calme. On va essayer de vous libérer. Laissez nous un peu de temps. »

J’aurais plutôt dû dire “laissez-moi du temps“ car Raesha n’a visiblement pas envie de rentrer. M’approchant donc du nain, je pose une main sur son épaule puis commence à examiner le mécanisme qui le retient, c'est-à-dire une cagoule de cuir raccordée par une chaîne à un socle qui à l’air brûlant.

« Ne bougez pas… »

Examinant d’abord la cagoule, je cherche une fermeture ou une lanière qui permettrait de l’enlever, puis je jette un œil au socle, approchant ma main pour voir s’il est vraiment chaud.

le nain semble se calmer à tes paroles, et Raesha décide enfin d'entrer dans la pièce dévastée par la foudre. Sa cagoule de cuir retenant sa tête sur le socle est attachée dans son dos au milieu des homoplates par une simple sange de ceinture. Ses bras courts et costauds ne peuvent l'atteindre, surtout avec l'imposante armure naine qu'il porte.

Lorsque ta main approche du pilone, tu peux ressentir une intense chaleur s'en échapper. Il n'est pas rougeoyant pour rien, même si le métal qui le constitue n'est pas en fusion. La chaleur semble provenir du bas, puisqu'elle y est plus présente qu'au sommet du socle, là où repose la tête nanique, même si ça reste encore très chaud. Le nain se laisse faire et Raesha te regarde oeuvrer sans rien dire, gardant ses distances.

Tout ce que je peux tirer de mon examen plus complet du système qui retient le nain prisonnier ce que : la cagoule tient par une simple sangle semblable à celle d’une ceinture, placée en plein milieu de son dos, endroit qu’il ne peut atteindre avec ses bras courts et musclés. Ensuite, le socle où repose la tête du petit personnage est réellement brûlant, et c’est un euphémisme surtout pour la partie basse du pylône.
Comme il ne semble pas y avoir de piège, je me place derrière le nain et décroche la lanière de cuir, m’attendant avec un peu de dégoût le visage du malheureux, tout d’abord parce que c’est un nain et ensuite parce qu’il a vraiment dû avoir chaud au visage et ça a peut-être fondu un peu…

« Voiiilaa, vous pouvez bouger. »

Libéré de son entrave, les bras courts du nain s'activent pour se débarasser de cette cagoule de cuir qui retient sa tête posée sur le socle chaud. Il se retire tant bien que mal, bougonnant et râlant comme... Bah comme un nain en fait. Une marmelade de sons gutturaux sort de sa bouche, alors qu'il reste de dos. A l'instant où il ôte sa tête du socle, la pièce s'éclaire un peu plus. La cause en est deux petits trous dans la cagoule de cuir, au niveau des yeux de celui qui la portait. Ces trous semblent mener directement à l'intérieur du socle en métal, qui doit être bouillant et lumineux, bref de quoi vous abimer sacrément les mirettes.

Et c'est bel et bien ce que tu découvres quand le prisonnier de petite taille se retourne, vous révélant sa barbe tressée qui se cesse de remuer en même temps que ses lèvres cahées. Son gros nez fait très nain, son visage buriné aussi. Son crane chevelu et son front étroit également, ses sourcils broussailleux, pareil. Bref, un nain tout ce qui a de plus banal, si ce n'ets sa superbe armure finement ouvragée (pour une armure naine) et marquée de runes diverses.

Seulement, ce nain a une autre particularité, hélas: à la pace de ses yeux sont deux trous béants. Les globes oculaires semble avoir fondus et forment une masse blanchâtre et sanglante au fond de ses orbites creuses. Il est aveugle, mais se tourne néanmoins vers son libérateur, parlant de sa voix rocailleuse.

"Boudiou de sort! L'air de cette pièce est encore plus douloureux que la lave qui m'a aveuglé! Qui es-tu sauveur, et pouquoi m'as-tu sauvé?"

Aussitôt ses paroles finies, il grommelle de nouveau, jouant avec les chaînes par lesquelles il est toujours attaché par le cou, les agitant dans un bruit de métal. Il ne cesse d'ailleur de faire du bruit, car même quand il ne ronchonne pas, sa respiration est aussi profonde qu'un ronflement d'orque, et les pièces de son armure épaisses frottent entre elles sans arrêt, provoquant des crissements peu discrets.

A peine ai-je lâché la ceinture que le nain se débat frénétiquement pour se débarrasser de sa cagoule, grommelant et maugréant des sons incompréhensibles. Lorsque sa tête est enfin dégagée, le fait de l’avoir relevée éclaire un peu plus la pièce, ce qui s’explique aisément. Deux trous sur le socle laissent échapper la lumière incandescente, pile à l’emplacement où se trouvaient les yeux du nabot, de quoi redouter le pire quand à son faciès sûrement amoché. Une chose est sur, le petit bonhomme a vraiment tout d’un nain à une différence près. En effet lorsqu’il se retourne vers nous pour nous parler, il laisse apparaître des yeux totalement blancs et un petit jappement de surprise m’échappe. On a beau s’y attendre, ça surprend toujours…

Le nain me pose alors plusieurs questions auxquelles je réponds sans hésitation :

« Je me nomme Tathar et je suis ici avec un groupe d’aventuriers dans le but de détruire Mongoor et je vous ai sauvé car tout allié est bon à prendre surtout que l’autre défraîchi est plutôt puissant… Enfin, je pense que vous devez connaître certains de nos compagnons. Si je vous dis Maxanitsh, Amaltia et Shalim, cela vous parle ? Oh, attendez, ne bougez pas. »

Dégainant l’épée de Rotob, je frappe un grand coup sur les chaînes pour les briser et ainsi libérer complètement le nain.

La réaction du nain est vive et rapide, après un sursaut de surprise qui fait frémir toute son armure et ses chaines dans un bruit de ferraille.

"Boudiou! Maxanisth? Shalim? Pwahaa me dites pas qu'y sont là! Ahhh ce satané Mondoor, je lui ferais bien goûter de mon marteau de foudre si il ne l'avais pas pris! Un joli Peuah sur le coing de la gueule l'aurait bien remis à sa place!"

L'accent... bourrin du nain est à son apogée lorsqu'il parle avec vivacité de son ennemi juré... Lorsque tu essaies de briser les chaînes qui le retiennent prisonniers, tu rates ton coup et le nain manque de tomber à la renverse sous le choc. Il bougonne à nouveau:

"Boudiou ça va pas la tête? Si vous voulez me débarasser de ces satanés bouts de ferailles, vous vous y prenez mal!"

Aussitôt, il s'empare d'une des chaînes avec ses deux mains et après un effort poussé, un "Gniiii" retentissant et une grosse veine pulsant sur son front, la chaîne cède sans plus de résistance. Il effectue le même rituel avec l'autre avant de parler à nouveau.

"Et puis quoi? Un nain aveugle, à quoi je pourrais vous servir, j'y vois rien, tout est noir! Et les autres magos de l'équipe? Y sont où ceux là, té!"

Je ne peux qu’éclater de rire devant l’entrain que montre notre nouveau compagnon vis-à-vis de la façon dont refaire le portrait à Mongoor.

« Mon cher ami, malgré que vous soyez un nain, je sens que l’on va bien s’entendre ! »

Pour ce qui est de ma tentative pour briser les chaînes de l’aveugle, elle se révèle infructueuse, ce qui en fait n’est pas plus mal puisque mon échec me permet de constater la force du nain qui les arrache comme ça sans plus de difficulté que pour casser une branche. Ca promet. De mon coté, j’arrache une bande de tissu à ma veste pour la mettre dans les mains du nain.

« Tenez, mettez ça autour de votre visage. Pas que vous soyez moche mais c’est peu ragoûtant à voir, désolé… Et si on allait rejoindre les autres ? Pour ce qui est de Shalim, je crains vous décevoir en vous disant que la peine que lui a infligé Mongoor ne lui a pas permis de se joindre à nous… »

Le nain accepte ton morceau de tissus en ronchonnant et s’en enroule le crâne, cachant ainsi ses orbites malmenées, avant de te répondre.

« Boup ! Qu’avez-vous contre les nains ? Et puis qui êtes-vous d’abord ? »

Puis à la mauvaise nouvelle de l’emprisonnement de Shalim, il réagit plus promptement :

« Boudiou ! Qu’est ce qui lui est arrivé à lui ? C’était le premier après Maxanisth à disparaître avec Mongoor dans les tréfonds obscurs de ce temple maudit ! Joliment fait, mais maudit ! Je vais éclater la tête à Vlash et répandre sa cervelle partout autour ! Vous auriez pas vu mon marteau, té… Je sais pas où il est ? Et j’y vois goutte en plus ! »

La remarque du nain quand aux non-dits soulevés par mon « Malgré que vous soyez un nain » est on ne peut plus inévitable mais j’ai déjà une réponse toute prête qu’il me suffit de dire :

« Oh vous savez, les préjugés que peuvent avoir la plupart des elfes vis-à-vis des nains… En tout cas, il semblerait qu’ils soient infondés car vous m’êtes très sympathique. Comme je vous l’ai dit, je me nomme Tathar, un elfe gris qui à décidé d’en faire baver à Mongoor ! Pour ce qui est de Shalim, disons que Mongoor lui a fait dont d’un corps assez imposant… enfin Max pourra sûrement vous en dire plus. Quand à votre marteau, aucune trace… Et pour votre cécité, je vous propose d’être votre guide. Prenez ça et allons-y, je tiens l’autre bout. »

Sortant mon sabre et son fourreau de ma ceinture, j’en tends un bout au nain et garde l’autre en main pour le tirer vers la salle principale devenue beaucoup plus lumineuse.