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 Sujet du message: La petite ville de Beauclair
MessagePosté: Mer 16 Fév 2011 10:04 
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La petite ville de Beauclair

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Beauclair est la petite ville dépendant du duché de Blanchefort. Elle abrite un millier d'âmes et jouit d'un climat des plus cléments, favorable aux cultures, notamment celle de la vigne. Beauclair est en effet la capitale du vin des duchés, produisant un rouge fruité et au goût fort, dont la technique de macération et de vieillissement est gardée secrète depuis toujours.

Les traditions liées au vin sont particulièrement importantes à Beauclair et ses alentours. En effet, la ville possède deux événements annuels particuliers, propre à la petite cité : lors des vendanges, le premier foulage est fait au centre du bourg, déterminant les mariages à venir. Les raisins sont placés dans une grande bassine de bois et des jeunes filles vierges mais en âge les foulent : c'est ainsi que les familles annoncent quand leurs filles sont prêtes à être mariées. Les années où le premier foulage n'est pas accomplie de la sorte parce qu'aucune fille n'est en âge, le malheur risque de s'abattre.

Toujours pendant les vendanges, le dernier foulage est fait par les prétendants. Là encore il est de bon présage que pour chaque jeune fille il y ait un jeune homme, une jeune fille n'ayant pas trouvé de conjoint avant la fin de l'année devant en effet attendre la suivante, au risque d'être trop vieille par la suite.

En dehors du vin, Beauclair est aussi reconnue pour son osier brut d'une excellente qualité. Le savoir faire des compagnons artisans en la matière remonte à de nombreuses générations, le père enseignant au fils dans la plus pure tradition paternaliste. Le résultat est plus qu'à la hauteur, l'osier étant le deuxième produit le mieux vendu aux marchands, colporteurs et autres merciers, devançant même le minerai de fer.

En cas de siège du duché, les habitants de Beauclair se pressent pour rejoindre l'enceinte du château de Blanchefort.

La ville porte des traces d'anciennes attaques que les habitants tentent de dissimuler au fil du temps, le coeur de la ville est un lieu qui ne laisse en aucun cas penser qu'elle pouvait être victime d'attaques. Cependant, à y regarder de plus près, on peut trouver nombre d'indices qui indiquent le contraire sur de petites maisons plus éloignées des autres...

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 Sujet du message: Re: La petite ville de Beauclair
MessagePosté: Ven 1 Avr 2011 12:10 
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Quand elle avait aperçu au loin le château fièrement dressé, Tisis s'était arrêtée, le contemplant longuement. Les souvenirs ressurgirent lentement, s'extirpant de sa mémoire. Ce n'étaient pas ceux auxquels elle aurait pu s'attendre, cependant. Elle ne revit par sa nourrice se faire ouvrir la gorge, ni les entrailles de sa mère encore en vie. Non, des passages plus lointains de sa vie lui revinrent, des sensations fugace: le parfum d'oranger de sa mère, la barbe drue de son père, les jeux dans le château, Armand, son premier baiser qui avait fini dans un éclat de rire.

Les moments passés avec ses frères, aussi bien Roland que Anatole, qui parfois lui racontait des histoires à en faire frémir des chasseurs de dragons. Sa première monture aussi, ainsi que les vendanges qui attiraient tout le domaine, riches comme pauvres, nobles comme roturiers.

Tout ce qui lui avait été volé en un instant, dans ce château, le siège de ses plus beaux et de ses plus atroces souvenirs. Elle s'arracha finalement à ses pensées, détournant le regard et se dirigeant vers Beauclair, la capuche mise. Heureusement, un certain nombre de chevaliers des différentes maisons seraient présents, accompagnant les seigneurs venus assister au sacre d'Anatole. Ainsi elle avait peu de chance de se faire remarquer, les villageois étant très occupés. Une Dame Chevalier était quelque chose de très rare, possible uniquement dans certains duchés et réservée à de rares cas, mais si elle se faisait discrète, elle ne risquait pas grand chose.

La jeune fille prit le chemin du cimetière pour rejoindre le bourg, se faisant bientôt accueillir par le croaillement d'oiseaux nécrophages. Les lieux étaient habituellement vides, pourtant en ce jour plusieurs beauclairois priaient sur des tombes encore fraiches. Celles-ci étaient nombreuses, tout une partie du cimetière ayant été retournée, sans doute le mois passé.

Toutes ces morts, cette souffrance donnèrent du courage et de la détermination à Tisis. Peut-être avait elle aussi causé le décès de blanforois, mais les sources de la tragédie remontait à Anatole et à Tristan. Cela n'excusait pas les actes de Tisis, mais le sang qu'elle avait sur les mains était aussi sur les leurs.

Elle passa devant chaque sépulture, s’arrêtant à chaque fois, observant les diverses offrandes faites aux dieux et aux défunts. Des objets personnels étaient déposés, parfois un bijou ou une simple sculpture en bois, voire un vêtement à présent terreux et souillé. Elle les honora, leur demandant pardon pour ces épreuves, au nom de son père et de sa famille.

Les deux femmes partirent au bout d'un moment, faisant un tour rapide de la ville dans l'espoir de ne pas croiser de valoriannais. C'eut été trop beau, mais ceux-ci restaient peu nombreux, mal à l'aise avec les différents chevaliers qui leurs jetaient des regards noirs. Tisis fut soulagée de voir que les bâtiments n'avaient pas trop souffert de l'attaque des orques. Millana alla se renseigner, demandant ce qu'il s'était passé. On lui apprit que les orques avaient attaqué pendant que les villageois étaient au château. Certains s'étaient à priori introduits dans celui-ci, causant la plupart des morts, mais les portes n'avaient pas été ouvertes.

Comme les vivres avaient été mises au château, les hommes-porcs n'avaient rien trouvé d'intéressant et étaient partis. Ils s'étaient à priori dirigés vers Valorian, dont les hommes étaient prêts et avaient massacré la menace. La femme qui avait renseigné Millana n'avait pas manqué de lui chuchoter que Valorian avait certainement quelque chose à voir là-dedans, personne ne les aimant. Elle lui conseilla d'éviter les soldats étrangers autant que possible.

Ce n'est qu'en dehors des palissades que des fermes et autres maisons isolées avaient souffert de l'attaque. Certaines d'entre elles avaient été brûlées, mais au final les dégâts étaient mineurs. Si les orques avaient sûrement tué quelques villageois, la plupart des tombes avaient été creusées par Valorian.

Tisis ne resta pas à Beauclair. Ayant appris ce qu'il s'était soi-disant passé et estimé la présence de ses ennemis, elle quitta la ville, retournant à l'abri des arbres et de la forêt. La future duchesse demanda à Millana d'échanger ses vêtements avec elle, car si elle était vue dans le château avant ou après l'assassinat de son frère, mieux valait qu'elle ne porte pas un pourpoint avec le symbole de la famille. La servante sembla gênée mais ne protesta pas. Se séparer de ses armes était déshonorant et grave, mais seul comptait le résultat à présent.

La tenue de la servante était légère en comparaison de la maille. Mieux valait qu'elle ne prenne pas de coup d'épée. Dans tous les cas, elle ne ressemblait guère à une duchesse ainsi, si ce n'est pour son regard perçant et presque régal. Les serviteurs du domaine se devant d'être propres, elle chercha un cours d'eau pour se laver le visage et les chaussures. Ce n'était pas parfait, mais cela ferait l'affaire.

Ne resta plus qu'à attendre la nuit, l'adolescente aiguisant ses armes et inspectant ses flèches. Ce soir, elle allait tuer son frère.

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 Sujet du message: Re: La petite ville de Beauclair
MessagePosté: Dim 3 Avr 2011 12:53 
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Les hommes étaient repartis une fois leur mission accomplie. Victoire n'avait pas voulu qu'ils restent plus longtemps, désirant uniquement rester seule. Leur simple vue lui donnait envie de vomir et de hurler. Tant qu'ils étaient près d'elle, elle ne pouvait s'empêcher de se comparer à son frère, qui avait fait appel à pareils tueurs pour des actions au final tellement proches de ce qu'elle venait d'accomplir. Tant qu'ils étaient là, ils lui rappelaient qu'elle ne valait pas mieux que Anatole.

Elle se retrouva seule, dans les bois, marchant vers la petite clairière où elle avait laissé Millana. Elle avançait lentement, sans se presser, profitant de l'épais manteau de ténèbres pour se cacher d'elle-même. Elle revoyait le corps de son frère, se vidant de son sang sur le sol dans un gargouillis infâme. Le sang sur la chaise, sur l'épée, sur ses mains... Son agonie avait été rapide, mais il avait souffert, parce qu'elle n'avait pas été capable de donner un deuxième coup pour proprement séparer la tête du cou. Non, elle l'avait laissé dans cette position grotesque, la peau, les tendons et les vertèbres à découvert.

Ses jambes se dérobèrent sous elle alors qu'elle tombait à genoux, répandant une bile horrible sur la terre. Son ventre la fit se tordre de douleur, son souffle coupé alors qu'elle était prostrée, parcourue de tourments. Elle vomit de nouveau, comme pour cracher la souillure de son âme, la trace éternelle du meurtre qu'elle venait de commettre de ses propres mains.

Malgré l'obscurité et la nuit noire, elle voyait encore le sang sur ses mains, le rouge étant la seule couleur qu'elle parvenait à distinguer. Comme parcourue d'hystérie elle se frotta les doigts, les plongeants dans la terre humide, cherchant par tous les moyens à faire partir cette tache ignoble. Rien n'y fit, plus elle se grattait, plus la couleur était visible, tout comme l'odeur du sang.

Elle se calma au bout d'un long moment, lorsque ses mains la firent gémir de souffrance. Allongée sur le sol, haletante, elle ramena ses genoux contre son ventre, prenant une position larvaire, fœtale. Des sanglots la saisirent, d'abord légers puis de plus en plus forts, à mesure que son âme pleurait l'innocence perdue à jamais.

Le sommeil la prit finalement, lui accordant un repos hanté par des rêves sombres et cruels, les dieux se moquant du pathétique de la jeune fille, la condamnant pour ses crimes et sa monstruosité.

***

Le froid la réveilla, au milieu de la nuit. Elle se redressa, lentement, d'un équilibre précaire. La douleur ne l'avait pas quittée, mais elle ne la figeait plus, la laissant reprendre possession de son corps. Elle erra, telle une âme en peine, se dirigeant vers sa servante du mieux qu'elle le pouvait.

Elle n'aurait su dire comment elle retrouva Millana, l'esprit obscurci et les pensées bien lointaines, orientées uniquement vers le passé et le château, siège de tous les crimes et toutes les atrocités. Son château. Elle parvint néanmoins à rejoindre sa servante, visiblement très inquiète par le retard de sa maîtresse.

"Mademoiselle Victoire! Comment cela s'est-il passé? Vos main! Vous saignez! Venez vous asseoir."


Victoire obéit, bien trop distante et brisée pour résister. Millana sembla s'inquiéter des mains de la jeune fille, qui s'était grattée jusqu'au sang, s'abimant sa peau fine et douce. La servante les nettoya avec de l'eau, avant de les entourer de bandages que lui avait donné l'infirmier de Keresztur. La future duchesse n'avait dit mot, incapable de s'exprimer, incapable de simplement faire le tri dans ses pensées, hantée par le fratricide.

Millana passa sa main sur la joue de la jeune fille, visiblement touchée par la souffrance de sa maîtresse. Elle passa une couverture humide sur les épaules de Victoire, avant de l'aider à se lever, l'entrainant vers d'autres couvertures, posées sur le sol. L'adolescente se laissa guider sans mot dire, ne protestant pas lorsque la servante la fit s'allonger, la prenant dans ses bras, comme l'aurait fait une petite sœur triste de voir les peines d'amour de son ainée.

Victoire ne méritait aucune compassion, aucune tendresse, aucun soutien. Elle avait tué de sang froid, elle avait assassiné son frère et jeté l'âme de celui-ci aux chiens infernaux, aux barghest dévoreurs. Elle-même s'était condamnée à pareils tourments, devant attendre que son heure arrive pour répondre de ses crimes et se faire déchiqueter par les crocs de ses victimes maudites.

Elle ne méritait pas les bras de Millana, mais elle les apprécia tout autant, trouvant de nouveau le sommeil, plongeant dans des limbes déchirantes et acérées.

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 Sujet du message: Re: La petite ville de Beauclair
MessagePosté: Dim 8 Mai 2011 15:42 
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Cela faisait maintenant depuis presque 24 heures que le transport était parti de Valmarth. Nolan et Edmund s'impatientèrent à l'intérieur à cause de la longueur du voyage. Pendant tout ce temps à part au début du voyage pour Edmund, ils ne surent quoi faire du temps. Dispersé entre regarder par la lucarne ou lire, il n'y avait pas grand chose à faire. Surtout que le jeune homme n'est pas de nature très loquace, c'est plutôt le contraire …. C'est pour cela que vers les dernières heures du trajet, le majordome décida d'essayer d'en savoir plus sur ce comptait faire Edmund, car même si il avait déjà parlé, il avait toujours était flou sur le sujet.
Il entama donc la discussion en commençant par demander que une fois arriver à Beauclair ce qu'il fallait faire.

"Vous voulez absolument tout connaître Nolan … Dans ce cas que dire …"

Il semblait réfléchir à comment expliquer tout ceci à l'homme en face de lui, puis se força donc à en parler avec Nolan.

"En réalité je vais à Beauclair pour ces papiers."

L'interlocuteur s'interrogea. Pourquoi donc aller faire tout ce long trajet pour Beauclair pour de simples lettres ? Même si ce qu'elles révèlent est capital, cela à quoi en rapport avec le fait d'aller en ville ? C'est ce qu'il posa à Edmund.

"C'est simple, en premier lieu je dois authentifier ces lettres. Grâce à cela je pourrai d'or et déjà acquérir le titre 'officiellement' pour éviter tout risque."
"En deuxième, je devrai trouver une poignée de mercenaire de préférence qui ont perdu la raison …"
"Ces mercenaires là me seront utile plus tard évidemment …. Mais je pense que la partie la plus difficile en fait à ce moment sera d'obtenir une audience avec le duc. Cela risque fortement de poser problème, mais on se débrouillera après tout …"


Nolan eu les réponses qu'il voulait à présent. Bien que le jeune homme n'eut expliqué que le début de ses projets, il s'en contenta pour le moment.
C'est donc avec toutes ces idées dans leur tête qu'ils finirent le voyage et arrivèrent enfin aux portes de Beauclair. Une petite ville magnifique et accueillante, assez distingué pour un duché comme celui-ci. Une joie s'empara de Edmund au moment où il vît les premiers édifices de la ville, cela signifiait tout simplement que ce long et interminable trajet arrivait à son terme. Près de 24 heures après, à rester tasser dans une charrette à ne rien faire ...
Cette dernière donc pénétra l'enceinte de la ville lentement et s’engouffra dans l'artère principal.
Edmund observa les alentours au travers la petite vitre pour repérer à l'avance l'endroit où il comptait aller depuis le départ. En fait c'est une personne bien précise à qui il doit parler, une sorte de responsable ou quelque chose dans le genre. Le transport marqua son chemin au travers de l'avenue pour terminer sa longue course sur une place, certainement le cœur de la ville.
Enfin immobilisé, le jeune homme soupira un coup. Cette même place semblait assez fréquenté du au nombre assez important de civils l'occupant.
Il se tourna vers son majordome et commença à ouvrir la petite porte.

"Vous venez ou vous restez ?"

Nolan su à l'instant quoi lui répondre, il avait déjà préparé sa réponse en fait.

"Je vous prie de m'excuser, mais je ne vais pas pouvoir vous suivre jusqu'à l'héraut.

Pour une fois c'est Edmund qui fût un peu surpris de ce que dis l'homme âgé. D'habitude c'est toujours l'inverse, mais ce coup-ci Nolan avait réussi à le surprendre.

"Tient donc ? Pourquoi cela ?"


L'interlocuteur sourit à ce moment là puis ouvrit la porte à la place de Edmund. A ce stade là, certainement qu'il avait quelque chose en tête, une idée.

"La journée passe vite monsieur, je vous conseille de ne pas tarder pour ce que vous devait faire."
"Ne vous inquiétez pas pour moi, je dois juste aller faire une petite affaire, rien de spécial …"


Le jeune leva un sourcil puis descendit de la charrette. Le soleil le prit directement l'éblouissant un instant. Le temps de regarder un peu ce qui l'entoure pour prendre, il se mit en marche vers la bâtisse. A vrai dire il ne va que très rarement en ville, c'est pour cela qu'à chaque descente il a un eu l'impression de ne pas connaître ce lieu. Pas à pas, en gardant en tête précisément le déroulement, il franchit la porte. Plein de personnes étaient présentes à l'intérieur, certainement pour diverses raisons. Après tout on est dans l'administration …
Un peu perdu car il ne su pas vraiment où était l'héraut, il interpella quelqu'un qui semblait travailler ici.

"Excusez-moi de vous interpeller, mais j'aurai besoin d'un renseignement …"

La personne en question était une femme de taille moyenne, pas vraiment jeune aux abords, portant une pile de documents dans ses bras.
Elle scruta rapidement le jeune homme, surtout à son style vestimentaire qui rappela tout de suite sa classe sociale.

"Vous voulez savoir quoi ?"
"Voilà, serait-il possible d'avoir un entretient avec l'héraut ?"

La femme prit un air assez sérieux puis répliqua à Edmund.

"Je ne pense pas que cela soit possible maintenant, selon la procédure vous auriez du envoyer une missive 4 jours à l'avance pour prendre un futur entretient avec l'hé ….."

Elle nu pas le temps de finirent la phrase que Edmund n'était plus là. Il reconnu la personne en question et se dirigeait vers elle. Une fois assez près il l'interpella à son tour. C'était effectivement l'héraut.

"Bonjour, vous êtes bien l'héraut si je ne me trompe ?"

Ce dernier d'un simple coup de regard sur la personne qui lui parle comprit à quel rang il appartient, ce qui pouvait justifier son attitude plutôt calme, voir même 'coopératif'.

"Bonjour monsieur, oui je suis effectivement l'héraut, que puis-je faire pour vous ?"
"J'ai plusieurs papiers administratifs à faire valider …."
"Ah … Quel genre ?"
"… Disons héritage."

Le visage de l'héraut s'illumina d'un seul coup.

"Il fallait le dire plus tôt, suivez-moi je vous prie."

Les deux hommes arrivèrent dans une pièce juxtaposée au hall principal dans laquelle se trouvait une table en bois ciré et deux chaises. Des armoires rempli de documents et de feuilles dépassantes ornaient les murs. Les fenêtres étaient épaisses, tellement que la lumière avait un peu de mal à pénétrer. Ceci étant dit, le futur seigneur s'assit mais l'héraut lui fouilla une des nombreuses armoires et étagères pour finir par mettre la main sur plusieurs feuillets qu'il posa sur la table. Il prit une plume imbibé d'encre puis entama l'entretient  :

"Je vais devoir d'abord prendre votre nom ..."

Edmund regarda à droite et à gauche rapidement pendant que son interlocuteur lui demanda son nom.

"Edmund de Valmarth …"
"Parfait … Donc à présent montrez-moi les papiers concernant l'héritage."
"J'ai oublié de vous dire que c'est un héritage de titre, non de fortune …."

L'homme leva la tête un instant et semblait un peu étonné de cette phrase.

"Oui, bien sur."

Le jeune sortit de sa besace une seule lettre, concernant justement la seigneurie et la succession. Il la posa sur la table, bien ouverte en la tournant dans le sens de lecture de l'héraut. Ce dernier la rapprocha de lui et commença à la lire. Quelque chose alors sembla retenir son attention.

"Bien, donc vous voulez faire authentifier cette lettre pour hériter de ce qu'est stipulé entre ces lignes ?"
"Oui, c'est cela."

Il regarda la signature, la date puis le point de cire sur l'enveloppe. Il avait besoin d'une preuve que ce jeune homme est bien un membre de la famille de Valmarth, il ce peut que ce soit un imposteur qui cherche une fraude.

"Je vais avoir besoin d'une preuve monsieur … Possédez-vous le Blason ?"
"….. Il me semble."

Il fouilla dans sa besace, sur lui, puis se souvenu de son pendentif portant la marque familial, ce fameux Blason. Qui ce même objet à son dos porte la marque de son fabriquant, témoignant de son authenticité.

"Tenez."


Il défit la chaine puis tendit le pendentif à l'homme. Il pu donc vérifier que les deux symboles sont exactement, sans aucuns défauts ni anomalies, identiques. Ceci attesta donc que le jeune homme est bien celui qui prétend être, que cette lettre est réellement écrite par la main de sa mère, étant donné que le point de cire porte aussi le blason.

"De par cette lettre et les preuves que vous m'avez apporté, il semblerait effectivement que vous hérité du titre appartenant à votre famille."
"J'aimerai de préférence ne pas y passer la journée si vous comprenez …. Ai-je bien cet héritage comme le stipule ce papier ou y a t'il un autre problème ?"
"Non, tout est en règle. Vous êtes à présent Seigneur si je puis me permettre …"
"Sire Edmund de Valmarth."
"Je vous remercie …"
"Je ferai parvenir une lettre pour que cela soit véritablement bien à jour dans toutes les seigneuries. A présent vous vous n'avez plus rien faire concernant ceci, vous pouvez y aller."

Edmund se leva, mais il du laisser la lettre aux mains de l'héraut car il en aura besoin pour les autres seigneuries comme il l'a dit. Le nouveau seigneur prit alors la direction de la sortie pour rejoindre la place devant la bâtisse.
Quelque part au fond de lui, il est assez content voir même heureux qu'il porte à présent ce titre. Même si il sait que ce n'est qu'en apparence, car il doit d'abord rendre la justice, cela avait crée son effet sur lui. Rien que lorsque l'héraut lui avait dit son nom complet en ajoutant la particule 'Sire', cela intérieurement lui avait procuré un sentiment de fierté.
Mais de toutes les manières, ce sentiment ne sera que de courte durée …

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 Sujet du message: Re: La petite ville de Beauclair
MessagePosté: Dim 8 Mai 2011 22:45 
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Edmund ne voulu pas vraiment profiter de la journée pour trainer en ville, ce que Nolan semble faire actuellement à ses yeux. A présent il devait trouver des mercenaires comme il l'a dit, leur utilité il le réserve pour plus tard. Quel était le meilleur endroit pour dénicher des truands ou des coupe-gorges ? La taverne fût son premier choix. Il traversa le long de toute la place en ne faisant pas attention au monde qui l'entoure. C'est au dédale d'une ruelle qu'il poussa la porte d'une taverne à l'apparence assez mal fréquenté. D'un coup de balayage au regard il scruta brièvement la salle et ses occupants. C'était étrange de jour là, aucune tête ne semblait être celle d'un tueur ou d'un malfrat … La malchance sans doute. Il jugea alors que rester dans un endroit pareil au bout de 10 minutes à observer les clients ne servait plus à rien, il sortit donc. Ne sachant où précisément fouiller pour se dégoter une belle bande de mercenaires tarés, il erra quelques minutes dans les rues, dans l'espérance de trouver une solution à ce problème.
Ces hommes de main qu'il cherchait en fait serviraient à, premièrement sa défense personnel car très prochainement il risque d'en avoir un grand besoin.
Deuxièmement, à la vue de ce qu'il prévoit de faire dans quelques jours, ce ne sera que bon pour lui d'avoir de l'escorte.
Le temps passait, courrait contre lui à toute allure à sa plus grande déception …. Celle de ne pas avoir les ressources nécessaire, celle qu'il cherche depuis déjà plusieurs dizaines de minutes.
C'est avec une frustration additionner avec de la colère contre lui-même qu'il prit le chemin du retour vers la charrette. Ceci lui prit pas mal de temps étant donné qu'il s'était engouffré dans les plus profondes ruelles de Beauclair.
Arriver à quelques mètres de sa destination il observa Nolan, sortant d'une habitations et lui aussi se dirigeant vers la charrette. Ce ne fût que lorsque l'homme s’aperçut que Edmund était aussi là qu'il le rejoignit de ce pas. Un air sur son visage s'était imprimé, le majordome semblait bien heureux alors que la situation n'y prête pas. Au moment d'entrer dans le transport, Nolan interpella le jeune seigneur.

"Je vous content de vous revoir monsieur. Comment ça y était avec l'héraut ?"

Il ne répondit pas tout de suite, son humeur était plus que mauvaise. Mais par politesse il du répliqué à son majordome.

"Bien, tout s'est bien passé, je ne vois pas pourquoi ça n'irai pas …"

"Pourtant vous semblez bien contrarié."

Edmund s'énerva un peu à cette phrase, qu'il haussa légèrement le ton.

"Un peu, oui je suis contrarié, et en colère contre moi-même !"


Même si le jeune homme s'énerva, Nolan gardât son calme et une bonne humeur, ce qui paru assez troublant.

"Voyons monsieur, il ne faut pas. Vous avez eu ce que vous voulez, de quoi êtes vous contrarié ?"
"Du fait que je n'ai pas réussi à me trouver des mercenaires ! Sans eux je ne pourrai jamais partir pour Amaranthe !"

Une nouvelle fois l'homme âgé fût étonner que Edmund veuille partir pour le duché d'Amaranthe. Bien que pour l'instant ce serai une mauvaise idée de lui demander pourquoi, il tenta quand même de lui dire quelque chose.

"Je pense que vous devriez me suivre, j'ai quelque chose qui pourrait vous faire changer de cette mauvaise humeur monsieur."

Edmund lança un trait de rire sarcastique, comme ci il doutait fortement que Nolan puisse y faire quoique ce soit. Mais étant donné qu'il sait parfaitement que le majordome fera tout pour qu'il le suit, il coupa court à tout ceci. Il accepta donc la proposition de l'homme et le suivit jusqu'à cette fameuse habitation où il était sortit tout à l'heure.
Le jeune homme ne su pas quel était le but de tout ceci de la part de Nolan, mais il ne tarda pas à le découvrir.
Les deux passèrent la porte de la modeste habitation. Le majordome semblait connaître parfaitement la maison puisque il se dirige au travers des petits couloirs avec aisance et sans na pas savoir où aller. Ils finirent par arriver dans une pièce plutôt grande, assez bien décoré sur les murs criblés de cadre et d'étagères. Un fauteuil était posé un peu plus loin, orienté vers la fenêtre, donc faisant dos à Edmund. Une main ridé dépassée sur l’accoudoir du siège. Nolan resta silencieux jusqu'à ce que le vieil homme assit dans ce fauteuil prit la parole.

"Tu as donc réussi à le tirer ici malgré sa forte tête ? Bravo Nolan …"
"Il est toujours comme ça lorsqu'il ne réussit pas ce qu'il entreprend." Dit-il d'un ton légèrement taquin.
"Mauvais caractère, comme son père …"

Le seigneur fût surpris que cet homme qui le connait certainement pas puisse faire référence à son père et surtout à son sale caractère. Comment peut-il savoir cela ? L'avait-il connu ?
Le vieil homme ne s'arrêta pas là, mais avant toute chose il se présenta. Il se leva de son fauteuil et fît face à Edmund.

"Je me présente, Richard Watts, à votre service."
"Et vous vous êtes certainement le fils de Philosert de Valmarth … Je me trompe ?"


Le jeune homme eut beaucoup de doutes sur cet individu. Pleins de questions envahirent sa tête à son propos mais pour le moment il devait se contenter de lui répondre.

"…Oui."

Richard balança un très fin rire et se dirigea vers la fenêtre. Il avait un air certes âgé, mais aussi posé et 'sage'. Ses cheveux blancs en témoignaient, ainsi que ses doigts frêles et fripés.

"Vous vous demandez certainement qui je peux bien être et que faites-vous là … Je vais donc tenter de vous apportez un peu de lumière dessus."
"J'étais un ami proche de votre père avant sa mort, comme un homme de confiance. Il m'a beaucoup parlé de son fils, vous."
"Il voyait en vous son successeur … Mais tout comme votre mère et beaucoup de ceux qui les ont suivis, il se doutait bien de ce qu'il pourrait lui arriver."
"C'est donc pour cela qu'il m'a chargé d'une tâche …"


Edmund était très curieux au sujet de ce vieillard. Il le laissa continuer son discours.

"Vous cherchez à apporter de l'éclaircissement sur cette sombre affaire, ceci vos parents l'ont prévus. Vous cherchez aussi des moyens, de la ressource … Non pas matérielle mais en force. Vous cherchiez des mercenaires si je ne me trompe ?"


Sans hésiter le jeune seigneur lui répondit.

"Oui, mais je n'en ai pas trouver. Je ne pense pas qu'à Beauclair ce type d'individu existe à vrai dire."

"Vous n'avez pas tort, cela n'existe pas ici."

Edmund fût un peu déçu par ce que venait de lui dire le vieil homme.

"De fier guerrier Kendran serai mieux … C'est cela qu'eut dit votre père en tout cas."


Richard fît un signe à Nolan et ce dernier parti autre part. Le vieil homme rassura Edmund qu'il reviendra bientôt avec 'Le présent de son père'. En effet, quelques minutes après il revenu avec 10 hommes habillés d'une tunique aux couleurs bleu vif et noir. Ils étaient armés de sabre pour la plupart, mais il y en avait un qui était avec une épée. Le jeune garçon comprit tout de suite que celui-là était le chef du groupe. La joie apparu sur son visage d'ailleurs, voilà ceux qu'il cherchait depuis un petit bout de temps … 10 Kendran prêt à en découdre avec n'importe qui.

"Philosert m'avait chargé de trouvé dix hommes, les plus compétents qu'il soit pour vous aider dans votre enquête si je puis dire comme cela …"
"Erwan, venait donc saluer le seigneur de Valmarth."


Erwan était le chef des 10 hommes, celui qui avait une épée à la place d'un sabre comme ses autres camarades. Il venu devant Edmund puis s'inclina légèrement avant de se relever aussitôt. Cet homme avait une caractéristique physique le démarquant de tout les autres, des moustaches en pointes accompagnés d'une barbiche.

"Je suis content de faire votre connaissance Edmund." Dit Erwan avec un ton neutre.

Richard rejoignit le chef, mais c'est le jeune qui prit la parole à ce moment.

"Comment est-ce possible ? Comment mon père a-t'il pu prévoir ce que j'allais faire ?"

"Il n'est pas allé bien loin …. Il a prévu en se disant comment aurai t'il fait lui dans la même situation que la votre et la réponse lui est venu."
"Je vois …"
"Cependant jeune homme, faites bien attention. Ce n'est pas parce que vous serait correctement escorté que vous devez lâcher la garde. Erwan se chargera de vous apprendre à vous battre pendant tout votre périple. Du moins jusqu'à ce qui soit encore en vie …"

Nolan et Edmund acquiescèrent. Richard les fixa, puis retourna dans son fauteuil. Erwan et ses hommes partirent en dehors de la maison, en attente de Edmund et son majordome.

"Merci beaucoup. Je vous serai reconnaissant po …."


L'homme lui coupa la parole.

"Vous me serai reconnaissant certes je n'en doute pas, mais en réussissant cette 'quête' que vous a confié vos parents." Dit-il d'une voix sérieuse.
"Ah, une dernière chose avant que vous partiez … Vos ennemies ne vont pas tarder à savoir ce qui se passe, ce que vous faites. Lorsque ils l'auront appris, faites très attention à ceux qui vont entourent car tout le monde sera à ce moment là pourront être des espions ou des traitres …"
"…"

Edmund ne su quoi répondre à cela. Nolan alors dit au jeune de sortir. Lorsque le majordome et Richard se retrouvèrent seul, le vieil homme dit une derniière chose à Nolan avant qu'il part à son tour.

"N'oubliez pas Nolan, vous serez mes yeux et mes oreilles dans cette affaire. Vous pouvez veiller à ce que les mercenaires gardent la vie, je n'ai rien contre, loin de là. Mais tâcher vous de le rester et de me rapporter ce que vous avez vu et entendu ... Je compte sur vous Nolan."


Nolan ne dit rien, il savait pourquoi Richard venait de dire ceci et parti rejoindre Edmund dehors.
Les deux rejoignirent donc les mercenaires, tous étaient prêt pour se rendre au duché d'Amaranthe. Le voyage se fera donc à pieds … Et il risque même d'être imprévisible.

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 Sujet du message: Re: La petite ville de Beauclair
MessagePosté: Mar 2 Aoû 2016 16:59 
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Beauclairois, beauclairoise … et Haple I


La nuit qui suivit cet après-midi d’entrainement fut une nouvelle fois agitée. En effet, le songe récurrent de l’agneau noir, du berger et du loup était revenu hanter son sommeil. Ce rêve qui voyait un animal égaré se faire retrouver par son guide pour mieux être offert en sacrifice aux crocs d’un prédateur vorace… Et encore une fois, c’est l’esprit entre deux eaux qu’elle émergea de ses pensées où tournoyaient les portraits flous et éphémères du Likyor rencontré aux premiers jours de son exode, de la guide de montagne Roche, morte pour la sauver de démons ailés, et le visage émacié à la barbe de trois jours de M. Pulchinel qui l’observait en silence…

Haple se frotta les yeux. Ça, ce n’était pas un rêve : il l’observait bel et bien, la tête tournée par-dessus l’épaule, un sourire en coin sur ses lèvres :

- Not’ princesse au p’tit pois est parmi nous. Alors on a le sommeil agité mais on dort jusqu’à pas d’heure ?

- Ah, commenta le drapier distraitement avant de s’adresser à sa jeune passagère, mange un petit quelque chose, on sera bientôt arrivé à Beauclair. Et je ne veux pas qu’on dise que je t’ai laissé mourir de faim haha, plaisanta-t-il.

Alors Haple se redressa gauchement contre un bord de la charrette et tira à elle le sac de toile cirée qu’elle savait contenir les vivres pour en sortir de quoi sustenter son appétit grandissant.

***


Ils avaient déjà dû faire un bon bout de chemin ce matin car l’elfe ne reconnaissait pas du tout ce paysage qui était pour elle des plus dépaysant. Tout était anthropisé, remarqua-t-elle tout en plongeant ses dents dans une miche de pain désormais élastique : la nature était présente mais partout la main de l’Homme était visible. Il y avait la route sur laquelle ils circulaient, naturellement, mais elle était désormais bordée de murets de pierres en camaïeux de gris entre lesquelles se logeaient pissenlits encore jaune et chardons déjà mauves. Par-delà cette bordure tant minérale que végétale s’étendaient sur leur droite de doux vallons aux pentes ensoleillées que zébraient d’innombrables rangées de ceps de vigne. De l’autre côté, c’étaient les plaines qui prédominaient, avec leurs champs de blé blond que les faucheurs commençaient à mettre en botte.

Haple avait bien sûr grandie entourée d’une abondance de plantes comme elle en voyait aux abords de Beauclair. Mais c’était une végétation sauvage, dont les siens prélevaient les vivres nécessaires à leur alimentation sans chercher à en maitriser la production dans le temps et l’espace comme le faisait ces humains. Et la jeune elfe était éblouie par l’efficacité du système : car il n’y avait qu’à regarder les paniers débordant de raisins que transportaient ces ingénieux travailleurs de la terre pour juger de la supériorité de ce système de culture par rapport à la tradition de cueillette des Hinions.

De jeunes humaines accoudées au muret contemplaient elles aussi la danse machinale des moissonneurs. Leurs cheveux étaient coiffés d’une manière que l’elfe n’avait jamais vue auparavant : de fines tresses convergeaient des bords de leur cuir chevelu en un chignon sagittal où elles fusionnaient en une longue et épaisse natte qui rebondissait dans la cambrure de leur dos comme elle riait de bon cœur. Ou plutôt… celles-ci gloussaient et l’elfe en compris la raison : ce n’était pas le spectacle de la récolte qu’elle observait avec tant d’amusement mais les jeunes hommes qui était au labeur. (Idiotes…) Et bien qu’elle les méprisât aussitôt pour cette frivolité, Haple ne put s’empêcher de ressentir une légère et incompréhensible torsion de l’estomac à la vue de ces dos nus et luisant de sueur, à la peau dorée et aux longs muscles dont les traits lui parurent un aussi doux relief que ceux du paysage vallonné.

***


Toute à son examen de cet environnement des plus exotiques, Haple aperçut tout juste les toits de tuile de Beauclair que, déjà, ils pénétraient dans les rues du village. De part et d’autre de la grande rue par laquelle ils arrivèrent, se dressaient sur trois étages de hautes maisons de torchis blanc à colombages noires. Plus ils s’enfonçaient dans la bourgade, plus les gens dans la rue se faisaient nombreux. Certains ramenaient de ces paniers qu’elle avait vu dans les champs, tandis que d’autres s’attelaient sur un édifice de bois, une estrade de quelque sorte, surmontée d’une potence où ils fixaient de splendides guirlandes de fleurs blanches et rouges dont elle ignorait le nom. D’autres encore déambulaient simplement par groupe et regardaient avec excitation ce qui semblait être les derniers préparatifs d’une grande fête, ou bien finalement, certains hélaient gaiement le conducteur de la chariote du drapier.

Et peut-être est-ce cela qui ramena l’esprit ébloui de l’adolescente à sa situation – ou bien peut-être était-ce le brouhaha grandissant après tant de jours passés dans le silence des montagnes. Quoiqu’il en soit, le drapier, qui répondait d’un air jovial à l’accueil de ses concitoyens, se tournerait bientôt vers elle pour lui demander l’adresse de ses parents prétendument tonneliers à Beauclair… Il lui fallait fausser compagnie à son bienfaiteur au plus vite ! Son cœur battait à tout rompre, elle se sentait acculée, prise au piège, comme le jour de l’enterrement de son père où elle avait poussé sa mère dans la tombe sur un coup de sang… Et encore une fois, son sang-froid elfique s’évanouit pour laisser place à l’impulsivité de l’enfant.

Haple agit au quart-de-tour : l’air de rien, elle s’assit sur le rebord contre lequel elle s’était adossée jusque-là, puis dans le silence le plus complet, la petite plume se laissa tomber sur la chaussée pavée et marcha droit à travers la foule, tête baissée et balluchon en main, en direction de la plus proche bifurcation. L’adrénaline lui donnant des ailes, Haple parvint en l’espace d’un instant sous l’ombre protectrice d’une étroite ruelle au sol de terre battue. Elle pouvait sentir des échardes du colombage en manque de ponçage lui piquer l’arrière du crâne alors qu’elle s’était vivement plaqué contre le mur, à peine avait-elle passé le coin de la rue. Mais les sensations aussi bassement physiques n’avaient pas prise sur l’ivresse qui l’avait gagnée au cours de cette folle échappée ! Elle ne voyait pas non plus ce que ses yeux aux pupilles dilatées regardaient, pas plus qu’elle n’entendait ce que ses oreilles bourdonnantes percevaient… Et lorsque, imprudente qu’elle était, Haple tourna la tête par-delà le coin du mur pour regarder si on l’avait suivi, ce n’est que d’une main distraite qu’elle retint son fichu accroché dans des fragments de torchis délabré.

Avec satisfaction, la fugitive vit la charrette emporter au loin les deux hommes. Mais juste au moment où elle tournait la tête et ramenait son attention vers la ruelle, elle crut apercevoir du coin de l’œil M. Pulchinel qui regardait dans sa direction par-dessus son épaule… (Bah, s’il avait voulu cafté mon imposture à M. Bertrand, il l’aurait fait il y a longtemps.)

Alors, l’ombre de crainte qui avait menacé de noircir son humeur disparut et un sentiment de soulagement la gagna, de fierté aussi, car elle était – enfin ! – libre de toute autorité adulte… et cela grâce à son ingéniosité, sa malice et son audace ! L’aventure, la vraie pouvait commencer : à elle de faire son chemin désormais ! Et comme elle l’avait planifié depuis la grotte des affaires, elle profiterait des festivités de Beauclair pour se gagner un peu d’argent par ses talents naissants de percussionniste.

Mais avant tout, il lui fallait être présentable. Les deux derniers jours du voyage avaient laissé ses habits empoussiérés et sa peau barbouillée, songea-t-elle à la vue de ses bras. Tournant la tête de l’autre côté, Haple nota l’heureuse présence d’une large et rustique fontaine à l’autre bout de la ruelle. Sans attendre, elle se remit en marche, mais cette fois d’un pas aussi léger que son humeur.

Beauclairois, beauclairoise … et Haple II

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 Sujet du message: Re: La petite ville de Beauclair
MessagePosté: Mar 2 Aoû 2016 17:01 
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Beauclairois, Beauclairoises … et Haple II


La ruelle était loin d’être aussi fréquentée que la grand-rue par laquelle ils étaient entrés à Beauclair. Néanmoins, l’étroitesse des murs rendait le trafic désordonné des villageois quelque peu délicat. De plus, personne ne semblait prêter attention à une jeune fille tout juste adolescente, modestement vêtue et manifestement peu soignée, pas plus qu’aux autres bambins qui se faisaient gaiement la chasse en courant entre les jambes des adultes. Haple dût donc se frayer prudemment un chemin entre les couples amoureux qui marchaient main dans la main, oublieux du reste du monde, et entre les passants encombrés de paniers de vivres démesurés, ou bien de piles de nappes si hautes que leurs porteuses en étaient réduites à avancer à l’aveugle.

Une centaine de pas à travers ce parcours d’obstacle, l’elfe commença cependant à entendre le doux gargouillis de la fontaine. Des voix féminines aussi. Mélodieuses. Une ritournelle. Puis, elle les aperçût enfin, les lavandières.

Un groupe de cinq, non, six femmes étaient agenouillées sur les dures fondations de pierre d’une fontaine en demi-cercle, enchâssée dans le mur d’une bâtisse plus haute que les autres, de pierre elle-aussi – la première qu’elle ait vu depuis son arrivée. Elles étaient de toutes âge : les plus âgées accusant le passage du temps comme rarement le subissent les Anciens hinions, tandis que les plus jeunes n’étaient guère plus femmes que Haple. Celle-ci s’arrêta un instant pour les écouter…

- Sa cheville blaaanche. Son bras musclé-euh. Sa chevilleeeeeuuuuh blaaaaanccche-euuuuuh…

Elles se reprenaient en cannons, par paires. Certaines avec plus d’enthousiasme que d’autres, mais toutes battant la mesure à coup de linge trempé sur le large bord crénelé de la fontaine.

- La Jeannette-euh priiit... Soon braaaass musclééééééé-euuuuh!... Et le Jeannot priiit. Sa cheville blanche

Soudain, un violent coup dans le dos la projeta en avant.

- Hé , reste pas au milieu comme ça petite ! lui lanca une voix assourdie de derrière un amoncellement de tissus bariolés empilés sur plus d’un mètre.

Et Haple d’obtempérer. D’un pas précipité, elle se rapprocha de la fontaine et entreprit de se débarbouiller, la fraîcheur de l’eau lui arrachant un hoquet de surprise par cette chaude journée d’été. Ses manches retroussées, elle cueillit de l’eau dans la paume de sa main droite et regarda avec amusement le filet d’eau qui glissait d’entre ses doigts creuser des sillons dans la poussière accumulée sur sa peau.

- Caalèche-euhEt tout deuuux montèèèèèèreennt-euuuuuh… AAAAh ! Par Gaïa !...

Haple sursauta. L’une des plus jeunes chanteuses s’étaient fendu d’un cri qui fit tout le monde se retourner et suivre la direction de son doigt qui pointait vers… l’elfe. Le sang de celle-ci se glaca. Qu’est-ce qui se passait ? Elle avait bien son fichu sur ses oreilles … ? (Oui) Elle ne connaissait pas cette jeune fille à la mine décontenancée ?... (Non…)

- Ses bras, regardez, mais qui t’as fait ça petite ?!

Ne comprenant toujours pas, Haple baissa des yeux stupéfiés sur ses bras nus… et alors elle saisit de quoi il retournait. Ils étaient couverts d’ecchymoses. Du vert, du jaune, du mauve… une palette de peintre avec guère plus qu’une touche de blanc pour éclaircir le tableau. Oui, l’entraînement avec M. Pulchinel avait laissé ses marques.

- Mais tu vas te taire, petite sotte ! siffla une lavandière plus âgée avec véhémence. Mêle-toi de ce qui te regardes, veux-tu. Allez circulez ! lança-t-elle finalement aux quelques badauds qui s’étaient arrêtés par curiosité.

D’une cinquantaine bien tassée, cette dernière tourna finalement un regard résolument neutre vers la petite aux bras meurtris.

- Ne fais pas attention. Fais ce que tu as à faire, et reste aussi longtemps que tu veux avec nous… Tu n’as rien à craindre ici, ajouta-t-elle d’une voix morne où perçait néanmoins quelque chose de… quelque chose que la petite avait du mal à identifier.

De la compassion ? Avec son front barré de rides profondes et son air grave, la lavandière avait tout l’air d’avoir connu son lot d’épreuves, elle aussi. Elle se faisait sans doute une fausse idée quant à l’origine de ses marques de coups sur ses bras, certes, mais malgré cela Haple était touchée par l’empathie pudique dont l’humaine faisait preuve à son égard.

Finalement, ses comparses suivirent l’exemple de leur aînée, se remettant à l’ouvrage en laissant la petite tranquille. Et petit à petit, leurs voix s’entremêlèrent à nouveau au rythme du linge battu contre la pierre. Soulagée de retrouver son anonymat, Haple acheva de se nettoyer avant de se pencher par-dessus le bassin pour boire au robinet.

***


La sortie d’eau était grossièrment ouvragée en un tuyau de cuivre, trop large pour sa petite bouche, et celle-ci s’aspergea le visage plus qu’elle ne but. Mais la sensation de fraicheur coulant librement sur sa peau lui fit le plus grand bien. Et c’est avec le sourire du bonheur simple qu’elle essuya enfin le menton d’un revers de main et s’assit sur le rebord en écoutant le chant des Beauclairoises.

Soudain prise d’inspiration, elle plongea une main dans son balluchon et en ressortit son tambour de mendiant. C’était un aussi bon endroit qu’un autre pour tester ses talents de musicienne ! Alors, doucement, presque timidement, elle commença à accompagner les lavandières du timbre sec de son instrument. D’un geste du poignet, elle faisait tourner en rythme le tambour sur son axe, entrainant ainsi les billes de bois attachées au cadre par de courtes ficelles. Et les billes virevoltaient en sifflant dans l’air, et elles percutaient vivement la peau tendue du tambour.

Elle s’attira ainsi les regards amusés des femmes qui s’affairaient autour de la fontaine. Mais bientôt, les passants s’arrêtèrent pour les écouter, les chanteuses aussi bien que la surprenante percussionniste. Car celle-ci ne se contenta pas longtemps de marquer la mesure de manière monotone. Au contraire, elle se laissa rapidement grisée par la musique et lâcha bride à son corps qui ne demandait qu’à s’exprimer par le lyrisme de son souple poignet, mais aussi de sa main contre son torse plat et de ses pieds sur la terre nue.

Repérant une caisse en bois abandonnée contre le mur de pierre, Haple sauta agilement dessus. Alors, encouragée par l’attroupement grandissant des Beauclairois qui tapaient des mains et lançaient des « Chauffe, chauffe petite ! », l’enfant se mit à taper des pieds contre sur le plancher de bois de son estrade de fortune.

Elle développait progressivement une rythmique à la complexité grandissante où ses mains et ses pieds se découplaient, désormais pour diriger plus que pour accompagner les trois voix du cannons des lavandières. Et, exultant d’une joie de vivre bestiale, un sourire qui aurait englouti le Monde rayonnait sur son visage perlé de sueur, grisée qu’elle était par les vibrations de la caisse et du tambour lui parvenant à travers ses mains et ses pieds pour finalement résonner dans son corps tout entier.

Et alors que son ivresse culminait à son paroxysme, telle une flamme si vive qu’elle menaçait de se consumer dans une sublime langue de feu tendue vers le ciel, la voix profonde d’un cor – noble, fière et solennelle – retentit fortement dans les rues de Beauclair, comme pour célébrer l’avènement d’une musicienne de prodige ! … Cependant, toutes les têtes se détournèrent aussitôt de la petite inconnue. Et des voix excitées s’élevèrent de tous côtés. Même les lavandières avaient interrompu leur ritournelle et abandonné leur ouvrage.

Le souffle court et le sang battant à ses oreilles, Haple laissa ses bras retomber le long de son corps et tourna la tête de part et d’autre pour comprendre de quoi il retournait. Du haut de son promontoire, son regard portait juste au-dessus des têtes et jusqu’à la grand-rue où elle voyait les passants de la ruelle se précipiter en hâte. Quelque peu hagarde, elle descendit de son piédestal, ayant compris ce qui lui avait volé la vedette : la fête des vendanges avait démarré.

A en croire les histoires du drapier, on entamerait les célébrations par le foulage du raisin. Tradition étrange qui voulait que les jeunes femmes en âge de se marier trépignent en robe blanche dans une immense cuve contenant la récolte de la saison pour en extraire le jus que boiraient les villageois dans la soirée. Bien sûr, le jus de raisin n’était qu’un hors d’œuvre, et après la gorgée symbolique, viendrait la récolte fermentée des années précédentes !

Mais la tradition devait aussi permettre aux jeunes hommes du même âge de repérer celles parmi les fouleuses à qui ils feraient la cour et épouseraient l’année suivante. A en juger par le sourire narquois du drapier, il y avait un symbolisme quelconque dans l’image de la robe blanche tâchée par de rouge … qui échappait cependant complètement à la jeune fille. Et elle comptait bien voire tout ça de ses propres yeux pour éclaircir ce mystère.

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 Sujet du message: Re: La petite ville de Beauclair
MessagePosté: Mar 2 Aoû 2016 17:02 
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Le Loup, l'Agneau et le Berger I


A peine eut-elle fait un pas en direction de la grand-rue qu’une main l’arrêta cependant. Haple se retourna. Il s’agissait de la lavandière qui lui avait obtenu la paix… Haple leva des yeux interrogateurs à son encontre pour demander la raison de cette intervention.

- Tu es trop jeune pour aller à la fête, petite. Personne en dessous de l’Age de Femme n’y est autorisé. Il te faudra encore attendre un an ou deux…

(Elle est gonflée, j’ai vu plus de printemps que la plupart des bécasses qui vont se trémousser dans le raisin…). Et comme si elle lisait dans sa mine renfrognée le sentiment d’indignation que Haple ressentait – bien qu’elle n’y voyait naturellement que la frustration d’une pré-adolescente humaine se voyant être traitée comme une enfant qu’elle n’est plus tout à fait – la lavandière tenta de la consoler en lui indiquant des pièces de monnaie qui jonchaient le sol au pied de la caisse en bois…

- Les gens sont d’humeur généreuse aujourd’hui … l’ambiance festive probablement. En tout cas, on dirait que tu as fait des adeptes avec tes percussions, commenta-t-elle avec un sourire amène. Tu sais, dans quelques années tu pourras peut-être rejoindre une troupe de ménestrels, et alors tu seras de toutes les fêtes du Duché !


Sur ce, la lavandière s’éclipsa vers la grand-rue, son panier de linge sur une hanche, n’adressant pour tout au revoir qu’un autre sourire et un geste de la main. Alors, Haple laissa s’exprimer l’agacement qui avait menacer de faire craquer sa retenue elfique et flanqua un coup de pied dans la caisse en bois.

***


Au moins avait-elle obtenu ce qu’elle était venue chercher à Beauclair : (les fonds nécessaire pour démarrer ma vie d’adulte.) Le mot résonnait avec justesse dans son esprit. Mais qu’était-elle donc si ce n’est une adulte, dans la mesure où elle devait se prendre en charge elle-même, et où elle avait au cours de ces dernières semaines traversé plus d’épreuves que la plupart des humains ne connaîtraient jamais au cours de leur courte vie ?

En ruminant ces pensées, Haple entrepris de ramasser le petit pactole qu’elle avait gagné par sa prestation musicale. Une récompense amplement méritée selon elle, car elle s’était donnée à fond, et elle espérait que les prochaines villes qu’elle visiterait saurait également apprécier ses efforts. D’ailleurs, quelle serait sa prochaine destination ? Après le lit douillet de l’auberge de Beauclair c’est-à-dire… Elle pourrait se rendre à la capitale humaine du Sud dont les voyageurs hinions lui avaient parler avec un mélange de fascination et de réprobation.

(On verra) songea-t-elle avec lassitude en s’asseyant sur la casse pour observer les derniers passants quitter la ruelle pour les attractions de la grand-rue.

C’est alors qu’une voix féminine la fit sursauter :

- Et bien nous voilà enfin seules…

Haple tourna la tête en tous sens. Elle ne voyait personne. Ces paroles, lugubres et lointaines, semblaient sortir des murs eux-mêmes.

- Venez ! lança la voix d’outre-tombe à la cantonade, bien que, Haple vérifia à nouveau, personne ne semblait présent, ni la personne qui parlait, ni ceux à qui elle s’adressait…

Mais au moment où Haple s’apprêtait à mettre en question sa santé mentale, la silhouette mince et élancée de M. Pulchinel apparut au coin de la ruelle. Et il n’était pas seul : une femme pénétra dans la ruelle à sa suite, rondelette en comparaison du saisonnier, et vêtue d’un pantalon et d’un chemisier bouffant qui ne faisait qu’accentuer cette allure grotesque.

Haple n’aurait pas pu imaginer plus étrange compagnie à son grossier compagnon de voyage. L’humaine, d’une trentaine d’année, n’était pas sans charmes, et l’impeccable facture de sa tenue indiquait une existence au moins sédentaire et probablement bourgeoise.

- Vous, s’exclama Haple à l'attention du saisonnier ?!

- Moi, rétorqua-t-il sardonique.

- Ah, voilà donc cette enfant dont tu nous as parlé.

- C’est elle ; Haple.

Effrayée par ce développement aussi inattendu qu’incompréhensible, Haple eut un mouvement de recul.

- Ma Sœur, je dois vous prévenir : l’enfant est rebelle. Il vaudrait mieux qu’elle ne s’enfuie pas, ne croyez-vous pas ?

- Oui, si tu le dis.

Et d’un geste négligent de la main, paume vers le ciel, la Sœur réalisa une prouesse qui laissa la magicienne novice interdite : le mur de pierre à ses côtés s’étira dans la ruelle au niveau du sol de manière à former une dalle qui se glissa sous ses pieds et lorsque l’humaine leva la main … la dalle de pierre s’éleva dans les airs en longeant le mur à toute vitesse, cueillant au passage une Haple à quatre pattes, en prise avec une soudaine envie de vomir lorsqu’elle aperçut qu’elle était perchée à près de trois mètres de hauteur.

Vu d’en haut, l’humaine paraissait encore plus sphérique et l’allure de fil de fer de M. Pulchinel se trouvait être exacerbée sous cet angle… Mais plutôt que de s’attarder sur leur physique, Haple tendit l’oreille car la magicienne semblait s’entretenir avec elle-même…

- Haple dis-tu ? Hum, c’est une étrange coïncidence, ne crois-tu pas, Nacota ?


(Panna cotta ?!) Quelque chose lui échappait…

- Le Texte lui donne des noms diverses et variés, mais l’un deux est bien « le Simple », n’est-ce pas ?

Et la voix sinistre qui s’était élevée plus tôt récita d’une voix monocorde, tandis que M. Pulchinel et la Sœur, lèvres cousues, fixaient la petite sur son perchoir :

- « Le cœur de Yuimen, éternel diamant, enchâssé dans une simple écorce de poussière, répondra par son nom d’apparat : le Simple. Et le serviteur le cherchera. Et le fidèle verra scintiller en son sein la lumière multiple de Zewen. »

***


Le silence retomba. L’espace d’un instant, Haple avait oublié sa frayeur. Pourtant il y avait quelque chose d’absolument terrifiant dans le fait d’entendre cette voix désincarnée qui semblait émaner des murs eux-mêmes !... Mais à la mention du nom par lequel elle l’avait désignée, « Simple », son attention avait été captivée et elle avait bu ces paroles cryptiques. Car, ce nom, elle le connaissait ! Et le plus étrange c’est que personne encore ne l’avait appelée par ce nom, personne d’autre qu’elle-même, ou plutôt, que cette petite voix à la limite de sa conscience qui lui avait insufflé la force de se connecter au fluide terrestre lorsqu’elle s’y était essayée au cours du voyage. (Haple la Simple, Haple la Pure, Haple la Vraie) récita-t-elle comme un écho aux confins de sa mémoire.

- Petite, sais-tu ce que Haple signifie dans la langue oubliée des Montagnards Nirtimois ?

La question de la Sœur était purement rhétorique : (si c’est une langue oubliée comment je peux savoir ?!). La colère commençait à monter en elle, contenue sous une chape hybride de curiosité et d’appréhension, certes, mais les premières lignes de fracture avaient commencé à se former.

- Simple. Haple signifie Simple.

- Je crois que tu as raison, ton Berger ne se trompait pas, Nétone. A ce que j’ai pu observer de sa prestation, elle correspond à la description du Texte : elle a certainement plus de valeur que son apparence ne laisse pas soupçonner.

- Et n’oublie pas ce que le Berger nous a appris : elle manie le fluide terrestre, ce qui pourrait correspondre à la référence à Yuimen.

- Et elle est couverte de poussière, remarqua la voix sinistre avec un malin plaisir.

- Oui… Je ne pense pas que le Texte soit aussi littéral.

C’en était trop. On la traitait comme si elle était quantité négligeable, comme les adultes le faisaient toujours. Et elle comptait rectifier la chose… à coup de poings si nécessaire. Ou plutôt vu que c’étaient ses talents cachés qui les intéressaient, elle allait leur montrer ce que ça donnait quand elle se connectait au fluide terrestre !...

Et elle aurait besoin d’un coup de booste. Alors, une pensée pour le Sinari de la Grotte des Affaires qui l’avait prévenue qu’elle aurait besoin de tout son pouvoir pour « s’en sortir », elle sortit le flacon de fluide de son balluchon et en vida le contenu d’une traite.

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Dernière édition par Haple Mitrium le Mar 2 Aoû 2016 17:17, édité 2 fois.

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MessagePosté: Mar 2 Aoû 2016 17:03 
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[:waraxe:]


A son heureuse surprise, l’effet sur son organisme fut bien plus supportable que lors de la première prise et, le temps de s’ébrouer pour libérer ses articulations momentanément rigidifiées, Haple se tenait prête à en découdre, poings serrés et regard foudroyant.

- Haha, tu aimes ça ? Tu veux augmenter ton pouvoir ?! s’esclaffa la voix dans les murs avec une note de démence qui déstabilisa quelque peu l’enfant. On en a de toutes sortes tu sais… Viens avec nous et tu pourras tous les essayer, susurra-t-elle finalement d’une voix soudainement doucereuse, telle le sifflement du serpent tentateur.

Mais on ne laissa pas l’occasion à Haple de répondre qu’elle ne voulait rien avoir affaire avec ces gens ! Car aussitôt, la Sœur répondit comme si la question avait été adressé à elle et non à l’elfe :

- Oui, Nacota. Je pense que nous avons un socle d’évidence suffisant pour justifier la phase expérimentale.

- AASSEEEEZ !!! hurla Haple excédée. TAISEZ-VOUS ! FAITES- MOI DESCENDRE OU JE VOUS ECRABOUILLE COMME DES INSECTES.

Le rire désincarné s’éleva dans la ruelle plus puissant, plus méprisant et plus cruel que jamais. Mais au lieu de glacer le sang de l’enfant, cela ne fit qu’aiguiller sa rage. Ainsi, lorsque la Sœur, sourcils froncés et lèvres pincées, repris la parole de sa voix froidement factuelle pour lui faire la leçon, ce fut la goutte qui fit déborder le vase.

- Je crois que tu ne comprends pas la situation, Haple. Ta situation. C’est ton destin de nous suivre. Il semblerait que ce soit Ecrit dans …

Mais sa litanie rébarbative fut interrompue dans un grand fracas ! Haple avait poussé la caisse par-dessus le bord de la plateforme de pierre, et celle-ci s’était écrasée juste devant les pieds des deux humains au milieu de l’étroite ruelle, projetant dans leur jambes débris de bois et soulevant un nuage de poussière qui les força à reculer en se couvrant le visage de leur bras.

(Maintenant ! )

Alors, profitant de l’effet de surprise, Haple sauta dans le vide, se jetant en avant de toute ses forces de manière à atterrir entre ces gêneurs qui prétendaient lui dicter sa conduite. Et à mesure qu’elle chutait, elle pouvait sentir la gravité augmenter. Pour tout un chacun, l’infime différentiel aurait été absolument imperceptible. Mais Haple, elle, ressentait vibrer dans chaque fibre de son corps le fluide terrestre qui l’habitait : il reconnaissait la force de Yuimen qui l’attirait vers la terre. Et il entrait en résonnance, s’amplifiant à mesure que la distance au sol diminuait, si bien que Haple n’eut aucune difficulté à répéter son exploit précédent et opéra la fusion des fluides qui s’appelaient mutuellement, en elle et en Yuimen, tel qu’elle l’avait fait au pied du pommier. Seulement cette fois, elle agit en connaissance de cause et dosa plus prudemment la quantité de fluide mobilisée.

Ainsi, lorsqu’elle atterrit enfin, genou en terre et ses mains frappant férocement la terre battue, l’onde de choc qui parcouru le sol de la ruelle depuis Haple à l’épicentre ne fut pas spectaculaire… mais néanmoins effective ! Les yeux couverts pour se protéger de la poussière, les deux autres n’avaient pas vu leur captive attaquer et la secousse sous leur pied les prit suffisamment au dépourvu pour leur faire perdre appui, les faisant chuter à terre avec un petit couinement de surprise.

***


Il n’était cependant pas question de s’attarder sur le succès de son offensive. Il fallait prendre la poudre d’escampette avant qu’ils ne se relèvent et ne lui fasse payer sa témérité. Et Haple fit mine de se relever, jusqu’à ce que, avec une grimace de douleur, l’intrépide enfant ne sente une douleur aigüe lui transpercer la rotule. Elle avait dû se fêler un os au moment de l’impact.

Une chute de plusieurs mètres mal amortie ne pouvait pas laisser le fragile squelette de l’elfe intact. Du fait de la furie qui l’avait envahie, cette évidence que la voix de la raison aurait due lui asséner était passée à la trappe. Et comme résultat de cette inconscience, elle était submergée par une douleur si vive qu’elle sentit ses yeux mouiller à la vitesse de l’éclair et son menton trembler comme le sol de la ruelle.

Mais elle ne pouvait se permettre de fléchir maintenant. Se mordant la lèvre inférieure à s’en faire saigner de manière à distraire son attention vers une autre source de souffrance, Haple se remit sur pied avec un grondement de rage. La rage du combattant !

Malheureusement, cet imprévu lui avait coûté de précieuses secondes. Et à peine avait-elle fait quelques mètres clopin-clopant qu’elle entendit derrière elle la voix … sereine ? … de la Sœur.

- Ne la laisse pas rejoindre la grand-rue, Pulchinel. On ne la retrouverait pas.

Et, alors qu’il sautait prestement sur ses pieds, le « Berger » grogna son acquiescement plus qu’il ne répondit.

- Allez p’tite, arrête d’faire des histoires. T’iras nul’part com’ça… commenta-t-il en désignant son genou d’un geste décontracté de la main.

Comment pouvaient-ils être aussi calmes après ce qu’elle venait de leur faire ?! Elle s’était attendue à ce qu’ils soient furieux, qu’ils cherchent à l’étriper… à lui donner la fessée au moins ! Mais non, ils la regardaient boiter à reculons, avec amusement dans le cas de M. Pulchinel, impassible pour l’autre.

(Ils ne me prennent toujours pas au sérieux, rrrhaaaaa !)

Alors, levant la main d’un geste impérieux en direction de M. Pulchinel, elle commanda au fluide qui était en elle de le couvrir des pieds à la tête et de souder chaque particule de poussière, chaque écaille de peau morte, pour former un véritable étau de fange duquel il ne pourrait se défaire. Le résultat n’était pas des plus probant – quand elle songeait au sort qu’elle jeté sur sa mère, l’effet avait été nettement plus spectaculaire – mais elle avait dû réagir vite, et elle tenait à économiser ses forces de toute façon.

Heureusement, cela suffit néanmoins pour entraver sa progression. Et, la respiration coupée, M. Pulchinel tomba à genoux, ses mains portées à sa bouche pour tenter vainement d’arracher manuellement le bâillon boueux qui lui bloquait la respiration.

Malheureusement, c’est à ce moment que la Sœur décida de prendre les choses en main.

***


- Bon, assez jouer, déclara-t-elle en se relevant avant d’ajouter, avec force cette fois, lorsque Haple leva à nouveau une main pour réitérer son étau de boue, Non ! Ça ne marchera pas avec moi. Tu as beaucoup à apprendre petite.

- Qu’est-ce que vous en savez, vieille peau ?!

- Vieille peau ?... répéta la voix désincarnée avec ironie. Qu’est-ce que ça fait de moi alors ?! Aucun respect, la jeunesse, haha…

Mais la Sœur ne releva pas plus l’insulte que la condescendance désopilante de l’invisible interlocutrice.

- J’en sais que je suis bien plus puissante magicienne que toi. Je pourrais t’apprendre ?... tenta-t-elle en faisant un pas en avant.

- M’en fiche ! Laissez-moi tranquille !... rétorqua Haple d’une voix qui tremblotait autant de colère que d’inquiétude, tandis qu’elle reprenait sa fuite en arrière de sa démarche d’éclopée.

- Non… murmura la Sœur d’une voix teintée de regret. On a déjà déterminé que ce n’était pas une option, il me semble. Tu n’iras nulle part, ajouta-t-elle avant de faire une pirouette, pied tendu, la pointe de ses orteils traçant un cercle sur le sol autour d’elle.

Et aussitôt, la fuyarde sentit le sol se dérober sous ses pieds. Ou plutôt, elle le sentit se liquéfier, et comme dans la terre spongieuse d’un marécage, elle s’enfonçait ! Chaque pas qu’elle faisait en était rendu si difficile … ! Et la douleur à son genou ne faisait qu’empirer du fait de l’effort qu’elle devait opposer à la force de succion exercée par le sol magique. Si bien qu’elle dut s’arrêter pour aviser de la situation.

***


Telle une araignée au cœur de sa toile, la Sœur observait les vains efforts de l’enfant avec une certaine consternation. Elle ne s’était visiblement pas attendue à une l’irréductible combativité de la petite. Et elle n’avait pas tout vu ! Haple remarqua que son adversaire était confortablement située au centre d’un cercle de terre battue qui n’avait pas été affectée par l’épatante métamorphose. Il fallait lui faire perdre cet avantage. Halentante, elle tourna la tête de toute part à la recherche d’une idée, d’une arme, de quoi que ce soit vraiment… et là, elle la vit : une palanche abandonnée sur le bas-côté par quelque maçon, les briques contenues dans ses deux paniers encore harnachés à l’unique manche de bois, renversées sur le sol par l’onde de la secousse de l’enfant.

Aussitôt, un plan se dessina de lui-même dans l’esprit aux abois de la jeune fille. Celle-ci se jeta de sa jambe valide vers les projectiles inespérés qui sombraient doucement dans la boue, et en décolla un premier, puis un deuxième qu’elle empila sur l’autre avant de les transférer dans son autre main, de s’armer d’une troisième et de se redresser.

- Prends CA !!! vociféra-t-elle en jetant de toute ses forces la première en direction de son aînée. Et CA !!! ET CA-aa-AA !!! acheva-t-elle dans un effort surhumain.

Son premier tir n’eut d’autre effet que de faire hausser un sourcil à son adversaire, tellement la tentative était dérisoire : la visée laissait à désirer, la brique atterrissant mollement dans un « Splash » de l’autre côté du disque de terre ferme. Et de plus des briques ne semblaient pas faire le poids face au pouvoir incommensurablement supérieur que la Sœur commandait !

Le second projectile en revanche parvint juste à l’endroit précis où le pied de la Sœur s’était trouvé avant que celle-ci ne le retire précipitamment dans un mouvement de recul. Sa réaction ne se fit pas attendre : elle perdit enfin son sang-froid. Avec un grognement inaudible à la vue de la boue qui recouvrit ses bottes reluisantes, la Soeur s’avança à grand pas en direction de la lanceuse de pierre au mépris de son bras pour jeter son dernier projectile.

Et celui-ci remarqua Haple avec une lueur d’espoir se dirigeait droit vers la Sœur. Et celle-ci ne réagissait pas ! Elle allait se la prendre ! (en pleine poire !) Mais juste avant l’impact, le visage de la Sœur changea subitement de couleur, prenant la teinte gris sombre de la pierre, et la brique se brisa sec au contact de la peau magique.

Pour s’être essayée à ce type de protection magique pas plus tard que la veille, Haple reconnaissait là une maîtrise exceptionnelle du fluide terrestre, à n’en pas douter. Alors, l’espace d’un instant, elle ne put s’empêcher de ressentir une certaine admiration pour son adversaire, malgré l’animosité qu’elle nourrissait pour elle par ailleurs.

A la vue de la Sœur progressant péniblement mais rapidement à travers les quelques mètres de marais qui les séparait, Haple se ressaisit cependant et se baissa à nouveau en direction de la palanche. Mais elle ne cherchait pas à se réapprovisionner en projectiles. Cela n’avait jamais été son but de lui infliger des dommages de cette manière.

***


Non, au lieu de se tourner vers le contenu des paniers, elle se tourna vers leurs attaches de manière à désolidariser le manche en bois de ses fardeaux. Aussitôt fait, elle saisit le manche de sa main droite, et s’en aidant comme d’une béquille, l’éclopée s’élança aussi vite qu’elle put vers l’extrémité du marécage, la Sœur sur ses talons, de plus en plus agacée, qui l’interpella d’une voix menaçante :

- Simple ou non, il va falloir t’inculquer le bon sens, petite !

Du bon sens, elle en avait. Elle pensait bien qu’elle n’avait aucune chance de rivaliser sur le plan de la maitrise magique, mais peut-être était-elle également inexpérimentée sur le plan physique. L’autre s’était dite « magicienne » après tout. Ce qu’elle espérait donc, c’était qu’elle pourrait mettre à profit la gêne qu’occasionnait le sol, entre liquide visqueux et que solide spongieux, pour déstabiliser son adversaire et lui maintenir la tête dans le marais jusqu’à ce qu’elle cesse de bouger… Si seulement, elle pouvait parvenir sur la terre ferme pour avoir le dessus… Le bord du marais était maintenant à portée de main. Un pas, deux… Et elle y fût !

Se retournant aussitôt dans un vif volte-face, bâton brandi en garde, Haple déclara victorieuse :

- Et maintenant à moi de donner une lecon ! Hhaaaa !...

Dans un cri désarticulé, Haple bascula le poids de son corps sur sa jambe valide, se déportant vers l’avant, ses deux bras tenant fermement le bâton pointé vers la poitrine de la Sœur qui parvenait à la limite du marais. Et dans un choc sourd l’extrémité du bâton la heurta de plein fouet en plein ventre.

Mais au lieu de se plier en deux, ou bien de basculer à la renverse comme Haple l’avait espéré, ce fut l’elfe qui accusa le coup. A peine son arme était-elle entrée en contact avec la Sœur qu’une onde de choc avait parcouru celle-ci jusqu’au mains de l’enfant, laquelle faillit bien lâcher prise sous l’effet du contrecoup.

***


Levant les yeux sur le sourire froid de la Sœur qui la dominait d’une tête, Haple comprit aussitôt : elle avait renouvelé sa protection magique, seulement cette fois au niveau du torse, là où sa peau de pierre était couverte par son chemisier, et donc Haple ne s’en était pas aperçue… L’instant d’après, la Sœur se saisit de l’extrémité du bâton la plus proche d’elle d’une main en disant :

- Comme je disais tu as beaucoup de chose à apprendre. A commencer par la modestie.

Et en une fraction de seconde, Haple lut dans les yeux implacables de son adversaire ce qui allait se passer et elle s’y prépara en basculant imperceptiblement ses appuis vers le côté. Ainsi, au moment où la Sœur poussa de son poids en avant pour mettre la petite impertinente à terre, Haple, elle, au lieu de résister, pivota de travers et tira sur le bâton dans un mouvement latéral pour accompagner la Sœur dans son geste, laquelle, emportée par son élan, vit le haut de son corps basculer en avant tandis que ses pieds restaient englués dans le marécage.

Et, alors qu’avec un bruit de succion quasi-comique, l’humaine parvenait à extirper un pied pour le poser sur la terre ferme dans un grand écart déséquilibré, Haple lui asséna un vif coup de pied dans l’entre-jambe en y mettant toute sa hargne ! Et quel délice éprouva-t-elle à la sensation des chairs qui s’écrasait sous le choc !... Et quelle douce mélodie que ce bruit sourd et cette plainte misérable qui retentirent lorsque son pied percuta l’os pubien.

- Ha ! L’aviez pas vu venir celle-là ! ... triompha-t-elle férocement

Finalement, toujours pliée en deux dans une immobilité presque hilarante, un masque de douleur peint sur son visage soudainement blafard, la Sœur s’effondra sur le flanc une main portée entre les jambes où une douleur incapacitante l’empêchait de toute évidence d’engager la moindre rétribution.

Ne désirant cependant pas s’attarder sur place et laisser à M. Pulchinel rester de l’autre côté le temps de traverser le marais pour s’emparer d’elle, Haple ramassa le bâton que la Sœur avait laissé tomber au sol et se hâta en direction du vacarme grandissant de la grand-rue où elle pourrait se fondre dans la masse des fêtards.

C’était sans compter sur le quatrième protagoniste dans la ruelle...

>> Le Loup, l'Agneau et le Berger III

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Dernière édition par Haple Mitrium le Mar 2 Aoû 2016 17:20, édité 3 fois.

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 Sujet du message: Re: La petite ville de Beauclair
MessagePosté: Mar 2 Aoû 2016 17:05 
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Le Loup, l'Agneau et le Berger III

[:waraxe:]

- Nacotaa, coassa le pitoyable ramassis de magicienne derrière Haple.

- Ne t’inquiète pas Nétone, répondit vivement la voix désincarnée dont toute trace d’amusement avait disparu.

Haple allongea le pas, un frisson lui parcourant l’échine. La voix qui semblait venir des murs, auparavant comme un écho lointain, lui avait semblé plus proche cette fois. A quelques mètres d’elle peut-être. A droite, à gauche, elle ne distinguait cependant rien d’autre que les ombres projetées par les hauts murs de torchis et de bois. Et c’est alors qu’elle accélérait comme si elle avait le diable aux trousses qu’une main aux longs doigts ornés de bagues en or, tendues comme des serres vers son visage, sortir d’une ombre sur les côtés. Elle eut tout juste le temps d’apercevoir la silhouette d’une femme enveloppée dans des voiles aussi sombres que les ombres qui l’avaient dissimulée, que tout s’éteignit !

Soudain plongée dans une obscurité aussi totale qu’inexplicable, Haple hurla d’effroi. Sous le coup de la panique, elle perdit toute retenue, toute fierté, et si elle n’avait pas voulu appelé à l’aide auparavant, elle avait instinctivement revu sa position lorsque des assaillants sortaient des ombres par elle ne savait qu’elle magie sinistre.

- Au sec…

Mais aucun secours ne viendrait. Car si les lèvres tremblantes de l’enfant formulaient toujours cet appel à l’aide désespéré, aucun son ne sortait de sa gorge. Et pour cause, elle sentait sa gorge se contracter douloureusement, comme si une main de fer cherchait à l'étouffer. Pourtant, elle ne sentait nulle chaleur physique, nulle texture de peau rugueuse, nulle odeur de cuir d'éventuels gants... Elle avait été réduite au silence par un coup de maître de l’insaisissable Nacota. Enfin, celle-ci lança d’une voix impérieuse :

- Pulchinel ! Rends toi utile. Tiens-la en place que je la neutralise, avant qu’elle n’attire sur nous l’attention des villageois.

- Oui, ma Sœur, répondit une voix distante.

Mais Haple ne comptait pas se laisser prendre. Elle n’avait pas encore baissé les bras ! Au contraire, elle les agitait littéralement en tous sens, tentant tant bien que mal d’atteindre son ennemi invisible. En vain…

Une lueur d’espoir jaillit cependant lorsque son bâton heurta un mur de la ruelle. Précipitamment, elle se colla dos au mur de manière au moins à protéger ses arrières, puis se fiant à l’un de ses rares sens qui lui restait, tendit l’oreille à la recherche de la grand-rue. (Là ! ) Elle avait un repère, une défense et une arme : tout n’était pas perdu. Trainant sa patte blessée, Haple progressait de côté, en pas-chassés maladroits, agitant son bâton à tout-va devant elle pour repousser un Pulchinel qui serait bientôt sur elle. (Aïe ! ) Elle avait heurté un obstacle. Mais elle poursuivait sans relâche, faisant abstraction de la douleur en se focalisant sur la musique pleine d’espoir des festivités qui battaient leur plein… Mais dans ces conditions, son échappée était vouée à l’échec. Et, comme un oisillon sans défense, elle fut désarmée et rudement plaquée contre le mur sans qu’elle puisse offrir la moindre résistance.

Pourtant, elle tenta bien de se défaire de l’emprise du fourbe Monsieur Pulchinel. Griffant, mordant, battant des pieds, elle chercha par tous les moyens de lui faire lâcher prise. Mais il n’y avait rien à faire : en se débattant, elle ne parvint qu’à se faire plus fermement maintenue en respect et s’entendre dire d’elle :

- J’peux l’assommer ? Elle gigote de trop.

- Touche à un cheveu de sa tête, misérable morpion, et je fais fondre tes chairs d’un claquement de doigt. Ta peau se crevassera, tes dents se déchausseront et tes cheveux s’arracheront à pleine poignée, illustra-t-elle avant de poursuivre, bien qu’entre nous le message était probablement passé… tes os s’effriteront et tes organes se liquéfieront. Bientôt les œufs d’insectes écloront dans la matrice putride de ta chair en décomposition, et le va-et-vient des lombrics au travers de ta peau découdront l’enveloppe charnelle qui recouvre présentement cette infâme carcasse que tu appelles ton corps.

- …oui, bah, j’ai compris. J’touche pas à la p’tite, grommela-t-il d’un air revêche mais qui n’osait tout de même pas se faire défiant.

- L’Elu vaut cent fois plus que le pion que tu es dans le jeu du Destin ! N'oublie pas la place qui est la tienne, Berger ! conclut-elle sévèrement.

Haple n’était pas mécontente d’entendre l’homme qui la malmenait se faire ainsi remonter les bretelles. Mais à vrai dire il y avait là quelque chose d’inquiétant à ce que cet homme accompli courbe l’échine devant la Sœur sorties des ombres. Et c’est avec raison qu’elle sentit son estomac se nouer lorsqu’elle entendit les bruits d’un flacon qu’on dévisse suivit de pas fluets venant dans sa direction.

L’instant d’après, une prégnante odeur d’alcool lui chatouilla les narines puis on lui maintint un chiffon humide sous le nez, aussi délicatement que possible au vu de ses efforts pour reculer sa tête, jusqu’à ce que finalement, même son odorat lui fasse défaut et que toute sensation physique quitta son corps.

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