Perplexes, Keynthara et Kraemer se regardèrent sans comprendre. Ils avaient essayé de se montrer poli et on leur avait pourtant, en retour, répondu avec parfaite froideur. Il n’y eu pas d’au revoir. Les Zaistras étaient-ils si proches que le temps leur manquait pour saluer les personnes côtoyées depuis de nombreuses semaines déjà ?

« Surtout pas dire au revoir ! », déclara l’Aniathy, extrêmement vexée. Elle souffla fort pour exulter sa rancœur, mais le Shaakt s’en allait déjà dans la direction que les Seros avaient fuie, supposant que les Zaistras allaient surgir de cette partie du camp.

« Ouvre l’oreille et ferme ta bouche. Ça ne sert plus à rien, je suis désolé. Mais tu n’es pas toute seule, n’est-ce pas ? »

Le chevalier du chaos partageait la peine que la poupée ressentait, pour autant, il ne souhaitait pas l’exprimer. Ce fut donc simplement le ton de sa voix qui signifia son émotion, se voulant surtout rassurant pour une Keytnhara déboussolée.

Le temps ne manquait pas, vu la distance du bruit, les Zaistra's n'arriveraient au campement que dans plusieurs minutes. Le vent soufflait dans les branches bleues, faisant voleter les feuilles mauves, peut-être indice de l'automne comme le soulignait Faera dans l'esprit de Keynthara. Si c'était le cas pour la couleur des feuilles, le vent avait changé, d'une manière étrange. En deux mois sur ce campement, vous n'avez jamais senti le vent soufflé dans cette orientation. Celui-ci soufflait clairement du campement vers le chemin pris par les Seros.

Jet d'écoute pour Kreamer : réussite. Jet d'écoute pour Keynthara : échec

Kreamer semble tendu soudain. Il se retourne vers Keynthara et se fige. Il lui demande si elle aussi elle l'a entendu, cette voix dans le vent ? Elle disait qu'ils se reverraient, que c'était un au revoir, pas un adieu.

L’instant qui les séparait à la fois des Seros et des Zaistras semblait s’éterniser. Keynthara s’était figée pour tendre l’oreille, mais son attention s’était plutôt reportée sur les feuilles mortes bleues et violacées remuant dans l’atmosphère. Le vent qui s’était levé apportait effectivement le bruit des pas des robots approchant. Mais surtout, le Shaakt crut entendre une voix magique venue de partout et nulle part à la fois.

S’empressant de communiquer ce que son ouïe fine lui avait permis de capter à la Petite, il se boucha précipitamment les oreilles pour que ces mirages auditifs cessent immédiatement.

« Tu as dû rêver, ne te met pas dans cet état ! Tu sais, les ‘adieux’, les ‘au revoir’, c’est toujours la même chose. Tu as juste un peu de mal à t’y faire, avec tous ces changements en ce moment, voilà tout ! », chuchota calmement l’Aniathy, qui en avait profité pour retourner la situation.

« Allons, avançons sagement… », finit-elle par conclure en attrapant Kraemer par la hanche, tandis qu'il continuait à être raide comme un pic, crispé en tremblant de tout son corps imposant. Ils avancèrent alors en direction inverse du vent, la poupée, pleine d’excitation à l’idée de retrouver Shalyä, sautillant à intervalle régulier durant leur marche rapide.

« Bouche tes esgourdes aussi longtemps que tu le voudras, moi ça m’empêchera pas d’appeler tout fort les Zaistras ! »

Elle se mit alors à crier dans la forêt, la main en porte-voix pour se faire entendre, répétant toujours la même chose. L’elfe noir la laissa faire, bien trop préoccupé par le message venteux qui s’était insinué dans son esprit et qui, il en était persuadé, n’avait pas été qu'une hallucination.

« Shalyyyyäaaaaa ! T’es làààààààà ? C’est Keynthara et Kraemer, on est perduuuuu !!!! »

Il fallut guère de temps pour que les Zaistras apparaissent, mais ce n'était pas Shalyä qui leur tomba dessus, mais une armée complète, équipée d'armures transparentes ajustées à leur corps, d'armes rondes, tenant à peine dans leurs poings serrés:



Nul besoin de vos faeras pour vous avertir du danger, les traits de lumières fusent autour de vous : leur nature est similaire à ceux de Keynthara, ils sont fait pour blesser et pour tuer. Faera est manifeste cependant, ces traits n'ont absolument rien de magiques, ce ne sont pas des productions issues de fluides.

Les Zaistras avaient fini par faire leur apparition, un peu trop mouvementée et dangereuse au goût des deux acolytes. Ils se médusèrent alors en voyant les traits de lumière filer sur eux à toute vitesse. Lorsque ces derniers vinrent se ficher à quelques centimètres d’eux dans un tronc d’arbre mauve ou à même le sol, ils ne restèrent pas plus longtemps immobiles.

(Cachez-vous !), hurlèrent mentalement les deux faeras, respectivement abritées dans leur bijou. Elles ne craignaient pourtant rien de cette magie dont elles étaient en partie constituées, mais par contre, elles ressentaient la menace qui pesait sur Kraemer et Keynthara.

Les deux amis s’exécutèrent alors, disparaissant l’un et l’autre derrière deux gros troncs. Si l’Aniathy n’avait aucun mal à se cacher et se protéger de cette magie qu’elle connaissait bien, le Shaakt ne pouvait pas en dire autant, lui qui avait une imposante carrure. Il dut se plaquer au mieux contre son arbre en interrogeant du regard, silencieux, la Petite. Elle se trouvait à deux mètres à peine, si bien qu’il leur était néanmoins possible de discuter au besoin.

« Ils vont être sur nous d’une minute à l’autre… Et d'où sortent ces foutues armes magiques ? », lança la poupée en tremblotant. Elle ne comprenait pas ce comportement agressif et n’avait aucune idée de ce qu’il était le mieux de faire dans cette situation.

« Arrêtez de nous tirer dessus, Zaistras ! On est des gentils ! On a été capturés par les Seros ! Je suis comme vous, en plus petite ! Je veux voir Shalyä... »

La poupée se mit à pleurer sous le coup de l'émotion et passa alors la tête en travers du tronc d’arbre pour voir si les tirs avaient cessé. Seuls son beau diadème, quelques-unes de ses mèches fines et ses yeux bleus furent visibles pour les Zaistras guerriers attentifs.

Dès que la petite avait hurlé, les tirs avaient repris, non loin de vous, une des cabanes avait pris feu, colorant l'atmosphère d'orange et de rouge. Bien sûr, les Zaistras n'avaient pas pu entendre ni comprendre ce qu'elle avait crié.

Un tir venait d'ailleurs tout juste de toucher l'arbre derrière lequel Keynthara s'était caché. Celui-ci avait pris feu lui aussi, en fait, tout autour d'eux n'était que cendres ou flammes, à part les Zaistras et leurs peaux argentées sous les armures, Keynthara et Kraemer.

Kraemer avait été blessé, un trait de lumière venait de lui traverser l'épaule de part en part.

A travers ce chaos cependant, une voix familière surgit derrière Keynthara, mais ce n'était pas un Zaistra... mais Renarde sous sa forme animale.

"Vous suivre moi. Eux porter mort et flamme. Si vous retourner bâtiment dans la forêt, moi conduire vous. Mais vous pas rester village. Seule mort traîner ici !"

Désespérés, les Yuimeniens ne savaient plus quoi faire, dans cette situation qui semblait perdue d’avance. L’arbre de Keynthara avait explosé en mille morceaux enflammés et elle remercia Zewen d’avoir épargné la pauvre petite créature qu’elle était. Le Shaakt n’eut hélas pas cette chance et fut touché par l’un des tirs meurtriers.

La Petite était bien sûr capable de guérir très rapidement son ami, le problème était de savoir comment aller jusqu’à lui sans se faire blesser à son tour. La seule solution qui se présentait à eux à présent était de fuir à toute allure, mais où ? L’Aniathy voulut lancer cet ordre. Peu importait la direction à prendre, de toute façon, ils devaient juste s’éloigner de la redoutable armée de Zaistras. Mais au dernier instant, elle tomba nez à nez avec Renarde qui était, manifestement, revenue sur ses pas pour s’assurer que tout se passait bien pour eux. Sa présence était inespérée, car elle portait avec elle une solution intéressante : rejoindre le bâtiment de la forêt, qui devait, sans nul doute, être la maison de Shalyä.

« Alors on se bouge sur le champ ! Renarde, conduit-nous ! », cria Kraemer dans un rictus de douleur qui parvint à peine à couvrir le brouaha qui avait métamorphosé la forêt en une bien triste clairière ravagée. Il ne pensait à présent qu’à une chose, recevoir les soins magiques de la poupée qui tenta de rassembler ses fluides internes pour mobiliser son sort de guérison, bien que courir rendait les choses excessivement difficiles.

« Je fais... de mon... mieux... pour te soigner ! Tout ira bien... courage... »

Ce fut les seuls mots de réconfort que la Petite réussit à articuler. Son esprit était embrouillé par les émotions, la course et la concentration mélées.

Jet de soin magique : réussite

Malgré la course, tu parviens à focaliser ta magie suffisamment pour soigner Kraemer. Autour de vous, les attaques fusent, montrant la différence majeure entre leur puissance et la magie : eux n'ont aucune limite d'utilisation, ou s'ils en ont une, elle est bien plus haute que toutes celles que tu as pu voir.

(rendez-vous aux alentours de la ville)