Tous dans la Salle Gemme suivent avec beaucoup d’intérêt les plaidoiries des deux avocats improvisés, même s’il est claire que Maître Ezak a une plus grande expérience du métier et descend en flèche celle qu’il pense être la traîtresse. Il est vrai que les accusations de Tathar ne semblent pas vraiment fondées, et n’expliquent en rien pourquoi Amaltia serait la traîtresse. Alors, Naral Shaam regarde l’elfe grise avec un regard inquisiteur, fixe et froid, sévère. Raesha, trop faible, et blessée, ne peut qu’abandonner le combat. Elle prend la parole d’une voix faible, noyée de pleurs, et des larmes de rage coulent le long de ses joues argentées.

« C’est moi qui les ai tués… Ezak est perspicace, je ne pensais pas avoir laissé tant de traces derrière moi. Il a raison. Si je tuais l’entourage de Naral avant, j’aurais eu plus facile à l’éliminer, lui. Il a tué mon frère, il ne mérite que la mort ! C’est lui le traître à ses principes, le parjure, l’assassin ! Je voulais venger mon frère… Tout ça est de sa faute ! »

Naral, plus glacial qu’une tombe, sourit narquoisement face à ses révélations, et se contente de hocher de la tête en tournant son visage vers Tiniis, qui sans hésiter, obéissant au doigt et à l’œil de son maître, dégaine son sabre en s’approchant de Raesha, qui ne peut plus réagir, trop faible pour ça… Alors qu’il lève son arme pour mettre fin aux jours de la Sindel vengeresse ayant trouvé un peu de réconfort sur la mort de son frère dans les bras de Tathar, Maxanisth hurle son désaccord.

« NON ! Ne faites pas ça !!! »

Mais trop tard. La lame s’abat sur le corps frêle de la jeune elfe, qui meurt sur le coup, sans un cri, avec juste un dernier regard rempli de haine envers Naral Shaam. Raesha a échoué dans sa mission : venger son frère du meurtre de Naral… Elle n’était pas assez forte, ni assez soutenue pour réussir dans cette entreprise qui la dépassait. Ainsi disparait une meurtrière au mobile noble, mais aux actes odieux. Ses lames à jamais marquées du sang de ses victimes marqueront à jamais l’aveuglement que lui a apporté la haine. Car pour venger une mort, elle a tué de nombreuses fois…

Maxanisth semble totalement dépité face à ce qui vient de se passer, et se tourne vers Naral avec un air effrayé, alors que Tiniis nettoie sa lame du sang d’une elfe de sa race…

« Naral Shaam, vous êtes un monstre ! De tous les jugements hâtifs que j’ai pu observer, c’est celui-ci le plus cruel, et la sanction que vous lui intimez n’est pas digne de vous. Vous n’étiez pas comme ça, autrefois… La magie sombre de ce temple a-t-elle tant noirci votre esprit ? »

« Ne soyez pas si prompt à me juger, Maxanisth. Hihihi. Il y a assez d’un traître à éliminer ici. Nous ne pouvons nous permettre de nous mettre tous en danger. Si ce temple a obscurci mon âme, c’est uniquement par le désir de vengeance contre Mongoor, lui aussi traître. Si je suis rentré chez les Disciples, à l’époque, c’était seulement pour obtenir une couverture qui m’a permis de subtiliser la pierre précieuse de ce démon. C’est à cause de ça que j’ai perdu ma sœur, Amaltia, qu’elle m’a renié. Mais je ne pouvais l’éliminer seul. Vous m’y aiderez, compagnons. C’est pour ça que je vous ai tous appelés à me suivre, même s’il n’en reste que trop peu. Marchons contre Mongoor, maintenant. Marchons pour le tuer, et vous aurez la récompense promise. J’ai fait trop de sacrifice pour que cette entreprise s’arrête ici... »

Puis il se retourne vers le socle au centre de la pièce, parlant sans viser personne.

« Quelqu’un aurait-il la bonne idée d’ouvrir cette porte ? »

Maxanisth, lui, s’est dirigé près d’Amaltia et lui octroie de sa grâce divine un sort de soin pour guérir ses blessures. Mais l’elfe au regard de feu semble en état de choc quand aux révélations de son frère, et son air hautain et sur d’elle est soudainement déconfit, dubitatif. Elle n’ose rien dire, se relevant juste, belle et provocante dans sa robe déchirée et trop courte…


((( Ezak: Félicitation, superbe analyse des maigres indices que je vous ai laissé. Ton développement est très précis et bien réfléchi, ce qui t'octroie 1XP bonus, comme l'indique ma règle. )))

Un coup de poignard, c’est exactement la sensation qui prend mon cœur lorsque Ezak nous fait son exposé. Tous les éléments qu’il invoque ne peuvent vraiment pas être remis en cause et c’est avec le regard mortifié que je m’éloigne un peu de celle dont j’ai pris la défense. Cette dernière, ployant sous le regard froid comme l’acier de Naral finit par avouer ses tords qui me font l’effet d’une douche glacée. Le seul brin de compassion qu’il me reste pour elle est dû au fait que ses actions sont une vengeance pour son frère assassiné et en y réfléchissant bien, hormis Robasc et Selena, toutes ses victimes et futures victimes ne m’inspirent aucune sympathie.

Malheureusement, avant même que nous n’ayons pu décider du sort de la traîtresse, si l’on peut vraiment l’appeler ainsi, Naral donne un ordre silencieux à son chien fidèle qui réagit au quart de tour et exécute Raesha sur le champ, sans même qu’elle puisse se défendre, tandis que Max pousse un cri de désaccord. Seulement il est trop tard…

Encore sous le choc des révélations, je ne réagis pas de suite à l’intervention de l’homme masqué, mais il ne faut pas longtemps pour que la rage s’empare de moi. Avec Lassiria, il avait été à la limite de s’en prendre une, mais cette fois-ci, s’en prendre à quelqu’un sans défense lorsque cette personne se révèle être ma compagne… ce n’est plus le vase qui déborde, c’est carrément le vase qui se brise ! Aucun besoin d’arme pour ce qui va suivre, si bien que je les laisse discrètement tomber pour ne pas qu’elles me gênent dans mes mouvements. Profitant de la longue tirade de Naral et réitérant le même assaut que dans la prison, je fauche les jambes du guerrier qui se retrouve à terre. Il ne me reste plus qu’à lui décrocher quelques paires de coups de poings bien placés, le dernier le frappant bien fort dans la mâchoire. Autre différence notable avec ce qui c’était passé dans l’antichambre, aucun mot ne sort de ma bouche, préférant concentrer ma colère dans mes coups.

Considérant que Tiniis en a reçu assez pour le moment et c’est sur, il s’en reprendra d’autres d’ici là, je me relève, lui assène un méchant coup de pied dans le ventre, puis récupère mes armes avant de rejoindre Naral près du socle avec sourire tout ce qu’il y a de plus narquois. La réponse à l’énigme étant tellement évidente, je sors le miroir de mon sac, toujours aussi silencieusement, toujours souriant et le pose à l’emplacement prévu, dirigeant le rayon lumineux vers le trou de la porte.

« Voila, chef ! Content ? »

Le jeu est finit. Dos au mur, Raesha ne peut qu’avouer… C’est elle qui les a tués, elle avoue tout. Son excuse ? Vengé son frère que Naral aurait tué. Pour n’importe qui l’elfe grise aurait pu paraître émouvante mais pour moi la chos est claire. Elle n’avait qu’à ne pas se faire prendre. On ne joue pas des batailles perdues d’avance…

Sans aucune pitié, j’observe Tiniis, s’approcher de la traitresse sabre à la main sur un simple ordre à peine visible de Naral. Avec un geste extrêmement rapide et précis, la traitresse est exécutée. Avec satisfaction j’observe le corps de Raesha s’affalé sur le sol. Maxasnith de son côté, se met à protesté contre cet exécution soudaine. Surpris, je me tourne vers lui comme outré qu’il puisse dire de telle chose.

Je dois dire que je ne comprends pas… Prendre la défense d’une traitresse… Cela me dépasse. Et alors que Naral explique son geste, Tathar dans une fureur noir mate Tiniis pour lui assainé plusieurs coups violents.

Des fous… Voila ce qu’ils sont pour prendre la défense de celle qui aurait pu tout nous tuer... Je ne peux les comprendre. Certes c'etait une personne pour qui Tathar avait des sentiment. Mais quand même une traitresse! Je n’ai surement pas été élevé avec les mêmes idéaux qu’eux car malgré tous mes efforts je ne comprends pas leurs actes.

Tathar finit en quelques secondes, d’arranger le portrait de Tiniis et se dirige vers le socle avec la tête des mauvais jours pour y déposer un miroir. De mon coté, je m’approche de l’elfe masqué et tente d’aider le malheureux à se relever.

Tiniis s’est salement fait défoncer la gueule par l’elfe gris en colère. Il n’a même pas eu l’occasion de se défendre, s’étant retrouvé au sol sans rien comprendre, roué de coups par la brute de service, Tathar. Faut dire, il venait de buter sa minette… on pouvait comprendre sa réaction. Alors que Tathar frappait, Maxanisth s’était une nouvelle fois exclamé son indignation quand à ce déploiement de violence en criant une nouvelle fois un ‘non’ réprobateur. Tiniis, frappé de toute part, en perdit son masque, qui s’en alla rouler à proximité de sa main, dévoilant son visage. Dans le temps, il avait du avoir un visage très séduisant. Des traits fins, beaux, épurés et nets. Mais là, à la place d’un front lisse se trouvent trois profondes cicatrices semblant provenir de griffes puissantes. Les trois plaies sont anciennes, mais ne semblent jamais avoir guéri, et marquent son front de ces stries rouges et écœurantes à voir. Mais Tathar ne le voit même pas. Trop fier de son acte, laissant derrière lui un Tiniis plaintif, la lèvre déchirée. Quand Ezak veut l’aider à se relever, son premier réflexe et de remettre au plus vite son masque gris, ne supportant visiblement pas qu’on voit ses plaies…

De son côté, Maxanisth essaie de rassurer Amaltia qui a l’air complètement paumée, tout d’un coup, alors que son frère, Naral, supervise sans un mot les actes de Tathar, un sourire sardonique collé au faciès.

Lorsque le druide place le miroir sur le socle, et que le rayon de lumière atteint le petit trou dans l’immense porte, celle-ci se met à trembler avant de s’ouvrir doucement, dans un fracas assourdissant, sous le regard intéressé de Naral, qui sourit toujours d’une manière mystérieuse…

La porte est ouverte…

Apparemment, il semblerait que Max ait condamné mon acte envers l’homme masqué, seulement, étant trop absorbé dans ma tâche, je n’ai strictement rien entendu de ce qu’il a pu me dire… Une fois le miroir en place et le faisceau lumineux placé dans son trou, la porte du fond commence à trembler pour s’ouvrir lentement, faisant un boucan du diable par la même occasion.

Naral, ainsi que les autres membres du groupe commencent alors à s’avancer pour pénétrer dans la nouvelle pièce qui s’offre nous… de mon coté, je rejoins le corps de Raesha et m’agenouille à coté d’elle, ne sachant vraiment si je dois être triste ou non… Une chose est sure, il faut tout de même que je garde un souvenir de la belle, tout comme l’anneau d’Anya qui orne mon doigt. Je porte mon dévolu sur les dagues de l’elfe qui sont encore couvertes de sang et que je nettoie avant de glisser dans ma ceinture. Une idée me vient alors… Raesha voulait venger son frère et n’a pas réussi… Peut-être que moi, je pourrai y arriver !

Déterminer à en finir avec Naral, je jette un dernier regard à la jeune femme qui baigne dans son sang puis me redresse pour rejoindre les autres dans la nouvelle salle.

(Mon cher Naral, un pas de travers et tu mourra par ces dagues, je le jure ! C’est de toute façon ton destin, car une fois Vlash vaincu, ce sera à ton tour d’y passer…)

Le masque de Tiniis tombé sous les coups de Tathar, je parviens à apercevoir le visage de l’elfe. Un visage répugnant… En fait ce n’est pas le visage en lui-même qui me révulse, mais ces trois cicatrices semblables à des griffes rougeâtres sur le front de l’elfe gris.

Je reste un moment bouche bée devant la vision qui m’est offerte de Tiniis. Mais l’elfe visiblement ne pouvant supporter ce regard à bien vite fait de replacer son masque, comme avant.

(Quel genre de bestiole est capable de faire ça ?)

Aidant Tiniis à se relever je le fixe quelques instants avant de me tourner vers la porte ouverte grâce à Tathar. Sans attendre, je me mets en marche à la suite de mes compagnons, le visage de l’elfe gris démasqué me revenant sans cesse en tête.
J’aurais quelques questions à lui poser...