Prologue
Elle a deux techniques spécifiques de chasse qu'elle met en œuvre généralement la nuit, à l'aube ou au crépuscule. L'affût, consiste à attendre l'ennemi tapis dans l'ombre des broussailles et de saisir le moment parfait pour assainir un coup fatal à la cible qui procurera l'effet désiré, c'est-à-dire la mort de celle-ci. Elle préfère toutefois l'approche masquée qui rend l'exercice beaucoup plus attrayant et selon elle, beaucoup plus efficace. Elle choisit une proie isolée qui semble chercher son souffle et l'observe de ses yeux verts émeraudes qui reflète l'étrange curiosité que provoque le danger. On avance. La respiration s'accélère et se mélange à l'excitation. Les muscles se tendent et l'adrénaline nourrit le tambour qui résonne aux tempes à chaque battement. La marche est prudente, mystérieuse et ras le sol. La cible oscille et se sent observée. On ferme les yeux pour effacer l'effet de fixation et contrôler la pulsion. Les pulsations de notre cœur se joignent à celles de la proie. Le contrôle parfait que nous avons sur la cible est à son apogée. Nous ouvrons les yeux, elle est là. La proie vacille, hésite et tombe. L'attaque a été foudroyante. Nous avons choisi la mise à mort par strangulation qui consiste à resserrer notre mâchoire sur la gorge de la victime. L'animal a la colonne vertébrale brisée et la lune éclaire le suintement du sang rougeâtre sur le pelage au niveau de la nuque. Nous enfonçons nos dents dans la chair encore chaude. La viande est tendre, la victime n'a pas eu conscience de sa mort. Une fin propre et respectueuse. Nous nous nourrissons de la partie charnue du flanc et remercions la terre et le ciel de ce festin. Patte à la suite de l'autre nous marchons sans presse vers l'étendue d'eau en aval. Nous sommes les maîtres de cette forêt et la forêt nous rend ce qui nous est dû. Nous faisons partie du cycle. L'étendue est calme et l'eau presque lumineuse. Le miroir glisse jusqu'aux murs rocailleux qui délimitent la frontière de la forêt. Notre corps de félin a besoin de repos. Nous approchons de l'eau et nous nous abreuvons du liquide frais. Le miroir redevient miroir et je peux observer nos traits. Un pelage noir comme l'ombre qui guète, comme la nuit la plus noire qui s'ouvre sur deux cavité d'un vert perçant aux pupilles verticale. C'est étrange. Je plisse les paupière pour regarder de plus près. Le regard vert en fait autant. Je m'approche encore et les yeux me fixe. Le liquide m'enveloppe, c'est mouillé. Je tombe, je tombe...
Ali se réveille en sursaut et en en sueur. C'est étrange comme certains rêves peuvent sembler si près de la réalité. Le jeune homme retire les couvertures de laine et se lève sur le sol de pierre froide. Ses sens sont quadruplés par l'excitation et le réalisme déroutant du rêve. Sa posture est parfaite, pure. Sa masse musculaire soutien ses membres longs et sa forte stature. Des cheveux noirs tombent farouchement de chaque coté de son visage aux caractères à la fois sauvages et provocants. D'un mouvement mécanique, il lisse sa chevelure en queue de cheval et les attache d'un nerf de daim séché. Son regard fait le tour de la minuscule pièce dont les murs rocailleux d'une cavité rocheuse constituent une grotte juste assez grande pour y accueillir un seul homme. Un lit constitué de branches de sapin recouvertes de diverses peaux formant un étrange historique de chasses est entassé dans un coin, une souche à la verticale en guise de banc, un feu de braise recouvert d'une mince dalle de calcaire et une fente dans la pierre qui permet de voir les lueurs du matin. L'adolescent saisi un morceau de charbon et redonne quelques détails au grand félin dessiné sur la paroi où les premières clartés se reflètent. L'animal est debout, la tête haute, le pelage noir, les yeux vert... Vert comme ceux d'Ali.
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Que puis-je dire à mon sujet si ce n'est que je dois mon existence à notre terre qui nous entoure. L'équilibre est présent dans son ensemble, il est l'ensemble de toutes choses. Sans lui, le chaos deviens maître et anéanti tout ce que les saisons peuvent nous offrir. La nature peut quelques fois nous surprendre et faire abstraction de son cycle logique. Étrangement, c'est à l'automne où toutes flores perd de sa vivacité que ma vie commença. Ma naissance fut l'objet de questionnement pour les habitants du village puisque jamais on ne su l'identité de mon père. Danaa était ma mère. C'est d'elle que je tiens mes yeux verts. Or, nous vivions dans un petit village sans importance en bordure ouest de la forêt centrale au-dessus de Kendra Kâr. Petit village vivant de chasse et d'agriculture saisonnière. Mes souvenirs de cet endroit sont hérétiques et très sombre. Nous nous fîmes chassé de ce coin de continent par de quelconques étrangers venus d'ailleurs. Malchanceuse de sa vie, mère me pris sous son aile et nous partîmes en itinérants, errant de lieu en lieu. Notre chemin marqua profondément mon enfance solitaire et sans contacts sociaux ou très peu. S'inquiétant pour mon futur, Danaa n'eut d'autre choix que de me confier à qui veuille bien s'occuper de mon éducation. Les circonstances de notre venus en terres d'Ynori m'ont toujours été masquées, mais je crois que mère savait précisément ce qu'elle faisait en foulant l'orée d'une forêt de la région. À ce moment précis de ma vie c'est l'engourdissement d'un néant complet qui fait œuvre dans mes pensées. Un vieillard, un feu de foyer, la douceur de l'édredon, l'entrechoquement de sabots, la peur, le déchirement...
Et puis mon réveil ce fait dans une forêt étrangement familière. Elle semble m'accueillir de sa sagesse et de son savoir sauvage. La vie palpite de toute part et de lumineux filaments de lumière pénétrant le haut feuillage viens éclairer mon esprit d'enfant. Je sais que je peux faire confiance à cet ensemble qui m'invite à en faire partie. Je me sentais vivre pleinement pour la première fois à mon douzième été. La forêt me tendit sa main et je la saisi de la mienne. Ce fragment de ma vie fut une épreuve spirituel et physique qui souda mon essence à celle de la nature. J'accomplissais l'acte de vivre avec comme meilleur et pire ami cet forêt. La forêt m'offrait ses éléments pour que mon cœur puisse continuer à battre et je lui rendait le respect. Chaque jour j'apprenais de moi-même les rudiments de la chasse et de la survie. Tout était instinct et réflexe. J'ai maintenant de nombreuses années derrière moi et ce rêve que je fais de plus en plus fréquemment est devenu une obsession quasi maladive. Jamais je n'ai vu ce félin dans la forêt. Qui est-il? Pourquoi vient-il me chercher chaque nuit lorsque le sommeil s'empare de mon esprit? Jamais je n'aurais pu me douter de l'illumination qui allait survenir.
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Fixant la sépulture du félin sur le mur de sa tanière, Ali enfila ses vêtements constitués de cuir et de peaux et saisi son bâton de chêne blanc. Une odeur de pin planait dans l'air tiède d'une matinée d'hiver. Lorsqu'il posa les pieds à l'extérieur de son abri, le sol était recouvert d'un fin tapis blanc. Il fléchit les genoux et ferma les yeux pour s'imprégner des environs. Le vent soufflait paresseusement vers le nord et les oiseaux encore dans la région sifflais leur plainte. Les arbres bougeaient dans un rythme insaisissable et le soleil faisait fondre d'une lenteur déconcertante cette neige qui annonçait la fin de la saison. Pourtant, dans cet équilibre une faille ce faisait pré-sentir. Quelque chose se déplaçait un peu plus haut vers la montagne. Ali ouvrit les yeux et d'un bond courut vers ce point avec une agilité et une connaissance des lieu à toute épreuve. Se déplaçant dans un silence absolu, il pu observer cet homme habiller tout de gris qui semblait flotter au-dessus du sol geler. Ali fut surpris d'apercevoir un loup qui marchait à côté de l'homme. Aucune menace n'émanait de l'animal. L'homme gris lui tournait le dos et semblait chercher quelque chose dans les airs.
« Jeune homme, qu'est-ce que c'est que ces manière? Présentez-vous, ne soyez pas impoli! »
Ali sursauta et recula d'un air méfiant. Ces paroles résonnèrent dans son crâne comme un écho ne voulant s'éteindre. Le souvenir d'un langage lointain réveillait chez lui des pensées confuses et sans lien précis. Il répondit tout de même en gardant ses distances d'une voie rauque et caverneuse marquée par un silence absolu.
« je... je Ali. Toi fuir la maison forêt... Elle est moi.. »
L'homme gris se retourna et d'un même mouvement enleva la capuche qui masquait un visage à la fois ravagé par les années et empreint de vitalité. Une barbe blanche de quelques jours camouflait la partie inférieur du facial de l'homme. Il répliqua d'un air penseur en fronçant des sourcils broussailleux.
« Oh... Ali.. Je vois. »
L'homme semblait avoir oublié les bafouillages maladroits d'Ali lorsqu'il repris la parole.
« Biensûr! Oui Ali, voilà que je te vois enfin jeune homme tu as bien grandit! Oh et je vois que tu t'es débrouillé à merveille au sein de notre merveilleuse Seregon. Au fait, je suis Ereton et voici Maltazar. Tu n'as jamais vu un loup d'aussi près, c'est vrai? Haaahaha oui évidement! N'ais pas peur il est notre ami. Il y a tant de saisons que nous t'avons confié au cycle pour purifier ton âme et je crois que tu es près. Approche mon garçon. Il est temps pour toi d'accéder au savoir! »
Ali n'y croyait tout simplement pas. Cet étranger avait parler beaucoup trop rapidement pour son oreille et il n'avait compris qu'une fraction de ces paroles. L'homme gris le regardais avec un sourire chaleureux tandis que le loup se couchait lourdement sur le sol. Il avança lentement avec un soupçon de méfiance. Son bâton offrait une parade facile pensa-t-il tandis que la curiosité s'emparait de son esprit vif. Sa bouche s'ouvrit une seconde fois pour répondre avec la même difficulté. Il avait cru percevoir que cet homme voulait l'amener avec lui.
« Moi forêt! Ici rester et toi partir... je non suivre homme et loup. Pas sortir de forêt maison... »
Ereton poussa un rire grave. Il lui fit un clin d'œil et dit:
« Qui t'as dit que tu devais en sortir mon garçon? »
L'adolescent plissa les yeux en considérant les paroles du vieillard. Son visage basculait et revenait vers un état de stupeur et d'incompréhension sans savoir quoi penser de ce qui lui arrivait. Jamais il n'avait vu autre homme que sont visage à travers l'eau d'un ruisseau depuis très longtemps.
« Mon garçon... Tu dois être complètement gelé! Et la faim de te ronger les entrailles! Viens avec moi. J'ai beaucoup de nourriture pour toi. »
Le visage de l'homme aspirait la confiance et l'instinct d'Ali lui signalait la bienfaisance de l'inconnu. Quelqu'un voulant partager sa chasse ne devait pas être une menace et il pourrait facilement prendre la fuite si le danger venait à survenir. Après un échange de regards, Ali baissa son bâton et acquiesça.
Le vieil Ereton vivais en ermite en bordure de la forêt et se disait protecteur dévoué des lieux. Il s'étonna comment Ali avait soif de curiosité pour les arcanes de la forêt. Sa recherche de connaissances semblait sans limites et Ereton était satisfait des progrès de son nouvel élève. C'est avec difficultés qu'il assimila les concepts plus concret comme les subtilités d'une bonne communication à l'aide de la parole. Il progressait avec facilité et son esprit logique s'éguisait rapidement. Le maître lui enseigna les rudiments de la survie et diverses techniques de chasses plus complexes que les réflexe primaires du jeune homme. Toutefois, son éducation ne fut pas sans mal, souvent Ereton envoyait Ali voyager seul pour chercher des outils ou des ingrédients pour le diner dont il ne voyait pas du tout l'utilité si pressante que son tuteur lui soulignait. Il ne compris que plus tard que son sens de l'orientation et de l'exploration s'en virent quadruplés. L'adolescent grandissait bien et appris de plus le métier de chasseur. En plus de ses propres connaissances rudimentaires sur le sujet, il dévelopa des techniques beaucoup plus efficaces. Maltazar était le compagnon animal du vieil homme et le suivait partout où il se déplaçait. Il prévint Ali qu'il avait créé un lien très puissant avec ce loup et que leurs esprits étaient maintenant lié jusqu'au déchirement de la mort. L'élève pensa à ce moment aux rèves troublant son sommeil. Ce félin noir l'encorcelait littéralement et il ne pouvait s'empêcher de penser à l'engouement de cette fascination. L'enseignement devint peu à peu un entrainement rigoureux où Ali appris à se défendre avec efficacité. Son style de combat restait trop sauvage selon le maître, mais il n'en était pas moins efficace. Au bâton, Ali devint un adversaire redoutable.
Pourtant, Ereton notait certains comportements chez Ali qui réveillait maintes inquiétudes... En effet, le jeune druide resta beaucoup plus marqué par sa période laissé à lui-même dans la forêt que son maître avait prévu. Il lui arrivait de se comporter de façon sauvage lorsque ses humeurs variaient subitement. Le matin, il était fréquent qu'il quitte la chaumière pour courir à en perdre le souffle et il revenait plusieurs heures après en affirmant comme prétexte qu'il avait une envie incontrôlable de se défouler. Encore plus étrange, Ereton surpris Ali à jouer avec des loups de la forêt en se comportant de la même façon que les bêtes. Le mentor lui enseigna que là où les hommes vivent, il y a un code d'éthique où il est mal vu de se comporter de façon bestial et instinctif. Ali avait beaucoup de difficultés à assimiler ce concept de « l'endroit où les hommes vivent ». Que font-ils hors de la forêt? Pourquoi construisent-t-ils des murs autour de leur territoire? Le jeune homme préférait courir avec ses frères...
Tout deux partaient souvent chasser pendant plusieurs jours accompagner du loup. Ce moment de parfaite communion avec la nature éveillait l'appétit sauvage d'Ali. Celui-ci s'enfermait en lui-même et vivait du même souffle que la nature. Son regard changeait et on ne pouvait plus préciser si son corps était habiter par un esprit d'homme. Lorsque leur périple les ramenait à la maisonnette, il arrivait qu'il dorme pendant 2 jours et lorsqu'il se réveillait il redevenait l'homme intelligent et empreint de curiosité d'avant. Sa sensibilité envers la nature continuait de s'affiner avec les années en même temps que cet étrange facette de son esprit...
Le soleil perçait de ses rayons les nuages qui fuyaient derrière la montagne lorsque Ereton annonça la nouvelle à Ali.
"Tu as réussi Ali... Je n'ai plus rien à t'apprendre et rester ici te limiterait dans ta progression. Pars et suis ta voie. Protège la nature et la nature te protègera de son mieux. Prends cette cape en daim, elle te sera plus utile qu'à moi. Pars maintenant, je t'ai tout appris. Le vœu de ta mère est exaucé, tu est maintenant armé pour affronter l'avenir."
Ereton lui donna une cape en daim bleu sombre douée d'une capuche qu'Ali s'empressa d'enfiler. Il pris son fidèle bâton de chêne blanc et remercia son maître adoptif du fond du cœur.
(Où es-tu... Où te caches-tu... tu viens me chercher toutes les nuits, c'est maintenant à moi de venir te chercher...)
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