Ô toi, Lumière divine qui s’épand comme de mille étoiles jointes en une harmonie parfaite, voilà que je te prie, et voilà que tu m’entends ! Déesse des déesses, Grande Mère et chamarré joyau dont le faste oncques n’aura d’égal en aucun lieu du vaste Cosmos ! Pareille miséricorde ne devait s’éveiller que dans les sombres geôles d’un donjon par trop étreint des velléités noires ! Ainsi ne fis-je point d’indigentes offrandes, ainsi furent en nombre sur l’autel sacré les myriades colorées des fleurs et des gemmes !
Car voyez, lecteurs qui m’êtes de tels aimés, comme tout de suite notre chœur en un juste trait à touché l’âme de Gaïa. Sitôt m’en vais-je vous remercier, et aussi me verriez-vous vous embrasser dans mes bras d’une vénusté sans frein, si n'était cette odeur et des sangs et des fanges elle seule une algie à vos sens délicats. Là ! Là est l’union sacrée qui réjouit notre Mère, et là furent vos voix qui m’aidèrent en ce lieu ! Oyez ! Quel astre superbe se fit sous mes yeux, immédiat lorsqu’Elle eut ouï nos incantations menées en farouche homélie : quelle ne fut point ma surprise, de voir soudain jaillir sans que je n’y fisse rien un Trait de lumière plus vaillant qu’aucun que j’engendrai jamais ! Et pour cause ! Le voilà agissant mieux que je ne l’eusse espéré en moi-même, car point n’avais-je encore en l’idée d’agir de la sorte – Gaïa m’agit dans l’esprit, pour ma cause propre, mais également pour cette gloire éternelle que je porte en son nom. Alors, terrible pour le monstre, le Trait se vit comme celui d’une baliste puissante – mais pas moins n’était-il pour cette Akrilla à la beauté sans nom un tabard qui celait sans médire son indicible éclat. De son propre chef fendit-il les espaces obscurs jusque derrière la bête, et tout de suite, voilà l’ennemi qui se détourne ! N’est-ce pas là le souhait le plus cher que nous eussions pu formuler ? Grandiose est cette Reine, Reine parmi les reines, et priée par elles encore ! Gaïa aux yeux pers, tu déchiras de cette juste flèche les ténèbres qui me faisaient vêture !
Et lors, ci-est le plus puissant prodige ! Car voilà que cette clarté aveugle me révéla ce qu’auparavant point n’avais-je vu : une fosse profonde, de quelques pieds géants à peine séparé de mon humble retraite. Vertes en sont les âcres vapeurs, mais noires les abysses, elles qui savent tant et tant mordre dans la chair encore vive – création des Malins, pour sûr, que le néant frémissant qui se repaît des âmes fourvoyées dans l’ombre…
(Fichtre poil de grenouille !)
Et tous savez comme moi combien rares ils se font, alors gare avec pareils jurons !
Mais tout de même… L’ombre pour l’ombre, et ainsi une nouvelle aube pour les âmes offertes aux doigts d’or et de rose ! Comble des espoirs que de jouir d’un piège si facile ! (Wow ! Aro, commence pas à t’emballer comme ça, d’accord ?) Pourtant, voyez comme ces morbides exhalaisons l’appellent – « Petit monstre, petit monstre, nous sommes ta maison… » - entendez ces timbres d’outre-tombe. Il suffirait qu’il s’avançât de peu, quelques pieds, disais-je, quand bien même fussent-ils ceux de Géants des Terres Enormes ! Et alors au bord de ce gouffre incessamment noyé dans les plus sombres nuits, voilà que fond sur lui l’Akrilla sans ombre de pitié…
...
(Hé, quoi ? Il a dévoré le demi… chose, c’est pas un gars sympathique !)
Mais comment se pût-il qu’il avançât encore ? Le voilà agité, dans le corps et l’esprit, et le moindre ressors d’une ou d’autre part le fera à nouveau retourner vers l’entrée ! Aussi, point de mouvement, toujours tapie sous mon logis osseux, point n’avancé-je un cil. Et nonobstant ceci, tout bouillonnant mon cœur frémit-il d’impatience, d’apprendre présentement comment tous ses désirs ici-même faire entendre : comment forte lumière, toute entière animée à agir la bête, lui fît croire un instant qu’une image fût une autre, le néant une âme, et l’âme le néant. N’entendez-vous ainsi que moi la douce voix d’un vieux Lutin qui naguère m’enseigna les arts des phaïnomanciens ? Péperci Foldelune, sont-ce là ses précieux conseils qui résonnent en mon cœur ? Large est le lit des rivières divines, large le lit des instances magiques – cataractes d’or pur, voilà que je les sens, tièdes et roulantes sous une houle fauve, vagues diamantines qui s’éveillent et s’endorment à l’appel du cor ! Et voilà que mes veines tout entières s’embrasent, tandis que dans les rets de pourpre cardinalice s’entremêlent myriades d’entrelacs aux miels sans pareils – résurgences amènes me sont-ils à l’esprit, qui s’émeut à son tour aux caresses des fluides. Tendue me vois-je ci, hors de mon propre corps pour d’un œil profane en savoir les rouages, bandée dans les muscles tout autant que dans l’âme. Ne faut-il pas cela pour se faire démiurge, et ainsi que les dieux inciter une image en un lieu qui ne la connaît pas ? Souffle divin, certes, celui qui saurait se scinder en deux êtres – un chacun se connaissant pour son rôle et son temps, pour l’un l’éphémère et pour l’autre la vie. Souffle divin, certes, que celui d’Illusion…
Et toutefois, point ne me voyez que dans ce seul effort, car appelant en moi aux galopants renforts, d’une plus physique quête préludé-je l’essor : car alors aux-devants des abîmes dévorants, la bête, enfant d’horreur, n’aura pas l’ignorance de s’y jeter vivant. Aussi devrai-je l’aider, mais point avant que de m’être mis en main le tranchant fil d’une lame aiguisée. A quoi bon les leçons, et à quoi bon Cérahe, encore, si ce n’est d’avoir eu en mémoire par longues digressions les assises éternelles d’un savoir médical ? N’en sais-je pas plus que quiconque où sont les ligaments, et encore mieux qu’un autre tailler en plein dedans ? Mettre genoux en terre, alors, n’est plus si malaisé si l’arme alors trouvée n’est point trop émoussée.
L’œil rivé sur l'ennemi, pourtant que mes tâtons se fissent en silence, et aussi dans la plus immense de toutes les défiances. Je crains qu'il ne me vendent, et pourtant plus que tout me sont-ils nécessaires. Que Gaïa dans la quête m'instiguât une cachette ! Sinon que pour les yeux, les cadavres alentours bientôt ne me seront plus méconnus, car me voilà cherchant, et cherchant à nouveau, de quoi couper au vif – en espérant qu’un os, par le plus grand hasard, se fût autour de moi divisé en éclisses aux arrêtes saillantes…
((Apprentissage de Illusion de groupe | Observation tactile des alentours))
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CAHIDRICE ARO. PRINCESSE ALDRYDE, ACTUELLEMENT DANS LA MERDE.
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