La dague du voleur brisa le crane de son agresseur dans un bruit sordide... mais qui sonna pourtant comme une libération aux oreilles du voleur: À l'instant même ou il perçut l'impact dans son bras, il sentit également la mâchoire du dément lâcher prise, et il put dégager son bras meurtri de son étreinte cannibale, tandis que le corps sans vie du fou s'écraser à ses pieds sans même un dernier soubresaut.
La douleur de son bras était lancinante, et bien que le sang s'arréta rapidement de couler, ce que Rasliak découvrit ne lui rendit pas le sourire... La plaie était moche à voir: rouge et déjà boursouflée, et surtout très sale... Les dents de l'homme avaient déposé une épaisse couche noire dans la plaie, sans doute la crasse accumulée depuis qu'il était bloqué ici... Avisant les chicots en question, il retint un flot de bile qui remontait son œsophage: effectivement, il y avait là de quoi donner des cauchemars à n'importe quel arracheur de dent d'Imiftil!
(Je sais pas si c'est mon estomac qui devient de plus en plus fragile, mais ça fait quand même un bon paquet de fois que j'ai envie de vomir depuis que le verdâtre m'a expédié ici... Raaah, ça fait mal c'te saloperie! )
Et sans rien pour nettoyer et désinfecter la blessure, cela sentait l'infection assurée... Poussant un grognement de désapprobation, il écarta du pied le cadavre pestilentiel qui gisait à terre et, serrant son bras blessé en un garrot de fortune pour cesser définitivement toute hémorragie, se tourna vers Gwaë.
La situation eut-elle était autre, Rasliak aurait éclaté de rire: le visage de l'elfe était déformé par une moue de dégout profond à la vue de l'homme, dont l'immobilité funèbre faisait ressortir toute la laideur. Cependant, elle reprit bien vite contenance, examinant sans bouger et rapidement la gravité de la blessure du voleur. Son changement d'expression ne rassura pas Rasliak, et le conforta dans ses propres craintes: si la blessure en soi n'était pas bien grave, le risque d'infection lui... enfin, pouvait-on encore parler de risque pour décrire une quasi-certitude? À moins de nettoyer la plaie, difficilement réalisable sans alcool ni eau, il finirait par perdre l'usage de son précieux bras... Il fulminait intérieurement, rageant que Rose et les seaux contenant le liquide salvateur ait disparu dans la salle précédente.
(C'était bien la peine que Zazrick... non, Karzik, nous file de l'eau si c'est pour qu'on se sépare au moment où j'en ai besoin! C'est bien ma veine tient...)
"Tout va bien?"
Rasliak leva les yeux, et hocha de la tête pour la rassurer. Il craignait de trahir la douleur qui lui perforait l'avant bras s'il disait quoi que ce soit... Et quoiqu'il douta qu'elle s'inquiéta réellement pour lui, il ne tenait pas à l'effrayer... Elle devait simplement redouter de se retrouver seule dans des lieux aussi peu hospitaliers. Après tout, lui non plus n'aurait pas apprécié se retrouver isolé ici-haut avec l'autre fou quelques instants plus tôt... Serrant les dents, il la remercia brièvement.
" Merci pour ton aide pour dézinguer ce fou... J'aurais pas du essayer de négocier, j'ai toujours été un piètre diplomate... Je pensais qu'avec un fou à lié ça passerait, mais faut croire que je ne serais même pas capable de convaincre un ivrogne de boire un coup..."
Acceptant le mouchoir qu'elle lui tendait, Rasliak entreprit de nettoyer sa plaie... ce n'était pas facile: il lui fallait enlever le plus du tartre noirâtre dont l'avait gratifié le machabé possible, mais chaque fois que le mouchoir entrait en contact avec sa plaie, il devait retenir un hurlement de douleur... Cela pouvait semblait peu viril, et encore moins héroïque, mais après tout, s'il avait choisi la voie du larcin et de l'assassinat, ce n'était pas pour se confronter à la douleur du quotidien des guerriers. Certes, il n'aimais pas souffrir, mais quel homme jouissant de ses pleines facultés mentales - à l'inverse de ces barbares dont les cerveaux finissent atrophiés à force d'accuser les coups de masses qu'on leur expédie - aurait pu affirmer le contraire? Toujours n'est-il qu'à force de patience et d'acharnement, il fini par parvenir à nettoyer le gros de sa blessure... Le mouchoir de Gwaë, par contre, ne pourrait plus servir à rien qu'à récurer les latrines... N'envisageant même pas de lui rendre dans un tel état, il le laissa tomber sur le visage du cadavre gisant encore à ses pieds... Il était déjà beaucoup plus agréable à regarder lorsque l'on n'était plus obligé de contempler son visage! Arrachant un pan de sa tunique, il s'en servi pour envelopper sa blessure, la protégeant de manière fortuite de la poussière et de l'atmosphère insalubre des lieux...
Son manège achevé, il leva la tête et prit le temps d'observer plus en détails la pièce où il se trouvait... Gwaë était accroupi au bord du puit par où ils étaient montés, et il comprit qu'elle devait être en train de récupérer son grappin.
(Elle fait bien, ça pourrait nous être utile... Malheureusement, je pense pas qu'on puisse atteindre ce second conduit... Ça nous laisse la porte.)
Observant le reste de la salle, il ne vit rien d'utile: le sol était jonché de petits ossements et de morceaux de fourrures, sans doute les restes des maigres repas de l'ancien "locataire" de la pièce... Soupirant, quelque peu las et fourbu par ses péripéties les plus récentes il commença à arpenter la salle, à la recherche de quelque objet utilisable. Mais mis à part les os et les restes, rien ne lui apparut comme tel...
(Bon, bah il reste que la porte hein...J'espère qu'elle s'ouvre simplement en poussant... Et je me demande ce qu'il a voulu dire par: Je n'y retournerais pas... ? Je pensais qu'il voulait nous bouffer pour avoir la force d'y retourner justement? Enfin bon, il était fou après tout... Mais ça présage rien de bon tout ça... Comme d'hab, reste sur tes gardes mon bon vieux Ras... Et puis arrête de te parler à toi-même.)
Avançant jusqu'à la porte, il en détailla l'encadrement... Celle-ci était très fortement similaire à la première porte qu'ils avaient du franchir à l'aide des 4 mécanismes... Sauf qu'ici, il n'y avait rien qui suggéra qu'il faille faire autre chose que pousser, comme leur avait indiqué le fou...
(Je me demande... Ces portes sont peut-être un moyen de savoir qu'on est sur le bon chemin? La première fois, on avait pas le choix donc c'était forcément la bonne voie... Cette fois-ci, cette porte est peut être simplement un signe qui vient conforter notre choix... Donc derrière, c'est sans doute une nouvelle épreuve qui nous attends... Et pas des moindres: si le fou avait préféré s'enfermer ici à attendre de mourir de faim, c'est sans doute que ça ne rigole pas derrière... Je me demande depuis combien de temps il était là ?...)
Sans plus de détours, recentrant ses pensées, qui commençaient à s'égarer, sur sa situation présente, il posa les deux mains sur un pan de la porte, et, prêt à réagir au moindre phénomène suspect, entreprit de l'ouvrir.
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Watch the shadows, watch the walls, For there he lurks, and there he crawls His dagger quick, his dagger sly, To cut your throat, to pierce your thigh.
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