Continuant de couper corde après corde, je vis Arhos se glisser entre Mahelen et moi, me disant : « Ne vous précipitez pas, je crois que notre ami Tuia a trouvé une bonne tactique » (Nôtre ami hein ?...) Je n’avais guère envie de m’arrêter, ayant mon plan en tête pour me sortir de cette « épreuve ». D’ailleurs quel étrange déroulement pour un « tournoi ». J’avais imaginé que les épreuves seraient plus actives et moins portés sur les énigmes comme ça se trouvait être le cas maintenant. Déjà nous avions passé la porte à force de réflexion et nous enchaînions avec cette situation grotesque qui ne requérait, apparemment, pas le moindre de mes talents. Heureusement peut être au vu des pulsions quelque peu bestiales qui me sautaient à la gorge sans crier garde. Enfin, maintenant, le grand blond bête me demandait de m’écarter… comme quoi le plan de Tuia serait meilleur que le mien… (Bien sûr qu’il l’est, il réfléchit lui, tandis que moi je fonce, je veux me sortir d’ici. Je veux retourner à Tulorim, y tuer, continuer mon apprentissage et mon entraînement…) La tentation de m’attaquer à Arhos me prit un instant. Durant une seconde, une très longue seconde, mes pulsions meurtrières se ranimèrent… moins bestial qu’avant néanmoins vu que j’arrivais à exercer un certain contrôle. Peut-être était-ce dû au fait que cette préméditation de meurtre soit du fait de ma pensée ; quoi qu’il en soit, j’envisageai la possibilité d’assassiner Arhos sous tout les angles possibles. Néanmoins, à chaque tentative, ce même instinct qui m’encourageait à tuer me soufflait qu’il fallait prendre garde cette immense épée noire. Finalement, je décidai qu’il ne servirait à rien d’attaquer dans ces conditions forts peu avantageuses où je me trouvais être blessé, seul contre deux, avec un adversaire dangereux de surcroit… nous avancions dans la même direction, donc pourquoi m’opposer à eux…
Je m’écartai quelque peu de la scène, rangeant mon wakizashi dans son fourreau orangé, puis j’observai tranquillement le déroulement du plan de Tuia avec intérêt. Le gnome passa devant la seconde humaine qui répondit d’un « oui » sonore. La troisième fit de même, puis, à mon grand dam, la quatrième, celle que j’avais commencé à libérer ultérieurement, répondit d’un déni tout aussi franc que surprenant… qu’avait-elle en tête ? Enfin, les cinquième et sixième répondirent elles aussi d’un « oui ». (Bon. J’avoue m’être trompé… Alors Tuia, quelle est la bonne ? ) En effet, les cristaux colorés avaient réagi de concert avec les voix des humaines, s’irradiant à chaque fois d’une teinte claire ou foncé, restant néanmoins dans le violacé. Le gnome devait avoir trouvé la solution car il affichait un immense sourire de contentement, regardant les humaines avec des yeux pétillants d’excitations. Ainsi, il revint se placer vers la troisième humaine, la contemplant quelques temps dans les yeux. Etait-ce donc l’originale ? Autant pour moi. Je vis donc l’agaçante petite créature se munir de l’arme de l’humaine pour se mettre à bûcher sur les liens qui la retenait, et se faisant, il lui soufflait quelques encouragements pour le moins inutiles. Quelques pensées s’animèrent alors en moi : l’origine de ce qui m’avait un peu « motivé » dans ce tournoi, ces mésaventures étaient dû aux promesses de l’assassin félon qui m’y avait entrainé, et ainsi que l’appât de quelques gains qui pour le moment n’avaient pas vu le jour. Je ne pouvais pas prendre les paroles de l’assassin au sérieux… non, je ne le pouvais pas. Mais tout de même, en réfléchissant clairement à tout ce qui était arrivé jusqu’à maintenant, y avait-il quelque chose qui m’avait fait progressé ? Non, rien. Il était vrai, cela dit, qu’il n’y avait guère de temps que cette aventure avait commencé… depuis combien de temps avais-je achevé mon combat avec Denin… quelques heures tout au plus. J’avais rencontré quatre singulières personnes avec lesquelles j’avais réussi à ouvrir une porte pour le moins complexe, et nous nous trouvions maintenant à la fin de cette seconde épreuve. Epreuve où ma participation et mon utilité furent aussi manifeste que l’intelligence de l’elfe blonde, personnage qui semblait d’ailleurs être en état de choc depuis que nous avions pénétré cette salle. Enfin bref, j’avais été inutile : même Arhos, l’animal de trait, avait montré quelques talents, de paysans certes mais indéniablement utiles, à porter celui sur lequel se portait ma suspicion. Celui à qui, à mon grand dépit, revenaient tous les éloges dans la résolution de cette énigme… Toujours en retrait, je ne pus que le regarder libérer celle qui était manifestement la véritable Mahelen qui, à peine libre, se mit à s’étirer de long en large, faisant circuler son sang et sortant ses muscles de leurs engourdissements. Ayant fini, elle répondit alors à la précédente remarque de Tuia avec une placidité qui ne laissait en rien penser qu’elle avait subi quelque chose d’extraordinaire. (Bien, alors avançons maintenant.) Et à peine la pensée était-elle nait en moi que le grand, le beau, le brave et blond Arhos l’avait traduite, puis il se tut, fixant le gnome et semblant attendre quelques directives de sa part, avec l’humaine. (Mais qu’est-ce que ? Tuia ? Chef de ce groupe ? Eh bien bas les masques dans ce cas) A peine voulus-je m’avancer pour l’invectiver à nouveau que j’entendis ce petit bout de rien du tout s’adresser à l’humain, disant que Meredith et moi-même étions « bizarres ». Il était vrai que je n’avais pas pipé ni bougé depuis quelques temps, me contentant de me confondre dans mes pensées et d’observer les actions de mes « compagnons ». Mais c’était à cause du certain malaise que je ressentais depuis que nous nous étions tous rencontré… oui, j’étais différent d’eux. Toute ma vie, avant que mon destin ne m’amène à entrer sur la Voie, n’avait été que rien, oui rien, et maintenant tout ce qui m’animait s’axait autour de l’art de tuer. Je ne m’en plaignais pas, mais je ne pouvais m’intégrer avec ces gens, même si je l’avais désiré, de par ce petit quelque chose en moi… cette boule sombre qui n’était en fait que ma nature d’assassin. Un assassin vit seul.
Je sentis mon visage s’assombrir, mes traits se durcissant tandis que mes paupières se plissaient autour de mes yeux de braises. Je venais de prendre conscience d’un élément fondamental de ma vie, la solitude, et l’émotion chaotique qui menaçait de me submerger m’obligeait à voiler mes traits. Ce fut à travers une vision sombre et floue que je vis Tuia découvrir le mécanisme d’ouverture de la porte, une des rares choses pour lesquelles j’aurais pus avoir quelques mérites, puis appelé la fille pour quelle ouvre l’immense battant. Pendant ce temps, mon cœur s’était glacé tandis qu’au fond de moi quelque chose s’était cassé… mon enfance, ma candeur, ma naïveté… Certes je passerai du temps avec mes maîtres, certes j’apprendrai encore d’eux, certes je me ferais peut être des intimes que je pourrais élever au rang d’ami, mais pour la majorité de l’existence qui suivrait, je serai seul. Je me souvins alors du sixième conseil que m’avait donné Ethernia, de prier le dieu de la mort… et je me mis à prier, sans sortir de ma posture. (Phaitos, mon dieu, je suis Kal votre serviteur. Suivant la Voie qu’Ethernia m’a enseigné, je vous demande aujourd’hui de m’apporter votre force car mon cœur est ceint par d’effrayants ténèbres… les ténèbres de la vérité. J’ai pris conscience que vous servir, ô mon dieu, reviens à m’enchaîner des liens de la solitude et cette révélation trouble mon âme. Aidez, ô mon maître, votre humble serviteur.)
Je n’attendais rien de cette prière mais le simple fait de m’être confessé à mon dieu m’avait sorti de ma torpeur maladive, me permettant de me rapprocher du petit être. Je m’étais soudainement rendu compte que je n’avais plus rien à lui reprocher. S’il voulait se cacher, qu’il le fasse, je n’en avais cure, il vivrait sa propre vie comme je poursuivrais ma voie. Néanmoins j’avais une question à lui poser, et, attendant qu’il finisse de poser la sienne à l’une des copies de Mahelen, je lui demandai d’une voix que je ne me connaissais pas… sombre que calme et pesante : « Tuia. Puis-je, s’il te plait, te poser une question ? Comment as-tu su discerner la vraie des fausses ? »
(((Prière à phaitos comme action)))
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-Nous, assassins, ne rendons de culte qu’a Phaitos, le dieu de la mort.
-Pourquoi lui rendre un culte ? -Il est le dieu de la mort et nous la semons. Nous sommes ses envoyés.
Dernière édition par Kal le Ven 1 Oct 2010 01:02, édité 1 fois.
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