La tempête de glace s'abattait sur mon corps, me déséquilibrant ce qui faillit me faire tomber à terre à plusieurs reprises. Le sifflement de l'air résonnait dans mes oreilles, m'arrachant même un juron qui se perdit dans le tumulte aussi rapidement qu'il était sorti de ma bouche. Je ne savais pas comment nous arriverions à retrouver Glaya dans ce blizzard qui menaçait sans cesse de nous propulser sur le sol sans sommation. Les rafales me repoussaient sans arrêt en arrière, j'aurais aimé être une brindille pour pouvoir laisser passer l'air sans être dérangé. Le temps n'était donc pas notre allié, à croire que tous les éléments s'étaient mis en travers de notre chemin ! La bouche ouverte, je continuais d'hurler pour que Krochar pût retrouver ma trace sans se perdre dans cette purée de pois aussi claire qu'une vitre fumée. D'ailleurs, mon coéquipier ne devait pas être au meilleur de sa forme car quelques secondes avant que je rompisse le charme, son cri transperça le temple maudit. J'espérais qu'il ne lui était rien arrivé de trop grave, nous ne pouvions pas nous permettre de perdre un nouveau membre du groupe.
(Pourvu qu'il me retrouve !)
Après quelques minutes qui me parurent une véritable éternité, une main énergique attrapa ma cape qui flottait dans tous les sens à cause du vent. Je crus tout d'abord qu'un de nos ennemis nous avait suivis, mais la voix de Krochar apparut au beau milieu de ce chahut. Enfin ! Il avait réussi à me trouver, nous devions avancé pour partir à la recherche de notre chère amie... Mais où chercher ? Ce vaste monde imaginaire créé par la puissante magie du sorcier Garzok était un véritable désert de glace. Je me mis à avancer droit devant, apercevant de temps à autre la masse imposante de Krochar qui ne me lâchait pas d'une semelle. Au moins, nous étions réunis et avions peu de chance de nous égarer dans ce véritable labyrinthe. «Hé Krochar ! J'espère que Jakadi a moins de problème que nous !» plaisantai-je maladroitement.
Soudain, un bruit me fit sursauter à quelques pas de nous, à moins que ce ne fût mon imagination qui me jouait des tours ou bien était-ce le froid piquant qui s'était immiscé à l'intérieur de ma cape dans l'espoir de me faire greloter. Dans tous les cas, nous ne devions pas oublier que des Garzoks bien plus forts et nombreux que nous continuaient de nous poursuivre. Nous aurions peut-être pu les semer, néanmoins, l'un d'entre eux était le mage de glace qui nous avait posé quelques problèmes lors de notre arrivée au village nain. Ce monde des neiges était le sien, son propre élément dans lequel il vivait depuis toujours. Et si c'était lui qui nous suivait, attendant le bon moment pour se jeter sur nous et nous anéantir une bonne fois pour toute ? Peut-être était-ce un guerrier à la lame acérée qui désirait tout simplement nous ouvrir et nous vider comme des porcs...
(Ne sombre pas dans la paranoïa Kerkan, c'est mauvais pour ta santé...)
Laissant ce début de folie loin derrière moi, je suivis mon chemin accompagné de Krochar : nous ne voyions strictement rien, cette atmosphère incertaine commençait à me titiller les nerfs. Puis, les pleurs se firent plus nets, signe incontestable que nous nous approchions de la Rouquine. Enfin ! Elle était là, à côté de nous, nous venions de la retrouver ! Mais pourquoi était-elle si triste ? Pour cela nous devions continuer de marcher afin de comprendre ce qui lui causait tant de mélancolie.
(Tout cela est étrange...)
Lorsque nous fûmes à une distance relativement minime de Glaya nous pûmes observer ce qui la chagrinait tant. Le corps d'un jeune homme blond était allongé sur le sol, une épée plantée dans le corps, laissant perler quelques gouttes de sang dans la neige ce qui donnait un côté encore plus inquiétant à la scène. Qui était-il ? Glaya le connaissait-elle ? Était-ce son amant ? Tant de questions qui resteraient sans réponse... La magicienne pleurait à chaudes larmes, ne se souciant nullement de la situation qui nous menaçait, la seule chose qui lui importait était cet homme sans vie. Tout cela paraissait si tragique que ça en devenait presque ridicule ! Pourtant, j'aurais adoré serrer la jeune femme dans mes bras pour tenter de la réconforter. Mais, Krochar était là et cela aurait pu être malvenu étant donné que ce cadavre faisait partie du spectacle...
(Aïe ! Mais c'est quoi ça encore ?)
Une violente douleur s'éprit de ma cuisse, ce qui eut pour seul résultat de me faire tomber à genoux dans la neige... Je me rendis vite compte que ma jambe s'était faite une amie incongrue : un épieu de glace était planté dans ma tendre cher. Mon sang commença à couler, je voulus d'ailleurs retirer le symbiote, mais, la vision de mon fluide vital se déversant à flots par terre me figea sur place. J'en étais sûr ce monstre nous suivait ! Il pouvait certainement voir dans cette tempête autant que certaines espèces nyctalopes qui avaient la capacité de se servir de leurs yeux comme en plein jour. Nous aurions dû être plus prudents, comment avais-je pu faire preuve d'autant d'inconscience ! La seule chose que nous devions faire c'était de sortir Glaya de sa torpeur et de la ramener le plus vite possible dans notre monde ! «Vite ! Nous n'avons pas de temps à perdre, les secondes nous sont comptées ! Ce sale mage est dans les parages, il vient de m'attaquer... Je ne pourrai pas l'affronter dans cet état... Nous devons nous enfuir, cette tactique peut paraître lâche, mais nous sommes trop peu nombreux... Occupons-nous de Glaya avant qu'ils ne soient ici !»
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Quête 18 : Un monde de rêve au pays des cauchemars
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