Je venais de sortir dans la rue et avais levé le visage vers le ciel, les yeux fermés, me demandant si Virgule était là, quelque part. Je ne crois pas en une vie après la mort, du moins, pas au sens où les gens l'entendent habituellement. Mais, dans le cas de mon ami lutin, j'aurais, sans y croire, au moins aimé que cela soit le cas. Je ne sais pas si les dieux pardonneraient à un fou. Au fond, il n'était pas lui-même, ce n'était pas sa faute mais la mienne.
Sur le coup je ne fis pas attention à tous ces gens qui me voyaient sortir de chez le médecin. J'avais pris soin de mettre son corps dans la cave, sans la fermer pour que les lutins aient un enterrement digne de ce nom. Donc à priori, je ne risquais rien mais il faudrait que je me presse à sortir d'ici. Seul bémol, petit souci du plan, la crotte de bique sous le soulier, la cerise sur la gâteau, enfin bref vous m'avez compris : je ne connaissais pas cette putain de ville pourrie ! Je mis facilement trente minutes à en trouver la sortie. Je me trouvais à deux pas de celle-ci lorsque, d'une voix tonitruante, j'entendis la lutine crier un « l'assassin » me désignant. Je me retournais vivement, le temps de constater que deux gardes me courraient droit dessus, et fis comme eux, mais dans le sens contraire. La mallette de soin de Virgule sur l'épaule – ce serait mon souvenir – je pris mes jambes à mon cou, au sens presque littérale du terme. En quelques secondes je me retrouvais dans le bois de Bouhen, toujours en cavale.
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