Un de ces projectiles enflammé atteint ma cheville.

«AïïïE! AïïïE! AïïïE!»

Vite accroupi, je m’empresse de plaquer mes deux mains sur la plaie afin d’étouffer le feu. La brûlure n’en demeure pas moins intense, mais au moins elle ne se répandra pas sur le reste de mon corps.
Mes yeux deviennent humides, je les ferme par réflexe ou par orgueil, je ne sais trop. Les dents serrées, je me concentre sur ma respiration et j’attends patiemment que la douleur s’estompe.

Mon adversaire balafré à eu moins de chance que moi, un premier éclat a atteint sa tête et ses cheveux roux se sont enflammés aussitôt. Trop affaibli et à peine conscient de ce qui se passe; il ne peut rien faire pour éviter l’incendie de se propager sur ses vêtements et il laisse, malgré lui, le feu le dévorer. En peu de temps, il est devenu une torche humaine. J’ai vu ses cheveux roussir, sa peau gonfler, brunir puis noircir, le spectacle était affreux, mais je n’ai pu m’en détacher les yeux. Je ne veux plus en voir davantage, je veux quitter ce lieu maudit.

(Je vais me rendre dans la cale pour n'en ressortir que lorsque le massacre sera terminé.)

Je tends ma main vers mon épée que j’avais laissée au sol un peu plus tôt afin de m’occuper de ma blessure. J’allais atteindre le pommeau, lorsqu’un marin d’un coup de botte l’envoie valser plus loin sur le pont.

Rosie frémit d’excitation. Elle ferma les yeux pour concentrer toute son énergie dans ses paumes alors que déjà elle pouvait sentir des éclairs traverser ses doigts. Elle les agita doucement et perçut toute la statique qui s’en dégageait comme si ses mains avait été chargé d’électricité. Il n’y avait plus de doute à avoir sur les pouvoirs du présent que lui avait offert la vieille dame, c’est-à-dire les gants. Soudainement gonflé d’espoir, elle approcha doucement ses mains de la peau du pirate. Il fallait seulement qu’elle le touche, juste un petit peu pour que le tour sois joué.

Cela ne prit pas un centième de seconde. Dès que ses doigts entrèrent en contact avec la peau de celui qui la maintenait, il la lâcha prestement plus de surprise et de réflexe que par crainte et douleur. La jeune fille venait de lui envoyer tout un choc électrique, de quoi faire frémir n’importe qui. Rien de bien dangereux mais ô combien déstabilisant. Si elle l’aurait put, Rosie aurait pouffer de rire comme nous l’aurions tous fait après avoir électrifier quelqu’un de la sorte, mais le temps n’était pas à la plaisanterie, elle n’était pas encore sorti d’affaire et c’est pour cela que dès qu’elle fut libéré de l’emprise du pirate, elle se retourna vivement vers le deuxième tout près et lui envoya un coup de poing, toujours chargé d’éclair, à la figure. Elle ne devait pas lui laisser la chance d’utiliser sa dague, arme petite mais très efficace. Furieux, il s’élança vers elle, prêt à la poignarder mais elle évita son geste un peu trop de justesse. Il ne pu lui enfoncer sa lame dans le ventre, mais l’arme glissa tout de même sur la peau de la jeune fille qui s’était seulement tourné sur le côté, n’empêchant tout de même pas la dague de la taillader. Surprise, elle ne vit pas le crochet que lui envoya le premier pirate qui venait de se remettre de son choc électrique, lui faisant perdre l’équilibre. Elle tomba assise, une main plaquée contre son ventre, un gout de sang désagréable dans la bouche.

C’est là qu’elle remarqua enfin l’étendu du chaos qui régnait non loin. Des flammes léchaient l’Échangeur, emportant dans la mort du même coup quelques combattants. La vision de Rosie vint alors trouble, sa respiration saccadé et ses mouvements faibles. Le feu. Elle détestait les flammes. Dans sa tête défilait des images du passé, des souvenirs d’incendie horrible et meurtrier. Les corps qui se faisaient dévorer au loin n’avaient rien de nouveau aux yeux de la jeune fille. Elle ne s’en souvenait toujours pas parfaitement mais elle avait un sentiment de déjà vu : un corps se consumant lentement par des flammes affamé. Tremblante, elle fixa le désastre.

( Qui a fait ça? )

Ce moment d’inattention lui valut un coup de pied sur la tempe, ce qui suffit pour qu’elle s’étale complètement au sol, tout en étouffant une plainte de douleur. Elle avait complètement oublié la présence des autres. Elle aurait aimé rester étendu pleurant le désastre de son entreprise en paix. Elle voulait qu’on la laisse moisir seule là avec ses souvenirs horrible et inachevé. Mais on ne lui laissa pas la chance, déjà elle sentit une main lui agripper les cheveux près de la nuque, la forçant à se lever. La jeune fille ne se fit pas prier et se releva supportant les élancements dans sa tête ainsi que dans son ventre. De sa main libre, elle essuya le sang qui s’écoulait de sa lèvre fendu. Elle avait du mal à garder l’équilibre. Le coup de pied ne lui avait pas été bénéfique.

Malgré tout, maintenant qu’elle était de nouveau debout, elle refusa de finir ainsi aux mains de l’ennemi, plus particulièrement aux mains de ses deux pirates qui n’avait en apparence rien de grand combattant. Elle voulait en finir et partir au plus vite. Donc à la vitesse de l’éclair, elle pivota vers celui qui la tenait toujours, enfonçant son arme dans ses côtes avec l’espoir que celui là resterait blessé. Puis, elle fit glisser le manche de son arme entre ses doigts, rapprochant ses mains de la lame pour mieux lui frapper la tête avec le bout de la hache. Ce dernier tomba complètement assommé. Sans laisser la chance du deuxième de venger son coéquipier, elle s’empressa de se donner un élan afin de lui balancer un coup sur la tempe. Il se mit à tituber. Elle lui en envoya un deuxième, l’achevant immédiatement. Rosie le souffle cours, les regarda un instant inconscient. Le nain ne s’occupait plus vraiment d’elle, étant plus occupé à aider les blessés. La jeune fille en était soulagée se doutant que ces capacités devançaient de loin ceux des deux jeunes matelots. Elle détourna les yeux, contemplant plutôt les dégâts causés par les autres. Elle soupira :

« Je déteste ça… »

Je me relève le plus rapidement possible afin d’éviter que le propriétaire de cette bottine m’envoie rejoindre mon épée. Je préfère grandement donner les coups de pied que de les recevoir!
C’est alors que j’aperçois mon nouvel adversaire. En fait, il ne s’agit pas d’un pirate ordinaire, mais d’une ravissante jeune femme, tout de même pirate il va sans dire. Mon hésitation sur sa personne s’explique par le fait que la nuit étant déjà tombée, seuls les rayonnements émis par l’incendie me procurent la lumière suffisante pour distinguer qui que ce soit. Et puis, il faut dire aussi qu’elle porte ses cheveux d’ébène en broussailles très courts, suffisamment courts en effet pour qu’on puisse apercevoir le bout pointu de ses jolies oreilles. Bien qu’effilées, ces dernières le sont trop légèrement pour l’associer à un elfe; elle est bien humaine.

Maintenant debout, je lui fais face, ses yeux d’un bleu profond me fixent. Contrairement à ses collègues, elle ne porte pas le bandeau sur l’œil. Sur cette peau blanche, une bouche bien dessinée esquisse un sourire de victoire. Elle s’avance calmement vers moi sabre à la main, apparemment prête à me décapiter. Cela ne semble pas l’embarrasser de s’attaquer à un homme désarmé.

Je suis troublé par cette beauté, mais insuffisamment, heureusement pour moi, pour rester figer sur place. Je recule suivant son rythme, effectuant le même nombre de pas qu’elle, afin de maintenir la même distance entre nous. Patiemment, ce petit bout de femme poursuit ce manège, elle affiche maintenant un sourire narquois : elle ne semble pas pressée d’en finir.

(Ma beauté y est peut-être pour quelque chose?)

Après quelques instants, je comprends, hélas, que ce sourire espiègle laissant paraître ses magnifiques dents blanches n’était pas destiné à mes attributs, mais plutôt au fait que je sois pris au piège : je ne peux plus reculer, acculé sur un des mâts, je suis à sa merci.

« Fais tes prières beau blond! »

Ce disant d’une voix chaude et légèrement enrouée, elle lève son sabre haut dans les airs et le laisse pesamment tomber. J’accompagne des yeux le mouvement de son arme. Resté immobile jusqu’au dernier moment, j’évite son sabre de justesse. C’était risqué, mais je ne pouvais faire autrement. Si j’avais changé de position trop tôt, elle aurait eu le temps de réajuster son tir.

Coup de chance en ma faveur, son arme reste fichée dans le mât avec un petit bout du pan de ma chemise. À deux mains, elle essaie nerveusement de déloger son instrument de guerre. Je profite alors de ce moment pour la frapper dans le ventre avec mon pied. Je me sers ensuite de son sabre comme d’un marche pour gravir le mât. Je n’ai pas aussitôt le pied gauche dans les cordages, qu’elle agrippe à deux mains mon pied droit, avant que je n’ai eu le temps de l’enlever de la prise improvisée. En secouant ma jambe, je tente de me déprendre, mais sans résultat, elle me tient fermement.

(Si je ne peux m’échapper de la bataille, je n’ai d’autres choix que d’y participer!)

Me contorsionnant le tronc afin de lui faire face, je me jette sur elle. J’espère ainsi lui faire perdre l’équilibre; ce qui est réussi. Lorsque je lui tombe dessus, je l’enlace de mes bras, elle perd pied et lâche ma jambe. Elle se cale la tête contre mon estomac afin d’éviter sans doute que l’arrière de son crâne frappe durement le plancher de bois. Nous atterrissons sans trop de mal, elle laisse seulement échapper un léger gémissement.

Je me retrouve couché par-dessus cette femme qui voulait ma peau. Cette situation m’aurait plu si nous n’étions pas en plein carnage. Beaucoup de cadavres parsèment le pont, un incendie fait rage, la fumée nous asphyxie et des fous prennent plaisir à s’entretuer. Mon flan gauche me brûle, son sabre a sans doute éraflé ma peau.

Je suis blessé à deux endroits. Exténué, je n’ai plus de réserves dans lesquelles puiser.

(À quoi bon résister davantage.)

Je fais alors un geste qui peut me coûter cher, mais tant pis je veux profiter de ces derniers instants de ma vie. J’approche davantage mon nez de sa tête et je renifle ses cheveux qui dégagent une délicate odeur de jasmin, je la serre ensuite un peu plus fortement dans mes bras pour bien sentir sa chaleur. Sans la violenter, ni la brusquer, je profite avidement de cette petite douceur.

« OUAïlïE ! »

Sa tête toujours contre sa poitrine, elle m’a mordue: mon rapprochement bien que délicat et dépourvu de toute trace d'attouchement l'a tout de même déplue. Je comprends sa réaction bien légitime, mais je ne lâche pas prise pour autant, au contraire je resserre doucement mon étreinte espérant ainsi éviter une récidive de sa part. Tout en la maintenant contre moi, je fais une roulade de côté d’un demi-tour afin que son dos et non le mien soit exposé aux éventuelles attaques.

Ainsi partiellement protégé par ce bouclier humain, résigné, j’attends la fin. La chaleur de son corps est comme un baume sur mes blessures. Mon seul réconfort : c’est dans les bras d’une femme que je rendrai l’âme.

La fin de cette terrible bataille a enfin sonné. Sur le pont de l’Echangeur, nombre de cadavres sans vie ou encore agonisant baignent dans leur propre sang, et dans celui de leurs amis et ennemis vaincus en ce jour. L’attaque du Rubis Sanglant a été meurtrière, et c’est avec clarté que l’on reconnait maintenant la réalité de son nom : ces pirates n’ont aucune pitié, aucune compassion pour leurs semblables. Ils font couler le sang sans remords ni regret : c’est leur métier, et ils le font sans coup férir.
Leur capitaine boiteux, borgne et manchot a fait ses preuves lors de ce combat, provoquant en duel le capitaine Khamsin et remportant ce duel haut la main.
Une fois que les dernières poches de résistance tuloraines sont mises à mal, le capitaine hurle ses ordres glacials de sa rude voix de marin. Il ordonne à son équipage d’embarquer tous les survivants de l’Echangeur sur le pont du Rubis sanglant, où il les fait s’aligner en une longue ligne droite. Chaque homme de Tulorim est maintenu par un pirate, qui lui menace la gorge de son arme. Le moindre mouvement de révolte serait suicidaire, surtout que le cruel pirate semble vouloir faire étalage de clémence… à moins que ça ne soit un petit divertissement agréable pour savourer sa victoire pleinement.

La femme tatouée est descendue de son nid de pie. Elle semble encore vivante, mais gravement blessée au niveau du ventre. On l’étend pourtant dans la file avec les autres. Lorsque tout le monde est installé, deux pirates reviennent des entrailles de l’Echangeur en maintenant un homme muni d’une cape noire à capuchon et au visage couvert d’un tissu noir. L’assassin…

« Cui là s’cachait dans la soute ! »

Il est amené lui aussi avec les autres, et tenu en respect par un pirate.
Anarazel est le premier de la file des gens de l’Echangeur, en tant que second, en tant que trublion dans la bataille… Glenor, le nain guérisseur, se tient près de la demoiselle à l’aigle, prêt à lui prodiguer des soins. Burgh maintient avec un plaisir non dissimulé l’elfe noir enchaîné. Madoka, elle, s’est retirée un peu à l’écart, pas très loin du cadavre sanguinolent de Fino…

Rosie est presque en bout de file, à côté de l’assassin au capuchon noir, qui ne dit mot. Mathis, lui, est maintenu par la jolie demoiselle qu’il a si longtemps serrée. Elle pointe sur sa gorge une lame de poignard, jouissant visiblement de sa position de force sur le bel homme.

« Alors comme ça tu voulais être proche… »

Elle se serre contre le dos du voleur, tout en raffermissant la pointe de son arme sur la gorge du kendran. En face d’eux se tiennent Leena et Draast. La demoiselle rousse est accrochée au bras du semi-shaakt et le reluque attentivement de son œil vert.

« Alors, ce combat n’était-il pas grisant, mon beau ? »

Le capitaine pirate fait face à la file et la toise de son œil unique avant d’éclater d’un rire mauvais. Il tient à la main la tête du capitaine Khamsin, qui dégouline encore de sang…



(Légende: les tulorains sont les petits ronds, les pirates sont les carrés.
Les points:
Anarazel
La demoiselle tatouée
Ruméus
Le Drow
Mathis
Rosie
L'Assassin
Les carrés:
Glenor (en noir)
Burgh
Madoka
(feu) Fino
Leena
Draast
Le capitaine pirate

« Hahahaaa ! Fiers marins de Tulorim, vous voici vaincus ! Quelle folie d’avoir tant résisté alors que notre victoire était évidente ! Vous ne faisiez pas le poids, mauviettes ! Voici donc ce que Tulorim a envoyé pour cette chasse ! Ha ! Trop peu d’entre vous me seront utiles, désormais… mais certains pourraient l’être. »

Il lève le bras pourvu d’un crochet et l’abat violemment. Aussitôt, le sang gicle à nouveau à flots… Tous les marins de Tulorim viennent de se faire égorger dans un râle commun et peu ragoutant. Seuls persistent les aventuriers : Anarazel, la demoiselle tatouée, Ruméus, le Drow, Mathis, Rosie et l’Assassin. Le capitaine reprend alors la parole après un instant de silence.

« Vous, aventuriers, je vous donne le privilège de la vie sauve. À vous de voir ce que vous en ferez ! Je vous offre un choix : Soit vous me rejoignez, soit vous allez croupir dans les cales du Rubis Sanglant jusqu’à ce qu’on décide de votre sort… Choisissez, mais choisissez bien ! Haha !!! »

Le silence s’abat sur le pont, un silence de mort seulement troublé par le bruit des vagues et du vent. La nuit est tombée, et seules les nombreuses torches éclairent les visages, les rendant plus terrifiants encore… Les corps des marins de Tulorim sont jetés négligemment à la mer dans l’attente d’une réponse…

[A vous de jouer ! Je fais répondre les PNJ à vos actions et vos paroles.]