Je suis tout à fait prêt à te rejoindre sur l'idée que ça "touche" les deux notions.
Dans l'échange que nous avons eu autour de la culture du viol, je perçois deux dimensions :
- Celle qui m"intéresse le plus est celle qui m'incite à l'étude du phénomène, pour sa compréhension, et qui m'amène à me questionner sur la pertinence du terme de culture, les manifestations du phénomène, sa portée et ses limites. C'est ici que le terme "toucher" me plait bien, car toucher n'est pas englober, il y a une idée de ponctuel/cibalge.
- La dimension politique du terme (avec le sens large que je lui applique généralement, qui ne recouvre pas forcément la conduite de l'Etat et les actions qui y permettent de l'atteindre, mais une volonté plus large d'agir pour changer les orientations d'un groupe, les représentations, etc. que ce soit) avec laquelle je ne suis pas forcément à l'aise. La première dimension sert nécessairement la seconde (et peut-être comprendre le phénomène permet-il de susciter une vocation politique dans la lutte contre celui-ci), mais avant de me lancer dans cette dernière, je veux être bien certain de comprendre qui utilise le concept "culture du viol", et dans quel but, avant de m'approprier ce concept et, au besoin, trouver un autre cadre de référence, m'aménager ma propre vision de la chose, nommée autrement pour ne pas entrainer de confusion. Car dans cette dimension politique, il pourrait être plus intéressant de laisser flotter la question de la globalité du phénomène (il ne "touche" plus seulement), car dans un discours, il devient facile d'incriminer à peu près tout et n'importe quoi, donc d'accumuler beaucoup d'arguments à sa cause.
J'avais déjà eu le même souci avec la notion de flexivore, et la double dimension qui me gênait : objectivement, le terme pouvait décrire mon régime alimentaire (bon, j'ai aussi pinaillé sur la description et la proximité avec omnivore), cependant, je lui trouvais aussi une dimension politique, car en définissant le régime végétarien comme régime alimentaire de référence : comme le régime végétarien n'est pas qu'un régime alimentaire "naturel", il recoupe aussi, dans bien des cas, des considérations philosophiques/éthiques/politiques/écologiques/etc. c'est aussi cet ensemble de valeur et de comportements vers lequel le terme de flexivore me paraissait porter.
Alors oui, avec ma définition large, tout peut paraître politique. Le critère qui permet de restreindre me paraît être la question de l'intention et de la direction.
Malgré le fait que la culture du viol serait parfaitement intégrée à notre société, viol reste un terme négatif, emprunt d'une grande violence (encore plus si l'on étend la conception de viol à tout ce qu'a évoqué GM14 plus bas). Parler de culture du viol, reconnaître une culture du viol, ce n'est pas seulement une posture intellectuelle, comprendre ce qui se passe : c'est aussi stigmatiser ladite culture, et tout ceux qui en sont porteurs (pour faire un parallèle peut-être un peu approximatif avec le végétarisme, c'est comme expliquer être végétarien par souci de son corps, ou de la nature : malheureusement, le corollaire est que ceux qui sont omnivores n'ont pas ce souci), et plus on englobe, plus on emporte de chose avec.
Qu'on s'entende, je ne dis pas qu'il faut rester dans ce système. Cependant - et voici la conclusion de ce pavé, dans lequel j'espère avoir été clair - je vous suis reconnaissant de m'avoir permis de mettre un mot sur des choses que j'ai déjà entendu, et si je veux bien reconnaître l'occurrence de certains phénomènes, et adopter la première posture que j'ai décrite plus haut, je ne reconnais ni n'adopte le concept de culture du viol en l'état. En revanche, je reste tout à fait disposé à en discuter avec vous.
Sur ce bon appétit.
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C'est par la sagesse qu'on bâtit une maison, par l'intelligence qu'on l'affermit ;
par le savoir, on emplit ses greniers de tous les biens précieux et désirables.
Proverbes, 24, 3-4