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 Sujet du message: L'île interdite
MessagePosté: Dim 22 Mar 2009 13:16 
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L'île interdite


Au large de Kers se trouve une île vaste et mystérieuse. Les habitants de la ville la nomment l'île interdite, mais ne savent dire pourquoi elle s'appelle comme ça. Nul marin et nul pilote d'aynore ne voudra vous emmener vers cet endroit interdit. On raconte qu'il s'y passe des choses étranges et qu'une force obscure habite les lieux...

Récemment, un volcan semble s'y être réveillé et, si aucune coulée de lave n'est visible à partir de la ville de Kers, une colonne de fumée noire sortant de l'unique montagne de l'île est omniprésente et strie le ciel d'une ligne ténébreuse, comme un avertissement aux curieux indésirables...

(HRP: Île de la Quête 16, réservée aux dirigés avec GM9. Si vous désirez la visiter, envoyez-moi un MP!)

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 Sujet du message: Re: L'île Interdite
MessagePosté: Dim 22 Mar 2009 13:18 
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(Sortie de Quête de Ramos)

(Note à Ramos: reprenons où nous en étions à ton départ de la quête)

Quelque part dans un temple maudit souterrain, dans une chapelle obscure...

...


L'elfe, sitôt relevé, toujours râlant et toussotant dans un bruit affreux et gluant, crachant les derniers afflux de sang de sa gorge. Il voit l'alcool et le saisit pour en boire plusieurs grosses goulées. En fait, il vide d'un trait toute la gourde avant de la faire tomber sur le sol et de laisser perdre son regard vers le plafond. Curieusement d'ailleurs, son corps semble suivre ce regard, et il tombe en arrière, comme emporté par son propre plat. Il s'effondre contre l'étagère qui tombe sur lui dans un lourd fracas de bois. Mais visiblement, maintenant récapité, il a l'air solide puisque l'instant d'après, il apparait entre deux planches brisées, essayant à nouveau de se relever. Il louche un peu, maintenant, et regarde vers toi avec un air hagard.

"Z'ouvrez pas le second coff'?"

Il se relève tant bien que mal et s'appuie sur l'autel de pierre ensanglanté. Ses yeux mauves tombent alors sur le poignard de cérémonie, et il s'en empare en un geste, le soulevant au dessus de sa tête, bras tendus, comme fou. Il crie alors...

"Forces obscures qui maudissez ce lieu, donnez-moi la force de me crever une bonne fois pour toutes! Qu'Ifthiel ne soit plus, que mon sang s'écoule sur le sol comme l'eau d'un torrent file dans une vallée."

Puis, dans un mouvement vif, il se plante l'arme dans le ventre, projetant à nouveau un jet de sang sur l'autel de la chappelle sombre. Un moment passe où il se tord de douleur, lâchant l'arme qui reste dans la plaie, dans son estomac, puis, il se redresse vers toi. Il ne saigne plus, même si la dague est toujours enfoncée en lui jusqu'à la garde.

"Ils veulent pas... Ils veulent pas que je meurre..."

Il a l'air encore plus désespéré qu'avant et soupire sonorement avant de te regarder un regard blasé, l'arme toujours en place.

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 Sujet du message: Re: L'île Interdite
MessagePosté: Ven 27 Mar 2009 15:17 
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En voyant l'alcool, l'elfe n'hésite pas une seconde et la vide d'un trait, sa descente est impressionnante, il n'y a pas à chipoter... Il laisse ensuite tomber la gourde et lève les yeux au plafond, je suis alors son regard vers le plafond pour voir ce qui peut l'intriguer à ce point mais mon attention est détournée par le fracas que fait mon nouvel ami en tombant de toute sa hauteur sur une des étagères de la chapelle qui se renverse sur lui.

(Et voilà ! Encore un cas...)

L'elfe aux cheveux noirs se relève d'entre les débris et me regard avec ses yeux vitreux pour me demander si j'ouvre le second coffre. Je croise alors les bras... Son attitude, son intonation, ses yeux... Ce gaillard ne tient pas du tout la boisson. Je croise alors les bras et le regarde sévèrement.

"Si, je vais l'ouvrir, mais cessez donc de gigoter et de tout mettre sans dessus-dessous ! C'est impossible de se concentrer avec vous !"

Alors que je m'agenouille pour entamer la serrure du second coffre, j'entends l'elfe prononcer une sorte de prière macabre et suicidaire, demandant sa mort. Au moins, je connais son nom désormais : Ifthiel.

Lorsque je me retourne vers lui, j'ai tout le loisir de le contempler en train de s'enfoncer un poignard dans les entrailles, déversant encore une fois son sang, un peu partout dans la pièce. Le spectacle est toujours aussi déplaisant et je vais devoir mettre les points sur les "i" car cela commence vraiment à m'écoeurer. Je me redresse et m'approche de lui. Il est là, pantois, attristé, se plaignant de toujours être en vie. Je saisi alors le pommeau de l'arme et la retire sèchement pour la mettre dans mon sac.

"Déjà je commence par vous confisquer ceci ! J'en ai assez de vous voir vous torturer, c'est très fatiguant. De toutes façons, vous ne pouvez pas mourir, c'est ça ? Alors cessez donc de tenter votre chance, ce sera mieux pour tout le monde."

Je reprends mon souffle et regarde mon dépressif droit dans les yeux.

"Mais rassurez-vous, une fois débarrassés de Mongoor, je m'occuperais personnellement de mettre fin à vos jours. Maintenant donnez-moi un coup de main pour le coffre et dites-moi tout ce que vous savez sur Mongoor et sur cet endroit, je vous prie !"

Peu importe qu'il soit d'accord ou non, je me remet au travail sur la serrure du coffre, de toutes manières, il n'a pas grand chose pour se suicider et dans l'état où il est, il ne devrait pas tarder à roupiller.

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 Sujet du message: Re: L'île Interdite
MessagePosté: Dim 29 Mar 2009 13:44 
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À peine t’es-tu remis à l’ouverture de ton coffre qu’il te saisit par les épaules et te tourne vers lui avec une force insoupçonnée pour un être si frêle et faible. Son regard mauve emprunt de folie est désormais perçant d’une lucidité pour le moins étonnante au vu de la quantité d’alcool qu’il vient d’ingurgiter. Son ventre a déjà cessé de répandre son sang dans la pièce, comme une cicatrisation immédiate après que tu lui eus arraché son arme rituelle. Il fixe ses yeux dans les tiens et te parle de sa voix fébrile.

« Vous n’y parviendrez pas. Suivez le conseil d’Ifthiel le sage, même s’il est devenu fou. Fuyez, fuyez au plus loin d’ici et laissez la malédiction telle qu’elle est. Nous sommes perdus depuis bien trop longtemps, et rien ne pourrait y changer. Le jeu n’en vaut pas la chandelle, vous périrez tous autant que vous êtes. Vous ne soupçonnez pas la puissance du maître des lieux, Mongoor. Dragon d’améthyste. Il vous écrasera… »

Il est pris alors d’un frisson spasmodique, comme si une nouvelle douleur interne s’emparait de lui. Mais cette fois, il ne semble pas perdre la tête – au sens littéral – et t’indique dans un cri une curieuse anfractuosité dans les murs que tu n’avais pas perçue en explorant la pièce.

« Par là, vous pourrez rejoindre votre liberté. Fuyez, vous, et n’essayez plus de revenir. Le mal de ces lieux est trop profondément ancré pour l’en déloger. Vous n’avez plus beaucoup de temps, n’en perdez plus… Hâtez-vous ou mourrez… »

Les effets d’une prophétie maudite sont clairement exprimés dans le ton de sa voix. Il titube jusqu’à l’anfractuosité et place sa main dessus en murmurant des mots que tu ne peux entendre, ni même comprendre. Alors un passage s’ouvre dans les ténèbres, sur un sombre couloir poussiéreux et plein de toiles d’araignées…

L’instant d’après, Ifthiel se courbe de douleur et crache à nouveau le sang sur le carrelage obscur de la chapelle des Ténèbres de ce Temple maudit…

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 Sujet du message: Re: L'île Interdite
MessagePosté: Mer 6 Mai 2009 12:04 
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Alors que je recommence à essayer d'ouvrir le coffre, je sens l'elfe me prendre par les épaules pour me soulever et me retourner face à lui. Ses yeux sont rivés sur les miens et, tandis que, cinq minutes auparavant, il avait du mal à être crédible à cause de l'alcool, il à l'air tout à fait lucide et sérieux. Nous nous fixons du regard pendant quelques secondes, je crains qu'il ne veuille m'embrasser, après tout, cela doit faire des années qu'il n'a pas eu de contact humain...

Finalement, ce n'est pas ça, il ouvre la bouche pour me mettre en garde. Ses paroles ne sont pas vides de sens et il prédit ma mort face à Mongoor le dragon d'améthyste.

(Un dragon ? Ce n'est pas rassurant en effet... Et Ifthiel s'y connaît en mort...Plus cette aventure avance, plus j'ai des doutes sur l'existence du trésor... Et à quoi sert un trésor si je meurs ? A rien, assurément.)

C'est alors, que l'habitant de la chapelle recommence ses spasmes. La dernière fois, sa tête a été mystérieusement délogée. Je fais un pas de recul afin de ne pas être, encore une fois, aspergé de sang. Il hurle alors qu'il y a un passage, un petit espace dans le mur que je n'avais pas remarqué. Et, alors que ses paroles affirme l'existence d'une malédiction du temple il se dirige vers le mur et pose sa main dessus. Ses lèvres s'agitent alors et un passage s'ouvre dans la paroi. Un échappatoire ou un piège ?

Après l'ouverture, Ifthiel est plié par la douleur et vomit son sang, comme si quelqu'un ou quelque chose voulait le faire taire et le punir. J'éprouve presque de la pitié pour lui, mais je n'ose le réconforter, il est trop répugnant.

"Vous savez quoi magicien ? Je crois qu'il est temps pour moi de tirer ma révérence. J'ai déjà dû affronter trop de dangers jusqu'à présent, maintenant je suis las et je ne préfère pas risquer la mort. En tout cas, pas pour délivrer de sa malédiction, un temple qui m'indiffère totalement."

Je m'engage alors dans le passage avant de me retourner vers la chapelle.

"Je vous remercie de m'avoir éclairé et, s'il vous plaît, cessez de vous mutiler inutilement. Si vous les croisez, transmettez mes amitiés à ces imbéciles qui me servent de compagnons et à ce cher Mongoor !"

J'avance alors dans ce couloir sale et emplit de ténèbres.

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 Sujet du message: Re: L'île Interdite
MessagePosté: Ven 8 Mai 2009 20:22 
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Sans un mot, ni une réaction, Ifthiel te laisse filer sans te suivre. Il te regarde pénétrer dans le passage qu’il t’a dévoilé d’un œil triste, presque mélancolique. À peine as-tu fait un pas dans le couloir que la porte secrète se ferme derrière toi, te plongeant dans une obscurité totale, alors que tu entends un cri puissant poussé par Ifthiel. Un cri d’horreur, de douleur, d’agonie violente. Sans doute l’elfe dérangé est-il mort, s’il en est capable…

Quoi qu’il en soit, tu vas sans doute devoir avancer à tâtons dans ces ténèbres… Tes yeux s’habituent un peu à l’obscurité, mais tu n’y vois de toute façon pas grand-chose… Tu perçois tant bien que mal deux murs de part et d’autres, formant un couloir unique dans lequel tu ne peux qu’avancer. Des épaisses et immenses toiles d’araignées stagnent dans les airs, semblables à des fantômes revenus des temps anciens et enfermés là par quelque maléfice nécromantique. Un silence de mort règne ici…

Au loin devant toi, tu entends un espèce de grattement de terre, comme si une taupe était en train de se creuser une galerie souterraine.

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 Sujet du message: Re: L'île Interdite
MessagePosté: Mar 12 Mai 2009 10:44 
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A peine suis-je rentré dans le passage que le mur se remet à trembler et je l'entends se refermer derrière moi accompagné d'un bruit sourd et d'un nouveau hurlement d'Ifthiel. Il a vraiment perdu la boule... Prendre la poudre d'escampette est selon moi, une riche idée ! Seulement voilà, j'ai négligé un détail : je ne vois strictement rien du tout. D'après ce que j'avais pu entrevoir, il n'y a, justement, pas grand chose à voir. Le couloir avait l'air rectiligne -du moins au début- et de grandes toiles d'araignées recouvraient le plafond.

(Des araignées... Je n'aime pas trop ces bêtes là... J'espère qu'elles ne sont pas aussi grosse que la dernière fois (((voir la quête 6))). Mais vu la taille des moustiques que l'on trouve sur cette île j'ai un doute.)

Voilà quelques secondes que je suis planté là, au début du couloir. Un attitude bien inutile à mon goût. De toutes façons, il est impossible de faire machine arrière, alors allons de l'avant ! Je me dirige donc vers la paroi de droite, y plaque mes mains et commence à suivre le mur à l'aveuglette.

"Zewen, je te fais confiance, guide mes pas jusqu'à l'air libre."

Privé de la vue, ma concentration se porte naturellement sur mes autres sens. Je ressens la moindre imperfection dans le mur et le moindre creux à mes pieds. La poussière remplit mes narines et je suis régulièrement obligé de les dégager à l'aide de mon index. J'entends légèrement résonner mes pas et ma respiration dans ce vide sonore absolu, rarement briser par le bruit des araignées cavalant au dessus de ma tête. Mais le pire dans tout ça, c'est que je suis particulièrement crasseux et, alors que je ne sais même pas où je me dirige et si je sortirais vivant de ce tunnel, je me prends à rêver d'un bon bain chaud en compagnie d'une femme aux courbes parfaites et au regard de braise. Je soupire alors en grattant cette tête qui me démange.

"Qu'est-ce qui m'a prit d'écouter un elfe suicidaire ?"

Au bout d'un moment, je fais un pause, pour reprendre mon souffle, mes esprits et surtout pour pisser. Ce nouveau bruit tranche un peu avec le son monotone de mes pas et, une fois soulagé, je me remet en route. Très vite, un lointain grattement parvient à mes oreilles. On dirait un animal en train de gratter, comme une taupe ou un blaireau. Peut-être est-ce mon salut ? un passage vers la surface. J'accélère alors le pas, au risque de trébucher pour me rapprocher de cet unique espoir.

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 Sujet du message: Re: L'île Interdite
MessagePosté: Ven 29 Mai 2009 11:52 
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Erreur que de courir aveuglement dans un couloir fit d’ombres… Tu ne te rends compte qu’au dernier moment de la lueur violette qui apparait devant toi, débouchant dans le couloir où tu te trouve en ‘traversant’ l’un des murs. Ce sont là trois zombies aux couleurs de Mongoor qui apparaissent devant toi, armés de faux et de cimeterres, prêts à en découdre sitôt qu’ils t’ont aperçu… Les animaux souterrains de cette Île Interdite sont bien différents de ceux du continent, visiblement… Et c’est dans un gargouillement rauque que les trois morts-vivants se ruent vers toi avec hargne. Visiblement, ils veulent en découdre, et semble nettement plus puissants que ceux affrontés (et laminés) jusqu’ici. Ils sont pourvus d’armures de cuir aux reflets violets, et une lueur mauve teint leur regard vide…

(Combat libre de difficulté moyenne compte tenu de tes carac, mais pas aisé tout de même… Je te laisse le choix de la gravité de tes plaies…)

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 Sujet du message: Re: L'île Interdite
MessagePosté: Mar 19 Avr 2016 18:06 
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Si j’avais su, je ne serais pas venue.

C’est la phrase qui, pendant les premières heures de la traversée en partance de Kers vers l’Île Interdite, n’a pas quitté mon esprit. Je suis fille des forêts et des rivières, pas de cette foutue étendue salée que l’on nomme mer. Et si petite, et plus tard aussi, je n’ai jamais rechigné contre une baignade sur la côte sauvage de Yarthiss, bravant tous les interdits parentaux et manquant à la prudence la plus élémentaire, jamais je n’ai pris le large sur une embarcation subissant sans cesse le ressac des vagues, leur roulis continu, la houle sévère et le tangage inconstant des flots flanquant la coque de leurs flics et de leurs flocs. Burp. Rien que d’y penser, j’ai le cœur au bord des lèvres.

Ah qu’il est loin le flottage des troncs de l’entreprise sylvaine familiale transbahutant les cadavres des arbres professionnellement arrachés à la terre par les employés de mon père, que j’accompagnais parfois jusqu’à l’estuaire de Yarthiss pour qu’ils juchent les troncs sur de longs navires côtiers à fond plat, censés rejoindre diverses destinations, comme Exech, Tulorim ou encore le désert au sud-est de ma jolie petite bourgade pittoresque. Ah non, je ne m’imaginais pas une seconde quelle infamie ces marins bourrus, ces pêcheurs vulgaires aux cris braillards, ces hommes de la mer qui tanguent sur terre comme à flot, dépendamment de la teneur d’alcool dans leur sang iodé ; comprendre ici que plus ils boivent, moins ils tanguent, les salauds ; vivent au quotidien lorsqu’ils embrassent, le temps d’un voyage, d’un jour à plusieurs mois, leur amante de toujours, la mer. Oui, celle qu’on voit danser le long des golfes clairs. Celle dont les reflets d’argent changent sous la pluie. La mer… celle confondant les blancs moutons avec les anges d’écume, bergère d’azur infinie. Eurgh.

D’azur aux reflets céruléens percluse de fines lames blanches, dans lesquelles l’homme libre toujours contemplera son âme, dont elle est le miroir. La mer. Celle dont on veut peindre l’air de mille couleurs. Ah cruelle désillusion. Car de couleurs, je ne vis que celle de mon teint de pêche quitter mon visage délicat pour se répandre en dégueulis notoires dans ses flots insondables. Des teintes bien peu accueillantes, pour la voyageuse néophyte que je suis, agonisant des heures durant, tantôt penchée par-dessus bord à cracher mon âme et mon innocente candeur avec le charmant petit déjeuner servi par Aliéron le matin même, tout de suite moins délectable. Tantôt recluse dans l’étroite cabine de proue, allongée et gémissante aux côtés du Nennlartëa non moins geignant, qui jette sur moi deux yeux inquiets bercés d’une déception notoire. Quelle naïve j’ai été, que de croire aisée cette traversée. Je me rends à moi-même, de cette faute que je ne commettrai plus, sans qu’on m’y contraigne de force. Et quelle erreur de s’enfermer, prise d’un mal dont j’ignorais encore tout le matin même ! Le roulis empire, les nausées gonflent et la gorge se serre. Les yeux, sans plus de visuel sur l’horizon, déséquilibrent le corps jusqu’à ce qu’il perde tout repère. Kwasi m’a prévenue, bien sûr, goguenard, habitué qu’il est à subir le roulis effréné des vagues sous la coque, de ne rien en faire, mais comment convaincre une jeune femme du bienfondé de sa décision, qui se dit au plus profond d’elle-même que ça ne peut être pire. Hé bien si ! Bon sang de bois de chauffe en baguettes pleines d’échardes. Bien sûr que si. Idiote incrédule. Fissa, que j’en suis sortie, de la cabine, pour déverser ma bile sur les flots, tant en gerbes liquéfiées qu’en insultes grossières qui pourrait faire pâlir le plus rude des loups de mer.

Aergh, la mer, pas encore elle. Et le tout pendant qu’Aliéron s’extasie devant des espèces de grosses poiscailles à ailerons qui s’amusent en caquetant et en riant à suivre notre embarcation en sautant joyeusement hors des flots. Des dauphins, comme il les appelle. Et bien je les maudis, moi, les dauphins. Leur simple vue, m’ayant fait relever la tête, m’a vrillé l’esprit, quand j’ai vu l’horizon, si stable habituellement, monter et descendre sans raison. Beuah. Et je maudis Aliéron tout pareil de me les avoir indiqué avec tant de verve admirative, laissant entendre qu’il s’agit d’un spectacle enchanteur. Il n’y en a qu’un, finalement, que je ne maudis pas, grâce à l’efficacité de sa présence d’esprit. Avant-même que les premiers roulis ne me fasse rejeter le contenu de mon estomac, Nektanebo m’a agrippé les cheveux et attaché derrière la nuque à l’aide d’un lacet de cuir. Silencieux, mais efficace, le petit. Enfin petit, il me dépasse bien d’une tête, mais reste fort jeune, adolescent désincarné.

Pas une seconde, je n’ai songé à lorgner leurs torses nus et puissants luisant de sueur virile sous le soleil. Et pourtant, il y a bien de quoi réjouir toute cruche avide de verser son eau. Grands dieux, quels corps. Même le petit a de quoi faire frémir les jeunettes de son âge, et n’aura rien à envier aux deux autres dans quelques années. Mais non. Foutus flots.

Ce n’est, étrangement, qu’après plusieurs heures de traversée, lorsque le ciel ensoleillé s’est couvert de nuages noirs d’orage, portés par un vent ascendant aux bourrasques puissantes et de plus en plus régulières et rapides, soulevant les flots, es vagues et notre navire comme une coquille de noix dans une flaque d’eau battue de cent pieds d’enfants, que ma raison l’emporte et que subitement, tout mal de mer m’abandonne. L’horizon n’est plus bancal : il n’existe plus. Le roulis n’est plus nauséeux, il est juste déséquilibrant. Et alors que la vigueur m’accompagne de plus belle, et que les couleurs me reviennent, je vois la tête de mes condisciples blêmir, tous sombres qu’ils soient. Une tempête. Kwasi, notre capitaine autoproclamé, de par son expérience sur les flots marins, hurle des ordres à notre moussaillon, qui s’élance dans les cordes pour affaler les voiles principales et du foc. Pour ma part, j’ai veillé à enfermer dans la cabine les deux silnogures, ces compagnons à quatre pattes qui n’ont pas de mains pour s’agripper à tout ce qu’ils trouvent. Ils gémissent et hurlent à la mort, rendant à la scène des relents de fin du monde. En parlant de m’agripper, d’ailleurs, une lame plus haute vient frapper la coque et me surprend alors que j’écope l’eau accumulée sur le pont à l’aide d’un petit seau de bois cerclé de fer rouillé, et m’envoie valdinguer vers l’autre bord, contre le bastingage dont la rencontre fortuite me brûle la chute de rein d’une douleur cuisante, alors que mes bras s’accrochent à la première chose que je rencontre : le torse toujours nu d’Aliéron, aux muscles puissamment bandés pour aider Kwasi à tendre un cordage dont, présentement, je n’ai aucune envie de comprendre l’utilité. Mes ongles acérés se plantent dans ses pectoraux offerts et humides de pluies, pour que mes doigts ne glissent pas. Ça doit être douloureux, mais bon sang, ça vaut toujours mieux que de me voir passer par-dessus bord.

Quand finalement je me laisse tomber au sol, essoufflée, me laissant ballotter contre le bastingage, douloureusement peut-être, mais de manière sécure désormais, puisque j’ai agrippé une corde solidement arrimée au pont, corde que je ne compte plus lâcher de sitôt, toute prostrée que je suis désormais, et impuissante, repliée sur moi-même sans pouvoir plus rien faire que de subir ce grain. Autour de moi, les trois hommes hurlent, crient, s’organisent et paniquent. Puissent-ils trouver de quoi s’accrocher, à leur tour. Puissent-ils mener l’embarcation loin de ce cauchemar.

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Asterie


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 Sujet du message: Re: L'île Interdite
MessagePosté: Jeu 21 Avr 2016 19:40 
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Il ne faut pas longtemps à Aliéron pour m’apercevoir, repliée sur moi-même sur le ponton, et me juger être un poids mort, ici parmi eux. S’approchant de moi jusqu’à me couvrir de son ombre mouvant au rythme des éclairs fendant le ciel sombre aux nuages mordorés laissant éclater leur colère vengeresse, il me hurle de rentrer dans la cabine en compagnie des deux silnogures. Je n’ai pas vraiment le choix, en vérité, et ne peux que me contraindre à ce conseil subtil : je suis bien inutile, sur ce pont, en pleine tempête. Pas même foutue d’écoper un peu l’eau des lames qui se brisent sur nous. J’accepte qu’il m’aide à me relever, et le suis dans la cabine, à moitié étourdie de tout ce qui se passe là. Je n’y comprends pas grand-chose, en vérité. Et lorsque le semi-elfe referme la porte derrière moi, rejoignant les autres pour les manœuvres délicates de notre embarcation, je m’effondre sur les fesses, entre les deux animaux geignant toujours de peur. Sans doute auraient-ils préférés plonger dans les flots tumultueux plutôt que de rester là à risquer d’être blessés par le bois du navire. On ne les aurait plus jamais revus, en revanche. S’ils n’étaient pas tout simplement morts noyés, ils auraient finis par dériver sur les côtes sauvages du Naora, retrouvant la vie sauvage qu’ils viennent d’abandonner pour nous suivre, de leur propre chef.

À leur côté, à leur contact, je me sens mieux. Je tente de les rassurer en posant mes mains sur leur tête, en les caressant doucement alors qu’ils se collent à moi. Nous nous couvrons mutuellement dans une panique symbiotique. Loin de s’additionner, elle s’annule petit à petit… Jusqu’à ce que Siaban, l’aurëlartëa lié à Aliéron, ne grogne sauvagement, bondissant vers la porte en hurlant de plus belle. Abasourdie par cette vive réaction, je ne réagis que trop tard alors que dehors, une voix hurle :

« Un homme à la mer ! »

La panique emplit mon regard, et je blêmis de plus belle en me redressant subitement, manquant de peu de m’assommer sur le plafond de la cabine unique du vaisseau. Aliéron. Il ne fait aucun doute, vu la réaction de son silnogure, que c’est de lui qu’il s’agit. Je me précipite vers la porte, mais ai un moment d’hésitation avant de l’ouvrir : Siaban est vraiment nerveux, et semble comme fou, sauvage. Comme s’il n’était plus vraiment lui. Cependant, cette rage n’est pas dirigée contre moi, et je prends la décision rapide, finalement, d’ouvrir la porte sans plus tarder, me précipitant sur le pont. Le silnogure me bouscule presque pour passer à son tour, et sans demander son reste, plonge à son tour dans les eaux tumultueuses de l’océan.

« Non ! »

Il a beau être un animal marin, habitué à la nage en mer, si nous sommes au large de toute terre, nous ne le retrouverons jamais. Pas plus qu’Aliéron, en vérité. Car c’est bien lui qui est tombé par-dessus bord. Me voyant sortir de la cabine, et en refermer la porte pour ne pas qu’il advienne la même tragédie au Nennlartëa, je croise les regards dépités des deux hommes qui restent là, avec moi. Ils sont conscients que nous ne pouvons pas nous permettre de faire demi-tour, dans cette tempête. Quand bien même nous en aurions la possibilité et les aptitudes, ça ne serait que risquer de le condamner encore plus qu’il ne l’est, le heurtant de la coque du navire alors qu’il tenterait de le rejoindre.

Je serre les mâchoires de colère, de désillusion. C’est de ma faute. Il n’aurait jamais dû me suivre. J’aurais dû insister pour qu’il reste à Kers. Il m’avait déjà suffisamment aidée. Quelle plaie que j’ai été trop faible pour me passer de lui. Quelle erreur d’avoir cru sa présence nécessaire, alors que je me rends compte qu’elle l’aurait été bien plus s’il était vivant, à Kers, à attendre mon retour. Mais l’heure n’est pas aux ressentiments. Non. Nous sommes encore quatre à vivre sur ce navire, et nous devons tout faire pour sortir de ce grain. Plus le choix que de me plier aux tâches que j’ai précédemment lâchement déléguées aux hommes : nous devons tous nous y mettre pour notre sauvegarde. Kwasi semble conscient de mon état second, et pose une main ferme sur mon épaule, me regardant droit dans les yeux.

« Allez. La terre est proche. Il y a encore de l’espoir. »

Il me montre, non loin devant nous, la sombre silhouette de l’Île Interdite. Cette fameuse île aux mille dangers. Rien qu’y arriver relève apparemment de l’exploit. Les nombreuses falaises cernant cette bordure de l’île nous empêche d’accoster, pourtant, alors que Kwasi retourne vers la barre pour maintenir le cap, je perçois là où il veut nous mener : une crique. Un accès. Le souci, c’est que je me sens complètement inutile, à ne pas comprendre comment fonctionne la voilure, à ne pas savoir s’il faut la maintenir tendue au risque qu’elle craque, ou la relâcher et risquer de perdre de la vitesse. Pestant, je me précipite vers la barre et bouscule Kwasi pour prendre sa place. Il me regarde, défait, mais la détermination dans mon regard smaragdin le décourage de rouspéter. Il me laisse à cette tâche, et en prend une autre avec Nektanebo. Il y en a bien assez pour trois, de toute façon. Ils s’occupent des voilures, des cordes, et je me contente, tirant comme une forcenée sur la barre, de maintenir notre cap.

Les premières minutes se passent plutôt bien, et ma ferveur est grande, mais à mesure que nous approchons de l’île, les dangers se multiplient. Les récifs rocheux font bouillir l’écume des vagues partout autour de nous, et à un moment, quand le jeune adolescent hurle, paniqué, depuis la proue :

« Rocher droit devant ! »

Et que Kwasi, renchérissant du milieu du pont, accroché à une corde qu’il s’évertue à tendre :

« Vire ! Vire de bord ! »

Je ne peux que céder à la panique. Virer de bord. Ils sont drôles, eux. Déjà que j’ai du mal à garder le cap… Maladroitement, je lâche la barre, qui m’échappe violemment des mains pour claquer contre le bois du bastingage. Le voilier fait une embardée vers l’avant, la voile tourne subitement. Un choc sourd indique que la coque a touché le rocher. Une voie d’eau est sans doute ouverte, à hauteur de la cabine de bord. Mais ce n’est pas tout : le vif mouvement de la voile a tordu les cordages que tendaient Kwasi, et il tombe à la renverse sur le pont, lâchant ceux-ci. La voile, libérée de son étreinte, se tend brusquement et, alors qu’un éclair déchire les cieux sombres, la toile se déchire en plein centre, claquant au vent comme des oripeaux. Blessé au bras, je voix Kwasi s’approcher de moi en se tenant le biceps : la corde a arraché un morceau de peau en claquant, brûlant une partie de son bras à cause de la vitesse de frottement. Forçant sur la barre claquant frénétiquement sur la paroi, nous parvenons finalement à la récupérer, et alors que Nektanebo abat ce qui reste de voilure, je me précipite vers la cabine, trempée de pluie et des vagues passant par-dessus le bord.

Ouvrant la porte à la volée, je constate que la voie d’eau est effective et importante : le silnogure patauge déjà dans un mètre d’eau. L’embarcation ne tiendra plus longtemps la route. Il se précipite sur le pont, et je referme la porte, alors que Nektanebo me tend une rame de secours, en agrippant lui-même une pour lui.

C’est ainsi dépareillés que nous parvenons finalement à nous mettre à l’abri du grain en entrant dans la crique. Tout mon corps me fait souffrir, à force de ramer. Mes muscles me brûlent, mes mains chauffent sous les frottements du bois, et s’irritent. Mes mâchoires crampent à force d’être crispées. Et l’humidité ayant pénétré jusqu’au plus profond de ma chair n’est en rien pour arranger la chose. Je ne suis même plus bonne à penser, tant l’épuisement est présent. Tant l’accablement moral est fort. Le Nennlartëa est à mon côté, me donnant des petits coups de tête et de langue comme pour m’inciter à tenir bon. Machinalement, je rame, soutenant tant bien que mal le rythme de l’adolescent, habitué à des manœuvres de ce genre, que je soupçonne lui-même de ralentir sa cadence potentielle pour ne pas trop m’accabler. C’est ainsi, sur un rafiot prenant l’eau, à la voile déchirée, que nous parvenons à accoster finalement. Le voilier s’échoue sur une plage de sable gris, et si le ciel nocturne est toujours couvert, la pluie et le vent semblent s’être calmés, comme si les éléments nous accordaient finalement notre arrivée sur l’Île, laissant à ses propres dangers le soin de nous achever.

Je m’empresse de quitter l’embarcation pour fondre sur la terre ferme. J’ai l’impression que je ne l’ai plus touchée depuis des lustres. J’en ai presque la tête qui tourne, à avoir l’impression de tanguer encore. Un malaise qui disparait en quelques minutes, alors que les deux hafizs ont commencé à sortir du bateau les denrées les plus précieuses pour l’établissement d’un campement d’urgence, au moins pour cette nuit. Les voyant faire sans sembler s’inquiéter du sort d’Aliéron, je m’insurge :

« Mais… Qu’est-ce que vous faites ? On doit partir à la recherche d’Aliéron ! Il est peut-être en danger. Il a peut-être besoin de nous ! »

Les deux s’échangent un regard, et Kwasi laisse tomber au sol ce qu’il transportait pour s’approcher de moi. Dans la nuit, j’ai du mal à distinguer son expression, mais il ne semble pas sourire. Il est ferme, et direct.

« Il peut aussi tout aussi bien être déjà mort. À la faveur de la nuit, nous n’arriverons à rien, de toute façon. Rien n’indique qu’il ait atteint l’île, ni qu’il ne soit pas simplement noyé en mer. À l’aube, nous chercherons, mais d’ici là, personne ne s’éloignera de cette place. »

Je le regarde, un air de défi au fond des yeux, mais il ne semble pas ouvert au dialogue, et me tourne le dos aussitôt pour recommencer à charrier un sac de denrées. Faisant la moue, je me retourne vers Nektanebo, qui est en train de ramasser du bois flotté pas trop mouillé pour tenter d’allumer un feu. Un couinement attire cependant mon regard sur le Nennlartëa, qui reste immobile, oreilles dressées, yeux perdus fixement sur un point éloigné. Aux aguets. Je l’approche, m’accroupis près de lui, et en prenant sa tête contre mon épaule, je lui murmure :

« Qu’as-tu ? Toi aussi, tu veux retrouver Aliéron, hein ? »

Il geint de plus belle, et semble prendre ma question comme une proposition. Tout d’un coup, il se met à galoper vers une extrémité de la plage. Ni d’une, ni de deux, je me lance à sa poursuite sans hésiter un instant, coiffant au poteau les deux membres restants de notre petit équipage. Je suis déjà loin quand j’entends derrière moi Kwasi crier mon nom dans la nuit.

Le Nennlartëa m’emmène à sa suite, m’attendant quand je ne parviens plus à le suivre. Longeant la côte, passant outre la plage de sable pour nous retrouver dans un chaos de rochers bordant les falaises aperçues plus tôt, nous progressons lentement : il serait bête de se tordre une cheville et de tomber entre les rocs acérés. Mais désormais, je sais ce qui l’a poussé à courir de la sorte : au loin, j’entends des jappements plaintifs, des cris. Un appel dans la nuit. Il ne fait aucun doute qu’il s’agisse du silnogure d’Aliéron. Et si lui a survécu, peut-être le semi-elfe également… Investie de cet espoir, renforcée par lui, je poursuis inlassablement ma poursuite, jusqu’à arriver à vue de l’origine des bruits. L’Aurëlartëa est là, en bordure de mer, sur un roc incliné sur lequel il semble avoir charrié un corps inconscient, masse sombre sur le gris non moins nocturne de la roche. Sans plus de prudence, j’accours vers la silhouette dont les jambes sont encore dans l’eau.

« Aliéron ! »

Aucun doute possible, c’est bien lui. Mais il n’a pas l’air dans un bel état. La conscience l’a abandonné, et il semble réellement entre la vie et la mort. Je plaque mon oreille sur son torse meurtris, et y entends avec soulagement le son de son cœur qui bat. Faible, ténu, mais présent tout de même. Il est vivant. Sans hésiter une seconde, je le hisse davantage hors de l’eau et l’allonge sur le dos, m’agenouillant à son côté. Mes mains caressent son visage, sans savoir quoi faire. Je grimace, perdue.

Puis, du fond de ma mémoire me reviennent les lointaines leçons de premier secours de mon précepteur. Que diable n’ai-je pas été plus attentive et assidue à suivre ses enseignements ! Je me rappelle néanmoins des quelques gestes qu’il exerçait sur un mannequin en bois, et de quelques paroles fort utiles dans la situation présente. Comme pour me donner une contenance, je les cite moi-même tout haut, en singeant les gestes qui me reviennent au fur et à mesure.

« Pour secourir un noyé, il faut faire sortir l’eau de ses poumons. Et pour ça… »

Mains sur le torse, un détail me revient : il faut lui faire le bouche à bouche. Je me souviens de mon frère et moi, qui à l’époque avions ricané devant cette pratique. Je m’étais alors promis, écœurée, que jamais je ne pourrais la pratiquer. Voilà de quoi lourdement me détromper. Entrouvrant légèrement ses lèvres, j’approche ma bouche de la sienne et l’y colle pour y faire entrer de l’air. Je m’écarte, surprise de la douceur ressentie par ce contact pourtant tout sauf intéressé, et lui applique les mains sur le poitrail pour pousser à un rythme cadencé, sans toutefois lui défoncer les côtes. Ne voyant aucune réaction, je réitère mes gestes dans le même ordre. Et une troisième fois, et une quatrième. Ce n’est qu’au bout de la septième qu’un événement se déclenche, avec une toux secouée. ALiéron tousse, se plie sur le côté et crache l’eau qu’il a ingurgitée. Il vomit de l’eau de mer, et s’écroule à nouveau sur le dos, yeux entrouverts. Je le fixe sans vraiment l’apercevoir. Il fait vraiment noir. Mais l’éclat de ses yeux luit en un reflet fugace auquel je m’accroche pour lui décocher un sourire. Il est sauvé. Temporairement, du moins.

Mais à peine l’ai-je pensé qu’il referme les paupières et sombre de nouveau dans l’inconscience. Je ne peux décemment le laisser là, ni passer la nuit ici à son côté. Je commence moi-même à grelotter de froid, détrempée que je suis. Si les journées sont douces, voire chaudes, les nuits restent fraiches, surtout quand on vient de se faire rincer par une tempête. Il faut que nous rejoignions le campement. Alors, sous le regard attentif des silnogures, qui ne peuvent guère m’aider dans cette tâche, je prends mon courage à deux mains, et mets une nouvelle fois mes muscles douloureux à rude épreuve pour traîner Aliéron à ma suite. Le saisissant sous les aisselles, je le soulève partiellement pour le mener de rocher en rocher. Je l’aurais bien pris sur mon dos, mais je n’ai pas assez de force. Pas assez de muscles. Ni d’énergie.

Elle vient d’ailleurs à me manquer, quand le cœur au bord des lèvres sous l’effort fourni, je manque moi-même de tourner de l’œil. Je n’atteins la plage qu’au bout de longues minutes de difficulté sans cesse croissante. Je n’en peux littéralement plus. Des larmes d’épuisement perlent au coin de mes yeux et dévalent mes joues. Mes muscles tremblent, prêts à lâcher à tout moment. Mon seule repère est le feu qui brille sur le centre de la place, là où le navire, ombre noire sur le sable, s’est échoué. Souffle court, vue troublée, je ne perçois même plus rien quand soudain, des pas pressés me rejoignent. Kwasi, alerté par les silnogures, est venu à ma rencontre. Sans un mot, il s’accapare le corps d’Aliéron et le hisse sur ses épaules sans ménagement. Il se dépêche alors de rejoindre le campement, d’une foulée rapide que je ne parviens pas à suivre. Épuisée, je m’effondre sur le sable, à genoux. J’ai réussi. Il est sauf. Qu’importe mon état, désormais. Aussi, contente de cette pensée positive, je trouve en mon corps la dernière étincelle d’énergie pour me hisser sur mes pieds et, d’un pas titubant, rejoindre le feu de camp.

Ils ont installé le campement pendant mon absence, et réussi à allumer une bonne flambée dont la chaleur brulante à elle seule est revigorante. Ils ont déposé non loin le corps d’Aliéron, et arrivée à portée, supportant sans ciller le regard accusateur de Kwasi, à la blessure au bras à peine bandée, je m’allonge à mon tour, sombrant vite, trop vite sans un sommeil nécessaire.

Je me réveille peu avant l’aube, alors que le ciel se pare de jolies couleurs. Il est dégagé, comme si les nuages avaient fui à la faveur de la nuit. Si Kwasi dort, Nektanebo semble avoir veillé une partie de la nuit pour entretenir le feu et surveiller le campement. J’en déduis qu’ils se sont relayés. Égoïstement, je n’ai fait que dormir. Quand je croise son regard, fatigué mais souriant malgré tout, je lui indique ma place chaude et il s’y glisse alors que je me lève. Mes habits sentent la fumée, le feu, mais ils ont eu l’occasion de sécher. Je n’attraperai pas la mort, j’espère.

Le hafiz sombre rapidement dans le sommeil, alors que j’ajoute un morceau de bois dans le feu. Ils ont constitué, pendant mon sommeil, une petite réserve confortable. Aliéron ne semble pas s’être encore éveillé. Je m’agenouille à son côté, comme la veille pour le sauver, et débouche ma gourde pour verser un peu d’eau fraiche sur son visage endormi, la laissant doucement filtrer entre ses lèvres.

Et à l’instant précis où le soleil perce l’horizon, deux opales d’un bleu des plus purs s’ouvrent à mes yeux.

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 Sujet du message: Re: L'île Interdite
MessagePosté: Mar 26 Avr 2016 23:24 
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Je reste aux côtés du demi-elfe alors qu’il s’éveille petit à petit. Nous sommes vite rejoints par son compagnon, l’Aurëlartëa, qui a sans doute veillé plus que moi sur Aliéron, cette nuit. Il gratifie le hafiz d’adoption par de joyeux coups de langue. Lui aussi est content de le savoir en vie. De le voir en vie. Assise à son côté, je lui laisse le temps d’émerger, alors que derrière les cieux s’éclairent de l’aube grandissante, alors qu’un soleil de feu perce l’horizon désormais calme, niant toute tempête de la veille comme si elle n’avait jamais existé. Ironie.

Quand il parle enfin, c’est avec insouciance et humour, précisant qu’une telle baignade revigore un homme. Un maigre sourire amer couvre mon visage. Le revigorer, j’en doute. Il a failli y laisser la vie. Par la faute de cette tempête, par la faute de cette expédition. Par ma faute. Pourtant, il n’en semble pas inconscient, et alors qu’une ombre passe sur son propre regard, il me remercie plus solennellement sans doute qu’il l’aurait voulu. Il ne s’y attarde guère, et n’ayant rien à répondre, je me contente d’opiner du chef alors qu’il se tourne vers les deux autres. Je ne peux m’empêcher, même si je les crois foncièrement heureux de savoir Aliéron sauf, de leur tenir rigueur de leur immobilisme de la veille. Si jamais écouté Kwasi et que je n’étais pas allée directement à la recherche de mon compagnon, suivant tant mon instinct que les sens développés du Nennlartëa, il serait sans doute mort à l’heure qu’il est. Je n’en dis cependant rien. Ce n’est ni l’endroit, ni le moment d’évoquer ça. Loin de vouloir me vanter qu’il me doit sans doute la vie, je ne veux pas qu’une tension inutile naisse dans notre petit groupe.

Au loin, sur la plage, je vois mon silnogure dévorer avec cœur un poisson qu’il a sans doute été pêcher dans les flots calmés d’une mer matinale. Et j’en sens moi-même gronder mon estomac. Il a bien fait le vide, la veille pendant la traversée, et je n’ai rien avalé de consistant depuis. La faim est présente, indéniablement, et je sais que la tempête et notre naufrage n’a guère laissé énormément de vivres consommables, dans ceux que nous avions prévus pour l’expédition. Nos réserves personnelles sont intactes, mais les communes ont été partiellement baignées dans l’eau de mer. Des miches entières de pain et de biscuits de voyages ont dû être jetées, plus bonnes à rien. Aliéron en a-t-il lui-même conscience, alors que je le vois dévorer à pleines dents ses rations. Peut-être pas. Ce qui est certain, cependant, c’est que nous n’irons pas loin dans notre recherche de mon frère avec le ventre vide. Aussi, je l’imite rapidement, dévorant à mon tour des lambeaux de viande séchée avec une tranche de pain, l’appétit retrouvé.

Assez vite, Aliéron propose de s’organiser pour commencer les recherches. Pour l’instant, à part la confirmation qu’ils ont bien débuté le trajet pour venir sur l’île, nous n’avons aucune information, ne sachant même pas s’ils sont parvenus à la rejoindre. Il ne perd pas le nord, ce hafiz. Il propose que lui et moi nous séparions pour la journée afin de longer la côte pour retrouver des traces de leur débarquement, pendant que Kwasi et Nektanebo s’occuperont de réparer notre embarcation, nécessaire au retour à Kers, une fois l’expédition ayant porté ses fruits. Tout le monde acquiesce le plan, et les deux marins précisent que la durée des réparations, reprisage de la voile et colmatage des dégâts dans la coque, pourraient prendre plusieurs jours. Nous serons donc en duo, avec les silnogures, pour explorer cette fameuse Île Interdite, et braver ses nombreux dangers. Un semi-elfe et une chasseresse expérimentée. De quoi garantir une progression discrète et avisée dans ces bois inconnus sans doute peuplés de dangers. Des bois comme je n’en ai jamais vus, avec des plantes au feuillage clair, vert vif, et des arbres à la fois hauts et touffus. Une densité impressionnante de végétations à toutes hauteurs, que ce soit les buissons couvrant le sol ou les lianes reliant les arbres entre eux, jusqu’à la haute et épaisse canopée.

Et encore, je n’y ai pour l’instant pas mis les pieds.

Il ne sert plus à rien de s’attarder trop longtemps. Très vite, nous sommes prêts au départ, et partons chacun de notre côté. Aliéron partira vers le Sud, vers là où je l’ai moi-même retrouvé la veille, et j’irai au nord, vers l’extrémité de la plage que je ne connais pas encore. Vers là où reste toujours mon silnogure, qui lorsque je passe à portée relève sa tête aux yeux céruléens vers moi, curieux, et se met à me suivre avec insouciance.

Le plan d’Aliéron prévoit que nous nous retrouvions le soir-même au campement pour dormir sur place. Pour ça, nous marcherons chacun de notre côté jusqu’à la mi-journée, suite à quoi il nous faudra rebrousser chemin pour retrouver le camp et rendre notre rapport d’investigation au groupe. Simple, précis, mais qui reste toutefois problématique si nous ne trouvons rien à la mi-journée. Comment œuvrerons-nous, alors ? En pénétrant dans les terres à l’aveuglette et en espérant dénicher des traces du passage de l’équipée de mon frangin ? Ce serait à la fois risqué et vain. L’île, de ce que j’ai pu voir du navire, est grande. Retrouver un groupe de chasseurs de trésors là-dedans, c’est peine perdue. Surtout vu la densité de la végétation. Non, je ne vois aucune autre solution que de contourner l’île, toujours plus loin, quitte à dormir isolé une nuit… Une chose non moins risquée, en vérité. Quoiqu’il en soit, nous n’en sommes pas encore là, et c’est pleine d’’espoir que je poursuis la marche.

La plage sur laquelle nous sommes arrivés ne cache, sans grande surprise, aucun indice sur la présence de nos disparus. C’aurait été trop beau, bien sûr. Comme la veille, l’anse est bordée de rochers, qui coupants, qui glissants et recouverts d’algues détrempées, sur lesquels je m’aventure d’un pied assuré, mais prudent. Je ne cherche pas bien longtemps des indices ici, me contentant d’observer vite fait le rivage chaotique en espérant n’y trouver aucune trace d’un second naufrage.

Aux rochers se succèdent petites plages, nouvelles zones rocheuses, falaises que je suis obligée de contourner pour ne pas me baigner contre mon gré dans les eaux bordant l’île, sans toutefois m’enfoncer dans l’île plus profondément. Ma progression est lente, dans ces décors sauvages et dangereux. Le soleil tape dur sur ma peau habituée à des climats plus hospitaliers, et je sens ma sueur piquer mon visage de fines gouttelettes. J’accroche mes cheveux, véritable crinière, derrière ma nuque pour qu’ils ne me réchauffent pas plus. La matinée passe sans qu’aucune trace de visite ne soit découverte. Alors que le soleil est haut dans le ciel, signe que je dois faire demi-tour, je jette un regard derrière moi. Tout ce chemin pour rien ? Je m’y refuse catégoriquement. Et alors que je poursuis ma route malgré tout, le Nennlartëa piaille derrière moi, gémissant. Il sait, lui, qu’il faut faire demi-tour si nous ne voulons pas être piégés par la nuit sans avoir rejoint le camp. Il a raison, bien sûr… Mais nul n’a jamais su me résoudre à la raison. Alors ce n’est pas aujourd’hui que ça va commencer. De mauvais gré, il me suit quand même. Mais pas de bon cœur. Ça me rendrait presque coupable. Tellement, d’ailleurs, que je me justifie auprès de lui.

« Jusqu’au pic rocheux, là-bas. Puis on fait demi-tour. »

Effectivement, au nord d’une longue plage de sable fin se dresse un grand pic rocheux, pointe de roc affirmant sa présence comme un phare face à la mer. Je le rejoins d’un pas rapide, comme pour contenter le silnogure, et une fois arrivée là… je me rends compte que j’ai mille fois eu raison de suivre, une fois de plus, mon instinct.

Dissimulée derrière le pic, une nouvelle anse sablonneuse bifurquant vers l’est. Et au milieu de celle-ci, une forme que je ne reconnais que trop bien : celle d’une embarcation maritime. J’écarquille les yeux un instant, me frottant les paupières pour être certaine de ne pas me laisser abuser par quelque hallucination, mais non. La trace que nous cherchions. La voilà. Revigorée de nouvelles forces, je me rue vers le lieu où elle est amarrée, mais, à mesure que j’avance, je déchante amèrement. Il s’agit certes d’une embarcation marine, très certainement celle qu’a empruntée mon frère, même, mais il n’en reste pas grand-chose d’intact. Et quand j’arrive sur les lieux, je ne peux que le constater avec fatalité : elle a été intégralement brûlée. Le bois la composant est calciné, carbonisé, prêt à tomber en cendres aux endroits les plus touchés.

« Non. Non, non, non, non ! »

Défaite, je ne sais plus où donner de la tête. Je regarde cette carcasse et ses alentours. Un tel feu n’a pas pu prendre naturellement. L’auraient-ils fait sciemment brûler ? Quelle mouche les aurait piqués ? Non, ça n’a aucun sens. La solution est ailleurs. Et alors que je sens la rage monter en moi, je perçois un indice implacable et terrible qui, malgré moi, me fait blêmir. Dans la coque calcinée du navire sont plantées des pointes de flèches en silex taillé. Les hampes ont brûlé avec le reste, mais en remuant les cendres et le sable tout autour, je parviens à en dégotter une intacte. Une flèche artisanale, faite avec des moyens simples : silex, bois taillé à la main, chanvre et plumes colorées. Elle provient de l’intérieur de l’île, à n’en pas douter. Et le constat terrible est fait : ils ont été attaqués. Par qui ? Par quoi ? Pour quelle raison ? Rien ne permet de le dire. Une tribu d’autochtones, vraisemblablement. Mais quelles sont leurs motivations ? Qu’ont-ils bien pu faire de ces hommes venus chercher des trésors oubliés sur cette île maudite ? Je rage de ne pas le deviner, serrant les poings de frustration. Et je sais que je ne peux poursuivre mes investigations, bien que le désir ne me manque pas : le soleil est déjà en train de descendre dans le ciel, et le silnogure inquiet couine de plus belle pour m’inciter à la raison.

Cette fois, soupirant, je lui accorde. Au moins ai-je trouvé une piste que nous pourrons exploiter dès le lendemain, avec Aliéron. Ce que je cherchais, au final, même si cette réussite me laisse saumâtre.

Je me presse pour rentrer, revenant sur mes pas, un chemin que j’ai déjà parcouru, et dont les difficultés me semblent plus accessibles, soudain. Et heureusement, car je gagne ainsi en retour le temps que j’ai perdu en poursuivant mon enquête sur la côte. Plus ou moins, en tout cas, car quand je rejoins le campement, exténuée de cette journée de marche et d’espoirs déchus, le soleil est déjà couché, et les trois sombres silhouettes de mes amis m’attendent autour du feu. Penaude, j’arrive près d’eux, consciente qu’ils ont pu s’inquiéter de ne pas me voir revenir à temps. J’attends cependant d’être installée pour leur révéler ce que j’ai trouvé, m’asseyant à leurs côtés en reniflant avec aise les poissons, pêchés sans doute par l’un d’eux, qui sont en train de griller, empalés sur un bâton tournant au-dessus du feu par l’action répétitive de Nektanebo.

J’ose à peine croiser le regard d’Aliéron, craintive d’y voir la lueur si caractéristique du reproche. Pourtant, je m’y contrains quand je commence à parler d’un air grave, plantant mes pupilles dans les siennes sans ciller, même si je n’en mène pas large.

« J’ai trouvé leur embarcation. Mais elle était calcinée, et criblée de flèches. »

Pour témoignage de ma découverte, je leur montre la flèche dégotée dans le sable. Kwasi la prend en main, grimace et la passe à Aliéron ensuite, alors que je poursuis.

« Je n’ai pas pu investiguer plus, il fallait que je fasse demi-tour. Mais ils ont certainement laissé des traces là-bas. Nous devrons nous y rendre dès demain pour ne pas qu’elles disparaissent. Aucun corps n’attestait la victoire d’un camp ou d’un autre, dans cette bataille. Je ne sais même pas dire s’il y a eu lute ou non. Les cendres étaient froides. »

Encore maintenant, je ne sais qu’en penser. Seraient-ils tous morts ? Je n’ose le croire. Peut-être mes compagnons pourront-ils m’aider de leurs lumières sur la situation. Sans attendre de réponse, néanmoins, je poursuis à l’attention d’Aliéron.

« Qu’as-tu trouvé, de ton côté, vers le Sud ? »

Rien concernant notre affaire, sans doute. Mais toute information est bonne à prendre.

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 Sujet du message: Re: L'île Interdite
MessagePosté: Jeu 12 Mai 2016 13:42 
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Bien qu’il n’ait pas découvert les traces de l’embarcation de ceux dont nous guettons les traces, menés, je l’espère, par mon frère, la prospection d’Aliéron a quand même été utile. Ainsi, il a croisé, outre un curieux lézard dont je ne connais le nom, et dont il ramène chair et œufs pour le dîner, des traces curieuses ressemblant à celles de worans, ces créatures humanoïdes très proches des tigres, lions et grands félins. S’il est persuadé qu’il s’agit de woran, et non de simples animaux aux larges coussinets, c’est dû à la présence de traces d’armes ou d’appuis non loin : lances ou bâtons, précise-t-il. Il émet l’hypothèse, plausible, que l’embarcation que j’ai découverte a pu être attaquée par ceux-ci, globalisant son argument en précisant que quoiqu’il en soit, l’île est habitée par des populations pensantes. Une bonne chose ou non, je l’ignore pour l’instant. La présence d’une civilisation peut être à double tranchant. Elle peut s’avérer accueillante et précieuse en information comme hostile et organisée pour la traque aux indésirables. L’un ou l’autre, je me sens tout de même de préciser :

« Je n’ai vu aucune trace de ce genre, de mon côté. Il n’y avait que des traces humaines. Mais peut-être, dans ma précipitation, n’ai-je pas fait attention. »

Quoiqu’il en soit, c’est notre destination pour le lendemain. Nous aurons tout le loisir de trouver les traces que nous cherchons, lorsque nous y serons tous deux.

Le repas se déroule dans un calme presque pesant. Chacun est harassé de sa journée : les deux Hafizs d’avoir commencé les réparations sur le navire, et amélioré le confort du campement, qui sera leur base pour plusieurs jours, et Aliéron et moi-même de notre périple explorateur. Seuls les deux silnogures semblent avoir encore de l’énergie, s’égayant de leurs retrouvailles en galopant sur la plage nocturne, au clair de lune, jouant tous deux comme s’ils s’étaient toujours connus. Je dévore un œuf saurien ainsi qu’un poisson grillé pêché par Nektanebo en les regardant, de loin. Je n’ai pas vraiment cœur à discuter avec les autres, l’inquiétude montant de ne pouvoir retrouver mon frère vivant sur cette île.

Lorsque vient l’heure de nous coucher, Kwasi indique qu’ils se répartiront à deux les tours de garde, Nektanebo et lui, pour nous permettre de passer une nuit complète. Nous en aurons bien besoin, le lendemain. Sans demander mon reste, je m’installe à la chaleur du feu, me couvrant d’une couverture plus pour la forme que pour un réel confort. Le sable, par chance, n’est pas la plus désagréable literie lors d’un camping sauvage. Et fourbue, je ne mets guère de temps à m’endormir profondément, d’un sommeil sans rêve.

Ce sont les premières lueurs de l’aube, le lendemain, et le ressac d’une marée montante dont les vagues viennent clapoter sur la coque en bois notre embarcation naufragée, qui me tirent de ce sommeil réparateur. Mon compagnon animal, à qui je n’ai toujours pas donné de nom, contrairement à Aliéron avec le sien, s’amuse de mon éveil et vient m’accueillir de quelques coups de langue sur le visage, qui finissent de m’éveiller. Avant même de penser à déjeuner, j’ôte dans le silence du campement armures et équipements pour me retrouver en chainse de lin blanc cassé, sous-vêtement de rigueur pour masquer aux yeux indiscrets ma nudité. Ainsi vêtue, je m’avance dans la mer, y trempant d’abord mes pieds nus, et laissant la fraicheur de l’eau salée me surprendre. Prenant néanmoins mon courage à deux mains, afin de rafraîchir un peu un corps qui n’a que trop sué la veille, j’y avance jusqu’à mi-cuisses en soufflant. L’eau est fraiche de la nuit, même si plus chaude que celle de Yarthiss, indéniablement. Mais à peine m’y habitué-je que mon silnogure vient joyeusement patauger à mon côté, bondissant dans l’eau en m’éclaboussant de gerbes marines. J’en frissonne, et décide de passer le cap en m’immergeant complètement dans les flots, me laissant tomber vers l’avant tout en exécutant quelques maladroits mouvements de brasse. Lorsque la profondeur est idéale, je prends pieds et frotte ma peau pour exécuter quelques sommaires ablutions. Si je ne veux pas puer le fennec au bout de deux jours, j’ai plutôt intérêt à me tenir à une hygiène de base, fut-elle sommaire.

Ainsi lavée, je reviens vers le rivage, satisfaite, pour y voir les trois hommes partager le petit-déjeuner, surprenant leurs regards conjoints sur ma personne avec une insistance que je ne leur connaissais pas. Je ne me rends compte que trop tard, sortant des flots telle une naïade enchanteresse, que le lin, une fois trempé, est bien plus transparent que sec. Le rose me monte aux joues, et bien qu’offusquée, je ne peux leur en vouloir de lorgner ce spectacle involontaire, mais dont je suis unique responsable. Je me défile vite, rejoignant un endroit plus tranquille pour préparer mes affaires, enfilant mes bottes le temps que ma chemise reprenne sa teinte initiale en séchant un peu. Sans m’armurer totalement de mon équipement, attachant le tout en baluchon derrière moi pour laisser au soin du soleil de me sécher entièrement, je m’annonce prête au départ, et Aliéron me rejoint bien vite.

Sous un soleil sans cesse plus pénétrant, nous marchons le long de la plage et des rochers du bord de mer que j’ai empruntés la veille. La progression, en terrain désormais connu, est plus rapide, et je sers de guide improvisé à mon compagnon au sang-mêlé. Pour me couvrir du soleil, bien que je n’aie pas encore rééquipé mon pantalon de cuir ou mon surcot, j’ai placé sur ma léonine chevelure la capuche shaakt du désert de Sarnissa, censée me protéger des rayons dévastateurs du soleil. Son épaisseur, hermétique, pare mon visage d’une ombre agréable.

Lorsque le soleil a atteint son zénith, nous arrivons enfin en vue de la plage où, la veille, j’ai trouvé la carcasse calcinée et percée de flèches et lances du navire de Sihlaar. Au loin, je l’indique à mon compagnon, alors que le Nennlartëa emmène son compagnon en avant en de joyeux bonds joueurs. Alors que nous approchons des lieux, une sensation macabre me monte dans l’esprit, comme si tout courage m’abandonnait subitement pour me confronter à une dure réalité. Vu l’état de leur embarcation, il y a peu de chance qu’ils aient survécu. Ne fut-ce qu’un d’entre eux. Résignée, cependant, je serre la mâchoire pour me dire qu’il ne se laisserait pas laisser mourir comme ça. Pas sans me laisser un message, pas sans s’être battu, de toutes ses forces. Il a beau être bien plus citadin qu’aventuriers, Sihlaar n’a jamais manqué de ressources. Déterminée, je m’adresse à Aliéron.

« C’est là. Les traces ne sont plus fraiches, mais… on doit pouvoir trouver quelque chose. »

Et aussitôt, je me mets à chercher sur les traces confuses sur le sol sablonneux de la plage celles qui sauraient être pertinentes pour suivre la piste de ceux que l’on cherche. Dans un premier temps, j’essaie surtout de reconstituer la manière dont s’est déroulée la bataille… Un peu vainement, hélas. Ce qui est certain, c’est que les autochtones en sont vraisemblablement ressortis vainqueurs.

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Asterie


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