Kerkan partit en avant et je le suivais en titubant derrière lui, toujours accroché à sa cape. Le froid et la neige engourdissaient de plus en plus le moignon de mon épaule gauche et la douleur laissait la place à une sensation désagréable de paralysie mélangée au manque de mon membre. J'avais un peu peur que cette situation ne s'éternise et que l'usage de mon bras gauche me soit à jamais un exercice plus difficile que d'habitude.

(Faut qu'on sorte vite avant que je ne m'habitue à n'avoir qu'un seul bras. Je veux bien m'adapter à quelques situations extrêmes mais pas à ce point.)

Je voyais à peu près où nous nous dirigions : dans le blanc. On ne voyait rien mais apparemment Kerkan arrivait à se repérer car il marchait dans une direction précise.

(Il doit avoir une sorte de sixième sens magique. Il est aquamancien à la base, après tout.)

«Hé Krochar ! J'espère que Jakadi a moins de problème que nous !»

(Oh milparda ! J'avais oublié Jakadi ! Il lui est peut-être arrivé quelque chose. Il faut vite que nous sortions d'ici, si nos ennemis peuvent attaquer nos rêves, ils peuvent certainement attaquer Jakadi.)

"Moi aussi."

Il y eut alors un bruit dans l'immensité de la toundra qui nous entourait qui fit sursauter Kerkan et qui me fit regarder derrière nous pour vérifier que ce n'était pas un poursuivant.
Le sort de Jakadi m'inquiétait plus que le nôtre : nous étions immortels ici, pas Jakadi. Et puis le petit Sekteg n'avait pas vraiment la carrure pour résister longtemps à un combat contre des guerriers Garzoks entraînés comme ceux que j'avais combattus.
Dans le silence qui suivit, je pus entendre à nouveau les pleurs que je pensais être le fruit de mon imagination, mais après quelques instants de réflexion je me suis souvenu que c'était ceux de Glaya.

Kerkan repartit et je suivais toujours, regardant parfois par-dessus mon épaule pour vérifier si le dernier sorcier Garzok n'utilisait pas la neige comme camouflage, voir même comme arme.

(S'il peut congeler une rivière, il peut attaquer avec de la neige.)

Au bout d'un moment je compris que le magicien ne se repérait pas grâce à un sort quelconque, mais qu'il suivait les pleurs de Glaya à l'oreille à travers le vent.

(C'est étrange qu'on les entende si bien alors qu'on se croirait en pleine tempête.)

Lorsque enfin la femelle se trouva devant nous, nous avons stoppé nos pas pour regarder un triste spectacle : Glaya était agenouillée devant un Humain bardé de fer et d'acier allongé par terre. Ce dernier était vraisemblablement mort, une épée jaillissait de sa poitrine et du sang coulait par terre, rougissant la neige d'une couleur vermeille.

(Qui est-ce ?)

Avant que je ne pus formuler à haute voie mon interrogation, Kerkan fit un mouvement étrange à coté de moi et, en suivant son regard, je pouvais voir qu'il avait un pied de glace planté dans la jambe.

(Wow ! Il doit souffrir le pauvre.)

Je restais étonnamment décontracté devant une blessure aussi grave pour la simple raison que j'avais moi-même une blessure de l'ordre des "mortels" et que je tenais encore debout. Par contre je me souvenais que la douleur était bien réelle et je m'attendais à l'entendre hurler mais à ma grande surprise le petit homme se retint, ou était trop apeuré par une telle blessure pour même pensé à crier. Toujours est-il qu'il se ressaisit rapidement et dit :

«Vite ! Nous n'avons pas de temps à perdre, les secondes nous sont comptées ! Ce sale mage est dans les parages, il vient de m'attaquer... Je ne pourrai pas l'affronter dans cet état... Nous devons nous enfuir, cette tactique peut paraître lâche, mais nous sommes trop peu nombreux... Occupons-nous de Glaya avant qu'ils ne soient ici !»

J'acquiesçais d'un signe de tête et partit directement en direction de la pauvre rousse qui ne cessait pas de pleurer et, en commençant à la soulever sans sommation, je demandais à Kerkan :

"Tu sais comment sortir d'ici ?"

Puis pour justifier mon geste auprès de Glaya je lui dis du ton calme et posé des gens qui disent des choses sensées :

"L'Humain blond est mort, on ne peut pas l'emmener dans cette situation, on risquerait de se faire capturer. Il faut partir Glaya."

Glaya est vraiment amorphe. Elle se laisse porter comme une poupée de son par Krochar, comme si les deux aventuriers n'étaient pas là. Les larmes coulent toujours le long de ses joues.

"Shallir ! C'est ma faute, pardon..."

Après quelques secondes, elle réalise ce qu'il se passe et elle se met à paniquer et à se débattre pour se libérer de l'étreinte du garzok. Mais même avec un seul bras, il arrive à la contenir et à l'éloigner du corps.

"Non ! C'est Shallir ! Je dois l'aider. Laisse-moi !'

Elle se débat en vain, mais gêne quand même une retraite rapide.
A ce propos, vous voyez un projectile passé à coté de vous. La tempête vous a empêché de voir ce que c'est précisément, mais il vaut mieux ne pas s'attarder. Vous ne voyez plus la silhouette du cryomancien...

Krochar acquiesça, il le savait lui aussi, nous ne pouvions rester aux côtés de Glaya trop longtemps, sinon, le cryomancien nous attaquerait. Déjà que j'avais un pic de glace planté dans la jambe, je ne tenais pas à m'en prendre un dans le crâne... La douleur était bien trop aiguë, je ne pouvais pas me permettre de tomber dans les pommes en laissant mes deux coéquipiers dans ce monde irréel. D'ailleurs, Krochar me demanda si je savais comment sortir d'ici, la question me demandait une intense réflexion : que m'avait dit la Dame des Songes ? Ah oui ! Nous devions sortir du rêve de la Rousse et ensuite, je n'avais qu'à effacer les symboles magiques sur nos fronts...
«Oui, je sais comment sortir de ce monde... Mais, nous devons quitter le pays des glaces sans ça Glaya ne pourra retourner dans notre monde.»

Le Garzok s'approcha de la Rouquine, je pensais qu'il tenterait de la réconforter mais, il ne fit pas réellement preuve de tact... Lui dire qu'il était mort n'était pas la meilleure chose à faire étant donné dans quel état de souffrance elle se trouvait... Toutefois, nous n'avions pas de temps à perdre, Krochar la souleva de son bras musclé et l'écarta de la scène tragique. La Jeune femme se débattait, cherchant en vain à se diriger vers le guerrier prénommé Shallir. Qui était-il ? Était-ce une de ces personnes mortes qui la hantait dans notre monde ou bien était-ce son frère ou un autre membre de sa famille ? Pourvu que ce ne fût pas son amant ! J'aurais bien aimé avoir ma chance, juste une petite pour une fois... De toute façon, c'était peine perdue ! En regardant les traits angéliques du jeune garçon, je m'aperçus que je ne pourrais rivaliser avec mes cheveux bleus emmêlés, il était bien trop séduisant... Quelle ironie du sort ! J'en avais assez ! Tel un gamin capricieux, je m'approchais de Krochar et lui dit :
«Écarte-la du cadavre et allons-y ! Plus vite nous serons rentrés, plus vite on pourra tenter de comprendre ce qui est en train de nous arriver...»

(Ah ! Jalousie quand tu nous tiens...)

Nous devions nous hâter, chaque seconde passée nous rapprochait de quelques pas de notre adversaire aux pouvoirs du froid. D'ailleurs, quelques choses siffla nous loin de nous, était-ce une menace ou simplement un sort raté ? Dans tous les cas, il ne nous laisserait pas de répit, ce Sorcier n'avait qu'une idée en tête : nous abattre de sang-froid... Le pire était que l'inévitable combat contre lui aurait lieu et je ne voyais vraiment pas comment en venir à bout... En effet, ses sortilèges n'avaient rien à voir avec ma magie de l'eau, de plus, il était capable de transformer mes enchantements en glaçons... Génial ! Enfin, nous n'en étions pas encore là et j'avais le temps de peaufiner une stratégie pour en venir à bout.
«Il ne nous lâchera pas l'imbécile ! Si ça se trouve il est à deux mètres de nous, caché dans un brouillard magique ! Il commence vraiment à m'irriter !»

Nous ne pouvions pas courir étant donné que Glaya se débattait dans l'unique bras de Krochar et que ma guibole défaillait sous le poids de mon corps. Je craignais que notre ennemi nous rattrapât et nous transformât en chair à pâtée...

Kerkan répondit à ma question :

«Oui, je sais comment sortir de ce monde... Mais, nous devons quitter le pays des glaces sans ça Glaya ne pourra retourner dans notre monde.»

(Ca veut dire qu'il faudra repasser devant les guerriers, ça va être difficile mais cette tempête devrait nous camoufler.)

De mon seul bras valide je commençais à tirer Glaya en l'éloignant du cadavre Humain.

"Shallir ! C'est ma faute, pardon..."

(Je me demande bien ce qui s'est passé, il faudra peut-être lui demander après s'être tiré de ce guêpier.)

Mais la pauvre femelle ne voulais pas que je l'emmène, reprenant ses esprit et pleurant de plus belle elle s'efforçait de se libérer de mon emprise.

"Non ! C'est Shallir ! Je dois l'aider. Laisse-moi !"

Malgré mon membre manquant et toujours douloureux j'arrivais à contenir cette faible Humaine affaiblie par le froid et le chagrin, ce n'était pas très glorieux comme façon de faire mais je ne pouvais pas attendre qu'elle se remette de ses émotions pour partir. Plus pour moi que pour elle, je chuchotais assez fort pour qu'elle m'entende dans le vent :

"Désolé."

«Écarte-la du cadavre et allons-y ! Plus vite nous serons rentrés, plus vite on pourra tenter de comprendre ce qui est en train de nous arriver...»

(Et plus vite on sera hors de portée du mage de glace.)

Au même moment, comme un écho à mes pensés, un objet passa très rapidement entre Kerkan et moi, presque invisible dans tout ce blanc uniforme dans lequel nous nous trouvions. J'aurais pu tenter de repérer d'où il venait si le vent violent de la tempête n'avait altéré les sons ambiants.

(On aurait dit que l'objet venait de loin, impossible de savoir d'où exactement.)

Personne n'avait été touché et je trouvais ça un peu bizarre qu'un magicien qui maîtrise se genre de sort n'arrive pas à bien visé lorsqu'il est entouré de neige.

(D'un coté si Kerkan ne peut pas voir à travers la tempête, peut-être que le sorcier non plus.)

«Il ne nous lâchera pas l'imbécile ! Si ça se trouve il est à deux mètres de nous, caché dans un brouillard magique ! Il commence vraiment à m'irriter !»

(Bon sang on est mal là, si ce type nous lance un sort qui nous immobilise on sera condamné à rester ici. Faut faire quelque chose ! Réfléchis… que ferais tes ancêtres Krochar ? Potty combattrait jusqu'à la mort mais je ne peux pas me battre avec un bras en moins dans une tempête permanente… Potty potty aurais couru comme un dérater pour sortir le plus vite possible et trouvé un terrain favorable au combat mais courir serait dangereux si le sorcier nous attaquer par surprise… Rien de tout cela ne marche dans ma situation !)

Puis une idée me vint, une idée qui ne m'étais jamais arrivé d'avoir lorsque je pensais à mes ancêtres :

(Et Motty, elle ferait comme elle ? Motty n'était pas une guerrière mais elle trouvait toujours un juste milieu à deux idées qui s'opposaient. Et Motty motty disait qu'il fallait toujours tuer le chef de la meute avant de combattre ses sous-fifres.)

Dans ma tête fermenta un plan qui mélangeait toutes les techniques de ma famille, femelles comprises. Après avoir bien revu toute l'idée posément je m'approchais de Kerk pour ne pas avoir à crier par-dessus le vent afin que personne d'autre n'entende ce que je voulais lui dire.

"Moi aussi il m'énerve le sorcier ! Je pense qu'on a pas le choix Kerk, il faut le tuer lui aussi, c'est le seul qui peut facilement nous bloquer avec sa magie et si on se fait capturer, on aura beau être immortel on va en chier quand même. En plus j'ai un compte à régler avec lui depuis la route aux runes. Dès qu'on l'a eu il faudra ensuite s'enfuir à toute jambe, les autres Garzoks n'auront plus d'ordre précis et auront plus de difficulté à nous empêcher de partir. Elle est loin la sortie ?"

Le début de notre retraite ne se réalisa pas comme nous l'aurions souhaité : entre Glaya qui ne voulait quitter le Blondinet, le Sorcier qui nous envoyait des pics de glace dans la brume et nos blessures qui nous handicapaient, nous n'étions vraiment pas sortis de l'auberge... Le seul moyen que nous avions pour nous en sortir était de rejoindre le temple et nous mettre à l'abri. Mais, comment nous orienter dans cette tempête ? La neige battait nos visages, nous fouettant comme si nous étions de simples esclaves dominés par un maître sadique. Qu'allons-nous devenir ? Ce jeu du chat et de la souris n'était pas fait pour moi, nous ne nous trouvions pas en terrain ami, jamais je ne m'étais battu dans ces conditions...

(Satané pays des rêves !)

Krochar agissait en vraie tête brûlée, j'avais d'ailleurs l'impression qu'il avait perdu le sens commun... Selon lui la meilleure tactique à avoir était l'attaque, même si nous nous trouvions en plein blizzard et que l'ennemi en question était un sorcier des glaces sûrement très expérimenté. Comme quoi nous n'avions pas la même façon de voir les choses... Je ne savais trop quoi lui répondre, les éléments étaient contre nous et je craignais de me jeter directement dans la gueule du loup. Rien que de penser à la manière dont il avait congelé la rivière, je me serais bien enfui... Mais pour aller où ? Nous étions encore dans une sale posture, à croire que notre aventure était condamnée à être un véritable échec...
«Écoute Krochar, je sais que tu meurs d'envie de lui faire payer le passé, mais franchement, je ne vois pas comment on pourrait le vaincre dans ces conditions... Il doit être protégé de la tempête par un sort extrêmement bien ficelé alors que nous, nous ne sommes pas au meilleur de notre forme : il te manque un bras et moi j'ai une stalactite de glace dans la jambe. Je sais bien que tout cela n'est qu'une grosse illusion, mais, vraiment de là à passer à l'attaque, il y a un énorme fossé...»

À moins que l'on utilisât une diversion comme la dame des songes l'avait fait pour nous aider à entrer dans le temple afin de secourir Glaya... Je ne savais pas trop comment elle s'y était prise, mais, après tout au pays des rêves tout était possible... La petite flammèche de l'espoir s'enflamma aussitôt dans mon esprit, il me fallait trouver le moyen de donner vie à mes pensées !
«Attends avant de faire quoique ce soit ! J'ai peut-être une idée ! Je ne sais pas du tout si ça va fonctionner, toutefois, j'aimerais bien tenter le coup !»

Les rêves n'étaient qu'un jeu de l'esprit, un moyen pour les mortels de se libérer de la tension accumulée durant la journée. Hé bien ! Si je pouvais canaliser toute l'anxiété emmagasinée durant la dernière semaine, je pourrais certainement créer quelque chose de vraiment terrifiant... Bon ! Je devais me dépêcher. Réfléchissant aux horreurs que j'avais vécu, je me concentrai sur le petit dragon que j'avais chevauché malgré moi. Je revoyais ses crocs acérés desquels dégoulinait de la bave gluante. Rapidement, je vivais de nouveau la scène : ses griffes étaient plantées dans mes épaules, s'enfonçant jusqu'à toucher mes os. Malgré les cris stridents de la bestiole et mes efforts insurmontables pour ne pas sombrer dans le coma, mes paupières commençaient à se fermer inexorablement. Des frissons me parcoururent le corps, je n'aurais jamais imaginé me projeter dans le passer pour revivre cet événement morbide. Et pourtant, la créature cauchemardesque aux écailles luisantes s'activait devant mes yeux en battant des ailes.

(Garde bien cette image en tête ! Voilà, comme ça. Maintenant, trouve un moyen pour lui transmettre de l'énergie et la matérialiser.)

Utilisant les forces qui me restaient, je tentais de projeter l'image de la bestiole dans la tempête. Ma concentration s'était changée en véritable mur défensif contre les attaques extérieures. En effet, je n'entendais plus le souffle des bourrasques, tout ce qui m'intéressait était la création de la wiverne...

Miracle Tenté : miracle loupé

Malgré toute la concentration de Kerkan, son dragon ne semble pas vouloir apparaître. Le vent bat toujours violemment des flocons contre visage, sifflant comme une menace.

Pendant ce temps, toujours aucun signe du cryomancien. Avec un peu de chance, il s'est perdu aussi dans la purée de pois qui vous entoure.

Glaya, après s'être débattue vainement, finie par se calmer et deviens presque amorphe, reniflant bruyamment et laissant couler ses larmes sans interruption.

D'un coup, le cadavre du dénommé Shallir ouvre les yeux et son buste se redresse. Une voix rauque et plaintive envahit alors l'atmosphère et sans hurler, il couvre le bruit de la tempête et résonne dans vos oreilles.

"Tu m'as tué ! Tu m'as laissé y aller ! Je pourris là-bas par ta faute !"

Glaya pousse un hurlement et poussée à bout par le choc, s'évanouit, ne devenant plus qu'une poupée inanimée retenue par le bras de Krochar.

... Rien... Pas la moindre apparition autour de nous... Seule la neige continuait de tomber comme si nous étions dans un pays nordique où les hivers étaient de véritables luttes ! Oh ! Cela était si dur à encaisser, comment expliquer à Krochar que mon idée n'avait pas du tout fonctionné ? Aurais-je le courage de lui dire ce que j'avais tenté de faire ? Non ! Je resterai muet comme une carpe, personne ne réussirait à me tirer les vers du nez, je ne comptais pas me ridiculiser une nouvelle fois. Pourtant, je ne comprenais pas ce qui s'était passé, la Dame des Songes y était arrivée... Peut-être s'était-elle entraînée ou bien était-ce une experte dans l'art de l'illusion ? Je lui demanderai à notre prochaine rencontre, elle me révèlera certainement son petit secret... En attendant, je devais bien me résoudre à accepter l'idée de Krochar :
«Bon, hé bien on va dire que mon idée s'est révélée être infructueuse... Je me soumets à tes talents de stratège...»

Penaud, j'étais résolu à passer à l'attaque avec une jambe transpercée, une blessure qui causerait sans aucun doute ma perte prématurée. Pourquoi m'étais-je endormi ? Franchement, j'aurais pu prendre le premier tour de garde, j'étais certain que regarder les étoiles m'aurait enchanté. Mais non ! Je me retrouvais piégé dans cet univers, en train de jouer à une partie de cache-cache avec des Garzoks partisans de Oaxaca... On ne pouvait rêver mieux ! Croyant avoir atteint les sommets de l'ennui, j'étais prêt à relativiser et à faire face aux nombreux problèmes. Cependant, le cadavre aux cheveux dorés se réveilla en sursaut et se mit à parler à Glaya, lui expliquant qu'il était mort par sa faute... Hé bien, l'esprit de la jeune fille rousse devait être dérangé pour faire ce genre de cauchemars. J'aurais tellement voulu savoir qui était cette personne, en tout cas pour être aussi touchée par sa mort, la Magicienne devait tenir à lui.

(Et voilà, encore une tuile !)

En effet, la Rouquine commençait à peine à se calmer et le réveil du jeune homme la tira de sa torpeur. Un cri terrible sortit de sa bouche avant qu'elle ne tournât de l'oeil, Glaya ne devait sûrement pas s'attendre à le voir reprendre vie de si tôt... C'en était trop ! Si le zombie s'en prenait à nous, Krochar et moi n'aurions aucune chance de retrouver nos enveloppes charnelles.
«Glaya est dans les vappes ! Allons-nous en ! Je ne sais pas pourquoi, mais je sens que ce Shallir ne va pas nous laisser tranquille...»

Kerkan désapprouvait mon idée en disant que nous étions trop affaibli pour pouvoir combattre le sorcier de glace dans une tempête de neige.

(Le terrain lui est plus favorable, je l'admets, mais nous avons quand même l'avantage de l'invincibilité.)

Puis Kerk me demanda soudainement de ne plus rien faire, il voulait essayer quelque chose sans me dire de quoi il s'agissait.

(Un sort j'imagine.)

En le voyant fermer les yeux et prendre une tête très concentrée, voir même soufrant, je me rangea à cette hypothèse et m'attendais à voir un effet immédiat. Mais au bout d'une minute de silence complet – laps de temps durant lequel Glaya compris enfin que sa force ne suffirait pas à me faire lâcher prise et décida enfin de se laissé porter en pleurant – Kerkan se tourna vers moi et dit :

«Bon, hé bien on va dire que mon idée s'est révélée être infructueuse... Je me soumets à tes talents de stratège...»

"Haha ! Talents."

Le mot était assez drôle vu que mon idée venait juste d'une sorte de puzzle de techniques ancestrales.

(Enfin, on peut appeler ça de la stratégie au moins.)

Je m'apprêtais à demander à Kerk quel sorts il pourrait lancer durant la bataille mais je fus interrompus par une voix d'outre-tombe, une voie sourde et tellement puissante que je pouvais l'entendre malgré le vent de la toundra. C'était Shallir, l'humain que pleurait Glaya, qui venait de se réveiller pour l'accuser de sa mort :

"Tu m'as tué ! Tu m'as laissé y aller ! Je pourris là-bas par ta faute !"

Une telle vision la plongea dans un état de terreur insoutenable, la pauvre s'évanouie immédiatement dans mon bras.

(Milparda ! C'est pas possible un truc pareille ! Un non-mort ! Je pensais que ce n'était que dans les rêves qu'on pouvait les voir.)

Puis je me suis souvenu que nous étions bel et bien dans un rêve, celui de Glaya, et rien ne me disait que maintenant qu'elle était dans les vapes une autre malédiction ne pourrait pas sortir de son esprit tourmenté et nous attaqué.

(Nous sommes plus vulnérable que jamais.)

«Glaya est dans les vapes ! Allons-nous en ! Je ne sais pas pourquoi, mais je sens que ce Shallir ne va pas nous laisser tranquille...»

"T'as raison, tirons-nous avant que le sorcier ou un autre truc nous tombe sur le coquillard ! On trace sans s'arrêter !"

Et sans plus attendre je me mis à détaler droit devant moi vers la direction opposée au cadavre parlant, le poids de Glaya compensant largement, et même dépassant celui du bras que j'avais perdu.

(Tiens, le moignon saigne moi on dirait, ça doit être à cause du froid.)

Je n'étais pas vraiment attirer par l'idée de ressentir la blessure encore une fois mais c'était certainement préférable à la sensation d'avoir un bout d'épaule congeler.

Jets de fuite : pas trop mauvais
Jets d'observations : réussis pour tous les deux

Alors que vous fuyez, vous pouvez entendre les cris torturés de Shallir, s'évanouissant peu à peu dans la brume et la tempête. Vous entendez des bruits derrière vous et sur le coté à un moment, mais ils semblent aussi éphémères que la chute d'un flocon de neige et les vents du blizzard vous mènent loin d'eux. Au bout d'un moment, la tempête semble un peu moins violente et ses rafales ne manquent plus de vous rabattre au sol. Vos blessures vous ont affaiblis et le chemin et plus dur, notamment pour Krochar qui a perdu beaucoup de sang et qui porte aussi la jeune femme dans les vappes.

Néanmoins, vous remarquez un nouvel élément Vous voyez sur le sol neigeux que vous venez de franchir une très longue ligne de runes gravées dans le sol de pierre. Pour Kerkan qui a pu les regardé avec attention tout à l'heure, il n'y a aucun doute, ce sont celles gravées par le sorcier garzoks autour de la sphère de la tempête.

Krochar était du même avis que moi : il nous fallait déguerpir avant que le puissant sorcier nous rattrapât ! L'inéluctable combat qui m'opposerait à lui ne devait certainement pas être pour aujourd'hui... enfin, je l'espérais. Il me faudrait sans doute demander des conseils à Glaya, elle seule avait dû déjà se battre avec ce genre de magicien et pourrait donc me montrer ses failles... Je n'avais vraiment pas de chance, ses pouvoirs transformeraient en statue de glace le moindre de mes sortilèges... Que pouvais-je bien y faire ? Utiliser la magie de Gaïa ne m'avancerait à rien, je la maîtrisais si peu, je n'avais pas encore eu le temps de m'entraîner. J'en avais assez de ne rien contrôler, mes parents étaient morts trop tôt et n'avaient pu me donner les cours qui m'auraient permis de devenir un grand mage dans le domaine de l'eau. La seule personne qui pourrait me donner la formation dont j'avais besoin se trouvait dans la forêt de Cuilnen et vivait en autarcie depuis des décennies.

(Viens en mon aide Shamane !)

J'aurais tellement aimé pouvoir rester en sa compagnie la dernière fois que nous nous étions rencontrés, il aurait pu m'apprendre des tas de choses, mais, l'arrivée de Helce avait complètement modifié mes plans. Bref ! Me battre contre ces cauchemars était un moyen de gagner une certaine expérience et d'acquérir de nouveaux savoirs sur le monde magique. De plus, je pourrais rapporter au Shamane tout ce que j'avais appris sur les méfaits de la Vipère, j'étais certain qu'il apprécierait de connaître ses mouvements récents... En attendant, l'heure était grave et nous devions continuer notre route au beau milieu de cette tempête née d'une puissante source de magie.

(En espérant que personne ne nous tombe dessus...)

Notre fuite se déroula sans encombre, si ce n'était ma jambe qui me faisait terriblement souffrir. J'avançais en boitant, traînant mon fardeau dans la neige molle qui retenait chacun de mes pas comme si un énorme aimant m'attirait vers le sol... À moins que ce ne fût tout simplement les pouvoirs de la gravité qui vaquaient à leurs occupations. La douleur me fit grimacer à plusieurs reprises, j'avais l'impression qu'on m'enfonçait des aiguilles chauffées à blanc dans la chair. Le Garzok ne m'avait pas raté, mais au moins j'avais eu la lueur d'esprit de ne pas retirer le javelot de glace et ainsi éviter une grosse hémorragie. Malheureusement, le temps était une arme bien plus puissante que ce sortilège de débutant. En effet, ma chaleur corporelle fit rapidement fondre le glaçon qui se transforma en une eau écarlate tombant en une fine pluie sur le sol immaculé. En y regardant de plus près, on pouvait voir que les fines gouttelettes se changeaient en glace avant de toucher le sol. Cela aurait très bien pu attirer les convoitises de certains artistes aux obscures pensées vu que les billes rougeâtre se mariaient très bien avec le linceul de glace.

(À cause du sang que je perds je me mets à penser à des bêtises...)

À plusieurs reprises, quelques bruits se firent entendre à quelques mètres de nous, néanmoins, le blizzard nous protégeait mieux que ce que l'on aurait pu le croire. Personne ne nous tomba dessus ce qui me rendit un peu le sourire qui s'était récemment évaporé de mes lèvres, de plus, j'avais la nette impression que la tempête commençait à se calmer.
«Je crois que l'on s'approche du temple, les rafales sont moins puissantes.»

Nous continuâmes d'avancer jusqu'à ce que j'aperçusse les dernières courbes sombres faites par le Sorcier qui avait disparu peu de temps auparavant. À ce moment précis, je sus que nous avions enfin rejoint le temple et que nous étions bientôt près de la sortie !
«Ça y est ! On est arrivé, il faut que l'on sorte d'ici et que l'on se mette à l'abri. Ensuite, on repartira dans notre monde !»

Kerk me talonnait et nous nous sommes éloignés le plus vite possible du non-mort Shallir qui continuait à murmurer je ne sais quelle malédiction. La course était épuisante, courir dans la neige sous une tempête en portant une Humaine et avec un bras en moins était certainement la chose la plus difficile que je n'aie jamais fait. J'ais même faillis tomber par terre à cause d'une bourrasque de vent et mon moignon c'est mis en position par réflexe pour que mon bras imaginaire m'empêche une chute trop rude, mais bien heureusement je pus me remettre droit a temps et repartir droit devant moi. Kerkan me suivait de près malgré le pic de glace qui transperçait sa jambe et je pensais que cet Humain méritait vraiment ma considération, ce n'était pas donné à n'importe quel humain de réussir la même épreuve d'endurance qu'un Garzok.

(Encore que c'est peut-être moi qui suis plus blessé que lui. Enfin bon, fortiche quand même, il doit souffrir.)

Durant notre fuite je pus entendre des bruits étranges qui devaient très certainement êtres des bruits de pas ou des phrases transformées par le vent de la tempête en sons indescriptibles. Les guerriers n'étaient pas loin et, très certainement, le sorcier aussi mais la chance était avec nous : la tempête nous fournissait une couverture efficace que les Garzoks n'arrivaient pas à percer. Nous continuâmes donc jusqu'à ce que la violence du vent se fit moins forte et avec elle mon engourdissement, je ressentais de nouveau les douleurs de mon bras qui avait combattu les quatre guerriers et qui portait Glaya ainsi que celle de mon moignon et de mes membres refroidit par la toundra.

«Je crois que l'on s'approche du temple, les rafales sont moins puissantes.»

(Je fatigue, on a une bonne avance mais pas suffisamment pour une pause, je dois tenir encore un peu, la sortie doit pas être loin du temple.)

Je continuais du mieux que je pouvais, Kerk ralentissait comme moi ou alors il tenait bon comme moi, je ne pouvais pas savoir précisément dans ce blanc qui nous entourait et ne laissait aucun relief comme repère. Au bout d'un moment je pus voir par terre des traces étranges, comme des runes mal dessinées ou à moitiés effacées.

(Des symboles dans la neige ? C'est peut-être un piège.)

Mais Kerkan interpréta ces éléments différemment :

«Ça y est ! On est arrivé, il faut que l'on sorte d'ici et que l'on se mette à l'abri. Ensuite, on repartira dans notre monde !»

(Ah ! Ca devaient être les symboles du magicien Garzok qui essayait d'attaquer Glaya dans son rêve. Donc on est dans le temple et proche de la sortie d'après lui.)

"D'accord, je te suis Kerk."

Je fis un léger mouvement de l'épaule pour mettre Glaya dans une position plus confortable pour moi et peut-être aussi pour elle puis je suivis Kerkan.

Quelques jets plutôt bons

La tempête de neige s'atténue de plus en plus au fur et à mesure que vous avancez. le décor du temple réapparait sous une neige de moins en moins présente. Vous passez d'une plaine digne de Nosvéris à l'intérieur marbré et délabré que vous aviez quitté.

Quelques pas vous mènent dans une rue adjacente au bâtiment, à l'abri des garzoks qui semblent encore perdus dans la tempête. Sur l'épaule de Krochar, Glaya se réveille doucement, complètement perdue.

La neige qui s'était révélée être une adversaire redoutable s'était transformée en petits flocons doux et chaleureux, ceux que l'on espérait trouver lors des matins d'hiver. Cependant, nous n'avions pas le temps de nous attarder sur la beauté du phénomène, nous devions nous cacher cela était primordial pour l'instant. Notre groupe se dirigea dans le temple où le marbre s'élevait au beau milieu de la couche de neige ; enfin nous avions regagné notre point de départ. J'espérais qu'une seule chose : ne pas avoir de nouvelles surprises désagréables comme une embuscade ou un piège bien planqué... Prudence ! Le loup rôdait toujours à nos côtés je ne voulais pas me retrouver avec un épieu de glace entre les deux omoplates.
«Faisons quand même attention !» murmurai-je à l'adresse de Krochar.

Nous sortîmes à l'extérieur du temple, laissant les Garzoks perdus à l'intérieur du blizzard, avec un peu de chance ils ne retrouveraient pas leur chemin et mourraient... Cependant, avec la poisse que nous avions eu jusque là, je ne m'attendais pas à un revirement de situation aussi spectaculaire en si peu de temps... Pourquoi la magie ne pouvait me sortir de toutes ces situations difficiles ? J'en avais assez d'être aussi impuissant, j'aurais tant aimé pouvoir contrôler les événements, modeler le destin dans le but d'envoyer dans le néant tous les obstacles qui tentaient de m'empêcher d'avancer... Pourtant, une vie sans problème n'en était pas une... Où était l'intérêt de vivre dans un monde sans embûche ? L'aventure était un moyen simple, mais dangereux de faire jaillir le volcan d'adrénaline au fond se soi. Peut-être était-il beaucoup trop présent en ce moment ?

(En tout cas, j'aurais bien aimé un peu de repos...)

Une idée traversa soudain mon esprit, je repensai à Jérong et à toute sa famille... Que faisait-il ? Avait-il réussi à se débarrasser de l'elfe sylvestre ? J'en doutais un peu, même s'il maîtrisait le noble art de la magie, il n'était pas suffisamment puissant pour envoyer le garde de la reine dans un autre monde... Dès que j'en aurais terminé avec cette affaire, je m'occuperai personnellement de lui, il ne ferait certainement pas le poids contre moi ! Il n'avait jamais dû sortir de Cuilnen, il ne connaissait rien à tous ces mondes parallèles, au pays des rêves, à la magie elle-même ! Je n'avais plus peur de me frotter à des créatures magiques, je commençais à comprendre les mécanismes de la sorcellerie, tout cela devenait de plus en plus clair...

(Non ! Jamais plus je ne me laisserai marcher sur les pieds par un druide, mage ou quoi que ce soit d'autre ! Je pense que certaines personnes vont avoir du soucis à se faire !)

Une fois arrivés dans la rue, nous nous mîmes à l'abri dans une ruelle qui se trouvait non loin du temple. Maintenant, il ne nous restait plus qu'à retourner dans le monde réel ! Enfin nous allions rejoindre Jakadi et lui conter toute notre histoire plutôt farfelue... Je n'avais pas le temps de penser à ça, je devais renvoyer Glaya qui commençait à reprendre ses esprits dans notre monde... La Dame des Songes m'avait tout expliqué et cela était très simple : je n'avais qu'à donner quelques gifles à la Rouquine :
«Krochar, il faut que tu tapes Glaya, elle s'en ira d'ici. Quant à nous nous n'avons qu'à effacer les symboles peints sur nos fronts, normalement nous devrions regagner nos corps.»

La neige et le vent devenaient moins violent au fur et à mesure que nous avancions et très rapidement nous sommes arrivés dans le temple où j'avais combattu les quatre guerriers et perdu mon bras.

(Je me demande s'il est encore là.)

Le cherchant des yeux je n'ais pas réussis à le repérer, peut-être qu'un Garzok l'a pris comme trophée ou alors l'état onirique de ce monde dans lequel nous étions l'avais métamorphosé en autre chose. Toujours est-t-il que Kerkan ne s'attarda pas à admirer le changement soudain de température et d'architecture, il partit directement par la sortie et je le suivais, il bifurqua pour aller dans une petite ruelle pas très loin du temple. Complètement essoufflé je faillis m'allonger au dos du mur contre lequel nous nous cachions si je ne m'étais pas souvenu que Glaya était sur mon épaule lorsqu'elle se mit à remuer. Je me préparais à resserrer l'emprise si d'aventure elle voulait repartir dans son délire. Kerk profita de la pause pour m'expliquer comment sortir de ce monde :

«Krochar, il faut que tu tapes Glaya, elle s'en ira d'ici. Quant à nous nous n'avons qu'à effacer les symboles peints sur nos fronts, normalement nous devrions regagner nos corps.»

(La frapper… la tuer, il veut dire ? Non, il me l'aurait dit clairement si c'était le cas. Bon, autant lui faire confiance, il faut sûrement que je l'assomme un peu plus profondément que si elle était juste tombé dans les pommes.)

"D'accord."

J'entrepris tant bien que mal de poser Glaya devant moi, droite maintenant qu'elle était en possession de ses moyens. J'avais déjà frappé des humains au point de les assommer, des Garzoks aussi, quelques elfes. Chaque race avait besoin d'une certaine dose de puissance sinon le coup n'envoyait pas dormir et faisait très mal à la victime. Je me disais que Glaya étant une femelle son crâne serait moins résistant qu'un mâle. Mais comme je n'arrivais pas très bien à doser ma force je préférais croire qu'elle était encore plus frêle. Par soucis de ne pas lui faire croire que j'étais purement vicieux dans mon acte, je dis à l'Humaine qui avait l'air de plus en plus réveillée :

"Si ça ne t'assomme pas j'en suis désolé."

Et je lui mettais mon poing directement dans le front, zone sensible, facile à visée et surtout qui ne pouvait pas se briser comme le nez ou les dents.

(On a beau être plus ou moins dans un rêve j'ais pas envi d'être responsable des séquelles qu'elle pourrait subir.)

La magicienne de lumière ouvrit en grand ses yeux xxx et je fus moi-même frappé par l'intensité de son regard, jamais mes coups n'avait suscité une réaction aussi vive. Mon étonnement fus double lorsqu'elle disparut en un instant, téléportée par je ne sais quel mécanisme magique que mon poing avait déclenché. Mon bras me faisait mal après tous ces combats et le coup que je venais d'asséner n'arrangeait rien.

(Bon, mieux vaut ne pas la laisser seule, il faut partir vite la rejoindre.)

Me tournant vers Kerkan je crachais dans ma seul main restante et, avant de me frotter le front où se trouvait le symbole qui me retenait, je lui fit un léger signe de tête :

"On se retrouve dehors…"

Mon regard se porta sur sa jambe transpercée et puis sur mon moignon qui me démangeait.

"…entier avec un peu de chance."

Avec un sourire je me frottais le front avec ma salive qui faisait partir l'encre magique plus rapidement que si ma main était sèche.

Peut-être que Krochar ne m'avait pas totalement compris quand je lui avais dit de frapper la Rouquine... La pauvre, je serrai les dents lorsque je vis la main du géant de chair cogner contre le visage apeuré de Glaya. Je n'aurais pas aimé être à sa place, d'ailleurs j'aurais dû m'occuper de la renvoyer moi-même dans notre monde... Enfin, rapidement elle s'effaça, son âme libérée repartait vers son corps aux courbes tendres et pulpeuses. Puis, ce fut au tour de Krochar d'effacer les symboles qui étaient dessinés sur son front, mais pour cela il utilisa une substance peu ragoutante : sa propre salive gluante... Quel porc ! Pourquoi les membres de son espèce étaient aussi grossiers ? On ne leur avait donc jamais appris les bonnes manières !

(Entre les vers et la bave, il faut vraiment que l'on discute sérieusement de toutes ces cochonneries !)

Bon ! Maintenant, c'était à moi de les rejoindre, je ne tenais pas à me retrouver nez à nez avec une créature bizarre et assoiffée de sang... Je léchai furtivement ma main comme le garzok, après tout, les humains, eux, étaient plus gracieux et me passai les doigts sur le front pour enlever les marques mystiques... Comme l'avait dit Krochar, il ne serait pas désagréable que l'on se retrouvât hors de ce monde sans aucune blessure ; j'espérais vraiment que les dires de la Dame des songes étaient vrais quand elle disait que tout ce qui nous arriverait ne serait en réalité qu'une simple illusion...