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 Sujet du message: Clairière d'Astallin
MessagePosté: Sam 1 Nov 2008 12:03 
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La clairière d'Astallin


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Non loin de la ville, vers l'est, un petit chemin noyé sous les fougères et les herbes folles s'égare au milieu des champs et des bocages. Il longe la côte, à une dizaine de mètres de l'eau. Impraticable par temps de pluie, de terre effritée et de cailloux par temps sec mieux vaut tout de même regarder où vous mettez les pieds. La vue qu'il offre est sublime. Sous vos yeux se déploie l'océan, immense et profond, bleu et austère, qui se mélange avec le ciel en cas d'orage. Un vent froid vient du large et s'acharne sur vous. En vous penchant dangereusement sur la falaise, vous verrez le port de Lúinwë et son incroyable activité mais ici, tout est calme.

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 Sujet du message: Re: Clairière d'Astallin
MessagePosté: Ven 25 Sep 2009 20:29 
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Bien entendu, je savais déjà parfaitement ce qui se passait avant même de m’être mis à courir, mais ce n’était pas pour autant que je m’en étais abstenu : une explosion colossale alors qu’Aenigal était en plein dans ses expériences de haute volée laissait évidemment peu de place au doute, mais cette certitude avait beau m’avoir traversé l’esprit, je m’efforçais de ne pas y prêter attention à la manière d’un petit enfant qui se calfeutre sous ses couvertures pour ne pas voir les monstres que son imagination lui fait apercevoir dans chaque recoin de sa chambre. Je suis au courant, et l’étais d’ailleurs également à ce moment, que mon attitude était parfaitement irrationnelle et qu’étant donné la situation, j’aurais tout aussi bien pu regagner la maison au pas avec le même résultat, mais j’étais à ce point saisi d’angoisse que je n’écoutais que mes instincts les plus basiques qui me recommandaient de rappliquer de toute la force de mes petites jambes. Sans doute rien de plus pathétique à voir que le spectacle de ce jeune sindel courant à en perdre haleine, une main se balançant au rythme de sa foulée affolée, l’autre étreignant un coin de sa lourde robe pour la maintenir hors de portée de ses pieds, dévoilant une paire de guibolles grêles moulinant éperdument.
Même lorsque l’odeur de la fumée parfumée d’effluves écoeurantes de produits chimiques et relevée de la senteur nauséeuse de chair calcinée me parvint aux narines, je ne cessai pas de trotter bêtement en ahanant. Qu’aurais-je pu faire d’autre ? J’avais été habitué aux déboires, aux moments difficiles et aux épreuves, mais même sans aucun effort intellectuel pour faire en sorte d’élucider la situation, j’aurais eu le pressentiment que quelque chose qui traumatiserait mon existence toute entière venait de se dérouler ; et, écrasé par ce sentiment de fatalité qui aurait bien fait marteler mon cœur contre ma poitrine si j’en avais encore eu un, je me précipitais par conséquent vers les lieux du sinistre sans faire attention à quoi que ce fût d’autre, bondissant et sautillant avec une énergie stupide et désespérée. Mon visage, d’ordinaire empreint d’une sérénité variable mais toujours présente, était déformé par l’effroi : ma bouche pendante inhalait bruyamment, mes larges yeux avaient été rendus encore plus grands que d’ordinaire par la terreur, et mes cheveux ainsi que mes oreilles s’agitaient dans tous les sens, comme pris également de folie.

Ce n’est qu’en arrivant aux abords de ce qui avait été ma maison et en m’apercevant de l’étendue des dégâts que j’ai fini par ralentir l’allure, autant sous l’effet du désespoir qu’à cause de l’essoufflement qui me brûlait la cage thoracique de pair avec les échappements gazeux empreints d’un carbone délétère, pour finir par tomber à genoux devant… les ruines, il n’y a pas d’autre mot pour décrire le tas informe de bois ardé en lequel consistait ma demeure. L’ampleur de l’explosion avait véritablement dû être inouïe, car le toit, les murs ainsi même qu’une partie des fondations avaient été arrachés par le souffle, et il n’en restait plus désormais que des fragments épars dispersés ça et là. Quant au mobilier, inutile de le préciser, il était bien entendu passé à la trappe dans la foulée, étant devenu soit complètement inutilisable, soit simplement méconnaissable quand il n’avait pas tout bonnement disparu : adieu table où nous prenions nos repas, adieu bibliothèque si riche en savoirs, adieu lit confortable et douillet…
Des tas de pensées m’ont traversé l’esprit à ce moment, mais les plus importantes se focalisaient sur l’idée de savoir ce qui était advenu de mon oncle que je cherchais frénétiquement du regard sans même trop savoir pourquoi puisqu’il était évident que ses chances d’en réchapper étaient nulles ; et en rétrospective, peut-être eût-il mieux valu que je ne m’en souciât pas, car lorsque je le découvris, j’eus devant moi quelque chose qui offrait une scène particulièrement intéressante à reconstituer du point de vue balistique. En y réfléchissant à tête reposée, j’ai pu reconstituer les éléments suivants : Aenigal devait être en train de travailler sur son projet d’aniathy, et soit qu’il eût commis une fausse manœuvre, soit que quelque chose ne se fût pas passé comme il l’avait prévu, il déclencha alors la déflagration susmentionnée, la puissance de laquelle l’engloutit alors avant de le projeter contre un lourd coffre plat tout en métal adossé à la paroi du bâtiment. Bien entendu, le mur de bois avait été anéanti par le choc des flammes, mais le conteneur fort robuste avait résisté, stoppant le sindel littéralement réduit à l’état de poupée de chiffon dans son éjection, celui-ci ayant dû par conséquent mourir d’avoir la colonne vertébrale cassée plutôt que d’incinération ou de suffocation.

Bien entendu, tout cela, je le dis maintenant que j’ai pu repenser à ces évènements, mais sur le moment, tout ce que je pouvais voir, c’était l’être qui comptait le plus pour moi transformé en mannequin intégralement brûlé, le corps plié en deux à partir du coccyx selon une position improbable. Endommagé comme son corps l’était, il était méconnaissable, mais le doute n’était pas permis : en dépit de ses os qui transparaissaient là où la chair désormais grillée n’avait pas tenu, il ne pouvait s’agir que de mon tuteur, cela je pouvais m’en rendre compte même sans y réfléchir et même en opposant à cette découverte les dénis les plus acharnés, et cette découverte m’a mené à réaliser deux choses.
La première est que, contrairement à ce que j’aurais pu croire les vingt-sept années précédentes pour n’en pas avoir eu l’usage, mes glandes lacrymales fonctionnaient encore malgré l’épreuve de ma Première Ironie, et fonctionnaient d’ailleurs très bien puisque je me suis mis à verser des torrents de larmes. Vous ne trouvez pas ça grandiloquent, suranné et stéréotypé comme expression, « verser des torrents de larmes » ? Moi aussi, jusqu’à ce jour, mais à ce moment, alors que des pleurs coulaient de mes yeux pour la première fois depuis bien longtemps, on peut dire que j’ai pleuré pour toutes les fois où je m’étais retenu de pleurer auparavant, et je peux vous assurer que j’ai bel et bien versé des torrents de larmes en me rendant compte qu’Aenigal, mon précepteur, mon plus proche parent, mon plus fidèle confident, la personne pour laquelle j’avais le plus d’estime au monde, avait subi cette épreuve à laquelle j’avais échappé jadis de peu et que l’on appelle la Mort.
La seconde est que je n’étais pas d’une impassibilité aussi inébranlable qu’il me le semblait, car si, lorsque mon oncle me faisait des cours de biologie en s’aidant d’un poisson, d’une souris ou d’un lapin, je n’avais tout au plus éprouvé qu’une légère répugnance devant un étalage organique aussi cru, j’ai été beaucoup plus éprouvé à la vision de ce cadavre disloqué, déchiqueté et rongé par les flammes : avant même que j’eusse pu comprendre ce qui m’arrivait, ma gorge s’est crispée, mon abdomen a été pris de convulsion et le contenu de mon estomac a remonté le long de mon tube digestif pour venir se déverser par mon orifice buccal en un jet d’aliments à moitié digérés mêlés d’un liquide malodorant, me laissant un goût odieux dans l’ensemble de la bouche.

C’est ainsi que son décès a été célébré : par l’excrétion bruyante et désorganisée des deux éléments mentionnés plus avant alors que je me recroquevillais à terre, le visage baigné d’une eau au goût salin, la joue et les cheveux trempant dans mon vomi, et pour tout hymne funèbre, il y avait les crépitements du feu qui achevait de ronger tout ce qu’il pouvait ronger de la maison et mes gémissements entrecoupés de sanglots. En songeant à ma vie, il y a certaines choses dont j’ai honte pour une raison ou pour une autre, mais de m’être réduit à une loque pleurnicharde et impuissante n’en fait pas partie pour la simple et bonne raison que je m’estimerais plus indigne d’avoir accusé le coup d’un pareil désastre sans m’emporter que d’avoir eu une réaction aussi impulsive et pitoyable : s’il y a des choses en ce monde qui méritent que l’on fasse montre d’une telle affliction, alors Aenigal en faisait indubitablement partie.
Ensuite, même en faisant en sorte de me rappeler ce qui s’est immédiatement ensuivi, mes souvenirs restent plutôt flous et diffus, mais ce dont je me souviens très bien, c’est d’avoir pendant de longues minutes éprouvé le désespoir le plus terrible que j’aie jamais ressenti, et j’ai sincèrement regretté sur le coup de ne pas être simplement comme certaines de ces créatures magiques qui périssent à la mort de leur créateur. Car c’est véritablement ainsi que je me sentais ; comme un familier sans maître pour lui dire ce qu’il doit faire, comme un élève sans instituteur pour lui montrer comment s’y prendre pour parvenir à devenir meilleur, et tout simplement comme un enfant sans parent pour le réconforter dans les moments durs. Lorsque je me demande pourquoi je ne me suis pas suicidé sur le coup tellement il me paraissait que j’avais perdu toute raison et même tout moyen de vivre, je crois bien que c’est la pensée que si j’avais rejoint mon oncle dans l’au-delà, il m’aurait sévèrement botté le cul pour avoir baissé les bras devant l’adversité. C’est alors que je sortis d’une des poches de mon ample tunique la petite sphère parfaitement ronde d’un gris délicatement perlé dont il m’avait fait don pour m’aider dans mes exercices magiques et que j’avais toujours gardée sur moi, la serrant contre mon cœur avec des sanglots toujours aussi déchirants mais peut-être moins désespérés et moins larmoyants… il faut croire qu’au bout d’un moment, je n’eus plus de larmes à verser ou qu’une partie rationnelle de mon être avait fini par décider qu’il fallait que je passe à autre chose plutôt que de rester étendu à terre à me morfondre jusqu’au dépérissement total.

Toujours transfiguré par le chagrin, je me laissai toutefois aller à un sourire rempli de douloureuse mélancolie à l’idée de tout ce que cette simple petite babiole magique représentait pour moi : pour n’importe qui, ce n’aurait sans doute été qu’un simple outil pour lanceur de sorts de faible puissance et de faible valeur, mais pour moi, c’était tout simplement tout ce qui me restait désormais que j’avais perdu tout ce à quoi se rattachait mon existence, nouveauté terrible à laquelle j’avais encore du mal à me faire tant elle me donnait une fois de plus envie de finir mes jours à l’endroit même où je m’étais effondré. Je n’avais pas de cœur, certes, mais c’était tout comme, car chaque pulsation qui agitait la source d’énergie qui m’entretenait me paraissait m’envoyer de douloureux tiraillements dans tout le corps, comme si la mort me cernait à un tel point que le simple fait de vivre encore me dégoûtait en comparaison… et pourtant, il fallait bien que je continuasse, je devais le faire pour Aenigal !
Bizarrement, repenser à lui, me replonger dans mes souvenirs alors que je me perdais littéralement dans la contemplation de mon orbe argenté m’apportait à la fois douleur et réconfort : à revoir mentalement cet homme généreux et brave entre tous jouer avec moi, me nourrir et m’éduquer de son mieux puisque ma mère n’avait pas été là pour le faire, je me rappelais combien il comptait pour moi, ce que je lui devais et la bravoure dont j’allais devoir faire preuve si je voulais honorer sa mémoire… et en même temps, l’idée qu’il était parti pour toujours s’entérinait plus que jamais dans mon esprit, cet étrange mélange me faisant osciller entre désespoir et courage pour finir par se stabiliser en une sombre résolution fragile. Faisant de mon mieux pour ne pas céder sous mon propre poids en dépit de mes jambes tremblantes, je me redressai alors, aussi lent et malhabile qu’un nourrisson, l’absence de mon tuteur m’ayant comme ramené au stade de ma vie le plus infantile, pleurant, bavant et trébuchant.

Jusqu’alors, tout se passait bien, même si je sentais qu’il aurait suffi d’une pichenette pour me mettre à terre, mais lorsque je voulus m’efforcer de prendre une grande inspiration d’air pour me ragaillardir, les miasmes écoeurants qui empoisonnaient l’atmosphère me saturèrent les sens, me courbant en deux avec une grimace, manquant de me faire à nouveau décharger mon estomac désormais vidé. Je ne serais arrivé à rien dans l’état où j’étais, c’était on ne peut plus évident ; aussi, sans me tourner vers mon oncle dont la vision renouvelée m’aurait certainement achevé, je serrai ma seule possession entre mes mains à la manière d’une boule de cristal qui aurait pu receler tous les secrets de l’univers, et me mis à balbutier maladroitement sur un ton piteux qui ne me ressemblait pas, véritablement transfiguré par l’affreux désastre :

« Je… je vais prendre l’air Aenigal. Je reviens tout de suite… promis ! » Terminai-je comme s’il avait pu m’entendre, n’étant pas encore tout à fait capable de me faire pleinement à l’idée que j’étais à partir de maintenant seul, abandonné aux aléas d’un monde dont je n’avais qu’une connaissance livresque et qui n’accueillerait probablement pas à bras ouverts une bizarrerie comme moi.

Ainsi, je fis quelques petits pas en direction d’un bosquet proche dont je me servais quelquefois pour des exercices de méditation et qui ferait peut-être l’affaire pour me ressourcer et me laisser le temps de récupérer d’un tel choc afin de pouvoir repartir avec l’estomac mieux accroché. Je me déplaçai d’abord timidement, avec peut-être au cœur l’espoir fou que d’un moment à un autre, j’entendisse cette voix si familière me héler pour me dire « Hé bien, graine de sorcier, où est-ce que tu vas comme ça ? », puis, ravalant de pareils fantasmes avec un ricanement cruellement caustique à mon égard, je me mis à courir éperdument tout en criant, étreignant convulsivement mon orbe, et je criais encore quand je parvins à mon abri spirituel au milieu duquel je m’accroupis, cessai un instant de brailler afin de reprendre mon souffle et de me calmer… puis me remis à hurler de plus belle, proférant des malédictions inarticulées à l’égard de la création toute entière pour ce qu’elle venait de nous faire subir à moi et à mon oncle, m’épuisant sans réserve à cette activité parfaitement futile. Autour de moi, la végétation qui d’ordinaire m’était toujours apparue comme d’une bienveillance et d’une placidité presque complices me semblait par rapport à mon affliction distante et froide, impression qui ne faisait que renforcer ma hargne et l’intensité de mes aboiements désespérés.
Je continuai ainsi tant que j’en eus la force ; puis, lorsque ma voix ne fut plus qu’une espèce de vagissement rendu rauque par l’usure, qu’une irritation douloureuse se fut emparée de tout mon appareil respiratoire, et que je sentis que ma tête commençait à tourner, je m’avachis contre le sol herbeux, l’air désormais parfaitement serein, ou plutôt complètement vide, car vide je me sentis alors, depuis mes poumons épuisés jusqu’à mes yeux vitreux en passant par mes pensées tournées vers un néant sordide et cotonneux. Même mon corps me paraissait vide, comme si plus aucune étincelle de cette magie qu’Aenigal m’avait aidé à cultiver en moi n’avait subsisté, chacun de mes membres me paraissant d’une légèreté telle que j’aurais presque pu m’attendre à me mettre à flotter pour aller dériver vers un infini d’oubli. J’avais successivement perdu toute envie de vivre par la destruction de mon foyer et de ma famille, puis toute envie de mourir par l’extrusion tapageuse de mon suprême désarroi, et maintenant, une seule interrogation, certes dénuée de sens, mais qui me taraudait cruellement, me hantait, laquelle je formulai du bout des lèvres :

« Pourquoi ? »

Hé oui, pourquoi ? Pourquoi avait-il fallu, bougre d’imbécile d’inventeur stupide, que tu te lançasses dans des expériences si dangereuses qu’elles t’avaient coûté la vie ainsi que l’entièreté de ta maison ? Pourquoi avait-il fallu, ô Zewen tout puissant, que tu fisses tourner la roue du destin d’une telle manière qu’il en résultât l’application d’une empreinte mortuaire sur la personne à laquelle je tenais le plus au monde ? Pourquoi avait-il fallu que je fusse de sortie pile à ce moment précis alors que si j’étais resté aux côtés de mon oncle, j’aurais peut-être pu m’apercevoir de ce qui avait conduit à la catastrophe et le dissuader d’en arriver au point qui a déclenché l’explosion et ainsi empêcher qu’un pareil cataclysme ne survînt ? « C’est la faute à Pas-de-chance. » avait coutume de dire mon tuteur lorsqu’un déboire survenait sans raison apparente, mais en l’occurrence, j’aurais presque voulu qu’il y eût un autre responsable que le symbolique Pas-de-chance rien que pour me trouver une raison de vivre avec la vengeance. Au-dessus de ma tête, les nuages d’ordinaire d’une épaisseur réconfortante avaient l’air de planer loin de moi à une allure dédaigneusement indifférente : pareils à des badauds moroses venus observer le spectacle de ma déchéance, ils se retranchaient dans leurs quartiers céruléens puisque la représentation était terminée, le bout de pas grand-chose que j’étais ayant apparemment perdu tout intérêt aux yeux impavides de ces prélats des cieux emplis de morgue qui partaient pour me laisser plus seul que jamais.
Mais bon, le temps des absurdités et de l’irrationalité à tous crins était passé, et je voyais bien désormais que tôt ou tard, je devrais me faire une raison et accepter mon sort ou me laisser dépérir, aussi je finis par refermer ma bouche laissée jusqu’ici entrouverte, par passer une main le long de ma face hagarde ainsi que dans mes cheveux toujours entachés de vomi froid, puis par me redresser à gestes mécaniques, aussi silencieux que la nature environnante qui me parut alors aussi endeuillée que moi, calquant le murmure dont les arbres étaient envahis sur ma respiration devenue plus tranquille. Tentant à nouveau de me remplir les poumons d’un air pur pour me redonner de l’allant, et réussissant cette fois-ci à ne pas suffoquer, je clignai des yeux, ne remarquant qu’alors que le soleil avait commencé à se coucher, la lumière commençant à diminuer graduellement, ne faisant qu’ajouter à l’angoisse qui me prenait toujours aux tripes. Ainsi, je me dépêchai de regagner mon ex-logis afin d’y faire ce que je devais y faire : j’avais beau me sentir trembler à l’idée de ce que je savais y trouver, j’étais tout aussi conscient que je ne pouvais plus faire marche arrière.

Maintenant que j’avais vidé mon sac, je me sentais certes toujours aussi éprouvé et amer, mais au moins, je pouvais faire bonne figure face à l’adversité, et retourner affronter les pertes que j’avais subies en ayant un peu moins l’air d’une âme en peine famélique et folle. Rebrousser chemin ne fut pas difficile, non seulement parce que j’aurais pu faire le trajet les yeux fermés, mais en plus parce que les restes brasillants de la maison constituaient une véritable torche visible à des dizaines de mètres à la ronde et qui aurait certainement attiré bien vite toute une foule si elle n’avait pas été si reculée. Cependant, alors que je m’approchais de ma demeure mise à mal, je pus remarquer des mouvements devant elle, plus précisément devant la dépouille d’Aenigal, et aussitôt, je retins mon souffle, autant sous l’effet d’une crainte soudaine d’avoir affaire à des détrousseurs de cadavres que d’une indignation furieuse d’assister à une telle profanation.
Serrant contre moi la seule chose qui aurait pu de loin faire à peu près office d’arme, et ravalant mes peurs, je redoublai d’allure en direction des formes qui gesticulaient, rappelant à ma mémoire le seul sort que je connaissais qui était également mon seul espoir de pouvoir être un tant soit peu considéré comme une menace. Mais, au fur et à mesure que je me rapprochai au pas de course, je pus très vite me rendre compte que les silhouettes virevoltantes étaient beaucoup trop infimes pour être celles de quoi que ce fût qui aurait pu s’apparenter à un humanoïde. De fait, un croassement sonore, guttural et désagréable ne tarda pas à me renseigner sur l’identité des fâcheux à l’encontre desquels je ne me fis pas un cas de conscience de déchaîner mon ire :

« Saletés de corbeaux ! Tirez vous ! » Clamai-je en agitant les bras tout en martelant la terre de mes grands pieds chaussés pour les effrayer.

Hélas, comme on aura pu facilement s’en douter, quand on fait pas beaucoup plus d’un mètre et qu’on est épais comme un arbuste, on peut difficilement prétendre au rôle d’épouvantail, et c’est donc conformément à toute attente que les gros volatiles ne réagirent pas à mes manœuvres, se contentant de me jeter un coup d’œil empli de malveillance, de superbe et de dédain avant de retourner à leur occupation qui n’était autre que de se repaître des restes de mon oncle ! Bouillonnant de colère à l’idée d’une occupation aussi répugnante, particulièrement à l’égard de MON oncle, je me saisis de ce qui parut au toucher être une pierre mais qui aurait pu à vrai dire tout aussi bien être un bibelot ayant jadis fait partie du mobilier de la maison ; et, rageusement, je jetai de toutes mes petites forces l’objet non identifié en direction d’un de ces oiseaux de malheur avec un « Prenez ça ! » vengeur.
Ce ne fut alors pas faute d’avoir essayé ni d’y avoir mis du cœur, mais ce fut un échec lamentable, le projectile allant se perdre dans la pénombre ambiante avec un *Toc* déprimant qui ne fit que me rendre encore plus furieux, l’apitoiement et la peine cédant de plus en plus la place à la colère. Pris d’une fièvre destructrice à l’encontre de ces affreux nécrophages, je rassemblai donc quelques munitions supplémentaires que j’envoyai avec la même hargne sur mes ennemis en un spectacle probablement aussi émouvant que ridicule, les bombardant avec un acharnement revanchard. Bien entendu, ce qui devait arriver arriva, et à force de tirer à foison, je finis par toucher l’un d’entre eux qui, sous le choc, dodelina un instant de la tête sans pour autant tomber alors que ses camarades me fixaient des onyx qui leur tenaient lieu de globes oculaires, cessant toute autre activité pour me foudroyer du regard d’une manière qui mit un frein à mes ardeurs et me fit froid dans les dos.

Après quelques secondes de suspens durant lesquelles je me dis que j’aurais vraiment pu mieux choisir l’une des rares fois où j’agissais avant de réfléchir, l’agressé se mit à pousser un croassement vindicatif, signal auquel le groupe de charognards prit soudainement son envol pour se précipiter droit vers moi en formation serrée, trio d’emplumés voraces avec en tête des intentions qui n’étaient pas difficiles à deviner. Pétrifié par cette situation de combat qui s’annonçait et à laquelle je n’avais absolument aucune aptitude, je les regardai fondre sur moi comme au ralenti, finissant par décider d’avoir recours à ma magie puisqu’ils s’étaient détournés de leur cible première… sauf que contrairement à mes intentions, ils n’avaient pas l’intention de faire place nette ! Malheureusement, entre la fatigue aussi bien mentale que physique des évènements récents, et la panique suscitée par l’idée d’avoir à me battre, je ne parvins pas à me concentrer comme je l’aurais dû, et ne réussis à provoquer dans le fluide qui coulait en moi que des fluctuations désordonnées et parfaitement inefficaces. Mais ce fut alors que les animaux de Phaïtos progressaient sur moi comme au ralenti par l’effet de l’adrénaline que j’eus une illumination sous la forme d’un flot soudain de souvenirs dont la réminiscence opportune parut former une parenthèse dans le cours des secondes, parenthèse qui s’étira longuement le temps pour moi de m’y replonger pleinement.

Parfaitement sphérique, le globe fait d’énergie incandescente pure se forma lentement, méthodiquement, dans la paume du sindel aguerri au maniement des fluides, ne faisant tout d’abord que la taille d’une bille pour peu à peu acquérir celle d’un pamplemousse, volume auquel il finit par se stabiliser, même si j’étais certain, étant donné le visage parfaitement serein d’Aenigal ainsi que la puissance dont je l’avais déjà vu faire montre, qu’il aurait pu continuer jusqu’à ce qu’il acquît celui d’un melon, et même de son torse s’il l’avait voulu. Impassible devant sa propre expertise, le magicien laissa le sortilège en suspens avec l’expression à la fois méditative et un brin complice d’un fauconnier, puis, sans même ciller devant l’aura dégagée par le sort offensif, il retira d’un coup le chaperon qui maintenait son attaque magique en berne. Celle-ci jaillit alors avec une vélocité inimitable dans un simple sifflement grésillant d’allure presque innocente, puis ce léger chuintement fut remplacé par un violent fracas éruptif quand la boule de feu s’écrasa contre la grosse pierre qui faisait office de cible, la transformant en parcelles de roche de tailles diverses.
Après quelques secondes de latence silencieuses, je pus alors sentir le regard de mon oncle se porter sur moi… « sentir » seulement, car contempler une manifestation pyromantique d’une telle ampleur m’avait étreint le cœur d’une peur panique irrationnelle et pourtant irrésistible à la pensée qu’il s’agissait là du même pouvoir destructeur qui m’avait défiguré il y avait de cela deux décennies ; et au moment où le projectile incendiaire était parti, je n’avais pas pu m’empêcher de fermer les yeux et de me ramasser sur moi en un véritable réflexe d’autruche. Je me sentais parfaitement stupide, et je savais que je l’étais de me laisser aller à une phobie aussi déraisonnable puisqu’il s’agissait d’un cours dont je devais tirer une familiarité et non une crainte envers l’élément qui imprégnait mon corps et me permettait de le maintenir en activité ; mais le fait était qu’il m’avait été sur le coup aussi insupportable de contempler le déchaînement proprement dit de l’invocation que d’assister à ma propre dissection.

D’un côté, je m’en voulais terriblement de ne pas avoir porté à la démonstration de mon professeur particulier l’attention qu’elle méritait, mais de l’autre, je sentais en moi des frémissements d’horreur indicible à la simple pensée que j’aurais pu à nouveau faire jaillir ces mêmes flammes qui avaient amené la Première Ironie et qui m’avaient donné pendant longtemps des cauchemars dont je me réveillais en hurlant et en gesticulant d’une telle manière qu’Aenigal, en pleine alerte, accourait aussitôt à toutes jambes. J’avais peur que, si je faisais à nouveau en sorte d’aller franchement dans le sens des fluides qui coulaient en moi, le même résultat allait survenir, et, tétanisé par l’éventualité d’être encore une fois dévoré par mon propre sort si celui-ci venait à se retourner contre moi, j’osais à peine faire n’eusse été que mettre en œuvre les prémices de son lancement.
Je me reprochais amèrement ma couardise sans pour autant parvenir à me décider à l’affronter, et en restais donc à un statu quo qui frisait le ridicule et l’absurde, semblable à celui d’un explorateur ramassé sur lui-même en plein environnement polaire : il sait bien que s’il veut avoir le moindre espoir de gagner un logis plus clément et ainsi avoir une chance de survie, il doit se mettre en route, mais le froid environnant le martyrise à un tel point qu’il préfère conserver son immobilité afin de ne pas redoubler ses souffrances en se mettant en mouvement. Lorsque l’on entend parler d’une situation aussi grotesque, c’est limite si l’on en rit pas tellement cela paraît puéril et lâche, et pourtant, si par malheur on en vient à y être confronté, voilà que tout la belle assurance dont on avait pu faire montre s’envole comme par enchantement pour être remplacée par une indécision et une appréhension glaçantes.

Bien évidemment, mon instructeur ne dut avoir aucune peine à remarquer mon trouble aisément visible à la manière dont je m’étais recroquevillé comme si je m’étais attendu à voir le ciel me tomber sur la tête, car il ne tarda guère à poser une main familière, réconfortante et compatissante sur mon épaule, puis, voyant que je n’avais toujours pas l’air de pouvoir me remettre de mes émotions, il me prit entre ses bras et me souleva de terre pour me recueillir contre lui. S’il y avait eu quiconque d’autre, je me serais résolument refusé à me montrer dans une position de faiblesse aussi infantile, et cela, Aenigal le savait, aussi respecta-t-il mon silence pudique et réservé tandis que je me collais contre son torse, me laissant envelopper par cette présence forte et rassurante qui calmait mes sens.
Là, l’oreille collée contre la poitrine de ce véritable archimage, je me sentais comme au centre d’un nexus d’ordre et de tranquillité parfaits : non seulement, les paupières toujours closes, je pouvais entendre parfaitement les battements sourds et réguliers de son cœur qui charriait paisiblement le sang, mais je captais aussi avec une netteté étourdissante les fluides qui fluctuaient à l’intérieur de son corps. De l’extérieur, Aenigal pouvait paraître maigre, dégingandé et chétif, mais il ne s’agissait là que d’une enveloppe certainement indigne à la manne de puissance qu’il renfermait, et contrairement à l’eau bouillante ou au torrent tumultueux, cette puissance n’avait rien de désordonné ou d’incontrôlé : tout en lui n’était que parfaite maîtrise, et cette sensation d’organisation parfaite et redoutable était pour moi une véritable source d’inspiration à laquelle je venais m’abreuver, la gorge sèche et assoiffée de connaissances, pour ressortir d’une pareille communion auréolé d’un peu de cette assurance calme et modeste.

D’ailleurs, le pire était que je savais très bien comment je devais m’y prendre ! Toute cette énergie que je sentais en lui, je la comprenais et savais y trouver une cohérence aussi aisément que je l’aurais fait d’un alphabet ; j’étais capable de voir clair dans chacune de ces parcelles de magie que je percevais et de dire « Ceci est cela, et peut servir à telle chose. ». De la même manière, en ce qui concernait le sort dont il venait de me faire la démonstration, j’aurais pu en décrire sans hésitation les tenants et les aboutissants, les élucider et les expliquer avec une clarté que n’aurait certainement pas reniée un maître en la matière, j’en étais absolument certain sans même qu’il fût question de vanité mal placée ou de dépit !
Mais voilà, lorsqu’il s’agissait de mettre ces connaissances en application, de passer du théorique au pratique, toutes mes certitudes avaient l’air de s’effilocher au fur et à mesure que je tissais la toile du sortilège que j’étais censé lancer et dont j’essayais alors éperdument de rattraper les pans au vol, ne faisant ainsi qu’hâter leur évaporation par une précipitation aussi malhabile. Je sentais, j’appréhendais, je voyais, et devoir ainsi m’arrêter si près du but me mettait dans une rage qui me semblait par moments contenir la clé de mon succès sans que j’osasse pour autant la déchaîner de peur de parvenir à des résultats qui m’auraient dépassé : le savoir qui m’échappait était contenu dans une cloche en verre indélogeable, et je n’osais pas la briser pour y accéder de crainte de m’entailler les doigts.
Comme d’habitude, Aenigal sut capter les soucis qui m’obsédaient, et, se doutant qu’il n’aurait servi à rien de pousser le boucher plus loin, me proposa de passer à autre chose afin d’essayer d’aborder le problème de mon inaptitude d’allure phobique sous un angle plus accommodant, prenant la parole de sa voix bien tempérée d’où me paraissait transpirer la sagesse même :

« Si on essayait un sort défensif plutôt qu’offensif ? »

Pour toute réponse, et après quelques secondes de réflexion qui me laissèrent aussi le temps s’apprécier les vibrations sereines qu’avaient imprimé les mots du sindel à sa cage thoracique, je le laissai me déposer à terre et acquiesçai, l’air ferme et résolu, manifestement bien plus naturel qu’auparavant puisqu’il fit écho à mon geste en le ponctuant d’un de ses étranges sourires qui donnaient l’impression que ses lèvres minces creusaient la chair de son faciès pour laisser paraître ses dents étonnamment blanches. Cette expression faciale ne s’éternisa pas sur le visage de cet homme en tout et pour tout sobre, et il eut vite fait de la troquer pour l’air matois qui lui convenait si bien alors qu’il se positionnait devant moi pour commencer sa seconde démonstration, l’air à la fois alerte et détendu, les pieds fermement ancrés dans le sol, les bras de part et d’autre du corps, paumes ouvertes dans ma direction.
Au début, lorsque ses fluides entrèrent en activité et que je sentis l’énergie commencer à irradier de lui, je fus à nouveau pris d’une angoissante appréhension, mais très rapidement, cette crainte s’évanouit, fondit comme neige au soleil ; et cet aphorisme était fort adéquat car je pus sentir avant que de voir mon oncle se transformer en véritable corps céleste ardent : plus que jamais serviteurs, ou plutôt compagnons de longue date diligents et prévenants, ses pouvoirs se mirent à sourdre doucement de sa peau pour se mettre à se rassembler autour de lui en une chape de puissance presque tangible. Le niveau de ce sort n’avait rien à envier à celui de la Boule de feu, et pourtant, contrairement à la fois précédente, je ne sentis pas la moindre peur naître en moi : assurément, la magie déployée aurait suffi à me réduire en cendres sur place, mais malgré cela, je me sentais parfaitement relaxé. Une aura de protection, de bienveillance, se dégageait de ce sortilège pourtant purement pyromantique qui, je le ressentais par le moindre des pores de ma peau, n’aurait pas fait de mal à une mouche, et aurait pourtant eu la résilience suffisante arrêter la charge d’un taureau. Rien qu’à en sentir l’influence de là où je me trouvais, je me sentais profondément rassuré et en même temps un brin intimidé : en ce moment, Aenigal était d’une telle majesté empreinte de sérénité qu’on l’aurait véritablement dit comme couronné de flammes éthérées, sous l’égide de Meno lui-même.

« Surveille bien l’évolution ! » Me prévint-il alors avec fermeté, me sortant de ma torpeur non dénuée de quelque chose de béat.

Obéissant à son injonction, je concentrai mes capacités perceptives et cognitives sur les fluctuations qu’il imprimait à ses fluides, en observant la progression et l’activité comme un architecte aurait surveillé celles d’une équipe d’ouvriers au travail, et ne tardai guère à décrypter le fonctionnement du sort que je trouvai en réalité d’une remarquable simplicité et aisé à reproduire tout bien considéré… mais il me vint alors à l’esprit que c’était aussi le cas pour la Boule de feu, comparaison qui me fit perdre de ma superbe. Mon oncle dut se rendre de tout cela, car, avec la même maestria dont il avait fait montre pour former son Bouclier de chaleur, il en dissipa la trame, mettant ainsi un terme à l’étalage de ses talents pour me laisser prouver les miens, passation de responsabilité qu’il me transmit d’un simple regard devant lequel je me sentis aussitôt mal à l’aise. Non pas que l’expression de ce sindel de la meilleure espèce qui fût eût quoi que ce fût de menaçant ou même d’impérieux, mais que j’eusse à faire appel à mes pouvoirs, surtout pour quelque chose que je n’avais jamais eu l’occasion d’essayer auparavant, me rendait nerveux.
Enfin bon, à la guerre comme à la guerre, il fallait bien essayer, et ce n’était pas en me répandant en atermoiement, ce qu’Aenigal proscrivait de toute façon fermement, que j’allais progresser, aussi me mis-je dans la même posture que lui et fermai les yeux pour me détendre et faire appel à mes fluides que je n’eus comme d’habitude aucun mal à sentir du fait de leur omniprésence toute particulière en moi. Cette partie de l’incantation était la plus facile, et constituait l’obstacle le plus basique à franchir pour les magiciens, aussi, moi qui, en dépit des peurs qui étaient inhérentes à un tel exercice, m’étais autant consacré à maîtriser mes capacités, parvins à le surmonter sans problème, faisant remonter l’énergie depuis les tréfonds de mon corps jusqu’à mes artères.

Toutefois, c’était à ce stade que les choses se compliquaient toujours, et comme trop de fois, bien que je fisse de mon mieux pour chasser l’inquiétude qui menaçait de troubler ma concentration, je ne pus faire autrement que de respirer un peu plus fort qu’avant afin de compenser le début de malaise induit par mes doutes et mes peurs qui revenaient me tarauder insidieusement et m’empêchaient de me plonger dans cette plénitude méditative qui m’était nécessaire à la formation de la trame d’un sortilège. Pour autant, la bonne marche du lancement se poursuivit sans désordre, et, comme j’avais vu mon exemple le faire l’instant d’avant, je laissai une sorte de pellicule de ma force pyromantique refluer contre mon épiderme tout le long de mon enveloppe charnelle, puis je me mis à l’alimenter en puissance, puisant hardiment dans mes précieuses réserves pour lui donner la consistance nécessaire à la finalisation de l’enchantement défensif en lui-même.
Et c’est alors que les choses se gâtèrent véritablement : à faire enfler la couche de fluide de feu dont je m’étais recouvert, je ressemblais à la fois à un souffleur de verre qui devait prendre garde à faire prendre une forme lisse et harmonieuse à son travail afin de qu’il n’en résultât pas quelque chose de monstrueusement difforme ; et à un faiseur de bulles qui devait surveiller l’ampleur de ses expirations de manière à ce que le corps aérien et savonneux qu’il formait n’éclatât pas. Or, je me mis brutalement à manquer à ces deux obligations, car maintenir le Bouclier sous une forme à la fois stable, solide et durable, nécessitait plus de rigueur que je ne l’aurais cru au premier abord, et lorsque je voulus corriger le tir, tout se mit à aller de mal en pis. La couche de chaleur solide n’éclata pas comme une bulle, non, ça aurait été trop simple : rendue tumultueuse et pour ainsi dire vacillante par l’afflux d’énergie incorrectement administré, elle se mit à se gondoler de manière incontrôlable, et les modifications d’afflux que je tentai de lui apporter en catastrophe n’arrangèrent rien, ne faisant au contraire qu’augmenter la gravité du problème tout en m’épuisant de plus en plus.

Puis, tandis que je me mettais à pousser des cris de panique devant un tel désastre à la pensée que ma Première Ironie aurait pu se renouveler, il y eut comme un soudain courant d’air qui dissipa tout mon capharnaüm magique en un rien de temps, et, étourdi par un tel remue-ménage, je tombai à la renverse pour être recueilli par mon éternel protecteur que je pus découvrir peiné en levant la tête, ce qui m’affligea sincèrement. Il n’y avait nulle colère, nulle réprobation, et même nulle déception dans son regard ou dans son attitude, mais je savais que j’étais loin, ô combien loin de ce qu’il aurait pu espérer de moi, et je crois qu’on peut bien dire que je fus alors déçu pour deux tellement je me reprochai une fois encore mon inaptitude.

« Allez, rentrons. Ne t’inquiète pas, tu y arriveras plus tard, c’est tout. » Me dit-il alors sans rancune avec une tape réconfortante dans le dos.

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Dernière édition par Tuia le Ven 25 Sep 2009 20:34, édité 1 fois.

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 Sujet du message: Re: Clairière d'Astallin
MessagePosté: Ven 25 Sep 2009 20:32 
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Et comme si, à la fin de ce soudain et vaste sursaut de mémoire, cette légère bourrade s’était faufilée à travers les limbes du temps par le biais de mes pensées pour se faire ressentir physiquement, je me sentis soudainement poussé en avant par une force nouvelle, puis tout se passa si vite et si souplement qu’encore aujourd’hui je m’applaudis d’un progrès aussi immédiat et fulgurant. Fulgurant fut le mot pour rendre compte de ce qui se passa, car tout à coup, le petit quelque chose qui m’avait manqué pour parfaire ma maîtrise de la Boule de feu et du Bouclier de chaleur m’apparut faire sens avec une netteté invraisemblable, déchaînant en moi des élans de félicité proprement extatiques qui me firent ouvrir grand la bouche face au danger fait de serres acérées et de becs crochus dont je me moquais désormais : la présence, l’écoulement et le fonctionnement des fluides dont le murmure m’emplit à ce moment avec une intensité prenante se firent d’une clarté éblouissante. Je compris enfin ce qui avait cloché pendant toutes ces années, et maintenant que j’étais parvenu à la solution elle m’apparaissait si simple que j’aurais pu en rire comme un dément : durant si longtemps, je les avais au mieux considérés comme mes frères ennemis, ne faisant trop souvent que tolérer leur présence pour le semblant de vie qu’ils me paraissaient m’apporter ; mais à ce moment, je vis qu’ils faisaient partie intégrante de moi au même titre que mes yeux, ma langue ou mes mains, et j’accueillis cette union de tout mon saoul, faisant corps avec les énergies qui grondaient en moi et ne demandaient qu’à se manifester.

Puisque je savais comment non pas dominer mais m’harmoniser avec mes fluides, j’aurais très aisément pu leur faire prendre la forme du Bouclier de chaleur pour me préserver des assauts des corbeaux, mais le sacrilège odieux dont ils s’étaient rendus coupables suscitait toujours en moi une colère, un mépris et une indignation si forts que le choix fut vite fait et que, brandissant mon « arme » au-dessus de ma tête dans un cri qu’on aurait pu appeler un cri de bataille s’il n’avait pas été au fond celui d’un enfant, je canalisai avec ardeur et en un temps record les forces nécessaires à la formation d’une Boule de feu, ne désirant rien plus furieusement que de voir ces profanateurs réduits en cendres.
Là, je sais que, communément, les mages rassemblent leurs pouvoirs et les déchaînent par le biais de leurs mains, mais en l’occurrence, sans que je sus ni sache d’ailleurs comment une telle chose survint (je penche pour le caractère désorganisé de ce premier succès), je me mis à cracher des flammes par la bouche en un orbe de la même taille, de la même rondeur parfaite que celui que je tenais entre mes mains, lequel fila vers une des horribles bestioles glauques. Le résultat fut magistral : dans un déchaînement court mais jouissif de flammèches argentées, il se retrouva cruellement ardé, son plumage graisseux constituant une invitation plus que tentante à la combustion qui, de fait, lui arriva dans un épouvantable cri guttural désarticulé mêlant douleur et surprise.
Sa charge coupée en plein vol par mon sort, le piaf maudit continua de battre ridiculement et vainement des ailes pour finir par atterrir pitoyablement à mes pieds, toujours en train d’être grignoté par l’attaque ; et quant à ses deux comparses, ils ne firent ni une ni deux et abandonnèrent immédiatement le lieu des hostilités, me laissant régler seul mes comptes avec celui qui paierait pour tous. Aussi triomphal et impitoyable qu’un seigneur en expédition punitive, je vins en deux enjambées furieuses jusqu’au volatile qui se débattait contre la mort en des soubresauts de vive souffrance, et me mis à le piétiner rageusement, ne prêtant qu’à peine attention aux craquements des os et à l’odeur répugnante de plumes et de viande calcinées, éléments dont l’un d’entre eux m’avait auparavant fait tourner de l’œil et qui ne m’apparaissait désormais que comme des conséquences logiques de mon action légitime dont je n’avais pas à m’émouvoir.

« Crève, saleté ! » Me répandis-je en guise d’imprécation sur mon adversaire avant de m’écarter pour vérifier si c’était bien le cas, la trombine du corbeau réduit à l’état de petits bouts d’os, de plumes et de chair plus ou moins brûlés laissant en réalité peu de doute à ce sujet : la « saleté » était bel et bien « crevée ».

Qu’on ne se méprenne pas, j’ai toujours été autant que possible un gentil garçon, mais avec ce qui venait de s’être passé, j’avais perdu toute commune mesure, et je crois bien d’ailleurs que si au lieu de gros oiseaux, je m’étais retrouvé face à des êtres humains, j’aurais fait preuve de la même attitude : l’expression « en vouloir à Yuimen entier » était tout ce qu’il y a de plus adapté puisque, en l’absence d’un responsable autre que celui qui avait été coupable en même temps que victime et qui n’était autre que mon oncle, j’aurais été prêt à me déchaîner contre n’importe qui sous n’importe quel prétexte tellement j’étais fou de douleur, car avec cette folie était également venue la folie meurtrière. Moi, Tuia, qui n’étais ni cruel, ni sadique ni même méchant pour deux sous, j’éprouvais un plaisir, ou plutôt un soulagement vicieux à enfin pouvoir imputer la faute de mon malheur à quelqu’un et à pouvoir le châtier pour cela, même si le quelqu’un en question n’était qu’un charognard en recherche de quoi d’alimenter et qui ne m’avait évidemment attaqué que pour se défendre, comme tout animal menacé l’aurait fait.
Tout cela, je ne m’en rendis bien sûr compte qu’après coup, alors que le calice avait déjà été bu jusqu’à la lie, et même alors que ce genre de pensées me venaient, je n’eus qu’une conscience nébuleuse de la teigne sordide que j’avais été en massacrant de si bon cœur cette bestiole, la seule idée claire qui m’habitait l’esprit étant que j’avais certes protégé Aenigal, mais qu’il m’aurait certainement fait le reproche de mon comportement s’il m’avait vu… mais il n’était plus là pour me voir. Dans un coin de mon cerveau, je me fis aussi la réflexion que je venais de mener là mon premier combat : certes, je m’étais plus d’une fois chicané avec mon aîné, mais jamais dans l’intention de lui faire le moindre mal, et c’était bien jusqu’ici l’unique fois de ma vie que j’avais agi avec l’intention de causer de la douleur et même de tuer. Premier combat, et quelque chose, comme une sorte de pressentiment, me disait que ce ne serait pas le dernier… et je ne me trompais pas.

Mais pour l’heure, je m’éveillais de la sorte de transe guerrière dans laquelle mon ivresse de vengeance m’avait plongé, et comme à la fin de toute ivresse, j’avais une méchante gueule de bois puisque, à faire preuve de si peu de réserve dans l’utilisation de mes réserves de puissance magique, je m’étais démesurément vidé de mes fluides et en ressentais désormais la torpeur qui s’ensuivait : mon corps qui avait fait ce qu’il avait pu pour suivre les desideratas de mon âme avait jusqu’ici soutenu le choc, mais commençait maintenant à montrer sérieusement ses limites. Et pourtant, j’allais encore lui demander de se mettre en action, car je n’aurais jamais voulu connaître le repos tant qu’Aenigal n’aurait pas reçu une sépulture un tant soit peu décente, n’aurait-ce été que parce qu’il aurait sans l’ombre d’un doute fait la même chose pour moi… sans compter que si j’avais réussi à repousser les premiers charognards, d’autres ne manqueraient pas de faire leur apparition sous peu.
Ainsi, me détournant de la dépouille de ma proie, bien maigre et morbide trophée, je me tournai vers celle de mon oncle après une inspiration vibrante pour me donner du courage et avoir cette fois-ci le cran de mener à bout l’entreprise que je me devais d’accomplir, quels que fussent les efforts que cela requerrait. Etrangement, sans doute par un effet conjugué de ma lassitude et de ma détermination, le cadavre malmené par les flammes, le choc de l’éjection et les coups de bec des corbeaux ne m’inspirait plus la même répugnance inexorable qu’avant, et bien que l’approcher me coûtât évidemment, je pus parvenir aux côtés de feu mon tuteur sans m’écrouler, m’enfuir ou me retourner l’estomac. Ce fut véritablement quelque chose de choquant que de voir ce que la mort avait fait de cet homme digne et sobre à la fois si paisible et exceptionnel : là où sa peau n’avait pas été grignotée par les persécuteurs à plumes, elle était recouverte d’espèces de croûtes noires affreuses, et là où elle l’avait été, du sang coulait de la chair à vif en des ridules infiniment tristes à contempler.

Si j’avais eu encore quelque chose de consistant dans l’estomac à vomir ou des larmes dans les yeux à pleurer, j’aurais certainement fait à nouveau ces deux choses, mais après la fougue déchirante de la déchéance puis de la vengeance, j’avais perdu toute velléité de m’insurger contre quoi que ce fût, aussi fut-ce avec des mouvements d’automate que je m’en allai chercher une pelle dans le petit abri qui se trouvait derrière la maison, près du potager désormais ravagé, puis que je me mis à creuser l’un des dénivelés qui avaient résulté de l’explosion afin de pouvoir enterrer le défunt, conformément à ses désirs, et conformément aux coutumes des sindeldi. J’avais une force physique supérieure à celle qu’aurait eu un enfant de mon âge, et la terre avait été rendue plus meuble par la chaleur ambiante, mais pour autant, la tâche d’offrir au moins un semblant de tombe à mon oncle n’en fut pas moins ardue, chaque geste sollicitant mes muscles d’une manière qui devint bien vite douloureuse tant l’instrument massif pour ma taille pesait lourd entre mes mains.
Cependant, le rythme de mon activité s’imprima bientôt dans mes membres d’une manière obsédante qui me permettait de moins penser à ma douleur, comme obsédante était la litanie de « Pardon. » que je soufflais à chacune de mes expirations : pardon Aenigal, pardon de ne pas pouvoir t’offrir une meilleure sépulture, pardon de ne pas t’avoir mieux protégé des corbeaux, pardon de t’avoir laissé seul, pardon d’avoir hurlé comme un sauvage, pardon de ne pas avoir été là pour t’empêcher de commettre cette catastrophe, pardon de ne pas t’avoir fait le plaisir et la fierté de me voir davantage progresser en magie, pardon pour toutes les fois où je ne me suis pas aussi bien conduit que je l’aurais dû, pardon de t’avoir causé autant de peine et de soucis avec ma Première Ironie, pardon de la part de Caesi’nhyl de t’avoir imposé ma présence… pardon pour tout, pardon pour rien, pardon pour n’importe quoi… pardon… pardon.

Je ne m’interrompis que lorsque je jugeai que la profondeur était suffisante, puis, mécaniquement, je m’en allai chercher le corps que je pris par les épaules, trop las pour éprouver une réelle répugnance à une telle action, et le tirai jusqu’à la fosse que je lui avais aménagée, le laissant s’y affaisser sans presque un bruit dans les ténèbres nocturnes repoussées par les restes du brasier tout proche, environné d’un silence tout juste rompu par des bruissements d’arbres ou d’animaux. Comme je m’y étais attendu, il ne tomba pas tout droit, se recroquevillant maladroitement dans cette crevasse de longueur un peu trop réduite à la manière d’une marionnette, mais je n’avais plus l’énergie et encore moins le courage nécessaires à descendre pour aller le remettre comme il l’aurait fallu ; aussi, l’œil morne et vide, je remblayai le trou avec les mêmes gestes automatiques, m’adonnant à nouveau à psalmodier mes « Pardon. » idiots.
Au bout d’un moment, je ne sentis même plus les muscles de mes bras, mais je n’y prêtai même pas attention, l’esprit si figé sur mon idée fixe d’enterrement que je ne parvenais même plus à penser à quoi que ce fût d’autre que ces allées et venues de la tête de métal porteuse de terre. Lorsque j’eus fini, j’étais dans une hébétude qui allait au-delà de l’épuisement et qui frisait la catatonie : seules mes fonctions les plus vitales, les plus basiques, aussi bien physiquement qu’intellectuellement, étaient restées actives, et ce fut par un bizarre sursaut de mémoire que je me mis à genoux pour joindre les mains en prière selon ce rituel qui consiste à attirer la bienveillance de Sithi sur l’âme du défunt afin qu’elle puisse connaître le repos éternel auquel elle a droit. Contrairement à ce qui était requis pour une telle cérémonie selon les usages de ceux de mon peuple, nous n’étions pas à la pleine lune, mais je n’étais absolument pas en état de me formaliser de ce genre de détails, ni même d’ailleurs de m’en rendre compte.
D’ailleurs, joignis-je vraiment les mains ? Difficile à dire, car ma perception des choses s’était alors réduite à un imbroglio délirant de formes et de sons flous, et ma tête lourde comme le Naora lui-même n’aidait pas à la concentration. Tout ce que je puis dire, c’est que tout à coup, le ciel et la terre se mirent à basculer l’un sur l’autre alors que je m’effondrais sur la terre fraîchement retournée, m’étendant tout à côté d’Aenigal chose dont nous avions perdu l’habitude une fois que j'avais atteint un certain âge, mais que je n'étais plus vraiment en état de dédaigner étant donné les circonstances. Je crois que je sombrai dans le sommeil avant même d’être complètement tombé.

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 Sujet du message: Re: Clairière d'Astallin
MessagePosté: Dim 4 Oct 2009 07:10 
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Étrangement, alors même que mon sommeil se fût prolongé sur une bonne demi-douzaine d’heures et fût très profond, je ne fis pas le moindre rêve, cette capacité n’étant pourtant pas moins présente chez moi que chez n’importe quel être vivant en dépit des transformations que j’avais subies. En rétrospective, je crois tout simplement que mes facultés cérébrales avaient été à ce point débilitées par mon épuisement aussi bien physique que mental que mon intellect n’était pour ainsi dire même plus capable de m’envoyer des images cohérentes, voire d’images tout court, car lorsque je me réveillai, j’aurais pu avoir l’impression de n’avoir fermé les yeux qu’une seconde durant si ce n’avait été le soleil qui s’élevait alors bien haut dans le ciel, accomplissant son office habituel avec une parfaite indifférence vis-à-vis d’êtres comme moi, si insignifiants en comparaison.
Dans un premier temps, je me demandai pourquoi je me sentais aussi engourdi, pourquoi j’avais l’impression d’avoir dormi aussi longtemps, pourquoi j’étais aussi crado, et surtout ce que je faisais à avoir choisi un monceau de terre meuble pour matelas alors qu’une literie familière, douillette et confortable m’attendait dans la maison. Puis, en relevant la tête, je m’aperçus que de maison, il n’y en avait plus du tout, ou plutôt qu’elle consistait désormais en des ruines calcinées fort peu hospitalières, et le temps que je me remisse du choc qu’une vision pareille me causa, les évènements de la veille eurent le temps de revenir en une succession de souvenirs affligeants et pénibles, réminiscences face auxquelles je restai un moment assis, les bras ballant, comme déconnecté de la réalité, incrédule devant ce que mes propres yeux et ma propre mémoire me révélaient, croyant peut-être follement que tout cela n’avait été qu’un mauvais rêve, ou plutôt l’expérience tragique de quelqu’un d’autre que je croyais vivre par quelque bizarre défaillance de mes capacités cognitives.

Pourtant, la réalité s’imposait bel et bien devant moi, parée de son manteau de froide indifférence, et je dus bien en accuser le coup, ce que je fis en prenant au préalable une grande inspiration vibrante qui me gonfla la poitrine d’air, comme si, faute de pouvoir avoir le cœur gros, j’avais eu les poumons gros. Allais-je, comme hier, me remettre à pleurer comme une fontaine devant quelque chose d’aussi affreux ? Non, car en réalité, ce qui résulta de cela fit un soupir… un simple soupir, oui, mais je crois bien que ce fut le soupir le plus profond, le plus gémissant et le plus dolent que je poussai jamais, et il valait bien une oraison funèbre puisque je n’aurais de toute façon pas été capable d’en prononcer une un tant soit peu digne de ce nom : le temps des pleurs était passé, il fallait désormais aller de l’avant, et même si ce n’était évidemment en aucun cas aussi facile, je me déchargeais de ma vie passé comme d’une mue pour revêtir une autre peau, celle d’un enfant bien étrange laissé à lui-même.
Bien sûr, tout comme un animal qui fait sa mue, juste après m’être adonné à celle-ci, je fus faible, vulnérable et peu assuré, mais je m’efforçais de me convaincre que ce n’était que pour mieux progresser… progresser, oui, mais vers quoi au juste ? Ce fut une question que je me posai alors que je me redressais, et, faute de pouvoir y répondre sur le coup, je décidai en fin de compte de me soucier de mon état immédiat plutôt que de celui que j’aurais dans le futur, me disant que je n’arriverais de toute façon à rien avec un estomac aussi peu rempli et un air aussi déplorable. En effet, durant tout le hourvari auquel je m’étais adonné, je m’étais successivement couvert de vomi, de suie et de terre, et même si je n’étais en rien coquet, j’avais une conscience sociale de même qu’une certaine estime de moi qui me poussèrent à m’accorder un brin de toilette avant de poursuivre mes tribulations, d’autant plus qu’un bon coup de frais ne pouvait pas me faire de mal après toute la chaleur des flammes puis de l’effort.

Cependant, même si quelqu’un à l’organisme aussi controversé que moi n’avait pas de raison d’avoir faim dans l’immédiat, je savais également qu’il était préférable que je me remplisse l’estomac sous peine de voir mes facultés fâcheusement réduites, et afin d’éviter de pareilles complications, je me dirigeai vers le potager attenant à la maison dont certaines parcelles n’avaient pas été trop amochées par l’explosion : là, Aenigal et moi faisi…avions fait pousser des pommes de terre, des pois, des carottes ainsi que des laitues, et ce fut d’un exemplaire à peu près intact de ce dernier légume que je m’emparai avant de m’éloigner en direction d’une rivière proche. L’avantage de ces activités terre-à-terre était qu’elles m’évitaient de songer à mon infortune présente, mais de toute façon, j’avais désormais plus ou moins encaissé le choc d’un évènement aussi désastreux. Bien sûr, à la pensée de mon défunt oncle et de ma si agréable vie faisant maintenant partie du passé, je sentais un violent poinçon de douleur me percer la poitrine, et je me doutais que même si, plus le temps passerait, moins celle-ci serait aiguë, elle subsisterait toujours comme un manque cruel. Cependant, je faisais de mon mieux pour réagir à ce qui venait de se passer aussi raisonnablement et posément que possible, afin de pouvoir au moins me dire qu’il aurait été content de moi, idée qui ne m’apportait à vrai dire absolument aucune consolation mais m’aidait à conserver au moins comme une dignité.

Ainsi, je parvins à une rivière avoisinante qui coulait tranquillement comme une dame d’oubli fraîche et languide, et je me dénudai, me défaisant de ma grande robe ainsi que de mes chaussures qui étaient les seuls vêtements que je possédais hormis pour des sous-vêtements faits de bandes de lin (j’étais peut-être à moitié aniathy, mais j’avais tout de même le sens de la pudeur) dont je me défis également. Me retrouver confronté au monde dans le plus simple appareil m’avait toujours fait une drôle d’impression, car si cet état charriait avec lui toute son impression de vulnérabilité et de honte, la portée en était amenuisée par la pensée que tout cela n’était en fin de compte que chair et sang, pas plus honteux à exhiber qu’un morceau de viande au marché… surtout que dans mon cas, la peau synthétique dont j’étais recouvert minimisait l’impact de la température ambiante, m’apportant un sentiment de détachement désormais plus profond que jamais puisque je n’avais justement à proprement parler plus aucune attache.
Me défaisant de ces réflexions bien peu productives, je plongeai tête la première dans le fluide froid dont l’emprise me tétanisa un instant, chassant toute préoccupation de mon esprit pour me forcer à concentrer mes perceptions sur ce liquide glacé maintenant omniprésent autour de moi, en un effet à la fois violent et salvateur. Ma prédilection se portait peut-être du côté du feu en ce qui concernait les éléments, mais je n’en négligeais pas les autres pour autant, surtout que d’une certaine manière, l’eau me permettait de ressentir d’autant plus intensément le foyer de chaleur qui brûlait en moi et qui s’était « rechargé » pendant mon repos. Remontant ensuite à la surface à la manière d’un chiot, j’allai m’asseoir au bord de la rive, car m’aventurer à me laisser reposer au sein du courant m’aurait porté loin de mes maigres possessions, et même si j’étais quelqu’un au tempérament plutôt philosophie, je ne me sentais pas vraiment prêt à commencer aussi hardiment mes pérégrinations, nu comme un ver.

Les minutes suivantes, je les passai à me frotter énergiquement la peau et à faire subir un lavage sommaire à mon unique habit à la manière d’une lavandière d’opérette, tapant, remuant et secouant le tissu épais qui en avait de toute façon vu d’autres, puis je l’étendis sur une pierre à côté de moi, exposé au soleil afin de le laisser sécher, et m’allongeai à ses côtés après avoir à nouveau couvert mon intimité, les yeux tournés vers le ciel, vers l’infini de possibles qui m’attendait et qui serait probablement mon pain quotidien de manière plus ou moins tangible. A propos de pain, je rinçai aussi la salade que j’avais emportée avec moi et en détachai ensuite une à une les feuilles en des gestes machinaux pour les grignoter pensivement tandis que je remuais patiemment et méticuleusement chaque éventualité qui me venait à l’esprit quant à mon avenir pour en rejeter la majeure partie, n’en trouvant aucune réellement satisfaisante. Au bout d’un moment, je me fis la réflexion que sans mon oncle, et malgré tout ce qu’il m’avait enseigné, je n’étais vraiment pas grand-chose, et à cette invective mentale qui m’évoqua une fois de plus Aenigal, je poussai un nouveau soupir devant mon manque de débrouillardise.

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 Sujet du message: Re: Clairière d'Astallin
MessagePosté: Dim 4 Oct 2009 17:31 
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Soudain, dans ta retraite, tu es interrompu par l’arrivé impromptue d’une tomate à quelques centimètres de toi. Elle est intacte, parfaitement ronde, belle et d’un rouge à en faire faire frémir le plus grand des jardiniers. Une tomate splendide en somme. Stupéfaction, cette tomate a été roulée jusqu’à toi par un être plus silencieux que la mort. En effet, à quelques mètres au dessus de ton épaule droite, se tient un inconnu encapuchonné plus grand et plus large que toi. Il semble compatissant et protecteur. Il est assis et attend que tu ais fini. Au bout d’un moment, il finit par dire d’un ton paternel :

« La mort d’un être cher n’est pas facile, mais mangez cette tomate, elle vous fera plaisir ! Le plaisir bien que ponctuel est le chemin du bonheur ! Aenigal n’aurait pas voulu que tu te laisse dépérir pour lui, il faut continuer à te battre pour la vie, Tuia … »

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 Sujet du message: Re: Clairière d'Astallin
MessagePosté: Lun 5 Oct 2009 04:49 
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Afin que les choses soient bien claires entre nous une fois pour toutes, je tiens à affirmer que je n’ai jamais cru au destin dans la mesure où il me paraissait absurde d’accorder foi à l’idée que notre vie toute entière pouvait être aussi soigneusement, rigoureusement et implacablement réglée qu’une partition de musique. Bien sûr, je ne niais pas pour autant que Zewen, le plus grand des dieux qui répondait justement à une telle affiliation, pouvait avoir une incidence sur la vie de l’une ou l’autre personne à l’un ou l’autre moment, mais un tel privilège à double tranchant m’avait toujours paru être l’apanage d’une élite d’élus triés sur le volet dont j’estimais ne pas faire partie. En somme, tout ce à quoi j’avais toujours prétendu, c’était avoir la capacité de réagir à tout ce qui pouvait m’arriver de la manière que je jugeais la plus efficace afin de m’orienter vers une voie aussi heureuse que possible ; désirs des plus modestes, on en conviendra.
Cependant, sur le coup, lorsque je vis de manière complètement inattendue parvenir dans mon champ de vision un objet que j’identifiai du premier coup d’œil comme étant une tomate du plus beau genre, on comprendra que j’eus de quoi me demander par quel coup du sort cette belle plante avait bien pu me tomber devant les yeux, et que je passai quelques secondes nez à nez avec cet intrus tout rouge qui se contenta de paresser là à mes côtés sans daigner engager la conversation bien sûr : tout le monde sait que les fruits sont par nature très malpolis. La réponse à ma question ne se fit toutefois pas attendre, puisqu’en levant la tête, je pus voir que j’étais veillé par quelqu’un vêtu d’un habit à capuche… et c’est tout ce que je pus relever sur ce nouvel arrivant, car étant donné que depuis ma position allongée, je ne pouvais le distinguer qu’à contre-jour, il me fut impossible de pouvoir ajouter quoi que ce fût au sujet de ce drôle d’individu sinon qu’en matière d’immobilisme, il était capable de battre les statues les plus inébranlables.

Contrairement à ce que l’on aurait pu attendre de moi, et contrairement d’ailleurs à ce que la logique la plus élémentaire aurait dicté, je ne me montrai pas plus surpris que cela de cette intervention qui frôlait pourtant le fantastique de par son caractère aussi soudain qu’inopiné. En effet, une expérience aussi rude que celle que je venais de subir avait au moins eu le mérite de me rendre encore plus blasé, et donc encore plus doué de sang-froid (même si je n’en avais plus à proprement parler, ha ha) : la maison dans laquelle j’avais habité toute ma vie brûlait, mon tuteur se retrouvait mort, je devenais à fou de rage et de désespoir, j’incinérais un corbeau, je creusais la tombe de mon oncle, je dormais un bon coup, j’allais me baigner et manger un coup, un zigomar inconnu au bataillon faisait irruption et commençait à me parler de la vie, des petits oiseaux, de l’importance de bien manger pour mener une existence saine, du bonheur et d’Aenigal…
Heu, là par contre, oui, je fus étonné, parce qu’autant tout ce qu’il m’avait déblatéré jusque là, ça aurait pu être sorti par n’importe quel passant un peu toc-toc qui n’avait rien de mieux à faire que d’offrir des tomates aux petits garçons en sous-vêtements, autant savoir le nom de la vénérable personne qui m’avait élevé n’était pas donné à tout le monde. Non pas que le personnage en question fût entouré d’un infranchissable halo de mystère, mais toute notre vie, nous l’avions passée dans l’intimité douillette et solitaire de notre foyer, et les rares fois où nous avions rencontré du monde avaient été celles où nous nous rendions à Luinwë pour l’une ou l’autre course, occasions durant lesquelles ce cher sindel qui ne sortait pas vraiment du lot n’avait jamais vraiment eu l’opportunité de se présenter à qui que ce fût. Pour cette raison très simple, que cet histrion sorti de nulle part fût capable de me décliner non seulement l’identité de mon oncle mais aussi la mienne me fit tiquer, et, avalant la dernière des feuilles de salade que j’avais rassemblées à mes côtés, je me redressai pour m’emparer de ma robe désormais à peu près sèche que j’enfilai afin de pouvoir au moins faire face à cet étranger dans toute la splendeur de mes maigres atours.

Tout en me redressant devant lui, je m’emparai de l’appétissante solanacée dont il m’avait fait don, mais, après l’avoir observée non sans curiosité devant son étonnante perfection, plutôt que de manger ce présent qui, pour ce que j’en savais, aurait pu fort bien être un fruit empoisonné, je la glissai dans une des larges poches qui parsemaient mon habit, sentant au passage le poids rassurant de mon catalyseur magique certes guère impressionnant mais dont la conscience m’apportait quelque réconfort. Ayant troqué l’apathie qui m’avait valu d’être tancé par ce bonhomme dont le ton sucré et bienveillant ne me disait rien qui valût contre la circonspection dont Aenigal m’avait appris à faire montre en toute circonstance, je redressai la tête pour distinguer plus clairement les traits de mon interlocuteur, toujours sans succès en raison du jeu de lumière qui me gênait la vue. Au départ, une de mes premières inspirations fut de faire usage de ce petit subterfuge auquel je savais avoir recours et qui consistait à me montrer aussi enfantin que mon apparence pouvait le laisser croire, mais quelque chose chez ce curieux personnage me disait qu’il en aurait su assez pour se rendre compte de la supercherie.

« C’est bien là mon intention. » Répondis-je donc en toute simplicité, davantage pour meubler le silence en attendant de trouver quelque chose de plus pertinent à lui sortir que pour lui donner la réplique.

Mais d’ailleurs, que pouvais-je bien avoir à improviser pour me hisser au même niveau que lui ? Car indubitablement, cette homme avait connaissance de mon existence dans le détail, sinon en gros, étant donné qu’autrement, il n’aurait pas été capable de se fendre d’un discours digne d’un vieil ami de famille, personnalité que je n’avais pas dans mon entourage proche, ni même d’ailleurs dans mon entourage lointain pour ce que cela pouvait importer. A proprement parler, j’étais démuni face à lui, aussi bien du point de vue de l’information que du point de vue des capacités d’ailleurs : certes, je savais lancer un sort ou deux, mais c’était là tout ce à quoi mon arsenal se réduisait, et une fois que de pareilles munitions seraient épuisées, je serais à la merci de ce mystérieux gaillard qui ne me voulait peut-être pas que du bien en raison de mes potentialités physiques fort réduites. Ainsi, en fin de compte, pris pour pris, je me décidai à faire au moins en sorte de conserver ma dignité et de faire front la tête haute, et après avoir remis mes chaussures dans la foulée, je me positionnai de façon neutre ; ni relaxé, ni tendu, les mains croisées au niveau de mon abdomen, et lui déclarai de but en blanc :

« Coupons court aux tergiversations : qui êtes vous et que voulez-vous ? »

Oui parce qu’on m’excusera de m’être montré méfiant, mais un bienfaiteur anonyme qui se manifestait derrière mon dos comme une fleur pour venir me donner quelques conseils et m’apporter, surcroît d’invraisemblance, une tomate, ça m’apparaissait à tout moins comme louche. Après, s’il parvenait à me prouver que mon alarme était en fin de compte tout ce qu’il y avait de plus superflue, je serais ravi de pouvoir me dire que j’avais contre toute attente quelqu’un pour me prêter main-forte, mais en attendant, je préférais rester sur mes gardes.

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 Sujet du message: Re: Clairière d'Astallin
MessagePosté: Mar 6 Oct 2009 00:16 
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L’inconnu ne semble pas le moins du monde gêné lorsque tu t’habilles prestement pour lui faire face. Il murmure un assentiment face à ta première réponse mais semble déçu lorsque tu glisse la tomate dans une poche plutôt que de mordre dedans. Il ne semble pas méchant, au contraire, il a l’air plutôt vieux et affable au vu de son dos voûté. Mais qui sait, les apparences étaient peut-être fausses… A ton injonction des plus désagréables, il répond avec un calme et une douceur inattendue :

« Disons que je suis un vieil ami! Je vous connais tout deux et c’est bien la seule chose qui importe. A ta création, Aenigal m’a dit qu’il faudrait que je vienne te trouver à sa mort. Me voilà aujourd’hui pour remplir ma mission. Je dois simplement t’informer des dernières volontés de ton maître… Cependant, je ne suis pas sûr qu’elles te plaisent…»

Il laisse sa phrase en suspens , réfléchissant lui-même aux conséquences de son acte et de ses paroles. Un vent frais parcourt son échine et il frémit. Même lui, il semble douter des propres paroles qu’il va prononcer. Après une dernière hésitation, il te demande simplement :

« Es tu prêt à les entendre ? »

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 Sujet du message: Re: Clairière d'Astallin
MessagePosté: Mar 6 Oct 2009 03:02 
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Comme je m’y étais attendu à moitié, l’anonyme ne se montra pas plus réactif à mes paroles que si je lui avais demandé le chemin le plus court pour rejoindre Luinwë : à coup sûr, j’avais en face de moi quelqu’un qui était habitué à discourir le plus habilement possible, à faire preuve des subterfuges les plus élaborés, et qui donc ne se laisserait pas déstabiliser par quelque réplique que ce fût, particulièrement si elle émanait d’un mioche pas bien imposant comme moi. Détail déstabilisant dans l’affaire, maintenant que je l’observais plus en détail, mon interlocuteur m’apparut d’un âge plutôt avancé (ou tout simplement bossu pour ce que j’en savais) à en juger par son dos courbé, donnée renforçant encore l’impression de gentil vieillard qui émanait de sa personne. Pour autant, je n’en fus pas le moins du monde rassuré, car sans tomber dans des clichés tel que celui du vieux pervers qui attend les petits enfants au coin de la rue en leur proposant des friandises pour les attirer au loin et leur faire subir des expériences qu’il vaut mieux taire, je sentais qu’il y avait anguille sous roche, toujours pour la raison que si ce grigou m’avait connu ou avait connu Aenigal, je l’aurais su, ou plutôt nous l’aurions su, ce qui revenait au même.

Ainsi, si ce quidam avait bel et bien mérité ce statut de « vieil ami » auquel il prétendait, je l’aurais reconnu, n’aurait-ce été que de façon floue, selon le raisonnement suivant : lorsqu’ils s’étaient éclipsés du Naora, évènement remontant à environ soixante-dix ans, mon oncle et ma mère l’avaient fait dans un relatif incognito, et depuis ce jour, comme je l’avais déjà mentionné, ils n’avaient eu que des rapports très restreints avec le monde extérieur. Certes, cela avait été bien davantage le cas du premier que de la seconde vu qu’elle s’en était allée courir l’aventure vers je ne savais quels horizons, et il était donc possible que ce fût la dénommée Caesi’nhyl qu’il eût connue, mais dans ce cas là, il l’aurait mentionnée elle et non lui. CQFD si on voulait bien me passer l’expression : j'étais peut-être dans de beaux draps, laissé à moi-même et déprimé, mais ce n’était pas pour cette raison que je m’en allais faire confiance au premier venu ou avaler toutes les couleuvres qu’on me ferait pendre sous le nez sans me poser de question.
D’ailleurs, le sombre individu se fourvoyait apparemment gravement sur ma nature puisqu’il avait tout l’air de me considérer comme un automate à part entière plutôt que comme un sindel tout ce qu’il y avait de plus ordinaire ayant subi quelques modifications sur le modèle d'un aniathy. Lorsqu’il osa employer le terme de « création » qui laissait entendre que je n’étais qu’une sorte de jouet bâti de toutes pièces sans conscience propre, je me sentis l'envie de le gifler… loin de moi l’idée de dénigrer ces poupées enchantées auxquelles je ne niais nullement le libre-arbitre, mais j’imaginais que demander à une pareille entité le nom de ses parents aurait été aussi inconvenant et blessant que de dire à quelqu’un qu’il avait été « créé ».

Mais bref, je divergeais, et pour en revenir à mon déplaisant conversationniste, celui-ci poussa la menterie jusqu’à prétendre être l’exécuteur testamentaire de feu Aenigal, éventualité tout à fait improbable puisque, encore une fois, je ne connaissais en rien ce zigue -et j’avais pourtant bonne mémoire-, sans compter que ce n’était absolument pas du genre de mon oncle de me faire des cachotteries, surtout sur un point aussi crucial que ses dernières volontés. Ainsi résolu à ne pas croire un mot de ce que ce fâcheux pouvait bien avoir à me siffler aux oreilles comme sornettes, je ne me laissai pas déstabiliser par la vulnérabilité de ce personnage, feinte ou non, et le toisai avec dans toute mon attitude une froideur qui aurait pu laisser croire que les fluides qui coulaient dans corps étaient originaires de Yuia et non de Meno pour lui répondre avec une politesse glacée :

« Monsieur, ce que vous dites là est impossible. » Laissant un instant mes paroles faire effet dans toute leur inaliénable véracité issue de mes réflexions, j’enchaînai pour pousser la logique de mes propos plus avant : « Je ne sais pas comment vous connaissez mon nom ou celui de mon oncle, mais je peux affirmer sans l’ombre d’un doute que ni moi ni Aenigal ne vous connaissions, aussi m’apparaît-il comme l’évidence même que vous mentez et que donc, a fortiori, vous n’avez aucune dernière volonté à me transmettre de la part de celui qui n’était, au passage, pas mon maître mais mon tuteur. »

A l’envoyer ainsi sur les roses, je n’éprouvai absolument aucune satisfaction : pourquoi aurais-je jubilé de devoir refuser l’aide de la première personne qui se présentait à moi après la catastrophe qui avait survenu et qui m’avait laissé aussi démuni ? Bien évidemment, c’était de bonne guerre que je me refusais à lui accorder la moindre confiance en dépit de toute la bienveillance qui se dégageait de lui, mais cela n’en rendait pas la pilule plus facile à avaler : manque de pot, le premier être sur lequel je tombais –ou plutôt, qui me tombait dessus- après ma Troisième Ironie était un inconnu louche et mythomane. En vérité, j’aurais bien aimé pouvoir avoir quelqu’un sur l’épaule duquel me reposer après un coup aussi dur, mais je le savais, Yuimen n’était pas un monde de conte de fées peuplé uniquement de créatures charmantes et innocentes, et je me devais donc d’être aussi prudent qu’il me l’était permis.
En l’occurrence, je ne savais pas quelle allait être la réaction de cet individu, mais quoi qu’il en fût, je devais m’en tenir à ma résolution de rester avant tout soucieux de ne pas me dévoyer, mais aussi de ne pas permettre que l’on évoquât l’identité d’Aenigal pour un prétexte aussi fallacieux. De cette façon, coûte que coûte, je poursuivis, tout de droiture et de dignité :

« Je vous prie de cesser de souiller la mémoire d’Aenigal en prétendant avoir été de ses amis. Si vous n’avez rien d’autre à me dire, vous comprendrez que je vous serai reconnaissant de me laisser en paix. »

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 Sujet du message: Re: Clairière d'Astallin
MessagePosté: Mar 6 Oct 2009 22:27 
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L’être , à tes paroles, se relève de toute sa hauteur et se détend complètement, faisant oublier son apparente vieillesse. Il dégaine sèchement un petit katana et adopte une attitude très agressive. Il t’injurie de telle sorte :

« Cela aurait pu se passer sans douleur petite créature insignifiante ! Mais tu as voulu oser le diable… Ce n’est pas prudent face à des inconnus. Je ne suis en effet pas un ami, mais je venais te proposer une affaire gentiment… Maintenant, je ne te laisse plus le choix !»

Il avance alors d’un pas rapide vers toi, lame devant lui, une lueur méchante dans sa démarche. Le combat semble inévitable, mais les gestes de ton adversaire sont sûr et précis, calculés pour une plus grande efficacité. Si affrontement il y a, ta peau ne serait pas facile à défendre, car tu es clairement désavantagé.

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 Sujet du message: Re: Clairière d'Astallin
MessagePosté: Mer 7 Oct 2009 02:41 
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Déplaisante bien que logique ironie du sort, contrairement à ma demande, l’individu que l’on pouvait désormais définitivement qualifier de sombre n’eut pas du tout, mais alors pas du tout l’air d’avoir envie de me laisser en paix, la preuve en étant du redressement éclair que le faux vieillard opéra avec une vivacité qui me fit tout de suite froid dans le dos : à ce moment, je ne sus toujours pas à qui j’avais affaire, mais une chose était désormais sûre et certaine, il ne me voulait pas du bien. En tout cas, la preuve en était que si la probabilité de voir un évènement bon ou mauvais chez un individu se fondait sur un facteur chance au lieu de répondre à une détermination aléatoire, j’avais vraiment pas de bol pour voir en l’espace de vingt-quatre heures la perte de tous mes biens ainsi que celle de mon oncle, catastrophe qui voyait à sa suite survenir la venue d’un personnage d’abord louche, puis franchement douteux, et enfin résolument timbré.
C’était vrai quoi : après toute la merde (excusez du langage) qui avait eue lieu, tout ce que j’avais désiré, c’était d’avoir le temps de faire tranquillement le point sur ma situation, et au lieu de ça, qu’est-ce qui m’arrivait, à moi, innocent sindel qui n’avais rien demandé à personne ? Je vous le donne en mille : un type sorti de nulle part, mais alors vraiment de nulle part, se faisait passer pour un ami intime de la famille, et, devant l’échec de sa tentative d’embobinage, manifestait soudainement des velléités de me couper en fines tranches comme l’indiquait le sabre qu’il extirpa des pans de la lourde tunique qu’il portait. Car oui, il fallait savoir qu’en matière d’armement, un katana était un outil d’une rare performance de par sa légèreté fort appréciable combinée à un tranchant redoutable qui en faisait l’arme de prédilection des combattants les plus raffinés, capable de traverser des couches entières de métal pour venir trancher la chair avec l’efficacité d’un scalpel de chirurgien.

Certainement, tout ce petit cours que je me fis au sujet des moyens de charcuter son prochain était très instructif, mais j’y aurais trouvé encore plus d’intérêt si je n’avais pas été dans une situation épouvantable, réduit à l’état de cadavre en devenir par ce maboul sanguinaire. A le voir dégainer son instrument de mort, j’aurais bien dit que mon cœur bondit, que mon sang ne fit qu’un tour ou que mes cheveux se dressèrent sur ma tête, mais étant donné que j’étais dans l’impossibilité physique de présenter n’importe laquelle de ses réactions, je me contentai de sentir ma gorge se serrer alors que j’ouvrais des yeux grands comme des billes et que l’adrénaline commençait à pulser dans mon cerveau devant l’urgence de la situation dont le caractère grandement, voire mortellement dangereux ne faisait maintenant plus aucun doute.
Désormais, ce n’était plus le moment de faire fonctionner ma langue bien pendue mais mes méninges, et rapidement de préférence tant que l’olibrius dément était trop occupé à me sortir son discours dépité et furieux plutôt qu’à faire usage de sa lame à l’encontre de ma personne. En effet, je le savais sans même qu’il fût possible de me leurrer, j’étais de constitution fragile, et il ne faisait par conséquent pas un pli qu’en un coup ou deux, je me retrouverais étalé sur le carreau, pour ne pas dire pour de bon, car si Aenigal m’avait guéri et même rendu plus robuste qu’auparavant, il ne m’avait pas rendu invulnérable, bien loin de là. En plus, d’après ses mouvements, et même si j’étais tout sauf un professionnel martial, ça crevait les yeux que mon désormais agresseur était loin d’être une bleusaille en matière de combat, ce qui rendait mes chances de survie en cas de lutte encore plus insignifiantes : si je voulais pouvoir prendre le dessus sur ce fou, je devais m’en tenir à une autre stratégie que les ridicules coups de pied et poing que j’étais capable d’asséner et auxquels se limitait mon arsenal guerrier.

M’efforçant de faire taire les tremblements qui commençaient à m’agiter les membres, je pris une inspiration la plus calme et contrôlée possible, laissant en même temps les fluides qui circulaient en moi quitter le centre énergétique de mon corps pour venir remonter le long de ma trachée, se frayant lentement un chemin vers ma bouche de la même manière si étrangement originale qu'ils l'avaient fait lors du lancement de la Boule de feu. Je pouvais en être conscient désormais plus que jamais, en dernier recours, mon feu était à peu près le dernier allié qui me restait, et c’était son aide que j’allais requérir pour me défaire de mon oppresseur : au-delà de la panique qui menaçait de m’envahir tout entier, je ressentais une familiarité indéfectible réconfortante envers cette puissance pyromantique qui me permettait de subsister en tant qu’être vivant et qui serait peut-être pour l’occasion un élément constitutif de mon propre sauvetage. Lorsque je relevai la tête pour darder mes prunelles violettes dans celles invisibles du tueur en puissance, résolu à affronter les circonstances de mes actes, on put voir que des flammes argentées dansaient désormais dans le fond de ma gorge, indice d’un Trait de feu imminent, et manifestation magique qui avait de quoi en effrayer, ou tout moins en déstabiliser plus d’un.

« Qu’il en soit ainsi. » Articulai-je ardemment, parfaitement serein, aussi confiant que je pouvais l’être dans mon plan, alors que des flammèches commençaient déjà à s’échapper de mon gosier.

Prêt à jeter les dés de mon destin et à affronter le résultat qu’ils allaient donner, je me campai solidement sur mes deux jambes, les genoux légèrement arqués, puis… je me jetai vivement en arrière dans la rivière de toutes mes forces tandis que je ravalais précipitamment le précieux fluide que j’avais emmagasiné afin de ne pas le gaspiller. Hé oui, c’était ça mon plan : faire croire à ce maniaque que j’allais l’attaquer au moyen d’un souffle igné afin qu’il fût un tant fût peu sur la défensive, et profiter de ce moment où il serait probablement pris de court, aussi bref fût-il, pour m’esquiver par la voie des eaux, cette stratégie ayant pour avantage indéniable que j’étais si légèrement équipé que tout ce que j’aurais à faire serait de me laisser tranquillement porter par le courant tandis que lui, alourdi par son considérable vêtement ainsi que par le matériel qu’il devait dissimuler, ne pourrait pas suivre le mouvement sans risquer de se noyer. Évidemment, cette idée n’était pas parfaite, et elle présentait certes des inconnues trop nombreuses pour pouvoir être considérée comme fiable à 100%, mais c’était la meilleure que j’avais pu concocter avec le peu de temps et de moyens que j’avais à disposition ; celle en laquelle je remettais tous mes espoirs de fuite, me fiant plus que jamais à mon intelligence et à mon sens de la logique pour me sortir de cette mauvaise passe affolante.

Vous ne croyiez tout de même pas que j’allais avoir la folie me mesurer à lui à la loyale, non ?

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 Sujet du message: Re: Clairière d'Astallin
MessagePosté: Sam 10 Oct 2009 00:58 
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Avec une violence inouïe, alors que tu y es à peine entré, les flots t’emportent, comme déchaîné par une force inconnue. Cependant, au bout d’un temps, un rythme plus lent s’installe et tu commence la descente vers l’aval de la rivière. Par chance, tu passe à côté d’un gros bout de bois sur lequel tu peux aisément t’accrocher pour dériver plus tranquillement si tu le désire.

De son côté, ton inconnu a paru très surpris de ta réaction et n’a pas réagi les premières secondes de ta folie. Mais ce temps passé, tu avais pu au loin l’apercevoir disparaître dans un bosquet… Le pire restait à craindre s’il te retrouvait et il fallait continuer à fuir. Le remous des flots y contribuent largement .

« Tuia, reviens à la rive ! Je me suis mal exprimé avec toi, tu as été choisi par mon maître, et j’ai ordre de te proposer de participer à une de ses festivités. Excuse moi et stoppe ta folie.

L’inconnu est déjà à tes côtés, sur la rive, monté sur un puissant destrier qui suit sans problème la dérive de ce petit bout de sindel que tu es. Voilà un nouveau problème à régler. T’avais bien besoin de ça en plus !

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 Sujet du message: Re: Clairière d'Astallin
MessagePosté: Sam 10 Oct 2009 04:50 
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Waaaaah ! A peine avais-je commencé ma fuite via la rivière que je me dis que ce n’était peut-être pas une bonne idée de faire preuve d’une telle hardiesse, ou plutôt que ce n’était peut-être pas une si bonne idée, car la mauvaise idée aurait tout simplement été de rester devant ce cinglé pour me mesurer à lui et très probablement me retrouver équarri. En tout cas, j’eus la satisfaction d’avoir pris mon agresseur de court, car je pus le voir qui me contemplait filer prestement au sein des flots avec la célérité d’un saumon, et la seule raison pour laquelle je ne lui fis pas un pied de nez pour célébrer mon coup d’éclat fut que contrairement au poisson précédemment mentionné, je nageais aussi bien qu’un fer à repasser, particulièrement en étant alourdi par ma grande robe épaisse. Ainsi, je me concentrai bien davantage sur ma survie que sur mon esbroufe, faisant de mon mieux pour ne pas perdre mon sang-froid, sachant que paniquer n’aurait fait que saper mes forces si précieuses et par conséquent qu’accélérer le moment où l’énergie me manquerait pour me garder à la surface : déjà qu’en m’en tenant aux dépenses minimales de ce point de vue là, j’avais du mal, ce n’était pas l’heure de faire l’étourdi et de céder à des pulsions de panique puérile.

Alors que j’étais ballotté à droite à gauche, j’eus tout de même la perspicacité de me rendre compte que contrairement à il y avait à peine une dizaine de minutes, le courant était maintenant incroyablement tumultueux, invraisemblable changement que j’imputai faute d’une autre possibilité à mon persécuteur… ou tout simplement à un Génie Malin en fait, allez savoir. Je me sentais tellement maudit avec ces successions d’écrasantes déveines que j’en vins à croire que Zewen s’ennuyait et qu’il avait choisi de s’amuser en voyant ce qui arriverait à un être choisi au hasard en lui envoyant des catastrophes à l’affilée. Hé bien pour l’instant, j’étais sévèrement ballotté de droite à gauche par des mains géantes aqueuses qui me giflaient de toutes parts, devant faire sans cesse des efforts de volonté pour ne pas battre des pieds ou des mains et n’inspirer que lorsque je pouvais être sûr que c’était la bonne occasion. Evidemment, étant donné mon étonnante morphologie, j’avais besoin de moins d’oxygène qu’un être elfique normal pour faire fonctionner mon corps, et étais donc bien moins menacé d’asphyxie que ne l’aurait été n’importe qui d’autre, mais il n’empêchait qu’à la vitesse où j’allais, si d’aventure je me heurtais à quelque obstacle, je tomberais dans l’inconscience puis me noierais.

Ce fut avec ces très réjouissantes pensées en tête que je poursuivis mon parcours marin, charrié comme un vulgaire bout de bois pendant un temps qui, contrairement au cliché d’usage, ne sembla pas infini à un gaillard intelligent comme moi, mais dura très précisément deux minutes et huit secondes. Au bout de cette période, j’eus comme compagnon un véritable sauveur sous la forme d’une branche morte de bonne taille à laquelle je m’accrochai comme si ma vie en avait dépendu (d’autant plus qu’elle en dépendait vraiment), trouvant chez cet envoyé de Yuimen un allié précieux qui me permit de dériver non moins rapidement mais en tout cas plus commodément. Prenant un moment pour souffler et faire le point sur ma situation, je pus très rapidement me rendre compte que contrairement à ce que j’avais ardemment craint, et conformément à mon plan, l’autre fou ne m’avait pas suivi, ma fuite précipitée l’ayant apparemment trop pris de court pour qu’il fût capable d’y réagir efficacement.
Grandement soulagé d’un tel succès, et retenant un sourire de triomphe qui aurait été plutôt déplacé étant donné ma situation, je fis des pieds et des mains pour hisser mon petit corps sur mon secoureur inerte, parvenant au bout de contorsions éperdues dont je n’avais pas l’habitude à me positionner à califourchon sur ma monture improvisée. Là, tout pantelant et ruisselant d’eau, mes cheveux et mes oreilles affaissés sous le poids du liquide, je m’accordai de reprendre ma respiration, aucune autre possibilité ne m’étant de toute façon offerte puisque bouger n’aurait fait que me faire prendre le risque de retomber dans le même pétrin que précédemment. Certes, la fougue du courant de la rivière s’était quelque peu atténuée, mais pour autant, je n’aurais tout de même pas pu évoluer dans ces flots agités sans peine, aussi était-il bien plus raisonnable de rester à bord de mon fier navire tout miteux sur lequel je me sentais tout de même envahi d’un ennui qui ne faisait en passant rien pour atténuer ma nervosité. A part observer le paysage verdoyant à la fois si familier et inconnu qui filait devant moi et sur mes côtés, je n’avais donc l’air d’avoir rien à faire quand une forme incongrue dans l’enchevêtrement d’écorce et de feuilles attira mon attention, m’ayant l’air étrangement familière.

M’approchant précautionneusement afin d’éviter de chavirer bêtement, j’allai tâter de cette étrange trouvaille, extirpant après quelques instants de manipulations délicates un panneau de chêne muni d’une poignée que je reconnus en l’observant comme étant un fragment de ce qui avait été jadis la porte d’entrée de ma maison et qui avait été réduit à l’état de débris flottant après l’explosion qui devait l’avoir projeté jusqu’à ce cours d’eau proche. Dans un premier instant, après un sourire nostalgique et désabusé dont je m’offris le luxe, je m’apprêtai à jeter cette relique de mon enfance désormais révolue, puis, dans un éclair d’astuce un peu folle stimulée par mon instinct de survie mis à rude épreuve, je me fis la réflexion qu’à partir de maintenant, je devrais trouver du matériel où je pourrais en trouver et en quantités que je pourrais trouver. En l’occurrence, comme panneau d’entrée, ce bout de bois était foutu, mais avec sa poignée toujours en bon état dans laquelle je pouvais passer ma main afin de plaquer mon bras contre ce morceau plutôt robuste, il pouvait fort bien faire office de bouclier de fortune !
Cette invention digne du système D le plus échevelé tenait sans doute beaucoup du ridicule, et pourtant, on ne pouvait me retirer que je tenais là une rondache certes fort peu reluisante mais qui me serait utile pour protéger ma frêle carcasse des coups. Evidemment, je n’avais aucunement la prétention d’être un combattant ou quoi que ce fût de tel, mais le fait était qu’avec l’intervention du sabreur, je préférais avoir de quoi augmenter mes moyens de défense, si peu que ce fût. En tout cas, devant cette innovation originale mais pas dénuée de sens, je ne pus contenir un élan de satisfaction, lequel se glaça aussitôt pour se transformer en désarroi lorsque j’entendis le bruit de sabots qui cognaient la terre, signe de l’approche imminente d’un cavalier. A cran comme je l’étais, je ne doutai pas une seule seconde que ce fût le taré de tout à l’heure, et malheureusement, la suite me donna raison quand l’obscur maniaque fit à nouveau son apparition, juché sur un destrier dont l’ardeur dépassait largement celui du mien et qui parvint sans peine à se maintenir à mon allure.

Avec une insistance peinée qui ne fit que me rendre encore plus méfiant envers ce harceleur vindicatif et acharné, il m’enjoignit alors de le rejoindre plutôt que de risquer ma vie dans ces rapides, arguant qu’il avait été mandé par son « maître » pour m’inviter à je ne pouvais savoir quelle sordide activité. Réprimant un frisson d’horreur et de dégoût à la pensée de ce que l’on pouvait bien vouloir faire d’un enfant comme moi, je regrettai une fois encore qu’Aenigal ne fût plus à mes côtés pour me protéger : je ne l’avais jamais vu se battre, mais j’étais sûr qu’avec sa maîtrise des éléments, il aurait été capable de transformer ce monstre à allure humaine en tas de cendres !
Hélas, point d’oncle pour me sauver, pensée qui m’étreignit le cœur d’un début de désespoir que je rejetai aussi énergiquement que possible, ne me tournant ensuite vers mon tourmenteur que pour lui tirer la langue avant de rediriger mon attention vers ma progression, gardant tout de même l’acharné dans mon champ de vision afin de repérer une éventuelle manœuvre de sa part. Je le savais, à l’allure à laquelle j’allais, il pouvait me rattraper même à pied étant donné ses capacités athlétiques très probablement développées, mais pour ce faire, il devrait d’abord descendre de cheval, chose qui lui prendrait du temps ; ce même temps qui jouait contre lui. En effet, toute rivière va tôt ou tard à la mer, et en l’occurrence, la mer signifiait le port de Luinwë, fort proche, port qui lui-même signifiait une ville, ville qui signifiait des gens… et ainsi, en regagnant cet asile qui ne devait plus être loin, je pourrais avoir de mon côté des témoins qui ne laisseraient pas un individu aussi louche que lui s’emparer d’un bout de chou aussi innocent que moi ! Et crac !

En attendant, il restait tout de même à faire en sorte que mon ennemi ne refermât pas ses griffes sur moi, et comme je ne savais pas quel tour il pouvait bien avoir dans son sac, je décidai de prendre sans attendre les devants en une manœuvre d’intimidation peut-être dérisoire mais qui valait toujours mieux que rien. Pointant mon index dans sa direction, je fis une nouvelle fois appel à mes chers, précieux et fidèles fluides qui ne tardèrent guère à se concentrer dans ma main pour former une flamme argentée au bout de mon doigt, puis, fort de cette menace latente, je lui criai :

« Partez ou je crame votre canasson ! »

Bon, d’accord, on avait connu plus classe comme menace, mais on ne me reprochera pas de m’être davantage soucié de ma survie que de mon style, le message étant de toute façon clair : même si, contrairement à mes dires, je n’étais pas capable d’incendier le pauvre quadrupède, un Trait de feu bien ajusté effraierait certainement l’animal qui craignait instinctivement cet élément, effroi qui signifiait par conséquent de nouvelles difficultés pour son cavalier.

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 Sujet du message: Re: Clairière d'Astallin
MessagePosté: Sam 10 Oct 2009 13:49 
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Le cavalier ralentit sa monture sur la berge pour pouvoir se mettre à ta vitesse. Il semble étonné de ta surprenante embarcation de fortune. Mais bon, il fallait bien quelque chose pour te sauver la mise… Sa monture est un magnifique étalon noir, à la crinière étonnamment orangé. Il est puissant et obéissant, il suit le moindre des mouvements du cavalier au millimètre.

La berge se rétrécit et bientôt le cavalier est obligé de poursuivre sa course-poursuite dans l’eau. Elle n’est encore qu’au niveau des bolets mais si cela continue, ils ne pourront plus te suivre au fil de l’eau.

C’est alors que ta remarque profonde et pénétrante d’une véracité qui frise le ridicule met encore plus l’inconnu hors de ses gonds. Ce n’est plus de la colère explosive et effusive qui peut se calmer avec un sourire et un pardon, c’est désormais de la fureur froide et contrôlée, inexorable. Dans un grognement, il relance la monture à pleine vitesse pour prendre une trentaine de mètres d’avance sur toi avant de s’arrêter. Il met pied à terre et attends désormais que tu arrive à sa hauteur… Sans doute va-t-il te tirer comme un lapin, et sur cette branche, tu n’as que peu de chance d’en sortir indemne. Il murmure froidement :

« Tu l’auras voulu ! »

Et sur ces mots, il plonge la main dans l’eau de la rivière. Une seconde après, tu peux voir que la rivière, ou du moins, le morceau ou tu te trouve, ralentit considérablement et commence à geler. Pour enfoncer le clou, il met une seconde main et l’eau se fige complètement, t’emprisonnant dans un cercueil de glace. Tu ne peux plus avancer sur ton bout de bois et l’homme est au milieu du seul accès qui te permet d’accéder à la rive. Il avance d’ailleurs, confiant sur sa glace, menaçant. Tes muscles sont engourdis et tu remarque alors que tes jambes sont prises dans la glace, tu ne peux plus fuir ton ennemi.

«Alors, es tu prêt maintenant à m’écouter ?»

Il n’y avait eu aucune violence, juste ces quelques mots.


((( Pour faire ce qu'il a fait , geler un bout de rivière, il a jeté , dans un soucis de réalisme , trois sorts simples de niveau 3 ! C'est aussi pour te donner une idée du bonhomme )))

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 Sujet du message: Re: Clairière d'Astallin
MessagePosté: Lun 12 Oct 2009 02:26 
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Décidément, niveau équilibre des forces, la situation était d’une injustice flagrante, et alors que j’opposais ma résistance dérisoire face à l’affreux jojo, je notai dans un coin de mon esprit qu’il faudrait vraiment que je me plaigne à Zewen pour avoir fait en sorte que je me prisse dans un guêpier pareil, confronté à un ennemi doté de moyens si considérables que j’avais l’impression de n’être face à lui qu’un galopin renfermé dans une cabane de bois pour soutenir l’assaut d’une charge de cavalerie lourde. La comparaison était fort bien choisie puisque en l’occurrence, ma monture et mon unique protection étaient faites du matériau précédemment mentionnés, équipement des plus ridicule face à quelqu’un dont l’arme était un katana sans aucun doute capable de trancher à travers mon bout de porte comme du papier, et le destrier un étalon infatigable obéissant au doigt et à l’œil. Enfin bon, la vie n’était pas une partie d’échecs : injuste, cruelle et impitoyable, elle ne donnait bien souvent pas le choix, et ne laissait parfois aucune chance.
Pour autant, je n’étais pas moins résolu à me battre bec et ongles pour ne pas me plier à la volonté de ce cruel personnage tyrannique, même si mon plan présent tenait bien davantage de l’esbroufe que de la logique : certes, les animaux n’aimaient pas le feu, mais en l’occurrence, celui qui galopait aussi fièrement et avec si peu d’efforts devait être habitué à des dangers autrement plus considérables que des Traits de feu minables, et supporterait donc certainement la sensation d’une gerbe de flammes presque sans broncher. Je le savais, j’étais pitoyable à croire que mes maigres pouvoirs magiques pourraient intimider ce bourrin, mais que faire d’autre ? Je n’allais pas me laisser gentiment capturer par cet individu douteux pour être conduit vers d’obscurs horizons où il m’arriverait je ne pouvais savoir quoi qui ne serait certainement pas agréable si l’on en jugeait par ce qu’il avait eu l’intention de me faire quelques minutes auparavant.

Quand on parle du loup, à peine lui eus-je envoyé mon avertissement que celui-ci abandonna définitivement toute tentative d’amadouement pour arborer un visage qui ne devait certainement avoir rien à envier aux masques de théâtre les plus effrayants. L’idée que la berge de la rivière se faisait de moins en moins praticable m’apporta un regain de confiance, mais bien vite, cette flammèche d’assurance fut soufflée par la célérité et l’apparente aisance avec lesquelles l’équidé prit une considérable avance sur ma pauvre branche. Je m’en doutais, s’il s’éloignait ainsi, ce n’était pas pour rapporter son échec à son « maître » : il n’allait pas abandonner l’affaire si facilement, et effectivement, ce fut avec un sentiment de fatalité que je le vis mettre pied à terre quelques dizaines de mètres plus loin, m’attendant d’une seconde à l’autre à le voir dégainer une arbalète pour m’épingler comme une vulgaire poule d’eau et me ramener ensuite les pieds devants. Si j’avais écouté mes instincts les plus basiques, j’aurais aussitôt plongé pour m’abriter sous l’eau, ou j’aurais tout simplement présenté ma reddition sans conditions, mais une fierté de sindel ainsi qu’un orgueil d’enfant me firent lui tenir tête aussi dignement que possible, le corps tremblotant de froid aussi bien que de peur dans l’attente de ce que ce maudit persécuteur allait bien pouvoir déchaîner à mon égard.

Et on peut dire que je ne fus pas déçu : rien qu’en le voyant plonger sa main dans la rivière et en sentant l’énergie glacée en lui qui commençait à se déchaîner, je devinai ce qu’il allait mettre en œuvre, et, ne trouvant rien de mieux à faire, je repliai mes jambes pour ne pas qu’elles se retrouvassent prisonnières de l’eau qu’il s’apprêtait très logiquement à geler. Evidemment, ce n’était pas grand-chose, mais à part l’attaquer directement, je ne pouvais rien faire d’autre, et je me doutais qu’un magicien tel que lui, suffisamment puissant pour que je détectasse ses fluides à cette distance, aurait pu faire fi de mon sort aussi facilement que si je lui avais lancé une allumette. Ainsi, je ne pus faire autrement que de rester coincé sur l’îlot de désespoir auquel avait été réduit mon bien triste radeau, impuissant alors que le coquin affichait son pouvoir dans toute sa redoutable étendue, déchaînant sa maîtrise cryogénique pour faire rendre l’âme à mon seul moyen de locomotion.
Au moment où le froid commença à se faire tellement présent que le feu qui me maintenait en vie parut prêt de s’éteindre, je sus que je n’avais aucune chance contre ce monstre, et qu’à moins qu’une météorite ne tombât du ciel pour l’anéantir, il pourrait faire ce qu’il voudrait de moi. Pour autant, je n’étais pas décidé à abandonner : une tique, l’insecte le plus tenace au monde, était bien capable de s’accrocher si hardiment à la chair d’une personne pour sucer son sang qu’on ne pouvait l’en retirer sans lui arracher la tête, alors si une bestiole pareille parvenait à faire montre d’une telle résistance, il aurait fait beau voir que je n’en fusse pas capable !

En m’apercevant que malgré les précautions que j’avais prises, la gangue de glace s’était étendue jusqu’à mes jambes pour les immobiliser, je dus une fois de plus faire appel à mon considérable sens des réalités pour ne pas paniquer à l’idée d’être ainsi à la merci de ce scélérat. Emprisonné dans un étau de givre, mon esprit me paraissait fonctionner au ralenti au même titre que mes capacités physiques de plus en plus faibles sous le carcan de glace qui m’emprisonnait le corps et empêchait mes fluides de fonctionner correctement, et mes expirations produisaient des panaches de vapeur inquiétants à voir. Dos au mur, condamné à bien devoir écouter cet inconscient, je paraissais tout simplement perdu pour le compte, mais même si mes armes étaient négligeables face à puissance dévastatrice, je n’étais pas obligé de lui obéir, et la simple conscience de cette parcelle de libre-arbitre qui me restait suffit à me décider à lui lâcher d’une voix chevrotante mais fière :

« J’ai le choix ? »

Cependant, au milieu de toute cette déchéance, la petite flamme argentée que j’avais préparée en vue de mon sort était toujours présente comme une lueur d’espoir, et, en un geste qui me parut me coûter autant d’efforts que si j’avais dû soulever mon poids tout entier, je dirigeai ma main aux pieds de l’ordure. Même si mes pouvoirs étaient de loin insuffisants pour lui faire véritablement mal, j’étais bien décidé à être jusqu’au bout un poison pour cet homme, et dans ce but, même mes maigres capacités rendaient possibles certains désagréments. En l’occurrence, il me paraissait logique qu’à moins d’avoir en face de moi un des plus puissants cryomanciens de tout Nirtim, la couche de glace qu’il avait créé ne pouvait pas être bien épaisse, et qu’un Trait de feu serait sans doute suffisant pour la fragiliser et la faire céder sous le poids de l’affreux. Bien sûr, étant donné l’habileté que j’avais pu lui constater, il ne se noierait probablement pas juste avec ça, mais en tout cas, cela ne lui ferait certainement pas plaisir.
Si j’y avais réfléchi, j’aurais pu me dire que je n’avais foncièrement aucune raison de m’opposer ainsi aux avances de ce personnage, mais je résistais tout de même, sans doute par esprit de contradiction : j’étais peut-être comme un hérisson qui se roule en boule pour se protéger et se fait quand même écraser par une charrette, mais il n’empêchait que je refusais catégoriquement de me laisser faire comme une pauvre créature chétive et innocente :

« Mais je vous préviens… » Articulai-je avant de prendre une inspiration qui me brûla de froid les poumons. « …un pas de plus, et je vous fais couler. »

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 Sujet du message: Re: Clairière d'Astallin
MessagePosté: Lun 12 Oct 2009 22:14 
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Ton adversaire s’interrompt un instant à ta remarque, comme doutant de sa propre puissance. Mais, il n’avance plus et soupire simplement. Cependant, ce n’est pas un soupir de déni mais plutôt comme s’il jugeait de nouveau vain ta remarque. Plutôt que t’approcher, il s’accroupit sur la glace et pose une main sur la grande gelée. Tu peux voir une boule d’ombre noire s’agiter sous la surface puis venir directement percuté tes mollets, sans douleur apparente.

«Je n’ai qu’à te dire bonne chance ! Ton entêtement aura finalement causé ta perte… Bonne chance petite créature !»

Et ce disant, il se retourne et s’en va sur la glace. Toi durant ce temps, tu tombes dans une léthargie étrange, comme si tu étais aspiré par une force invisible au fond de la rivière. Et alors que tu commence ta descente dans les enfers gelés, tu comprends que le transport fluidique t’emporte. Mais qu’est ce que cet inconnu a voulu dire ? Et où te rends-tu ? Voilà des questions dont bientôt tu auras la réponse… Trop tard sans doute !

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