A peine sorti de la hutte, elle me sourit. Pour ma part, je continue à me débattre avec le flocon toujours attaché à ma cape. "Attends, laisse-moi faire, je vais le détacher."
D'un geste beaucoup plus habile que le mien, elle décroche le flocon avant de me le rendre. J'ai l'impression alors d'être une gamine à laquelle sa maman vient d'ôter une saleté à sa cape. Cette impression ne fais que renforcer mon sentiment de vulnérabilité et de faiblesse qui me tient depuis que j'ai quitté Caix contre mon gré. (Qu'est-ce que j'ai appris durant toutes ces années...)
"Je m'appelle Asstryä. Suis-moi, je vais te donner de quoi te changer, tu pues le cadavre à des lieux à la ronde et tu risques d'attirer ces charognards de Warg, et il vaudrait mieux éviter, pour le bien de tous." "Les Warg?"
Manifestement, ce qui semble connu de tous en ces lieux, m'est totalement inconnu. Même si le fait qu'une femme en sachen plus sur le monde que moi ne me dérange pas, j'ai l'impression de passer pour un incapable (mais peut-être que c'est ce que je suis et que ma soeur avait raison.)...
"Tu ne connais pas les warg?" "Je devrais?" demandé-je d'une petite voix. "Il vaut mieux pour toi que ça ne soit pas le cas, en même temps... Même si ça m'étonne que tu sois arrivé ici à partir de Caix sans les croiser, ils rôdent..."
Devant mon air curieux et incrédule, elle poursuit (je vais peut-être en apprendre plus pour une fois.): "Les wargs sont des loups géants. On raconte qu'ils font la taille d'un poney. Ce sont des montures avant tout, créée sans doute par Oaxaca pour que les gobelins puissent suivre la course des garzoks. Ils sont grands, le poil rèche dans les gris noir et leur haleine sent le cadavre dont ils se repaissent. On raconte qu'Oaxaca leur donne des enfants humains et des enfants elfes à manger pour les rendre plus fougeux et voraces." La description des monstres ne me donne pas envie de les rencontrer (Et pourtant... Ca serait donc des wargs que j'ai croisé?)
Nous arrivons à une autre hutte, environ de la taille de celle du chef, et tout aussi dégarnie en meuble. (Comment peuvent-ils vivre dans un tel dénuement, et surtout pourquoi ne vivent-ils pas dans la cité de Caix?) Asstryä s'écarte de moi et part dans une pièce annexe. Elle revient quelques secondes plus tard avec un bac d'eau ainsi que des vêtements.
"Ôte tes haillons, il faudra sans doute les brûler. Mais d'abord, il faut te laver!"
Tranquillement, sans aucune pudeur envers les femelles, je me déshabille là où je suis. (Est-ce normal de faire ça quand on est libre?) Asstryä quant à elle s'écarte pour revenir avec un bac de sable fin.
"Manifestement, les femmes de ta famille ne sont pas des tendres, tu as le dos presque aussi blanc qu'un hiniön. Je vais y aller doucement." Elle s'approche de mon dos et me mouille sans ménagement à l'aide d'un chiffon. Beaucoup doucement, elle me frotte avec le sable, me conseillant de faire de même avec mes bras et mon torse. Surpris par cette demande, je me mets à me frictionner de mon mieux, l'ayant fait de nombreuses fois sur ma soeur. (Je pensais que c'était plus agréable que ça...) Petit à petit le sable mêlé à l'eau vient ôter la couche de crasse, de terre et de sang qui constelle mon corps noir. La couleur ébène réapparaît petit à petit, tandis que la jeune femme parvient à ôter le plus gros de la boue qui remplissait mes cheveux. Ceux-ci semble réapparaître gris à défaut d'être blanc, comme ça aurait dû être le cas.
"Il te faudra bien deux ou trois jours de lavage pour que tu retrouves ta couleur d'origine." "En même temps, c'est la première fois que je suis lavé ainsi..." "Tu veux dire que tu te lavais jamais?" "Ma mère racontait que le fouet et le martinet suffisait à ôter la saleté de mon corps et que seules les femmes y avait droit." "Manifestement, ta vie devait être plus pénible que celle dans ce village." "Oh, pas forcément. On avait de beaux meubles, une belle cuisine et un cellier plein de nourriture." "Et l'interdiction pour toi d'utiliser tout ça? La vie était peut-être belle pour ta mère et ta soeur, mais tu seras mieux dans les bois que là-bas." "Mieux dans les bois? Sans pouvoir s'abriter? Sans pouvoir manger? Sans pouvoir se réchauffer? "Tu apprendras cela ici, ne t'en fais pas."
Elle entreprend de me déméler mes cheveux, mais l'opération s'avère aussi douloureuse qu'inutile. Les dents du peigne s'obstinent à rester coincer à moins d'un pouce de la racine de mes cheveux, ce qui n'a rien d'étonnant.
"Tu m'excuseras, mais on va devoir les couper, ils n'en repousseront que mieux, crois-moi." "Vas-y, peu me chaut de ces cheveux!"
D'un geste souple, elle sort une dague courte de sa ceinture et entreprend de couper dans ma chevelure qui fût sans doute un jour blanche. Quelques minutes plus tard, je me retrouve avec moins de 2 pouces de cheveux sur mon crâne noir. Sur mon dos autant que sur mon torse, les longues estafilades blanches restent comme autant de témoins des sévices subis au cours de ma courte vie. (Et autant de raison de fuir au plus loin de cette demeure de fou.)
"Rabille-toi, dès ce soir, tu iras avec les chasseurs et les éclaireurs, ils t'apprendront à te débrouiller seul avec très peu."
Je mets les habits qu'elle me tend, un pantalon simple, une veste faite de cuir manifestement et une simple cape. (J'espère que je pourrais récupérer celle que j'ai volé, elle est bizarre.) Elle me tend alors des chaussures en cuir souple, confortable et légère (restera à voir pour la protection au froid, mais c'est pas le moment de faire la fine bouche.) Je ramasse, tout en attachant les chaussures, le flocon de neige géant qui ne semble pas vouloir fondre et le glisse dans ma poche.
Une fois ainsi vêtu, nous ressortons de la "maison" (pas certain d'avoir un autre terme pour ça) vers celle où j'ai été attaché...
_________________ Thian Siyth, shaak, perdu près de Caix...
|