Sidë se calme, même si elle ne semble pas accepter ces liens, ainsi peut-être que la proximité avec une autre elle.

"Des invités? Tant que j'ignore qui vous êtes, vous êtes des prisonniers, pas des invités. Quant à votre destination, rien ne me dit qu'il ne s'agit pas d'une ruse stupide de votre part."

Sa monture accélère légèrement, mais vous continuez dans la lignée de la bestiole, traversant l'océan sans doute d'une manière extrêmement rapide par rapport à ce que vous auriez pu faire à la nage...

L’elfe bleue, l’authentique dirons-nous, celle dont je ne suis qu’une pâle copie conforme, semble se calmer légèrement, même si ces liens qui la retiennent semble l’agacer au plus haut point, et je devine aux regards qu’elle me lance de temps en temps qu’elle n’apprécie qu’à moitié se trouver à côté d’une réplique d’elle-même. Quoi qu’il en soit, je me vois mal changer d’apparence maintenant que quelqu’un d’autre nous a vu… ça serait malavisé, et trahirait ce pouvoir qui pourrait certainement m’aider si jamais les choses tournaient mal.

Le chevaucheur aquatique, lui, est de plus en plus farouche dans ses réponses. Il nous rabaisse illico-presto au rang de prisonnier sans accorder la moindre considération à mes propos. Je lui lance un regard mauvais, un de ceux que seul Sidë peut effectuer, alors qu’il nous juge apte à inventer une ruse stupide pour déjouer son attention. Une ruse, peut-être, mais pas stupide… Et seulement pour se tirer de la situation dans laquelle il nous a mise lui-même… Il n’aura qu’à s’en prendre à lui-même si nous lui filons sous le nez sans même qu’il le remarque.

Je perçois une légère accélération de la grosse loutre et je pousse un soupir d’exaspération. Le voyage commence à me sembler long… Même à la vitesse élevée à laquelle nous allons.

« Dites, on y est bientôt arrivé, dans votre cité ? »

D'un regard vers l'avant de la monture tu as ta réponse : vous êtes bientôt, très bientôt arrivés. A moins que la cité qui se dessine au fond de l'océan, bloquée entre deux montagnes de pierre ne soit qu'une bourgade de passage. La ville est construite sur une base de pilier, de toit... Mais le Marlak vous confirme :

"Voici Szartserium, notre belle capitale. Je vais rapprocher le lien, nous n'avons pas la même ampleur de mouvement dans la cité et il faudra prévoir l'arrivée!"

Laissant son Sarlak se conduire tout seul, il se retourne sur sa selle et vient attraper la corde magique en vous traînant vers lui, votre visage au plus proche de la fourrure huileuse de la créature.

Je n’ai pas longtemps à attendre avant d’avoir ma réponse. Quelques foulées sous-marines de la grosse bête poilue qui nous tracte et hop, nous voilà en vue de la plus improbable cité qui soit : une ville entièrement immergée au fond de la mer, entre deux montagnes rocheuses. Notre cocher privé, celui qui veille depuis le début au confort sans faille de ce trajet express vers notre pas-destination, confirme que c’est là la ville où nous nous rendons, une certaine ‘Szartserium’. Cela me fait penser qu’ils ont vraiment des noms à se jeter par terre, dans ce monde, et qu’en terme de ville, le nom de cette cité tout comme son apparence me font plutôt penser à un aquarium inversé, les poissons mirant les habitants prisonniers de leur bulle sous-marine.

Mais notre hôte poli et distingué n’a pas dit son dernier mot : laissant les commandes à sa bestiole, il nous tracte jusqu’à ce que notre visage parvienne à hauteur des poils gras et détrempés, ô joie enchanteresse.

Il nous est inutile de nous débattre, aussi je me laisse tracter, neutre et distant, tentant de penser aux raisons de notre présence ici et des mots que je pourrais utiliser pour recouvrer ma liberté.

Vous faites votre arrivée dans la ville de manière fort peu agréable, votre trajet dans les rues est ponctué de tournant quasiment à angle droit. Puis le freinage où vous vous retrouvez le nez dans la fourrure de la bestiole. D'un bond leste, votre "hôte" saute de sa monture et vous détache avant de vous entraînez en nageant vers votre destination temporaire : la prison.

Vous traversez une ruelle étroite où une loutre géante ne saurait passé avant d'arriver devant une grande porte d'un bleu turquoise magnifique où deux Malaks, armés de longues épées, ainsi que d'une armure souple fait de plaques semblant être de mailles, de bracelets de poignets fait d'un métal doré et d'une paire de jambière blanche... assez semblables aux tiennes d'ailleurs si on excepte les deux ailettes arrières, montent la garde.



"Tu as trouvé des étrangères, Heamziak?"
"Ils rôdaient non loin de la vieille tombe."
"N'est-ce pas d'ailleurs le croc qu'il tient en main?"

Le ton du garde est manifestement impressionné quand il parle de tenir le croc en main...


(((Tu continues bien sûr dans la ville^^)))

Vous traversez l'océan à une vitesse équivalente, voire supérieure à celle des loutres géantes sur lesquels vous êtes arrivés...

La distance vous paraît ridicule d'ailleurs tellement vous foncez, slalomant entre les colonnes. Vous arrivez bientôt près d'une faille, proche d'une montagne que vous connaissez...

"Entrez, aventuriers, continuez tout droit. Rejoignez votre fluide et rentrez chez vous. Vous êtes en danger, je le sens, je le sais, le temps presse !"

Elle vous embrasse toutes les deux avant de filer.

L’élémentaire de glace nous emporte tous les deux travers l’océan. La vitesse à laquelle nous parcourons le chemin inverse est grisante et impressionnante. Elle slalome habilement entre les colonnes, jouant de sa souplesse pour laisser des trainées blanchâtres élégantes derrière nous. En quelques minutes, nous sommes revenus à notre point de départ, sur ce monde : le tombeau, par-dessus la faille. La montagne où nous devons reprendre le fluide vers notre monde.

C’est là que l’élémentaire s’arrête pour nous laisser. Elle semble inquiète, et nous le fait savoir. À ses mots, une crispation tord mon estomac. En danger ? Les troupes Oaxiennes nous auraient-elles rattrapées ? Quel accueil nous réservent-elles, là-bas, sur Nirtim ? Ou le danger est-il de ce côté du fluide spatial, au fond de cet océan tumultueux ? Elle ne me laisse guère le temps de lui poser la question, et s’en va sitôt qu’elle a terminé de parler. La dernière chose qu’elle laisse d’elle est un baiser d’adieu… Une marque glacée qui pourtant me fait fondre.

Mais une fois de plus, Sidë me tire de ma contemplation, en s’emparant de ma manche.

« Vite ! »

Dit-elle à son tour. Il est en effet temps de partir, de quitter Gramenou au plus vite. Suivant les conseils de l’élémentaire, nous pénétrons droit dans la faille pour avancer vers le fluide qui nous attend. Nous n’avons pas de temps à perdre… Dans ma main toujours serrée, la Larme de Thimoros stagne.

Sur la terre ferme, sortis de l’océan, je reprends mon apparence normale d’elfe gris, délaissant hélas les traits séduisants de ma compagne bleue. Et ainsi redevenu moi, je cours vers le fluide pour le traverser…

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