L'Univers de Yuimen déménage !


Nouvelle adresse : https://univers.yuimen.net/




Poster un nouveau sujet Répondre au sujet  [ 6 messages ] 
Auteur Message
 Sujet du message: Route entre Dahràm et Omyre
MessagePosté: Mar 10 Mar 2015 19:09 
Hors ligne
Avatar de l’utilisateur
 Profil

Inscription: Dim 26 Oct 2008 16:27
Messages: 39606
Route entre Dahràm et Omyre


Image


Description du voyage à pied et/ou cheval :

Quel lieu plus mal famé, au cœur de l’Empire d’Oaxaca, que la route reliant le Royaume de Dahràm, pays des mercenaires sanglants et de la piraterie, à Omyre, cœur du Mal sur Nirtim, capitale de l’empire Oaxien, patrie des orques et des êtres les plus sombres de ce monde. Entre les patrouilles de garzoks, les détrousseurs sektegs, les bandits humains, les pauvres hères ayant tout perdu, sauf la vie… De chaque personne rencontrée sur ces pavés brisés et pas entretenus, dernier stigmate d’un royaume elfe depuis longtemps perdu, on peut savoir une chose : elle est coupable. De quoi ? Des fois, il serait bien inconscient de le demander… Et nul, en vérité, ne veut vraiment savoir.

C’est une route où le silence vaut mieux que le courage d’une parole. Où derrière le moindre itinérant peut se cacher le monstre le plus violent. Longeant la côte un instant, l’ancienne voie se divise en deux : l’une partant vers l’ancien chantier naval de Mourrakat, aujourd’hui muté en carrière, et l’autre allant droit sur Omyre…

Durée du trajet à pied ou sur monture sur le continent de Nirtim

Basez-vous sur les cartes et présentations décrites dans les 4 continents de Yuimen

(Postez vos RP de voyages ici )

_________________
Image
Image
Image



Haut
 

 Sujet du message: Re: Route entre Dahràm et Omyre
MessagePosté: Mar 10 Mar 2015 19:20 
Hors ligne
Avatar de l’utilisateur
 Profil

Inscription: Ven 11 Sep 2009 00:29
Messages: 179
Voyages. Plus loin que la nuit et le jour.

Darhàm, une ville pleine d’opportunité pour les soudards employés sur la Désolation. Une nouvelle vie, chaotique, dans une cité sans règle bien loin de la blanche Kendra Kâr. Gurth ne doutait pas que la moitié de ces soiffards finiraient crevés dans une ruelle, à l’aube grise, baignant dans leur merde et leur sang après une soirée trop arrosée, ou à servir sur le pont d’un navire de forbans pillant et volant à foison, avec une gueule de bois à en fendre le ciboulot. Peu lui importait : la vie de déchéance, l’autodestruction, la violence et les vols, voilà des valeurs qu’il respectait. Il en trouverait mille, s’il voulait, des corniauds comme ces paumés, pour repeupler son triste vaisseau. Il n’en avait cure, maintenant. Sa seule préoccupation était de ne pas abandonner le navire qu’il avait payé si cher des sous dédiés à ses dieux sombres sans la garantie de le voir à son retour. Aussi avait-il empoigné, à son débarquement, le timonier nommé arbitrairement pour l’occasion. Il l’avait menacé de mille tourments si la Désolation venait à s’envoler, qu’il ferait subir à lui, et à tous ceux qui s’y trouverait mêlé. Plus une fois encore à lui, par tête de pipe mêlée à l’affaire. Autant dire que le pauvre avait ravalé sa salive jusqu’à se dessécher, et qu’il peinait encore à ne pas voir ses genoux trembler pendant qu’il montait sa garde sur le pont du navire, sans le quitter ne fut-ce que d’une semelle.

Fier de son effet ravageur, aisément compréhensible quand on voyait la bête hideuse qu’il était devenu, il avait quitté la pauvre cité sans intérêt pour lui pour s’épancher sur les chemins menant vers sa destination : la Sombre Omyre.

Durant plus de trois jours, ne se couchant que pour tomber de fatigue à même le sol, pour un repos tout sauf confortable, le dos douloureux creusé des cailloux qui peuplaient le paysage. Il ne mangeait que les racines terreuses et noires qu’il tirait du sol de cette lande désolée. Les pieds saignant dans ses sandales hautes, purgeant le retard qu’il prenait en soulevant, de ses pas lourds et grands, sa carcasse immonde et démesurée.

La douleur ne l’arrêtait pas. Loin de là. Comme un appel à la communion envers ses dieux, elle le poussait à aller chercher plus loin encore dans ses réserves d’énergie, chaque heure qui passait, pour presser le pas vers son destin. S’il croisa du monde, il ne s’en souvint pas. Mais ceux qui eurent pu le croiser témoigneraient d’un cadavre obèse marchant les yeux révulsés, boitant et traînant la patte, mais avec la volonté d’un lion qui cherche une proie. Personne n’osa l’interrompre, dans cette transe excursive le menant à Omyre.

Lorsque la vision de la capitale des Terres Sauvages d’Omyrhy s’imposa à ses yeux, sous son ciel de nuages noirs et lourds, pesant bas sur la plaine, il sut que ses souffrances étaient récompensées : il allait pouvoir œuvrer pour le mal, ici. Pour ses dieux. Pour la mort et la destruction.

Il soupira, profitant d’une pause pour panser ses pieds déjà recouverts de bandages sanglants, buvant à l’outre qu’il avait remplie à un ruisseau à l’eau douteuse. Son état était piteux. Plus que d’habitude, il faisait peur à voir.

Des Fémurs Croisés jusqu'au Crâne couronné,
Il avait marché, peinant, les pieds ensanglantés.

_________________
Gurth Von Lasch - l'Ogre de Tulorim

Je hais les testaments et je hais les tombeaux ;
Plutôt que d'implorer une larme du monde,
Vivant, j'aimerais mieux inviter les corbeaux
A saigner tous les bouts de ma carcasse immonde.
(Baudelaire - Le mort joyeux)


Haut
 

 Sujet du message: Re: Route entre Dahràm et Omyre
MessagePosté: Sam 18 Avr 2015 00:45 
Hors ligne
Avatar de l’utilisateur
 Profil

Inscription: Mar 20 Avr 2010 21:13
Messages: 12983
Localisation: Derrière Cromax
Dahràm et Omyre.

Ces deux villes revenaient souvent à la bouche des pirates et forbans des mers qu'il lui était arrivé de côtoyer. Hrist ne comprenait pas l'intérêt de cette ville qui lui semblait plus être une immense cabane de passe à pêcheur et de repos pour soulard et traine-la-grole en quête d'argent ou d'alcool. L'aube se levait au loin, alors qu'elle quittait ce navire étroit et sombre qui venait de la conduire jusqu'au port. Une aube rosée et triste qui venait poindre un faible écran de lumière derrière un ciel déjà chargé de lourds nuages. Une aube dont l'homme qui gisait face contre terre en face d'elle n'aurait pas conscience.

Elle avait demandé au capitaine un cheval, une monture n'importe laquelle pour abréger son trajet jusqu'à la ville d'Omyre. Repoussant du bout de la botte le corps étalé par terre pour vérifier s'il respirait toujours, Hrist grignotait un morceau de poisson séché et salé acheté plus tôt.

C'était un cadavre d'humain, les doigts encore refermés sur l'anse d'une outre de grès de mauvaise facture. Le port s'éveillait et au dessus de sa tête résonnait déjà le lent et plaintif cri des mouettes qui planaient au rythme du vent.
Dès lors que la monture arriva, Hrist quitta la ville sans se retourner, coupant à travers champs de blé antiques ou de ruines poussiéreuses, elle traçait une route approximative faite de chemins troués et de sentiers abandonnés ou de temps à autre, elle croisait âme qui vive, que ça soit un paysan maigre qui trainait sa misère derrière lui ou un groupe de bandits qui, déjà penchés sur un corps la laissèrent passer sans lui poser de problème.

Il fallait reconnaître que la poussière et le voyage en mer avait réduit à néant sa coquetterie, ses ongles étaient sales et sa tenue, bien que d'une grande qualité, était boueuse, sale, croutée et poussiéreuse.

Mais elle avait trop à faire à Omyre pour s'accorder un repos.

_________________
La petite ombre de la Mort à Elysian.

Alors, j'ai établi ma couche dans les charniers,
Au milieu des cercueils,
Où la Mort Noire tient le registre des trophées qu'elle a conquis.


Némésis d'Heartless


Haut
 

 Sujet du message: Re: Route entre Dahràm et Omyre
MessagePosté: Dim 17 Mai 2015 11:15 
Hors ligne
Avatar de l’utilisateur
 Profil

Inscription: Jeu 9 Avr 2015 19:09
Messages: 46
Localisation: Entre Kendra-Kâr et Omyre
Omyre.

Curieusement, les traits grossiers des bâtiments Garzoks écrasant les restes des bâtiments des elfes bleus soulignaient la domination d'Omyre sur son environnement.
Environnement guère agréable, à vrai dire : falaises escarpées, rochers disséminés un peu partout dans toutes les zones à peu près plates...
Il avait buté contre un caillou moins d'une heure avant l'arrivée à Omyre.
Son genou s'était ouvert, il avait du continuer son chemin en boitant.
Heureusement qu'il ne s'était fait mal qu'aussi tard, sinon, son trajet aurait été un enfer.

Son trajet, de Kendra-Kâr au Duché des Montagnes, de celui-ci à Darham et de Darham à Omyre. 8 jours de marche. 8 jours à marcher du matin au soir.
Le soir, il se trouvait un coin où se recroquevillait, entouré de sa cape,et s'endormait dans la minute qui suivait.
Et le matin, on recommence. On se lève difficilement, sentant cruellement les courbatures dû à la marche d'hier. Mais on avance quand même.

Mais il était enfin arrivé à sa destination.
Omyre, capitale de l'Empire d'Oaxaca.
Là, la population se débrouillait par soi-même, n'attendait pas l'hypothétique aide d'une milice, comme à Kendra-Kâr.
Toutefois, il n'était pas stupide et savait que dans cette ville, on ne pouvait compter que sur soi-même. Ou intégrer un groupe.
Il avait fait donc tout ce trajet pour rejoindre la Caste des Murènes, un groupe gagnant de la puissance dans Omyre ces dernières semaines.

Keylan grimaça une dernière fois à la douleur de son genou, et continua en boitillant sa route vers Omyre, la tête de Lato Iuric accrochée à sa ceinture par les cheveux battant à un rythme régulier sa cuisse.

_________________


Dernière édition par Keylan Forlos le Dim 24 Avr 2016 18:44, édité 2 fois.

Haut
 

 Sujet du message: Re: Route entre Dahràm et Omyre
MessagePosté: Dim 17 Mai 2015 15:09 
Hors ligne
Avatar de l’utilisateur
 Profil

Inscription: Sam 9 Mai 2015 03:06
Messages: 1129
Vers Dahràm - Quatrième jour

Ordre fut donné de passer la nuit sur le bateau, quand bien même était-il à quai. Le débarquement s’est effectué au matin sans heurt, dans l’ordre et la discipline, suivant les instructions données par les deux sergents. Avant de poser le pied à terre, le commandant de cette troupe a pris Beorth à part pour lui toucher quelque mot de sa place à venir dans la colonne.

« Tu marches avec nous, tu obéis aux ordres. C’est clair ? »

« Très clair. » (J’ai vu tes gars tendus avec les marins… Je sais qu’ils étaient parfois à deux doigts de leur servir une tarte aux phalanges… Mais ils n’ont pas moufté. M’est d’avis que toi, t’as de bons arguments pour qu’ils t’obéissent. Comme les arbalètes que tes mignons gardaient armées, carreau dans le fut…)

« Bien. Tu formeras l’arrière garde, en binôme avec Gaspard. GASPARD ! »

Un soldat trapu, vaguement grisonnant aux tempes, presque aussi barbu que Beorth, répond immédiatement à l’appel de son capitaine. Vêtu comme ses compagnons d’une jaque de maille, d’un bonnet de maille surmonté d’un casque rond aux larges bords, il porte au dos, par-dessus son sac, un large et haut bouclier rectangulaire, de lames de bois couvertes de lamelles d’acier croisées. Comme arme, il n’arbore qu’un long braquemart au fourreau, fort commode pour une corps à corps dans une mêlée, sans doute moins pour escrimer, et une solide arbalète à levier, certes encombrante mais sans doute à même de désarçonner un cavalier d’un trait, d’infliger de redoutables dégâts à des soldats protégés par une bonne armure.

« Gaspard, v’là ton fantassin. Beorth, tu veilles sur ce gars au prix d’ta vie, compris ? Si y’a du grabuge, tout c’que t’as à faire, c’est le protéger, pendant que lui se place, et tire. Clair ? »

« Très clair. » (Au prix de ma vie… Compte là-dessus et bois de l’eau fraîche, tronche à huile…)

En colonne, la cinquantaine d’homme a traversé la ville, passé les portes sans souci aucun, grâce à un savant mélange de nomination des commanditaires, de menaces et de yus, pour gagner enfin la route vers Omyre. Beorth ferme la marche, avec le compagnon qu’on lui a affublé, et devant lui quelques solides gaillards, dont le visage marqué par l’âge traduit le statut de vétéran.

« T’as d’la veine d’êt’ tombé avec nous z’aut’. Les bleus, on les colle au milieu, et avec tout l’barda à traîner ! »

« Ah ouais ? Et y’a quoi derrière ? Les traine la patte ? »

Le soldat, loin de s’offusquer, part dans un court éclat de rire, avant de reprendre : « Tu vois, si y’a une embuscade, y’a trois façon d’voir les choses. Soit les gars d’en face nous rent’ dans l’flanc, et là, devant et derrière, on s’regroupe et on les enserre. Soit y bloquent l’avant. Soit y z’essaient d’nous avoir dans l’dos. Pour les deux derniers cas, le capitaine préfère qu’les gars, y tiennent la route, y s’défilent pas. Une colonne qui s’effiloche par le bout, c’est comme une corde, c’est foutu. Nous on tient, vu ? »

« Et toi, avec ton cure-dent, tu vas t’battre ? »

« Oh qu’non ! Pour les gars qui s’approchent, j’compte sur un gaillard comme toi pour ret’nir les merdeux jusqu’à l’eau rousse. Moi j’me cale derrière mon bouclier, j’guette ceux qu’ont l’air de chefs et j’les épingle. Pas plus compliqué qu’ça. J’tire pas vite, mais tu peux m’croire, quand j’tire, j’touche au but. J’aim’rais pas qu’on nous butte le capitaine, ou les sergents, pas’que moi j’sais c’que ça donne quand ceux d’en face perdent les leurs. »

« Pas bête… »

« Même foutrement futé ! P’têt que tu nous verras à l’œuvre ! Paraît qu’des fois y’a des troupes qui viennent des montagnes. Escarmouches, trucs comme ça. Y viennent, y tuent, y partent. »

« J’préfère pas. »


Vers Omyre - Deuxième jour

_________________
***


La plupart des hommes aimaient mieux être appelés habiles en étant des canailles qu'être appelés des sots en étant honnêtes : de ceci, ils rougissent, de l'autre ils s'enorgueillissent.

Thucydide, Guerre du Péloponnèse III, 82


Beorth - Humain - Guerrier


Dernière édition par Beorth le Mar 26 Mai 2015 16:00, édité 1 fois.

Haut
 

 Sujet du message: Re: Route entre Dahràm et Omyre
MessagePosté: Mar 26 Mai 2015 15:59 
Hors ligne
Avatar de l’utilisateur
 Profil

Inscription: Sam 9 Mai 2015 03:06
Messages: 1129
Vers Omyre - Premier jour


Pas de halte impromptue pour pisser. La consigne est simple : aller à Omyre le plus vite possible, et qu’importent les soucis de chacun, ampoules, crampes ou coliques des hommes, le capitaine ne transige pas. Les sergents encadrent la colonne, ont des yeux dans le dos, des oreilles grandes ouvertes, prêtes à saisir le moindre pas de travers, la respiration faussée, le signe d’une faiblesse. Parce qu’ils sont vigilants, personne n’ose transiger à la règle ; à moins que ce ne soit par habitude de la discipline de fer durant les missions. Beorth l’ignore, et sa vessie commence à le travailler. Bien sûr, il peut patienter, mais ne pas pouvoir prendre quelques secondes pour se soulager l’agace prodigieusement. Pour cette seule raison, il ne s’engagera pas dans cette troupe, même si on le lui demande, quand bien même lui a-t-on vanté les vertus de cette sévérité. Gaspard est intarissable d’éloge envers son capitaine, dont il loue tant les capacités martiales que la sagacité permanente dans les situations plus tendues de la négocation.

« Va pisser. »

« Quoi ? »

« Va pisser j’te dis. Vas-y, le sergent r’gard’ra pas. J’te f’rais pas d’coup de pute, si j’te dis qu’tu peux aller pisser, c’est qu’tu peux. Privilège de fermer la marche, tu vois ? » explique-t-il avec un clin d’œil appuyé et un sourire à peu près franc.

(Si y me joue un sale tour… Je lui ferai bouffer toutes ses dents…) Et puis désobéir un peu à ces ordres n’est pas pour déplaire au guerrier, au moins affirmera-t-il par là son indépendance. Il profite du groupe pour sa sécurité, mais n’en fait pas partie à proprement parler. Que les sergents essaient de lui donner du fouet, et il se chargera de les rosser proprement.

Quitte à presser le pas, voire courir, pour rattraper la colonne en marche, il profite de la halte pour respirer un bon coup et de détendre les jambes, avant de délasser sa braguette et arroser un buisson poussant par là. « Par les balloches de Kubi, ça fait du bien… »

La flèche qui se fiche dans son épaule lui fait oublier en un instant son court moment de bonheur, et il vacille sous le coup de la douleur, arrosant par la même occasion ses bottes et une partie de son pantalon. Un soupçon de lucidité le pousse à courir vers le premier creux de terrain venu, et à s’y coucher. (Et si je dois crever, ça sera pas la bite à l’air ! Enfin pas comme ça…) songe-t-il en renfouraillant son attirail, tout en se demandant quel enfant de cochon l’a pris pour un lapin. Il retire la bandoulière qui retient sa hache, et, se servant du fer comme d’une protection pour son crâne, il risque un œil sur la direction d’où est venue la flèche. Pas le moindre mouvement de prime abord. Une chose l’intrigue cependant. Alors qu’il courait, il lui a semblé entendre un claquement sec, métallique, dont il jurerait qu’il n’a pas retenti lors du premier tir. Deux tireurs embusqués ? (Pourquoi fallait que ça tombe sur moi… Je voulais juste pisser, bordel !) De longues secondes s’égrainent, et aucun trait ne fuse. Pour autant, Beorth ne se risque pas à se relever. Au jeu de la patience, il compte bien avoir son adversaire. De ce qu’il a pu en juger en tâtant les mailles dans lesquelles s’est enfoncé le projectile, il n’a pas perdu beaucoup de sang, et il peut bien attendre encore un peu. Son seul souhait serait de retirer la flèche de son épaule, mais cela exigerait des mouvements un peu trop difficiles à exécuter sans se découvrir, aussi se contente-t-il de faire reposer son poids sur le flanc gauche.

« Sors donc, c’est fini ! »

« Gaspard ? »

« Sors donc j’te dis. L’est cané le salaud, j’l’ai eu en plein dans l’cou. Un tir dont j’peux êt’ fier, ça oui ! »

Se redressant à quatre pattes, puis totalement, Beorth découvre sur le chemin le vieux mercenaire, souriant de toutes les dents qu’il lui reste, l’arbalète tendue aux bras, une flèche dans le fût, pas l’air inquiet ni blessé.

« Tu m’expliques ? » grogne le guerrier.

« Parait qu’y’a des gars comme ça, des fois. Des tueurs, d’l’armée d’en face, payé, j’sais pas. Y suivent les routes, butent les voyageurs isolés. Pas d’bol, y s’est fait r’péré par un sergent. L’a fait un signe, j’ai vu. L’a fallu improviser, y m’fallait un appât pour qu’y s’montre et qu’j’le r’froidisse. Beau travail d’équipe, hein ? »

Malgré le ton jovial, l’arbalète est clairement pointée vers Beorth.

« Tu comprends, hein ? »

Aller et retour entre la pointe du carreau et le sourire de Gaspard. (J’aurais probablement fait pareil à sa place… Et je suis pas si gravement blessé que ça… Je crois… C’est le jeu, et il a gagné. Pas envie de risquer plus ma peau, mais je l’aurai à l’œil.)

« Ouais, je comprends… »

« Ben voilà ! Bon, aller, viens, pas qu’on dise qu’tu t’es fait trouver la peau pour rien. On va dépouiller l’macchabé. Y doit bien avoir quelques trucs pas dégueu dans les glaudes, qu’on pourrait r’fourguer à Omyre. »

« Si tu m’paies une pinte d’aut’ chose que d’la pisse d’âne, on s’ra quitte. Mais d’abord retire moi c’te foutue flèche. »

Le mercenaire s’approche, et pose son arbalète le temps de procéder à l’opération. Un instant, Beorth hésite à balancer son coude dans le creux de l’estomac du vieil homme pendant que celui-ci est dans son dos, mais son envie de bagarre est rapidement mouchée. Son destin, c’est Omyre, c’est là qu’il trouvera peut-être d’autres passions moins éphémères à même de le faire se sentir plus vivant. Pour ce qui est de la vie, ce qu’il douille lorsque le fer quitte sa chair lui en donne un bon aperçu. La blessure se remet à saigner, mais légèrement. Gaspard confirme que ce n’est qu’une plaie superficielle : le tir était effectué à grande distance, et la cotte de maille avait encaissé une part du choc ; il tire un peu de charpie de son paquetage, et plaque le bouchon pour endiguer un peu le saignement. « Par cont’, ta ch’mise est salopée, et t’as des mailles qu’ont sauté. »

« Pas grave. »

Ce rafistolage de fortune effectué, les deux hommes s’en vont faire leur besogne de détrousseur. Le cadavre est celui d’un humain, de plus petite stature que Beorth, aux vêtements adaptés à la vie en plein air, d’un brun-gris douteux, sans doute à même de dissimuler leur porteur dans bien des milieux ; pas assez toutefois pour échapper à l’œil vif de Gaspard.

« Moi j’prends ses bottes. M’ont l’air neuves. »

« C’pas ta pointure… »

« Rien à foutre. J’peux bien les trimballer jusqu’à Omyre. J’peux t’dire qu’là où y’a des troupiers, tu r’vends toujours d’bonnes bottes. Tout c’qui marche finit par trouver qu’vaut mieux s’payer d’bonnes bottes qu’un mauvais picrate. Tu peux m’croire. »

Boerth opine à cette sagesse de garnison. Pour sa part, il prélève son dû sous la forme d’une cape à capuchon, à peu près à ses épaules, d’un tissu traité, peut-être à même de le protéger de la pluie ; une broche en forme de feuille file aussi dans ses poches, ainsi que la bourse que Gaspard, bon prince, lui cède. Le glaive qui servait d’arme de proximité à l’embusqué rejoint avec son fourreau la ceinture du guerrier : il bringuebale un peu avec le coutelas de l’homme de main qui avait cané sur le port, mais il s’en accommodera jusqu’à destination. L’arc, il le dédaigne : jamais il n’en a manié un, et un vulgaire morceau de bois tordu ne lui inspire guère confiance ; au moins ce qui est en métal peut-être revendu pour le prix de la ferraille.

« Aller, c’est pas tout, faut qu’on r’joigne la colonne. Tu t’sens d’forcer l’pas ? »

« Et comment ! »

Arrivée à Omyre

_________________
***


La plupart des hommes aimaient mieux être appelés habiles en étant des canailles qu'être appelés des sots en étant honnêtes : de ceci, ils rougissent, de l'autre ils s'enorgueillissent.

Thucydide, Guerre du Péloponnèse III, 82


Beorth - Humain - Guerrier


Haut
 

Afficher les messages postés depuis:  Trier par  
Poster un nouveau sujet Répondre au sujet  [ 6 messages ] 


Qui est en ligne

Utilisateurs parcourant ce forum: Aucun utilisateur enregistré et 0 invités


Vous ne pouvez pas poster de nouveaux sujets
Vous ne pouvez pas répondre aux sujets
Vous ne pouvez pas éditer vos messages
Vous ne pouvez pas supprimer vos messages

Aller à:  
Powered by phpBB © 2000, 2002, 2005, 2007 phpBB Group  

Traduction par: phpBB-fr.com
phpBB SEO

L'Univers de Yuimen © 2004 - 2016