L'Univers de Yuimen déménage !


Nouvelle adresse : https://univers.yuimen.net/




Forum verrouillé Ce sujet est verrouillé, vous ne pouvez pas éditer de messages ou poster d’autres réponses.  [ 34 messages ]  Aller à la page Précédente  1, 2, 3  Suivante
Auteur Message
 Sujet du message: Re: La Grande Prostituée (Heartless - v=x3)
MessagePosté: Sam 24 Mar 2012 00:30 
Hors ligne
Avatar de l’utilisateur
 Profil

Inscription: Lun 12 Oct 2009 22:23
Messages: 8551
Localisation: Le Hollan... La Rascasse Volante !
Le Second Vieillard



Le Mauvais Poil




Mercurio fit son office sans faire d'histoire, prenant un malin plaisir à faire du zèle aux endroits où il pouvait déshabiller du regard des membres de cet équipage si singulier. Entendant certains cris d'efforts qui le laissait rêveur et laissant libre-court à son imagination, il eût quelques difficultés à contenir certains phénomènes physiologiques relatifs et dût cacher son émoi en se retournant vers le large avant de reprendre comme si de rien n'était.

Il continua ainsi à passer la toile presque automatiquement, sans même y penser et ne voyant pas le temps passer avec la lubricité silencieuse de son esprit. La seconde aurait pu lui faire laver le pont avec un pinceau qu'il n'en aurait pas été moins ravi.

Les rares fois où il n'était pas distrait par leurs corps, il essayait de comprendre les manoeuvres qu’exécutaient certaines. Si certaines actions semblaient simples, les cordages et l'attention du voilage le dépassait complètement. Puis il se réenvolait dans ses pensées salaces, se disant même qu'il devait vivre là le fantasme de tout marin et que ce serait un comble s'il n'arrivait à rien sur ce bateau.
Mais le côtoiement des filles à gages avait fait de lui un piètre charmeur, et certaines semblaient clairement être dégoûtées par ses gênes worans. Il essaya tant bien que mal de faire de l'oeil à quelques unes ; après tout, des femmes qui restent en mer sans aucun moyen d'assouvir quelques désirs ne devaient pas être si farouches... Mais il n'eût que des regards sombres en retour, et se dit que la tâche ne serait pas aussi facile qu'il l'espérait.

Il continua cependant, et finit par avoir un retour positif inespéré en se faisant prendre la main dans le sac en plein délit de voyeurisme par sa victime, qui lui sourit en le remarquant et en le scrutant à son tour avant de repartir plus loin sans rien dire. C'était une belle créature du peuple des dunes, la peau d'un mâte léger, des cheveux frisés lui descendant sur les épaules, des yeux verts et des formes dignes de ce nom. Mercurio eût aussitôt un gain d'énergie, frottant le pont plus fort et plus rapidement avec un grand sourire sur ses babines en s'imaginant déjà dans l'acte et sur la façon dont il allait l'aborder une fois son travail fini.

Ce fut à peu près à ce moment-là qu'Alessia, qu'il n'avait pas vu s'approcher, l'arrêta dans ses pensées en lui causant une surprise relative avec un léger recul et un réflexe de déploiement des griffes. Considérant sa patte en les rétractant avant de se retourner vers la source de sa perturbation qui lui demandait si aujourd'hui était un meilleur jour qu'hier, il prit un sourire forcé. Il n'avait aucune envie de s'embêter en délicatesses avec cette pyromancienne qui représentait pour lui un danger permanent et qu'il n'avait pas à coeur de s'y lier. Quelque part même, rien que le fait de savoir qu'elle usait d'une magie de feu le dégoûtait et l'énervait profondément.

Elle lui avait demandé s'il était plus dans son assiette que la veille. Il ne comprenait pas vraiment ce qu'elle voulait dire par là. De la façon dont il l'avait laissé tomber hier, ne comprenait-elle pas qu'il ne voulait plus rien avoir affaire avec elle et qu'elle le laisse tranquille jusqu'à leur arrivée sur le bateau du capitaine Heartless ? D'ailleurs, il espérait profondément qu'il soit un de ces capitaines qui ne veut pas de femmes à son bord par superstition ou qu'il ait la même appréhension que lui sur la dangerosité d'une femme avec un tel pouvoir sur un bateau en pleine mer ; bref, que cette Alessia retourne dans sa troupe de bouffons itinérants !

Aussi Mercurio ne répondit pas à sa question et lui répondit le plus sèchement du monde :
"Je travaille, là, et j'ai aucune envie d'te parler. Que mad'moiselle la-torche-aux-doigts se trouve quelqu'un d'autre à em***der."

Si après ça, elle ne comprenait toujours pas...



Les Deux Angoisses

_________________

Playlist de Mercurio

A propos, j'ai trouvé la morale de la fable que ton grand père racontait,
celle du petit oiseau que la vache avait recouvert de merde pour le tenir au chaud et que le coyote a sorti et croqué...
C'est la morale des temps nouveaux.
Ceux qui te mettent dans la merde, ne le font pas toujours pour ton malheur
et ceux qui t'en sortent ne le font pas toujours pour ton bonheur.
Mais surtout ceci, quand tu es dans la merde, tais-toi !

--------------------
Jack Beauregard (Henry Fonda), Mon nom est Personne, écrit par Sergio Leone, Fulvio Morsella et Ernesto Gastaldi


Dernière édition par Mercurio le Jeu 29 Mar 2012 22:59, édité 2 fois.

Haut
 

 Sujet du message: Re: La Grande Prostituée (Heartless - v=x3)
MessagePosté: Lun 26 Mar 2012 08:14 
Hors ligne
Avatar de l’utilisateur
 Profil

Inscription: Ven 4 Fév 2011 06:22
Messages: 56
Localisation: Alentours d'Exech
Face à ma question pourtant courtoise et sensible, le matou se montra des plus retors. Il m’envoya totalement bouler, prétextant qu’il ne voulait pas être dérangé dans son travail. Travail qui ne consistait qu’à frotter le pont avec une brosse humide, et qui par conséquent ne demandait pas forcément beaucoup d’attention. Ce Mercurio n’était sans doute finalement, derrière ses apparences félines, qu’une saleté d’ours mal léché. Un grognon malpoli, un rustre, un sans-cœur. Je sentais la chaleur de la colère me monter au visage, qui devait se colorer de rouge alors que mes yeux flamboyants semblaient vouloir incendier l’odieux personnage. Mes lèvres restèrent pincées, de rage, et un instant j’hésitai à lui cramer la face pour lui apprendre la politesse. Les fluides s’agitèrent dans mes mains, et quelques flammèches y naquirent, un peu malgré moi, prête à se jeter sur ce pelage touffu pour n’en laisser qu’un douloureux souvenir carbonisé.

Mais je parvins à me contrôler. Il ne me vaudrait rien d’incendier la tronche d’un coéquipier sur ce navire, et malgré toutes les explications que je pourrais fournir, je me retrouverais en position de tort. Et les conséquences allaient tomber, bien évidemment. Muette, mais rageante, je tournai donc les talons pour me dérober à sa vue. Une destination était claire : les cuisines du navires, où je retrouvai Greya en train de s’échiner autour d’une marmite pour préparer le repas de ce midi, une sorte de bouillabaisse aux parfums appétissants.

Sitôt qu’elle m’eut vue, elle comprit que quelque chose clochait, et qu’il ne valait visiblement mieux pas m’irriter davantage. Sans me demander plus de précision sur mon état, et donc sans risquer de laisser exploser ma colère, elle me confia une tâche répétitive et finalement plutôt relaxante : le rangement de la vaisselle du matin qu’elle venait de faire. Lentement, cela me calma, et mes pensées haineuses vers Mercurio furent déviées de leur route. La colère se mua en rancœur muette. Une rancœur sans raison, car à part par sa muflerie, il ne m’avait en rien offensée.

Lorsque j’eus terminé ma tâche, j’aidai Greya à terminer le repas, et à le servir dans les bols de bois du bord, tout en tranchant du pain pour l’équipage.

_________________
Alessia, mage flamboyante


Haut
 

 Sujet du message: Re: La Grande Prostituée (Heartless - v=x3)
MessagePosté: Jeu 29 Mar 2012 22:58 
Hors ligne
Avatar de l’utilisateur
 Profil

Inscription: Lun 12 Oct 2009 22:23
Messages: 8551
Localisation: Le Hollan... La Rascasse Volante !
Le Mauvais Poil



Les Deux Angoisses




Mercurio avait été sec avec elle et la pyromancienne virait au rouge de colère. Son énervement lui était bien égal -après tout le but de la manœuvre était bien de la vexer- jusqu'à ce que des flammes jaillissent dans sa main.

Il eût un geste de recul, cessant de frotter le sol avec sa serpillière et restant figé à considérer la menace qu'Alessia tenait entre ses mains. Il comprenait qu'il n'aurait aucune chance face à la donzelle et, de toute façon, la vision si proche d'une de ces angoisses les plus profondes -mourir immolé- l'immobilisa toute la durée, qui lui sembla une éternité, durant laquelle la mage semblait se demander si elle allait laisser parler ses pulsions meurtrières ou non. Sa respiration paralysée, le regard obnubilé par le feu, il attendait le verdict en se voyant déjà mort.

Heureusement, elle finit par se retourner et partit d'un bon pas. L'Humoran resta ainsi statufié durant quelques secondes après son départ, reprenant laborieusement sa respiration. Maintenant, il n'en était que plus certain : Cette fille était une menace, pour lui et pour tout l'équipage. Il suffirait d'une saute d'humeur pour que le sort de la Grande Prostituée et de tout ses occupants soit régler.

Il avait envie d'agir, mais que faire ? Aller lui parler ? Aller informer Garriar ou la seconde de l'ampleur du problème ? Agir en lâche et se débarrasser d'elle durant son sommeil ? Mais tout les scénarios qu'il pouvait se mettre en tête s'abréger lorsqu'il considérait le risquer de finir en cendre, omniprésent dans tout les cas de figure.

Mercurio continua son office en repensant à tout cela, le regard vide droit vers le sol, oubliant totalement ses fantasmes d'avant-coup et préférant faire l'impasse sur le repas du zénith malgré son estomac râlant encore de son jeûne de la veille au soir.

Un bon moment passa ainsi, ne pouvant se défaire de ses idées qui le ramenaient sans cesse à son éternel traumatisme. Ses pensées furent cependant coupés lorsque le son d'un hurlement de la vigie vint à son oreille :
"Capitaine ! Caraque en vue à tribord toute ! Il arbore les drapeaux d'Oaxaca et vient vers notre direction !"

Garriar hurla à son tour au reste de l'équipage :
"Comment ça, ils viennent vers nous ? Massacrer sur la terre ferme ne leur suffit plus ?"

La seconde hurla à son tour :
"Leur navire est trop rapide, on ne pourra jamais les éviter ! Hissez le drapeau blanc, on n'a aucune chance contre eux !"

"Non ! Ignorez cet ordre ! Imbécile ! Vous tenez tant que ça à finir en esclave sexuel pour Garzok ? Aux armes ! Soyons prêt à les accueillir comme il se doit !"

*Et bien, voilà autre chose !*, se dit Mercurio.
La situation était des plus étranges pour lui, qui avait toujours vécu à Dahràm, en plein coeur de l'empire d'Oaxaca. Si la conquête de la région avait ébranlé l'autorité de la précédente, la vie dans cette ville n'avait finalement pas grandement changée. Toujours aussi puante, remplie de crève-la-faim, d'ordures, de pirates et de prostituées. Mis à part quelques exécutions sommaires pratiquées par les miliciens et une montée en hausse de la population de peaux-vertes dans la ville, il n'en ressentit personnellement aucun trouble particulier dans sa vie. Une simple passation de pouvoir aurait fait autant de vague dans son existence.

Se retrouver maintenant à devoir lutter contre ses êtres qu'il voyait défiler chaque jour et avec qui il avait même quelque fois rigoler dans les tavernes lui mettait une claque. Surtout que les caraques d'Oaxaca, ce n'était pas de la rigolade. Il en avait déjà vu à quai et elles supplantaient de loin tout les autres navires ; c'était trois cent hommes à leurs bords, dont la moitié de soldats prêts à combattre. Ce n'était donc pas une poignée de péripatéticiennes effarouchées qui allait les arrêter...

Des ordres partirent dans tout le navire pour que l'intégralité de l'équipage soit paré à le défendre bec et ongles, un coffre d'armes de taille et d'estoc fut déployé et tout l'équipage fut convié à y piocher de quoi se défendre. Mercurio se retrouva ainsi avec un sabre, arme qu'il n'avait jamais utilisé auparavant. Il espérait que ce serait simple.



L'Oeil du Tigre

_________________

Playlist de Mercurio

A propos, j'ai trouvé la morale de la fable que ton grand père racontait,
celle du petit oiseau que la vache avait recouvert de merde pour le tenir au chaud et que le coyote a sorti et croqué...
C'est la morale des temps nouveaux.
Ceux qui te mettent dans la merde, ne le font pas toujours pour ton malheur
et ceux qui t'en sortent ne le font pas toujours pour ton bonheur.
Mais surtout ceci, quand tu es dans la merde, tais-toi !

--------------------
Jack Beauregard (Henry Fonda), Mon nom est Personne, écrit par Sergio Leone, Fulvio Morsella et Ernesto Gastaldi


Dernière édition par Mercurio le Mer 11 Avr 2012 23:14, édité 2 fois.

Haut
 

 Sujet du message: Re: La Grande Prostituée (Heartless - v=x3)
MessagePosté: Jeu 5 Avr 2012 11:06 
Hors ligne
Avatar de l’utilisateur
 Profil

Inscription: Ven 4 Fév 2011 06:22
Messages: 56
Localisation: Alentours d'Exech
Nous n’avions pas fini de tout servir qu’une rumeur monta bientôt sur le navire. Peut-être Greya et moi étions en retard, et les estomacs grondants de ces dames se mettaient à rugir par leur bouche. Mais l’expression paniquée de la cuisinière m’enjoignit à chercher une autre piste. Ce n’était pas les bruits d’une mutinerie, mais bien d’un réel branle-bas de combat que j’entendais là sur le pont supérieur. Fronçant les sourcils, et poussée par ma curiosité, je posai une main sur l’épaule de Greya et affirmai :

« Reste là, je vais voir ce qui se passe. »

Et tout aussitôt, je m’exécutai. Je gravis les marches vers le pont du navire pour tomber dans un véritable chaos de panique. Les fières femmes d’équipage se groupaient, armées, autour du capitaine, qui tendait théâtralement son sabre d’abordage en direction d’un navire qui nous arrivait droit dessus. Mes yeux incandescents se posèrent sur le bateau en question. Son apparence était plus qu’inquiétante. Un navire de guerre plus que de pirate. Des piques de métal sombre en dépassaient, et il était à maints endroits bardé de plaques de fer protectrices. Un navire pour en couler d’autres, sans pitié. Une allure rapide qui dépassait largement la nôtre, et une promesse évidente d’un abordage sanglant dont peu réchapperaient. Sans doute.

Cela ne pouvait arriver. Confiante, je m’avançai vers le bastingage tribord, là où bientôt, les hordes d’ennemis allaient affluer si je n’intervenais pas. J’avais déjà évité une attaque sur la Grande Prostituée la veille, et je pouvais recommencer. Je savais que j’en étais capable. Je levai la main en direction de la voilure des assaillants, surplombée d’un inquiétant étendard et je fis affluer en elle la magie qui était mienne. Le feu naissait, se regroupait au creux de ma main pour former une boule compacte, encore retenue, dont la fureur éclaterait une fois lancée. Et je ne tardai pas à le faire. Je propulsai mon sortilège vers la plus grande des voiles d’en face. Comme la veille, le feu atteignit son but, et je me tournai, l’air victorieux, vers l’équipage. Mais aucun ne semblait partager la subite satisfaction qui s’emparait de moi. Si les regards m’avaient un instant frôlé, ils étaient rapidement repartis vers l’ennemi. Si les mains s’étaient relâchées sur la garde des armes, voilà qu’elles resserraient de plus belle leur emprise.

Je me tournai à nouveau vers l’ennemi, et dus rendre compte par moi-même de l’échec de ma tentative. Le feu qui était né sur la voile était déjà éteint. Il ne restait plus la trace que de l’impact, formant un petit trou noirâtre presque dérisoire face à la taille du tissu. L’effet de mon sort avait été balayé par une autre magie, antagoniste à la mienne, à n’en pas douter. Car l’eau éteint le feu, et la voile fut arrosée d’un jet en provenance du pont. Un aquamancien veillait au grain.

Je pestai de leur insolente chance tout en serrant les poings. Ma vaillance faiblissait, car je savais que nulle échappatoire n’était plus possible : nous devrions nous battre. Je reculai lentement vers les autres, qui se positionnaient pour accueillir l’assaillant. Un combat auquel je ne pourrais échapper, cette fois. Mon premier, sans doute, moi qui n’y avais jamais pris part. Certaines durent voir mon trouble, puisque très vite, la petite rouquine qui dormait sur le hamac voisin du mien s’approcha de moi et me cala entre les main un vieux sabre courbe à la lame peu entretenue.


« Tiens, prends-ça et bats-toi ! »

J’avisai l’arme du regard, sans savoir si je devais remercier ou maudire la plus jeune des membres de l’équipage. Je me sentis gauche directement, ne sachant même pas comment empoigner la chose. C’était plus lourd que ce à quoi je m’attendais, et j’imaginais assez mal effectuer de rapides rotations avec. Pourtant, je n’avais plus le choix…

Car ils arrivaient.

_________________
Alessia, mage flamboyante


Haut
 

 Sujet du message: Re: La Grande Prostituée (Heartless - v=x3)
MessagePosté: Mar 10 Avr 2012 20:58 
Hors ligne
Avatar de l’utilisateur
 Profil

Inscription: Lun 12 Oct 2009 22:23
Messages: 8551
Localisation: Le Hollan... La Rascasse Volante !
Les Deux Angoisses



L’Oeil du Tigre




Alors que l'équipage était en plein branle-bas de combat et que des ordres filaient de partout, Mercurio se retrouva bête. Il ne savait simplement pas quoi faire et restait figé comme un idiot en considérant le navire de la reine noire qui arrivait vers eux.

Lui et une partie de l'équipage ayant vu la scène eurent un soudain regain d'espoir en voyant Alessia jeter une boule de feu sur la voile ennemie ; peut-être était-ce là une occasion d'échapper à un destin tragique et il se dit un instant que plus jamais il ne l'importunerait si cela réussissait. Mais ce ne fut pas le cas. A peine le projectile incendiaire arriva-t-il au but qu'un mage d'eau l'éteignit d'un petit jet. Les dégâts provoqués se limitaient à la trace de l'envergure de la boule sur la toile.

Le spectacle de cette bribe d'espoir s'éteignant aussi vite qu'elle naquit était pathétique. Ils étaient tous fichus, c'était clair pour Mercurio. Comment une victoire pouvait-elle être envisageable ?

Et il tenait entre ses mains ce sabre sans savoir quoi en faire, le tenant uniquement en se référant à l'équipage. Aux moins, si celles-ci ne semblaient pas particulièrement rassurées non plus, il paraissait clair que ce n'était pas la première fois qu'elle prenait les armes et savaient entièrement ce qu'elles faisaient.

Le sombre navire de guerre s'approchait et l'inévitable combat qu'il engendrerait était cause d'une angoisse toujours plus profonde. Mercurio avait beau être un armoire à glace, les rôles qu'il a pu avoir en tant que videur ou vigile avaient toujours été pour une présence intimidante et bien qu'il eût déjà bastonné sans remords quelques pékins imbibés ou autres parasites, la seule fois où il essaya de poignarder un quidam pour lui faire les poches se solda par sa face contre les dalles humides de Dahràm ; et il avait eu de la chance qu'il décide d'en rester là. Espérer triompher contre un seul soldat garzok solidement entraînés à la guerre était vain, alors à une armée...

Les peaux-vertes étaient proches maintenant. On pouvait les voir s'agiter sur leur pont. Zewen seul savait ce qu'ils attendaient d'un petit navire comme celui de la Grande Prostituée. Les hommes d'Oaxaca n'étaient certes pas reconnu pour leur tendresse et ne se contenteraient certainement pas de piller le bateau mais aussi se ferait-il une joie de l'envoyer sombrer dans les abysses après avoir massacré tout le monde sans faire de détail. Et encore, il se disait avoir de la chance s'il mourrait vite ; les femmes qui composaient l'équipage risquaient d'avoir un destin plus tragique encore...

Le bateau, s'approchant dangereusement en posture d'abordage, dépassait de plusieurs mètres de hauteur le bateau de Garriar. On pouvait apercevoir s'entasser sur leur bastingage une majorité de gobelins et d'orques, mais aussi quelques têtes humaines toutes aussi inamicales. Ayant fini par voir la féminité de l'équipage, ils furent tous envahis de comportements simiesques, hurlant des insanités et des menaces lubriques qui en disait long sur leurs intentions ; mimant l'acte sexuel et se vantant sur leurs attributs masculins, ils étaient animés d'une excitation perverse et bestiale, une fébrilité de pulsions obscènes et hostiles.

Ils collèrent leur navire à notre bastingage dont le contact fit un fracas qui manqua de faire perdre l'équilibre à l'ensemble de l'équipage. Le postérieur de Mercurio rencontra le pont et il fit ainsi tomber son sabre, qu'il s'empressa de ramasser anxieusement. L'Humoran était envahi par la peur. Il se voyait déjà mort, se torturent intérieurement en se haïssant pour son départ précipité de Dahràm et la situation dans laquelle il s'était mise. Au fond, il se fichait totalement de l'avenir de ce bateau et de son équipage et c'était certainement ce qui l’écœurait le plus. Il ne tenait à rien de tout cela. Ce n'était pas son combat, ce n'était pas son problème. Dans d'autres circonstances, sur la terre ferme, il aurait simplement lâchement fui. Mais ici, dans le grand large, il était piégé, fait comme un rat, oppressé de n'avoir aucune autre alternative que la mort. Il se sentait déjà totalement fichu, ne trouvant aucune utilité à une quelconque résistance et espérant juste une mort rapide. C'était un moment proprement horrible où il se sentait presque perdre la raison et où, tout gaillard qu'il était, ne s'était résolu qu'à l'envie que de s'effondrer en pleurant sur le sol.

Voyant Garriar qui hurlait des ordres comme un beau diable, le vieillard gardait une attitude presque victorieuse et semblait avoir soudainement rajeuni jusqu'à une époque où ceci était son quotidien. Le capitaine était méconnaissable, empli d'une fougue juvénile et pas le moins du monde perturbé par l'inégalité des forces de cette bataille imminente.

C'était là le coup de fouet qui lui fit reprendre courage. Il constata alors ses dernières pensées, se rappelant de son dégoût pour les pleutres qui demandaient la pitié de leurs adversaires triomphants et se mit à considérer avec mépris ces adversaires. Laisserait-il vraiment sa tête sur un plateau à ces chiens-chiens d'Oaxaca ? Passerait-il vraiment ses derniers instants à se comporter comme une jeune pucelle ?

Transformant son désespoir en colère, Mercurio récupéra la niaque qui lui avait fait défaut. Peu importe s'il n'y connaissait rien en maniement des armes, peu importe s'il devait mourir ; il allait se battre vaillamment et c'était tout ce qui comptait. Il retrouvait là le sang de ces farouches aïeux, son agressivité woranne se lisant dans ses yeux déterminés, dans l'hérissement de sa fourrure, dans sa posture voûtée, sauvage et menaçante, dans le retroussement de ses babines qui mettaient en valeur ses crocs perçants, dans la rétractation de ces griffes naturellement meurtrières, faites pour le combat. Toutes ses craintes et hésitations avaient subitement disparu pour un instinct sauvage dont il ne s'était jamais autant laissé envahir. C'était ce qu'il avait toujours été au fond de lui. Une bête sauvage, un prédateur. Et ils étaient les proies. Il se sentait le besoin de courir, de leur déchirer la jugulaire, de marquer sa domination.

Le pont de leurs assaillants était plus haut de plusieurs mètres et ils durent déployer une dizaine de cordes pour pouvoir passer d'un pont à l'autre et descendre sans encombre. Des sektegs ouvraient le cortège et se suivant de près. Les premiers furent rapidement éliminés par l'équipage, mais leur avancée était rapide. Il ne leur fallut pas longtemps avant qu'ils mettent le premier pied sur le pont et rentre dans la lutte.

Mercurio eût un rugissement féroce et, l'esprit vidé de toutes réflexions, rentra dans la bataille.



Le Goût du Sang [:attention:]

_________________

Playlist de Mercurio

A propos, j'ai trouvé la morale de la fable que ton grand père racontait,
celle du petit oiseau que la vache avait recouvert de merde pour le tenir au chaud et que le coyote a sorti et croqué...
C'est la morale des temps nouveaux.
Ceux qui te mettent dans la merde, ne le font pas toujours pour ton malheur
et ceux qui t'en sortent ne le font pas toujours pour ton bonheur.
Mais surtout ceci, quand tu es dans la merde, tais-toi !

--------------------
Jack Beauregard (Henry Fonda), Mon nom est Personne, écrit par Sergio Leone, Fulvio Morsella et Ernesto Gastaldi


Dernière édition par Mercurio le Jeu 12 Avr 2012 23:04, édité 2 fois.

Haut
 

 Sujet du message: Re: La Grande Prostituée (Heartless - v=x3)
MessagePosté: Jeu 12 Avr 2012 12:07 
Hors ligne
Avatar de l’utilisateur
 Profil

Inscription: Ven 4 Fév 2011 06:22
Messages: 56
Localisation: Alentours d'Exech
Le choc fut terrible, et augure d’un combat sans merci, durant lequel les atrocités les plus immondes qu’il m’ait été donné de voir surgiraient de nulle part. Le choc initiateur d’un revirement, d’une bataille sanglante. Mais ce ne fut peut-être pas le pire. Car avant le choc, il y eut l’attente. Cette attente angoissante d’un destin terrible auquel on ne peut échapper.

Car rien ne pourrait cette fois s’interposer entre la course de nos ennemis et la frêle stature du navire de la Confrérie d’Outremer. Ma tentative avait été vaine, quoique pleine d’espoir. Et elle s’était effondrée avec toutes ces espérances. Le ressac des vagues n’était presque plus qu’un lointain souvenir, un autre monde appartenant au passé. Rien n’existait plus que cette sombre masse qui s’avançait vers nous, et sur laquelle mes iris rouges étaient indéniablement fixés. Je pouvais maintenant distinguer les silhouettes appuyées au bastingage, bardées de fer et munies d’armes en tous genres, plus effrayantes les unes que les autres. Et très vite, leurs visages m’apparurent dans toute leur horreur. Des Orques, des Gobelins, des Hommes sombres de cœur, tels étaient nos ennemis. Au nom d’Oaxaca, ils allaient nous détruire, nous tuer, et rougir la mer de notre sang.

Autour de moi, l’équipage tenait bon, et la haine que leur inspirait ces ennemis ne faisait visiblement que renforcer leur envie d’en découdre, de se battre vaillamment, quel que fut l’essor de la bataille à venir. Je n’entendais plus les ordres du capitaine, qui braillait, sabre au clair, des jurons et conseils belliqueux tant aux ennemis qu’à son propre équipage féminin. Seul homme à bord, avec l’humoran, il prenait une position de pouvoir totalement fantoche, lorsqu’on en connaissait les ombres. Mais là, maintenant, je me serais rattachée à chacune de ses paroles, si seulement j’avais pu me concentrer sur elles. Il aurait été un phare dans la tempête, si les rires et grognements de nos adversaires n’avaient pas chargé mon cœur d’un effroi indicible. Rien que de les voir nous lorgner de manière lubrique et hargneuse, je souffrais en avance. Mon estomac se serra, et mon cœur accéléra. Ma main lâcha le sabre qu’elle avait pourtant serré si fort, et je sentis une boule monter dans ma gorge.

Ces êtres n’étaient plus que des ombres, et je me sentais sombrer en elles avant même leur arrivée. Ma tête tournait, et la peur enserrait mon ventre. Une sensation des plus horribles qu’il m’ait été donné de vivre. J’en parvenais à regretter le trac de chaque entrée en scène, dans la Troupe Flamboyante. C’était alors un mélange de peur et d’excitation. Ici, seule la peur était présente, brute et intense, irrépressible. Des images de mon passé défilaient devant mon regard, ma vie. Et pourtant, malgré tout, je ne regrettais pas. Je ne pouvais regretter, car tout ça avait été un choix délibéré. J’étais responsable de cette situation. Responsable de ma mort. Et cette idée fixe me terrifia, m’hypnotisa. Immobile, les membres tremblants, rien ne pouvait détacher mon regard de ces ombres mouvantes et menaçantes. Le cauchemar de ma vie. Rien sauf…

Le choc.

Rude, il ramena la réalité à moi de manière si brutale que je fus expulsée à plat ventre sur le pont, alors que le bois craquait bruyamment. Les sons me revinrent, et les couleurs. Tout n’était que chaos autour de moi. De cris venant des deux équipages retentissaient, fureur farouche des femmes prêtes à tout pour défendre leur vie et leur honneur, et hurlements bestiaux des peaux-vertes qui se régalaient d’avance de leur future victoire, épanchée dans la chair chaude éclaboussée de sang. Je me redressai tout en reculant contre un mât. J’étais impuissante, et cette idée instaura une rage certaine en moi. La puissance, but de ma vie, voilà qu’elle me manquait plus que jamais. Je ne pus rien faire contre ces cordes qui furent lancées, ces grappins qui agrippèrent le navire, et ces ennemis qui s’en servirent pour bondir sur le pont.

Les plus petits, les Sektegs, ouvrirent la marche, en bondissant agilement vers nous. Et là, alors que je croyais venue l’heure de ma mort, je ne vis que celle de ces infâmes assaillants. Les guerrières farouches de l’équipage les avaient fauchés avant qu’ils ne posent même leur premier pied sur notre territoire de bois et de cordes. Et cet événement me redonna curieusement confiance. Nous pouvions nous battre. Peut-être pas vaincre, mais nous ne succomberions pas sans avoir assuré une fervente résistance. Le regard illuminé de cette rage nouvelle, je serrai les poings et alors que les premiers ennemis appontaient, j’envoyai une nouvelle boule flamboyante sur l’une des cordes qui maintenait le navire accroché aux leurs. Les trois ou quatre assaillants qui s’y trouvaient churent dans les flots marins, ou furent broyés entre les coques des deux navires, qui continuaient de s’entrechoquer perpétuellement.

Je ne sus si cette réussite était positive ou non. Si j’avais réussi à tuer plusieurs d’entre eux d’un simple sort, je n’en avais pas moins attiré l’attention sur moi. Et la colère grondait dans les yeux de ceux qui me tenaient rancœur de la mort de compagnons, et de cette marque noire sur leur voilure sombre. Un orque, au moins, se détacha de la mêlée pour se diriger vers moi. Puis un autre, et un troisième. Acculée contre mon mât, je ne savais que faire. Deux d’entre eux étaient armés de tranchoirs impressionnants, et leurs muscles imposants saillaient entre les parties de leurs armures de fer et de cuir. Le troisième était plus grand encore, et armé d’une lance à double lame. Une arme impressionnante, qui ne tarderait pas à se ficher dans mon ventre si je restais là à rien faire.

Mes fluides m’appelaient, chauffaient en moi, m’incitant à les utiliser sans retenue. Furieuse, et paniquée tout à la fois, je balançai une nouvelle boule de feu sur cet ennemi si impressionnant. Les flammes vinrent percuter son épaule, dont les chairs noircirent aussitôt. Il en fut à peine déstabilisé, et continua à avancer vers moi, prêt à m’embrocher. Instinctivement, je balançai un second jet flamboyant, qui vint cette fois heurter son visage hargneux. Les flammes lui masquèrent un instant la vue, et ses cheveux ramenés en un catogan noir prirent feu, au-dessus de la chair carbonisée de sa bouche, de son nez, de ses yeux en flamme. Il arrêta d’avancer, et cela suffit à la rouquine pour lui bondir dessus pour lui enfoncer habilement une lame courbe en travers de la gorge pour l’achever, ne se doutant même pas qu’elle venait de me sauver la vie.

Sans attendre, elle poursuivit sa route vers d’autres partie de cette immense combat, qui faisait rage sur la Grande Prostituée, sans ordre ni discipline. Loin des batailles rangées aux tactiques longuement étudiées. Ici, seule la force et la bestialité comptait. La rapidité, et la puissance des armes. Les miennes, hélas, étaient taries, désormais. Et les deux garzoks terribles approchaient, passant par-dessus le cadavre de leur compagnon. Je tentai de lancer d’autre sortilèges qui leur crameraient la face, mais rien ne voulut sortir de mes mains tendues. Un rire gras et inquiétant sortit de leur gueule aux dents aussi terribles que peu soignées. La bave coulaient au-delà de leurs lèvres épaisses, et je ne pouvais qu’assister, impuissante, à leur avancée. Je me couvrir la tête des mains, comme pour me protéger vainement des coups qui arriveraient sans aucun doute.

Mais aucun n’arriva. Aucune lame pour me trancher la tête, me réduire en tas de chair. Non, les deux monstres se contentèrent de m’attraper les poignets fermement pour me relever, et violemment me plaquer contre le bois rude du mât. Mes yeux s’ouvrirent sur leur visage lubrique, et nos regards se croisèrent. Ce n’étaient pas de leurs lames qu’ils voulaient me tuer. Plaquée là contre le mat, ç’allaient être de leurs assauts répétés et brutaux en moi que j’allais périr, déshonorée et en souffrance.


« Non ! »

Je remuai pour échapper à mon destin, je tapai des pieds pour échapper à leur puissance, mais ils étaient trop forts, et mes coups n’étaient que des pichenettes qui entretenaient leur désir bestial. Une main puissante m’agrippa la cuisse fermement, douloureusement, et je voulus hurler. Ma voix semblait s’être dérobée, comme dans un cauchemar. Et mon cri fut bien moins puissant que je ne l’avais voulu. Totalement maîtrisée par ces bêtes, je ne pouvais plus bouger. Impuissante, je ne pouvais compter que sur ceux qui m’entouraient pour me sauver. Mais ceux-là étaient bien occupés. Occupés à se battre, à tuer ou à mourir.

J’hurlai à nouveau, totalement silencieusement, cette fois. Et les larmes coulèrent sur mes joues…

_________________
Alessia, mage flamboyante


Haut
 

 Sujet du message: Re: La Grande Prostituée (Heartless - v=x3)
MessagePosté: Jeu 12 Avr 2012 23:02 
Hors ligne
Avatar de l’utilisateur
 Profil

Inscription: Lun 12 Oct 2009 22:23
Messages: 8551
Localisation: Le Hollan... La Rascasse Volante !
L'Oeil du Tigre



Le Goût du Sang

[:attention:] RP contenant violence et sexe ! [:attention:]




Alors qu'Alessia et la plupart des femmes de l'équipage s'attelaient à briser les liens dont se servaient les serviteurs d'Oaxaca pour joindre la Grande Prostituée, Mercurio, qui avait perdu toute sorte de réflexion, s'était laissé complètement envahir par ses instincts bestiaux.

Il se précipita dans l'action comme un brok'nud sur un ratissa recouvert de confiture. Un gobelin malingre à l'oeil torve qui se faisait une fierté d'avoir mis son premier pied dans ce qu'il qualifiait sans vergogne un "étalage à viande" à ses collègues et qui exhibait à chacune de ses mains un kriss ondulé, fit les frais de sa présence ici lorsqu'il se rendit compte de l'arrivée de l'Humoran déchaîné qui fonçait sur lui. Il était là au mauvais endroit, au mauvais moment, en pleine ligne de mire de l'homme-tigre. Il n'eût le temps de la moindre sorte de réflexion que cette peau-verte se retrouva avec un coup de sabre tranchant dans le travers de la mâchoire qui l'expédia directement à Phaïtos dans une sombre giclée de sang qui alla éclabousser le sol et quelques uns de ces compagnons d'armes.

La scène s'était passé à une vitesse folle et Mercurio, tout à sa fureur, ne s'était pas rendu compte qu'il s'était simplement enfoncé en plein dans les rangs ennemis. Il s'était lui-même coincé en plein dans la gueule du loup, et déjà d'autres se rapprochaient, prêts à lui faire subir un sort au moins tout aussi sanglant.

Il se rabattit le dos contre le bastingage, jouant de sa lame en ratissant la zone autour de lui en de larges demi-cercles qui ne devaient laisser passer aucun de ces possibles envahisseurs. Et il rugissait sauvagement, son poil toujours hérissé qui semblait le rendre plus grand, plus imposant, plus intimidant et plus redoutable. Le premier qui oserait pénétrer sur ce territoire serait purement et simplement un être aussi mort que le sekteg. Ces assaillants semblaient prendre tout cela pour un jeu particulièrement malsain. Ils ne s’émouvaient en rien de la mort violente de leur défunt camarade gobelin et ils s'attelaient maintenant à provoquer l'Humoran avec des injures racistes, en remettant son courage et sa virilité en compte, crachant dans sa direction, lui faisant toute sorte de grimaces grotesques et mimant ses rugissements qui, dans une autre espèce de situation, auraient pu sembler seulement ridicules. Mais ils en restaient là. Ils savaient qu'ils ne pouvaient pas avancer ; la seule manière d'en finir avec lui était de le pousser à l'attaque. Mercurio resta ainsi en position défensive durant des secondes qui parurent des heures.

Durant cet insoutenable instant de flottement, il considéra le chaos qui s'était instauré sur le navire de la Confrérie d'Outremer en regardant par-derrière les sbires d'Oaxaca. C'était simplement l'horreur, et on pouvait presque ressentir le spectre de Thimoros s'emparer du lieu avec ses fidèles. Des cris de détresses féminins se faisaient entendre de par le bateau parmi les bruits de lutte et le tintement des lames qui s'entrechoquaient. Plusieurs corps de gobelins étaient répandus dans des positions absurdes, certains séparés de quelques uns de leurs membres. Un cadavre d'orque, cramé, produisait encore une fumée noire et une odeur nauséabonde à en soulever le coeur -ce devait être l'oeuvre d'Alessia, à n'en pas douter-. Deux corps de filles de l'équipage jonchaient sur le sol, pataugeant dans leur propre sang ; un sekteg au joyeux rire lubrique et aux tics trahissant son excitation traînait l'un des deux cadavres encore chaud et le déshabillait en se défroquant, la verge dure déjà prête à souiller la morte. D'un autre côté, un orque, un humain au visage défiguré par les cicatrices et deux gobelins avaient réussi à plaquer une des guerrières de la Grande Prostituée contre le pont et étaient déjà en train de la déshonorer, l'immobilisant pour lui empêcher toute lutte ; ses cris d'horreurs et de désespoirs mêlés aux larmes déchiraient le coeur. Elle hurlait qu'ils la lâchent à tue-tête, mais c'était peine perdu. Continuant son rapide panorama, il vit Alessia, submergée par deux solides orques, qui étaient sur le point de subir le même indigne sort. Ces créatures étaient des abominations, des êtres abjects, monstrueux et exécrables qui se livraient aux pires atrocités sans la moindre forme de pudeur. Aucun mot n'était suffisant pour décrire la répugnance, la haine et le fiel qui envahissait Mercurio devant cette scène digne des pires enfers, qui dépassait de loin les plus horribles des cauchemars qu'il put faire.

Envahi par l'hostilité la plus profonde qu'il n'eût jamais vécu, il se laissa aller à son agressivité la plus crue contre le plus proche des garzoks qui l'encerclait. Celui-ci était un orque à la peau sombre et à la face inondée de perçages et autres pendants. Il était armé d'un yatagan en sa main droite. Mercurio prit son sabre de fortune à deux mains, déterminé à le trancher de toute sa hauteur. Mais il fut sans doute trop lent et trop malhabile, car le garzok esquiva le coup de sabre et en profita pour lui trancher la cuisse gauche. Rongé par la douleur qui lui fit lâcher un nouveau rugissement, il eût le malheureux réflexe de lâcher son arme, mais sa rage n'en était pas moins grande et aussitôt il lui molesta son visage ingrat d'un puissant grand coup de griffe de sa patte droite, qui arracha une demi-douzaine des boucles qui ornaient sa face immonde avec une partie sa peau qui s'écorcha, retombant dans le sol en clinquant. Considérant la griffure qui l'amochait du lobe de l'oreille jusqu'aux lèvres, l'orque, l'air plus que jamais furieux, saisit l'Humoran au cou avant de le soulever jusqu'à ce que ses pattes antérieures peinent à effleurer la surface du pont.
Par pur réflexe, Mercurio saisit le bras strangulateur pour s'en défaire, griffant l'avant-bras de son agresseur jusqu'au sang, mais celui-ci ne semblait en avoir cure. Il commençait à suffoquer, alors que l'orque qui s'était fait étrangleur se faisait un malin plaisir à le regarder dans les yeux en clamant que cette mort était la rançon de son audace, les rires et les commentaires de ces compagnons appuyant ce fait.

Étouffant, il sentait les forces commencer à lui faire défaut. Sa langue pendante, ses sens commençaient à s'engourdir et ses yeux à révulser.
Il se sentait partir et voyait presque déjà Phaïtos arriver vers lui pour récolter les graines que son divin frère avait si plaisamment semés. Sa vision s'effaça pour un blanc des plus clairs et il revoyait les grands instants de sa vie défiler devant lui.

Puis, comme sortie de nulle part, il entendit une musique d'une beauté infinie. C'était la mélodie parfaite, un chant féminin divin dont il devait se rapprocher. Était-ce l’œuvre de Gaia ?



Le Temps des Blessures

_________________

Playlist de Mercurio

A propos, j'ai trouvé la morale de la fable que ton grand père racontait,
celle du petit oiseau que la vache avait recouvert de merde pour le tenir au chaud et que le coyote a sorti et croqué...
C'est la morale des temps nouveaux.
Ceux qui te mettent dans la merde, ne le font pas toujours pour ton malheur
et ceux qui t'en sortent ne le font pas toujours pour ton bonheur.
Mais surtout ceci, quand tu es dans la merde, tais-toi !

--------------------
Jack Beauregard (Henry Fonda), Mon nom est Personne, écrit par Sergio Leone, Fulvio Morsella et Ernesto Gastaldi


Dernière édition par Mercurio le Jeu 26 Avr 2012 16:34, édité 5 fois.

Haut
 

 Sujet du message: Re: La Grande Prostituée (Heartless - v=x3)
MessagePosté: Sam 14 Avr 2012 11:06 
Hors ligne
Avatar de l’utilisateur
 Profil

Inscription: Ven 4 Fév 2011 06:22
Messages: 56
Localisation: Alentours d'Exech
Tout était fini pour moi. Souillée j’allais être, et souillée je resterais à jamais. Je ne pourrais jamais, après avoir été ainsi déshonorée, poursuivre ma quête d’aventures et de puissance. Et les mains s’accrochaient, et les ceintures s’ouvraient avec brusquerie, alors que l’orque de droite tentait de m’arracher les vêtements, tout en me maintenant fermement plaquée contre le mât, qui s’imprimait dans mon dos, alors qu’un cordage me labourait les omoplates. Je pleurais, et n’en pouvais plus de tenter de crier en vain. Car personne ne venait, personne n’en avait l’occasion. Autour, des scènes de meurtre, de viol, de combat acharné et inégal. L’équipage de la Grande Prostituée se faisait réduire en charpie, et son sang rougissait le pont du navire. Certes, nombres d’ennemis étaient eux-aussi tombés, mais il en restait tant…

Mais il arriva une chose à laquelle nul ne s’attendait, alliés comme ennemis. Sans que rien ne l’annonce, un doux chant féminin me parvint aux oreilles. Un instant, je crus avoir été tuée, et que la manifestation de cette mort entrait dans cette musique enchanteresse. Mais bien vite, je compris qu’il n’en était rien. Les brutes qui me maintenaient plaquée contre le bois du mât me relâchèrent brusquement, et je tombai sur le pont, brisée. Ils n’avaient pas été jusqu’au bout, ils ne m’avaient pas souillée, mais je n’en étais pas moins brisée. Je m’affalai sur moi-même sans comprendre ce subit revirement de situation. Le chant, la musique étaient omniprésents, denses et beaux. Je ne pouvais concevoir que de telles brutes soient sensibles à tant de finesse. Les yeux rougis par les larmes, les membres tremblants et faibles, je relevai la tête vers le pont. Et ce que je vis, je ne pus le croire. Les assaillants, tous autant qu’ils étaient, se jetaient par-dessus bord. Ils plongeaient dans les terribles flots de l’océan, où ils mourraient sans doute.

La perplexité m’envahissait, mais je ne savais comment la vivre, tant tout ça était inattendu, impossible. Ce fut un cri d’une matelote qui me remit dans la réalité du monde, et de ce sauvetage inattendu et pour le moins efficace…

« Des sirènes, ce sont des sirènes ! »

Les sirènes… J’avais déjà entendu parler de ces légendaires créatures, mi femmes, mi poissons, qui séduisaient les marins pour les attirer dans l’océan afin de les dévorer cruellement. Je n’avais jamais accordé de crédit à ces histoires de vieux loups de mer, et aujourd’hui, je devais me rendre à l’évidence : je m’étais trompée. Ces créatures des mers existaient bel et bien. Et elles avaient, involontairement sans doute, sauvé une bonne partie de l’équipage de la Grande Prostituée. Certainement attirées par l’odeur du sang qui s’écoulait du bateau, elles étaient arrivées en nombre, et avaient par leurs chants enivrés les mâles combattants. Nul n’avait pu y résister. Je notai que les femmes ne semblaient pas affectées par cette douce musique.

Je me relevai un peu plus, adossée au mât qui m’entravait encore il y a peu, et aperçus Garriar qui tentait de se jeter à l’eau, lui-aussi. Trois marinières le maintenaient en vie en s’acharnant à retenir son létal plongeon. Je ne voyais pas le second mâle du vaisseau, Mercurio. Il y avait tant de cadavres, de blessés, de mourants sur le pont qu’il était impossible de réellement discerner son pelage tigré dans la masse rougeâtre du bain de sang. Le combat était terminé. Et contre toute attente, nous en sortions vainqueurs. Pourtant, je ne ressentais nulle joie. Nul rire ne voulut sortir de ma bouche. Je me sentais juste vide, et creuse. Si je m’en sortais, c’était uniquement par chance. Une chance que nombre de mes consœurs n’avaient pas eues. Certaines étaient mortes, d’autres estropiées. D’autres encore devraient vivre avec le poids d’un viol, l’horreur de l’impuissance, et le dégout du sexe. Non, il n’y avait nulle joie à retirer de cette victoire. Juste le soulagement de n’y être pas passée.

Hagarde, je restai immobile, assise sur les planches salies du pont. Autour, l’équipage s’activait. Les corps des ennemis défunts roulaient dans l’océan, et ceux des alliées se regroupaient pour leur offrir un départ digne vers les Enfers de Phaïtos. Les vaillantes aidaient les blessées, et reprenaient la manœuvre du bateau. Mais je n’avais pas la force, physique ou mentale, de les aider.

_________________
Alessia, mage flamboyante


Haut
 

 Sujet du message: Re: La Grande Prostituée (Heartless - v=x3)
MessagePosté: Mer 18 Avr 2012 00:22 
Hors ligne
Avatar de l’utilisateur
 Profil

Inscription: Lun 12 Oct 2009 22:23
Messages: 8551
Localisation: Le Hollan... La Rascasse Volante !
Le Goût du Sang



Le Temps des Blessures




L'obscurité.

Le silence.

L'obscurité.

Le silence.

L'obscurité.

Le sil... "Par Moura, tu vas te réveiller oui ?"

L'obscurité.

La douleur.

Après n'avoir perçu que tout ceci durant son moment d'inconscience, Mercurio finit par immerger à la force des claques que lui envoyait un membre d'équipage. Il ouvrit ainsi soudainement les yeux, ne manquant pas de se faire aussitôt aveugler par le soleil. Sa vision n'eût pas le temps de se remettre qu'il reconnût la voix qui lui parlait. C'était la voix de la seconde du navire ; mais son ton était très inquiet.
"Oui ! Réveille-toi, putier de toi !", dit-elle en se mettant à le secouer.

Mercurio gigota, avant d'avoir le réflexe de se dégager de celle-ci.
"Que... Qu'est-ce qu'il y a ?"

Alors qu'il reprenait ses esprits, l'Humoran vit que plusieurs des membres de l'équipage étaient autour de lui. Il n'en était qu'encore plus perdu.
"Il y a que j'ai une fille en train de caner et que t'es le seul sur ce foutu rafiot à pouvoir les soigner, voilà ce qu'il y a ! Allez, debout !", dit-elle en le relevant avec une autre matelote.

Il regarda autour de lui, ne comprenant pas vraiment la situation. Le pont, encore souillé de sang, était en train d'être nettoyé mais il ne voyait ni corps ni armes. Il se retourna et vit le navire d'Oaxaca s'éloigner à l'horizon.

Ils avaient vaincus ? Son dernier souvenir n'était pourtant pas des plus réjouissants...

"Qu'est-ce qu'il s'est passé ?"

Ce fut l'autre équipière qui lui répondit :
"Moura nous a sauvé en nous envoyant ses sirènes."

Cette phrase ne faisait que lui soulever d'autres questions, mais ce n'était vraisemblablement pas le moment, vu l'empressement qu'elles avaient à le conduire à l'arrière du navire. Il suivit rapidement, et la vit.

Il ne la reconnût pas tout de suite, cette fille dénudée, adossée au bastingage. Sa peau était pâle et des ecchymoses partout sur son corps indiquait qu'elle avait été rouée de coups, mais le plus grave était son avant-bras gauche, absent. Mercurio percuta lorsque son regard se dirigea vers ses yeux verts. C'était la femme des dunes qui lui avait souri un peu plus tôt dans la journée. Une de ces camarades lui levait le bras avec une mine angoissée. Un garrot lui avait déjà été mis avec une fine corde.

Il s'agenouilla aussitôt à côté d'elle et considéra sa blessure. Elle avait été coupé net juste après le coude. Ce qui lui paraissait curieux, c'est qu'elle était toujours consciente et qu'elle semblait ne pas ressentir la douleur. Elle avait les yeux fixes, regardant dans le vide devant elle. Mais chaque chose en son temps. L'urgence ici, c'était avant tout de faire arrêter ce saignement. Pâle comme elle était, si elle continuer à se vider de son sang, s'en serait bientôt fini pour sa vie.

Mercurio se retourna et hurla aux membres de l'équipage proche :
"Son bras, ramenez-moi son bras !"

Les survivantes se regardaient entre elles, mais aucune ne semblait savoir où il pouvait bien se trouver. L'humoran analysa la chaleur des extrémités de sa patiente. Elle était très froide et cyanosé. Énormément de sang lui manquait. Il était peut-être déjà trop tard.

Il avait beau être guérisseur, rien n'était simple avec le corps humain. Il était bien incapable de faire repousser un membre de cette taille ; la reconstruction des nerfs et des os n'avait jamais été son fort... Ç'aurait été tellement plus simple s'il y avait ce bras...

Mais plus le temps, et Mercurio s'attela à son soin. Après tout, le mécanisme de la fermeture d'une amputation, il le connaissait par coeur et l'avait pratiqué un bon nombre de fois. Là, c'était juste le contexte qui changeait. L’accélération de la cicatrisation prit quelques minutes et un peu de son énergie, mais rien d'insurmontable. Un tel prodige ne se fait normalement pas sans douleur ; les précédents patients sur lequel il le pratiqua se plaignaient d'avoir d'étranges sensations, comme des éclairs qui leurs traversaient le membre. En réalité, c'était la reconstruction des nerfs qui envoyaient de mauvaises informations au cerveau... Mais celle-ci ne bronchait toujours pas. C'était louche.

L'équipage autour le regardait faire d'un air circonspect ; cela lui mettait une pression supplémentaire. Garriar arriva peu après, demandant aux filles ce qu'il se passait mais aucune d'elle ne donnait de réponses valables.

Lorsque le moignon fut achevé, Mercurio continua sa tâche en silence. Alors qu'il voulait récupérer son stéthoscope pour s'assurer de son rythme, l'une d'elle l'interpella, vraisemblablement énervée :
"Hey, mais qu'est-ce que vous faites, vous êtes guérisseur, alors rendez-lui son bras !"

Cette réaction l'énerva. Encore une qui croyait savoir de quoi elle parlait :
"Écoutez, si vous m'aviez donné son bras tranché, j'aurais pu le recoller illico et sans problème. Mais le fait est que c'est pas le cas. Elle manque de sang et si je..."

Il fut coupé par sa patiente qui s'effondra comme un poids mort sur lui. L'effroi se ré-empara de la scène comme un claque dans le visage de tout ses spectateurs.

Il la rattrapa et l'allongea au sol. Il chercha à avoir quelques réactions en la stimulant, mais rien. Il voulut ensuite prendre son pouls mais le bruit environnant du monde autour de lui l'empêcher de se concentrer. Il improvisa une solution pour pouvoir travailler en paix :
"Aidez-moi, on va l'allonger dans la cabine !"

Une équipière la prit par les jambes alors qu'il la soulevait par les aisselles. Ils se ruèrent vers la cabine dans laquelle Mercurio avait dormi précédemment et l'y allongèrent.

Une fois à l'intérieur, il ne fit pas de manière. Il demanda à ce que tout le monde sorte et qu'il informerait de son état. Malgré les vives discussions qui se faisaient entendre par-delà la porte fermée, Mercurio fut soulagé. Il travaillait mieux dans le calme.

Il constata un pouls bas et une anémie sévère. Le coeur, à force d'avoir trop pompé pour chercher du sang, c'était fatigué. Ce n'était pas bon. Pas bon du tout. Il se demanda un instant s'il ne ferait pas mieux de soulager le coeur ; mais celui-ci se serait remis à pomper en vain et arriverait au même résultat. L'importance de la situation était l'oxygénation des organes, mais sans sang... Il se résolut à aller stimuler les glandes de la moelle osseuse responsables de la création d'hémoglobine. Une accélération de la production pourrait être salvatrice. Il s'étonnait lui-même de se rappeler de la place de ses glandes. L'opération prit une dizaine de minutes, car si la formation pouvait être accélérer, il ne pouvait en même temps doper l'arriver des éléments nécessaires à leurs conceptions et le rythme cardiaque bas n'y aidait pas mais au moins, il y en avait toujours un. Il s'arrêta en voyant le rythme reprendre au fur à mesure un rythme normal. Il avait réussi.

"T'es sauvée ma belle, t'es sauvée...", dit-elle à l'inconsciente qui semblait presque apaisée.

Il eût une certaine tristesse en la voyant ainsi, maintenant qu'il était tranquillisé. Nue, pâle, tâchée d'ecchymoses et inconsciente. Il la revoyait en train de lui sourire ce matin ; et en si peu de temps, sa vie avait basculé. Il soigna rapidement ses plus grosses ecchymoses et la couvrit d'un drap avant d'aller vers la porte pour aller donner des nouvelles.

Cet évènement l'avait retourné et fatigué.

Lorsqu'il sortit, tous le regardèrent d'un air inquiet. Mercurio sortit le plus calmement possible :
"Sa blessure est soignée, elle ne perds plus de sang et son rythme cardiaque s'est stabilisé. Elle va certainement rester inconsciente encore un bon moment, mais elle devrait s'en sortir. Que quelqu'un veille sur elle et m'appelle s'il se passe quoi que ce soit. Elle aura certainement envie d'un bon gros repas chaud à son réveil..."

Il s'éloigna, demandant à la seconde au passage :
"Est-ce que quelqu'un d'autre à besoin de soin ?"



Les Cicatrices

_________________

Playlist de Mercurio

A propos, j'ai trouvé la morale de la fable que ton grand père racontait,
celle du petit oiseau que la vache avait recouvert de merde pour le tenir au chaud et que le coyote a sorti et croqué...
C'est la morale des temps nouveaux.
Ceux qui te mettent dans la merde, ne le font pas toujours pour ton malheur
et ceux qui t'en sortent ne le font pas toujours pour ton bonheur.
Mais surtout ceci, quand tu es dans la merde, tais-toi !

--------------------
Jack Beauregard (Henry Fonda), Mon nom est Personne, écrit par Sergio Leone, Fulvio Morsella et Ernesto Gastaldi


Dernière édition par Mercurio le Jeu 7 Juin 2012 21:06, édité 1 fois.

Haut
 

 Sujet du message: Re: La Grande Prostituée (Heartless - v=x3)
MessagePosté: Sam 28 Avr 2012 10:27 
Hors ligne
Avatar de l’utilisateur
 Profil

Inscription: Ven 4 Fév 2011 06:22
Messages: 56
Localisation: Alentours d'Exech
Prostrée contre mon mât, j’assistai, impuissante, à la débâcle sur le pont. Le combat des armes était terminé, mais celui pour la survie ne faisait que commencer, pour certain. Les blessures et plaies étaient nombreuses à soigner, et les vies coulaient hors des corps meurtris. Je ne m’en sortais pas si mal, au final. Mais je n’avais pas l’endurance d’une guerrière, ou d’une femme de la mer. Jusque-là, je n’avais été qu’une artiste-mage vivant sans grand risque hormis celui d’un accident. J’étais bien incapable de faire quoi que ce soit pour aider. Vide de fluide et d’énergie, je ne pouvais que regarder la scène.

Mercurio reparut dans mon champs de vision lorsqu’il hurla de lui amener un bras pour sauver la vie d’une membre de l’équipage. C’était son combat à lui, désormais. Le soigneur bien plus efficace après le combat que n’importe quel mage ou guerrier. Je l’observai prendre soin de la blessée, jusqu’à ce qu’il l’emmène dans une cabine à l’intérieur. Là, je me laissai mener par le roulis du navire, désormais bien plus paisible. Je ne sais combien je temps je passai là, assise à ne rien faire, mais lorsque je me levai, le soleil déclinait déjà dans le ciel. Je rejoignis la cabine commune de l’équipage pour m’allonger sur mon hamac. Je n’avais guère plus d’énergie que plus tôt dans la journée. Juste celle de m’être déplacée jusque-là.

Je m’endormis rapidement, mais d’un sommeil rempli de cauchemars horribles. Je n’avais de cesse de voir le regard terrible de cet orque posé sur moi, alors que ses mains puissantes me maintenaient à l’impuissance. J’entendais leurs grognements salaces, je ressentais encore leur poigne sur mon corps. Je revivais le combat sanglant au sein même de mon sommeil. Et il prenait des proportions parfois inquiétantes. Je me vis seule, m’acharnant contre des ombres invincibles, au cœur d’une mer de sang. Des femmes-poissons aux dents tranchantes tournaient autour de l’embarcation fluette où je me trouvais. Un ciel de feu éclairait la scène rougeoyante où perçaient mille cri de douleur à l’origine indéterminée.

Je m’éveillai en sursaut, pleine de sueurs froides. Tout était sombre autour de moi. La nuit était tombée, et le navire avait retrouvé son calme. Je n’avais cependant aucune envie de retourner sur le pont, scène d’une boucherie sans nom. Je refermai les yeux sans pour autant m’endormir, et laissai le voyage se poursuivre dans sa monotonie presque rassurante, désormais. Le large était moins dangereux que les abords des côtes, où pirates et navires de guerre voguaient pour défendre les côtes et attaquer les faibles.

_________________
Alessia, mage flamboyante


Haut
 

 Sujet du message: Re: La Grande Prostituée (Heartless - v=x3)
MessagePosté: Sam 5 Mai 2012 16:16 
Hors ligne
Avatar de l’utilisateur
 Profil

Inscription: Lun 12 Oct 2009 22:23
Messages: 8551
Localisation: Le Hollan... La Rascasse Volante !
Le Temps des Blessures



Les Cicatrices




Les hommes d'Oaxaca n'avaient pas fait dans le détail, et nombreuses étaient ceux qui portaient des stigmates de leur passage.

Mercurio dût ensuite enchaîner les soins les uns après les autres, dans la panique la plus complète. Sa magie n'était pas inépuisable et le fatiguait beaucoup, mais le plus éprouvant était de devoir sans cesse justifier ses faits et gestes devant des spectatrices, portant avec elles l'agressivité de l'inquiétude, qui étaient totalement ignares en la matière mais qui ne se privaient pas d'apporter reproches et conseils stériles.

Il dût encore s'occuper d'une fracture ouverte du tibia, de fractures multiples de côtes, dont une qui était prête à perforer le poumon au moindre mouvement.
Il puisait dans ces ressources pour les soigner.

Il y avait ensuite de nombreuses coupures et ecchymoses. Ne pouvant que se rendre à l'évidence de son état, il jugea celles-ci et prodigua les premiers soins sans faire trop usage de magie. Si certaines coupures méritaient d'être emballées pour éviter l'infection, aucune ne semblait avoir atteint de vaisseaux sanguins importants. De même, il considéra les ecchymoses pour voir s'il n'y avait pas anguille sous roche, mais les renvoya toute en disant de venir le revoir demain si cela leur faisait toujours mal au réveil.

Alors qu'épuisé et sans plus personne à soigner, il allait pour demander à Garriar où il pourrait dormir maintenant, il vit la seconde à ses côtés.

En voyant l'Humoran arriver, elle le quitta pour venir lui souffler dans l'oreille :
"Il n'arrête pas de parler bizarrement depuis l'attaque..."

Mercurio ne répondit que d'un regard déterminant qu'il allait s'en occuper, mais intérieurement il en avait assez. Il était à bout, ses réserves d'énergie à sec. Il avait avec lui l'agressivité de la lassitude. Il était fier d'avoir réussi à faire en sorte qu'aucune ne meure, mais il n'était en rien un guérisseur de guerre ou un messie. Il ne pouvait pas porter sur lui absolument tout. La nuit s'était installée maintenant, le pont avait été nettoyé et ceux qui restaient sur le pont n'étaient plus que les traumatisés de cette bataille. Mercurio voulait juste pouvoir aller enfin dormir.
Se voyant encore chargé, il se surprit à vouloir boire. Cette journée aurait bien mérité de finir noyé dans un dur alcool de marin. Mais il n'en fit rien, car le seul être susceptible de lui en donner était là, accoudé tristement au bastingage en train de regarder un horizon qui n'existait plus dans cette nuit si sombre.

Il ne savait trop que dire. "Parler bizarrement", c'était un terme plutôt flou. Il improvisa alors un début de discussion.

"Bonsoir Garriar."

Le vieil homme ne lui répondit rien. Il haussa donc un petit peu le ton en lui mettant la main sur l'épaule.

"Vous m'entendez ?"

Il eût un petit sursaut, avant de finir par mollement tourner la tête vers l'Humoran.

"Hum ? Hein, ouais, ouais... J't'entends."

"C'était une terrible journée, aujourd'hui, cap'tain. Mais c'est pas votre faute. Je vous ai vu durant la bataille, vous vous êtes battu comme un expulsé des enfers."

"Je l'sais, mon p'tit gars, je l'sais..."

"Ces filles ont besoin de vous cap'taine. Faut pas flancher, surtout maintenant."

"J'flanche pas, j'flanche pas..."

En disant ces mots, Garriar sombra en larmes.
La raison n'était pas dure à comprendre. Capitaine depuis des années de ce bateau, voguant avec le même équipage depuis le début, il était comme le père d'une très grande famille qui aurait survécu à plusieurs de ses enfants.

Mercurio ne savait plus trop que faire et que dire. Il se contenta de lui prendre l'épaule en lui disant sans trop y croire lui-même :
"Allez, ça va aller, ça va aller..."

Il le repoussa rapidement, avant de poser son dos contre un mur en bois et s'assoir à terre. L'humoran fit de même, s'asseyant à ses côtés comme si de rien n'était. C'était une expérience retournant le cœur de voir ce vieux marin aguerri par le temps et les batailles fondre ainsi en larmes. Et il ne savait que dire.

"Pourquoi je dois encore vivre ça ? Pourquoi les jeunes meurent et moi, vieux croulant, je survis ? Y a tant de fois où j'aurais dû mourir..."

"Mais vous êtes en vie, et vous avez encore un équipage. Les oubliez pas et vous perdez pas dans c'genre d'idées."

Ils discutèrent ainsi plusieurs heures, et la lueur du jour commençait à se faire sentir à l'horizon. Le vieillard aurait encore à vivre avec une cicatrice de plus dans son coeur.

Lorsqu'il lui demanda où il pourrait coucher maintenant qu'il avait laissé sa cabine à une de ses patientes, il lui indiqua comment rejoindre la salle commune. Ajoutant avec amertume qu'il y trouverait des couches vides facilement maintenant.

Avant cela, il alla jeter un œil dans sa cabine pour voir si ses instructions de surveillance avaient été respectés. Il s'étonna en découvrant une des filles étant assise aux côtés de l'inconsciente, une lanterne à ses côtés. Elle semblait exténuée. Il la remercia pour sa présence avant de vérifier l'état de sa collègue. Elle avait repris des couleurs, tout semblait bien se passer. Il lui dit qu'elle pouvait aller se reposer, que celle-ci ne faisait maintenant plus que passer une bonne nuit de sommeil et que rien ne pouvait plus lui arriver. Ce n'était pas l'exacte réalité, mais en tout cas il n'y avait rien qu'elle aurait pu faire ou remarquer elle-même. Et Mercurio lui-même devait dormir.

Il la suivit jusqu'à la salle commune qui était plongé dans le noir, dans laquelle il purent entendre des pleurs féminins étouffés. La journée avait été tragique en bien des points pour tout le monde. Ils ne cherchèrent pas à savoir d'où venait le son ; la tristesse est un mal que parfois seul le temps peut apaiser. Elle lui prit la main dans le noir pour l'amener jusqu'à un hamac vide avant de le laisser sans un mot.

Mercurio s'y plaça et, cette fois, à peine eût-il fermer les yeux qu'il sombra dans un sommeil profond et sans rêve.

_________________

Playlist de Mercurio

A propos, j'ai trouvé la morale de la fable que ton grand père racontait,
celle du petit oiseau que la vache avait recouvert de merde pour le tenir au chaud et que le coyote a sorti et croqué...
C'est la morale des temps nouveaux.
Ceux qui te mettent dans la merde, ne le font pas toujours pour ton malheur
et ceux qui t'en sortent ne le font pas toujours pour ton bonheur.
Mais surtout ceci, quand tu es dans la merde, tais-toi !

--------------------
Jack Beauregard (Henry Fonda), Mon nom est Personne, écrit par Sergio Leone, Fulvio Morsella et Ernesto Gastaldi


Dernière édition par Mercurio le Sam 19 Mai 2012 09:41, édité 1 fois.

Haut
 

 Sujet du message: Re: La Grande Prostituée (Heartless - v=x3)
MessagePosté: Ven 18 Mai 2012 11:23 
Hors ligne
Avatar de l’utilisateur
 Profil

Inscription: Ven 4 Fév 2011 06:22
Messages: 56
Localisation: Alentours d'Exech
Je ne sus dire combien de jours passèrent suite au combat, tant ceux-ci se ressemblaient en fond comme en forme. Je me réveillai tous les matins vaseuse, écœurée et encore secouée de cette sanglante bataille gagnée par chance. Je n’en tirai nulle gloire, nul réconfort, ou nulle fierté. J’avais été incapable de me défendre, et j’avais failli me faire déshonorer. L’opprobre était ma torture, et j’avais honte d’en souffrir plus que certaines qui s’étaient réellement fait blesser par les orques. Membres arrachés, plaies ouvertes et repoussante, j’avais de tout ça été épargnée, et ça ne faisait qu’ajouter du poids à mon inutilité. Je me sentais faible, et voilà quelle était ma vraie douleur.

Sans cœur, je m’abandonnai à des tâches répétitives où je ne laissai aucune pensée se développer. Me contenter, machinalement, d’abattre ma tâche. Nettoyer le pont des flaques de sang séché, nourrir les membres de l’équipage en compagnie de Greta. Le seul décor, monotone et régulier, était la mer. Partout aux alentours, nul signe de la moindre terre. J’avais l’impression que la coquille de noix sur laquelle nous flottions allait être mon tombeau. Comme si toute île, tout continent avait irrémédiablement disparu de la surface, pour plonger dans les flots marins.

Quelle ne fut pas ma déconvenue, et ma surprise lorsque, après plusieurs jours de navigation, le nid-de-pie cria d’une voix aigüe qu’une terre était en vue. Incrédule, je jetai un œil dans la direction qu’elle indiquait. Effectivement, un delta terrestre se dessinait bien devant nous. Un continent sauvage, aux abords abrupts. Forêts sombres et hautes montagnes gelées, voilà ce qui se découpait dans le décor usé de la mer et de ses vagues. Un espoir rejaillit en moi à la vue de ceci, mais une crainte aussi. C’était près des terres que nous nous étions fait attaquer. Et en voilà de nouvelles. Percluse de stress, je me laissai guider vers ces nouveaux horizons. En fin de matinée, nous avions presque atteint les rives d’un large fleuve qui se déversait dans la mer. Nous devions sans doute le remonter, car la Grande Prostituée s’engouffra rapidement dans son cours. Par chance, le débit n’était pas rapide, car le cours d’eau était large et évasé, et la terre pas trop élevée à cet endroit du continent. Une voie navigable.

J’entendis des matelotes discuter à propos d’une ville, Henehar, où nous nous dirigions vraisemblablement. Notre destination. Là où ils nous abandonneraient, Mercurio et moi, pour qu’on rejoigne l’équipage principal de la Confrérie d’Outremer.

Sur le pont, je cherchai des yeux ce futur compagnon forcé. Nos rapports n’avaient pas été très bons, depuis le départ. J’allais devoir me le farcir, désormais. Alors autant mettre les choses à plat avant notre débarquement… L’air se faisait frisquet, petit à petit, et j’en venais à lui jalouser sa fourrure tigrée. Je n’étais moi-même que peu habillée pour une telle température. Et pourtant… je sentais en moi la chaleur réconfortante des fluides flamboyants. J’espérais qu’ils suffiraient pour affronter les températures rudes de ce nouveau continent, qui nous entourait désormais totalement, de ses plaines gelées et de ses forêts enneigées. Le fleuve portait encore les stigmates de l’hiver, et quelques blocs de glace flottaient lentement, dérivant vers l’océan. Ils cognaient sourdement sur la coque du navire, rythmant notre avancée d’un pas nouveau.

Sans m’en rendre compte, je frissonnai.

_________________
Alessia, mage flamboyante


Haut
 

 Sujet du message: Re: La Grande Prostituée (Heartless - v=x3)
MessagePosté: Sam 19 Mai 2012 13:12 
Hors ligne
Avatar de l’utilisateur
 Profil

Inscription: Lun 12 Oct 2009 22:23
Messages: 8551
Localisation: Le Hollan... La Rascasse Volante !
Les Cicatrices



Le Silence des Eaux




Les jours suivants, Mercurio eût fort à faire.

Certains membres d'équipage eurent des contre-coups inattendus de la bataille et il se trouva que les soldats d'Oaxaca avaient eu le temps de piller et ravager une partie des provisions. Un rationnement strict fut de mise et Garriar, qui se réconcilia tant bien que mal avec ses responsabilités, organisa un système de pêche ingénieux, mais tout aussi efficace qu'il fût, les poissons récoltés n'apportèrent pas pour autant les vitamines nécessaires pour lutter contre le scorbut. Une demi-douzaine de cas se déclenchèrent, et Mercurio ne put rien faire d'autre que d'en limiter les symptômes et soulager les douleurs causées.

D'autres, dont le traumatisme se lisaient dans leurs yeux, eurent des comportements étranges. Si certaines se contentaient de s'apaiser dans la redondance rassurante de certaines tâches et essayaient d'oublier ces évènements en reprenant leur quotidien, d'autres se montraient totalement mutiques ou apragmatiques ; elles étaient mélancoliques, fuyaient les regards, allaient se cacher pour pleurer, refusaient de manger, étaient prises de nausées et de vomissements... On ne pouvait plus rien faire d'elles.

La seconde ne comprenait pas quand Mercurio tentait de lui expliquer qu'elles n'étaient pas à proprement parler malades et qu'il ne pouvait rien faire face à ce genre de problèmes psychologiques, ce qui lui valut d'être pris pour un incompétent par celle-ci jusqu'au bout. Il essaya bien d'aller parler à celles-ci, en vain. Il était quasiment toujours repoussé et il interpréta que la cause en était au fait qu'il soit un mâle d'un certain gabarit, ce qui devaient leur rappeler leurs agresseurs.

Entre les mortes, les blessées, les malades et les traumatisées, il ne restait plus grand-monde pour manœuvrer le navire et c'est ainsi que Mercurio appris certains rudiments de marins, comme qu'un bon système de nœuds étaient bien plus efficace que la force brute.

Le trajet continua ainsi dans un malaise certain, les communications s'étant réduites au minimum. Les journées semblaient toutes plus longues les unes que les autres et l'océan qui défilait inlassablement de tout côté ne faisait qu'appuyer cette sensation d'être embourbée dans un malaise éternel.

Mercurio était quant à lui passer par un panel d'émotions assez curieux. Si les premiers moments après l'attaque étaient propices à son devoir de guérisseur et qu'il s'était tout d'abord laissé gagner par une sorte de tristesse et d'empathie, les évènements suivants ne réussirent qu'à le mettre dans un état de nerf dont il n'aurait fallu plus qu'une allumette pour faire jaillir le feu de son agressivité intériorisée. Un sentiment paradoxal lui venait à chaque fois envers toutes ses dépressives pour qui, d'un côté, il avait pitié et se disait bien que ce qu'elles avaient vécu devait être insoutenable et, d'un autre, les trouvaient totalement pathétiques à se laisser dépérir ainsi et démissionner de la sorte de leur responsabilités. La pression que lui avait mis la seconde et ses tentatives échouées ne firent qu'accentuer cette dernières facettes. Ensuite, le scorbut naissant qui rendait ses victimes incapables de travailler longtemps n'arrangea rien. Il dût trimer quatre fois plus et finissait de s'épuiser quotidiennement en les soulageant de leur douleur. Tout lui sembla au fur et à mesure devenir une nuisance ; les bruits devenaient d'une répétitivité et d'une constance insupportable. Le silence sur le pont, le bruit du ressac des vagues contre la coque, le vent qui sifflait dans ses oreilles, la voix de la seconde qui avaient encore l'audace de l'ouvrir pour faire des reproches à tout le monde, les pleurs, reniflements, soupirs et râles de tout un chacun... Et ces sensations... Le sel qui collait ses poils, desséchait sa face jusque dans sa gorge, les courbatures de ses efforts, la faim et la soif qui l’assaillait...

Et cet océan, ce fichu océan qui semblait le narguer et le condamner à une damnation éternelle, piégée sur ce rafiot de malheur. Se sentant comme un smilodon en cage, il maudissait tous les dieux pour ce qu'il vivait là. Se tuer à la tâche était tout ce qui l'empêchait encore de devenir complètement fou et il se retranchait lui-même dans une certaine solitude. Il ne voulait plus parler et écouter personne. Il faisait ce qu'il avait à faire et ça s'arrêtait là. Mais il sentait que cela ne faisait que retarder l'inévitable et qu'à un moment ou à un autre, il risquait de péter les plombs.

Il se tempera autant que possible durant plusieurs jours alors que le temps se faisait de plus en plus nuageux et glacial avant d'enfin entendre résonner dans la voix de la vigie le tocsin d'un espoir qu'il n'avait presque plus.

Il eût cependant un soubresaut en voyant la terre, mais aucune ville, espérant que le but n'était plus très éloigné. Il songea, dans son esprit, à tout ce qu'il ferait une fois arrivé dans le prochain port. Se l'imaginant semblable à Dahràm, il se voyait déjà se ruer dans une bonne auberge à engloutir un énorme morceaux de viande rouge et arroser ça avec de la bière. Beaucoup de bière. Ensuite il irait trouver un bordel et déchargerait ses pulsions sur la première venue et, se disant qu'une fois ne suffirait certainement pas, il le ferait encore et encore en changeant à chaque fois de partenaire jusqu'à ce qu'il soit totalement vidé. Pour finir, il se trouverait une taverne où il se mettrait la cuite du siècle. Puis après, retour à l'auberge pour dormir comme une masse dans une couche qui ne gigoterait pas en tout sens toute la nuit avec le bruit incessant des flots. Oui, ça méritait au moins tout ça pour le réconforter et lui faire oublier ce vaisseau de malheur. La Confrérie attendrait, il n'était pas vraiment pressé de reprendre la mer, après ça.

Le capitaine hurla quelques ordres alors que le bateau devait s'engager dans un fleuve d'où se déversait de petits morceaux de glaces ; la ville devait certainement être plus haut. Mercurio dût tirer quelques cordes et, une fois à l'intérieur, il finit par avancer tout seul et être laissé au soin de la seconde qui dirigeait le gouvernail. Il alla aux nouvelles auprès de Garriar qui lui expliqua qu'il allait les laisser lui et Alessia à Henehar, la prochaine ville et qu'ils devraient y attendre l'arrivée du capitaine Heartless, mais il fut incapable de dire quand celui-ci pourrait bien venir les récupérer.

Alessia... Il l'avait presque oublié, celle-là. Il l'avait vu sans faire trop attention à elle après l'attaque, elle montrait certains signes de traumatisme, exécutant solitairement toujours les mêmes travaux, la mine basse et triste. Il ne se rappelait pas l'avoir entendu parler depuis d'ailleurs. Il ne voulait pas d'elle comme d'un boulet qu'on traîne et n'était pas d'humeur à changer ses plans, surtout pour une fichue pyromancienne à moitié cinglée qu'il connaissait à peine et à qui il ne devait rien.

Garriar continua en lui disant qu'eux resteraient certainement quelques jours à quai, le temps de refaire leurs provisions et que l'équipage se remette sur pied, ce qui risquait de prendre du temps. C'était toujours bon à savoir, en cas de soucis.
Le vieil homme semblait particulièrement inquiet. Pour lui, ce n'était encore que le début des problèmes. Qu'allait-il pouvoir faire de toutes ses éclopées et celles qui sombraient dans la folie ? Engagerait-il de nouvelles recrues ? Quels comptes devraient-ils rendre à la Confrérie d'Outremer ?

Mercurio lui demanda ensuite à quoi ressemblait Henehar, ce à quoi il répondit qu'il s'agissait d'une sympathique petite ville de mages et de pêcheurs qui n'avait rien à voir avec Dahràm. Inquiet, l'Humoran demanda s'il pouvait penser y trouver de quoi satisfaire ses plans. Le vieil homme rigola en les entendant, lui assurant que oui, et que dans toutes les villes du monde, il pouvait toujours espérer pouvoir trouver où manger, boire, forniquer et dormir ; les besoins basiques de toutes les races depuis la nuit des temps.

Sur ce, il alla retrouver Alessia. Il devait l'en informer.

Il la trouva à côté d'un groupe de matelote ; la vue de la terre semblait l'avoir un peu revigoré.
"Alessia ? Le cap'taine vient d'me dire qu'on débarque à la prochaine ville. On va devoir y rester jusqu'à ce que ce fameux Heartless daigne nous y récupérer."



Maturité

_________________

Playlist de Mercurio

A propos, j'ai trouvé la morale de la fable que ton grand père racontait,
celle du petit oiseau que la vache avait recouvert de merde pour le tenir au chaud et que le coyote a sorti et croqué...
C'est la morale des temps nouveaux.
Ceux qui te mettent dans la merde, ne le font pas toujours pour ton malheur
et ceux qui t'en sortent ne le font pas toujours pour ton bonheur.
Mais surtout ceci, quand tu es dans la merde, tais-toi !

--------------------
Jack Beauregard (Henry Fonda), Mon nom est Personne, écrit par Sergio Leone, Fulvio Morsella et Ernesto Gastaldi


Dernière édition par Mercurio le Jeu 7 Juin 2012 20:58, édité 4 fois.

Haut
 

 Sujet du message: Re: La Grande Prostituée (Heartless - v=x3)
MessagePosté: Mar 5 Juin 2012 08:16 
Hors ligne
Avatar de l’utilisateur
 Profil

Inscription: Ven 4 Fév 2011 06:22
Messages: 56
Localisation: Alentours d'Exech
Je ne mis guère plus de deux minutes à trouver l’homme-tigre sur le pont. Il semblait sortir d’une discussion avec le capitaine. Les deux seuls mâles de l’expédition semblaient avoir sympathisé, en une sorte de solidarité masculine face au front féminin des marinières présentes sur le navire. Je n’eus par ailleurs pas à me déplacer pour aller le trouver, puisqu’il le fit de lui-même, avançant vers moi d’un pas nonchalant. Ses dons de guérisseur, même si je n’en avais pas eu personnellement besoin, avaient été plus qu’utiles sur la Grande Prostituée depuis la bataille navale. Et ce dévouement qu’il avait exposé me donnait envie de lui pardonner ses comportements étranges et déplacés. Je ne savais pas à quoi m’en tenir avec lui. Tantôt avait-il été chaleureux et engageant, même un peu trop. Et tantôt s’était-il montré farouche et fermé, comme un animal acculé. Peut-être était-ce là l’une des caractéristiques des membres de son espèce. Mi-homme, mi-animal, avec une personnalité penchant entre la civilité et l’instinct sauvage.

Aujourd’hui, ce fut l’aspect humain de Mercurio qui sembla venir à moi. D’une voix naturelle, d’un ton qui n’augurait aucune crainte ou aucune rancune, il m’avisa des paroles du capitaine. Nous débarquerions à Henehar, la prochaine ville sur le fleuve, comme il m’avait été donné d’entendre parmi l’équipage. Nous devrions rester là jusqu’à ce que le mystérieux capitaine Heartless puisse passer nous prendre.

N’était-il pas censé s’y trouver déjà ? Comment Garriar était-il au courant de sa position, même approximative ? Des secrets de marins auxquels je n’avais guère eu accès jusqu’ici, vraisemblablement. Après tout, puisqu’ils étaient capables de se repérer géographiquement sans le moindre indice terrestre, ils pouvaient bien se retrouver entre eux. Je me tournai vers l’humoran pour lui décocher un semblant de sourire. Le premier depuis des jours…


« D’accord, oui. Connais-tu quelque chose de cette ville ? »

Je savais pertinemment qu’il n’y avait jamais été, mais après tout il venait d’une cité de piraterie, et peut-être Henehar était-il un port connu parmi les forbans et loups de mer, bien que sa position à l’intérieur des terres de Nosveris puisse faire paraître le contraire.

Je frissonnai à nouveau sous la brise glacée de cette région au climat bien plus rude que ce que j’avais toujours connu. À Exech, la chaleur moite régnait, entre le désert et les marécages marins. Ici, c’était tout l’inverse. Un froid mordant et sec, de la glace qui dérivait tout autour d’eux, et sur les rivages, des neiges éternelles. Nous étions à la fin du printemps, si mes souvenirs étaient bons. Une saison peu propice à cette blancheur immaculée. C’était la première fois que je voyais tant de neige, et je n’osai imaginer ce que ça donnait, au plus fort de l’hiver.


« En tout cas, tu es chanceux d’avoir cette fourrure. Il fait glacial ! »

Ça sonnait un peu comme une banalité. Parler de la météo quand on ne parle de rien d’autre… L’attente de ce Heartless risquait d’être longue et pénible, si la situation ne prenait pas plus d’aisance entre nous. J’aurais bien plaisanté sur mon envie de posséder une telle fourrure également, mais je redoutai sa réaction à de tels propos.

_________________
Alessia, mage flamboyante


Haut
 

 Sujet du message: Re: La Grande Prostituée (Heartless - v=x3)
MessagePosté: Jeu 7 Juin 2012 20:56 
Hors ligne
Avatar de l’utilisateur
 Profil

Inscription: Lun 12 Oct 2009 22:23
Messages: 8551
Localisation: Le Hollan... La Rascasse Volante !
Le Silence des Eaux



Maturité




La jeune femme se montra souriante à son arrivée, demandant sagement à l'Humoran s'il en savait un peu plus qu'elle sur cette ville gelée dans laquelle ils arrivaient...
"J'en sais que ce que vient de me dire le vieux. Une p'tite ville de mages et de pêcheurs, tranquille. Ça s'ra pas d'refus de s'poser un p'tit peu après tout ça."

Il fit une pause, songeur. Au fond, tout ce qu'il voulait, c'était se reposer, s'apaiser un peu et, bien qu'il était parti pour la laisser tomber dès qu'il aurait mis le pied-à-terre, il la regarda pensivement lorsqu'elle se mit à lui dire qu'elle lui enviait sa fourrure.

Il pouffa en entendant cette phrase, puis reconsidéra ces ambitions prochaines. Après tout, il n'y avait aucune raison à cette animosité entre eux et depuis l'attaque, Mercurio avait bien eu l'occasion de relativiser sa peur de finir immolé. Ses cauchemars et ses craintes n'étaient plus les mêmes depuis.

Il avait beau avoir fait le gros dur qui tient la route, il ne s'était jamais senti aussi seul et abattu. Il se reprit un peu, puis lança à Alessia, calmement et avec un grain de tristesse dans sa voix qui lui échappa en lui touchant mollement l'épaule :
"Ouais, j'ai déjà froid avec, alors j'imagine même pas sans. Tu sais quoi ? Dès qu'on débarque, on va se caler dans la première taverne ou auberge qu'on trouve et je te paye un coup pour fêter notre..."

Il eût un petit trou, ne sachant pas vraiment ce qu'il voulait dire lui-même. Le mot qui lui venait en tête était "survie", mais ce n'était vraiment pas approprié... Que pouvait-il dire d'autre ? Notre "départ de ce navire de mort" ? Notre "premier traumatisme commun" ? Notre "avenir incertain dans cette confrérie dont on ne sait quasiment rien" ?
Non... Ne pas se laisser aller aux ressentiments amers... Il fallait juste trouver quelque chose de beaucoup plus simple et beaucoup plus neutre. Ce n'était pas évident pour lui, sur le moment.

"Notre première escale !"

Il se força à exhiber son plus beau sourire humoran pour tromper les derniers évènements et se mit à se mouver plus que de raison, faisant de grands gestes pour accompagner ses paroles alors qu'il essayait comme de se convaincre lui-même de la grandeur d'une chose qui ne changerait rien :
"C'est ça, on va dire au revoir à tout le monde et on va aller se réchauffer dans le premier estaminet où il y aura un bon feu. On va se poser tranquillement, vider quelques choppes pour fêter notre première escale et... Et c'est tout ce que j'avais en tête pour l'instant. On va profiter du moment quoi."

Mercurio se surprenait lui-même à dire ce genre de choses. Ça lui ressemblait tellement peu et qui avait des objectifs tout autres il y a juste quelques instants. Mais ce soir, il ressentait encore toute la pression de ce voyage et il n'avait pas envie d'entrer en conflit avec quiconque, de faire semblant de savoir ce qu'il voulait et de reprendre des habitudes pas forcément glorieuses mais réconfortantes. Comme si cette terrible expérience l'avait soudainement assagi. C'était presque s'il n'en était pas au point où il déciderait de laisser tomber l'idée de rentrer dans cette confrérie pour s'installer dans cette ville tranquille ou une autre, fonder une famille et y passer une petite vie sans soucis. Mais il n'en était pas encore là.

Il se calma un brin, finissant son monologue :
"Qu'est-ce que t'en dis ?"

Alors qu'il clamait ceci, imperturbable, le décor de la ville s'affichait au-delà des bastingages. C'était une ville blanche et propre, recouverte de neige. Outre quelques villageois et gardes isolés, tout semblait incroyablement vide et calme. Une petite brume s'était installée aux abords de la rivière et la vue de pilotis confirmaient qu'ils étaient aux abords de ce qui servait de port. Ils arrivaient. Enfin.



Pied à Terre

_________________

Playlist de Mercurio

A propos, j'ai trouvé la morale de la fable que ton grand père racontait,
celle du petit oiseau que la vache avait recouvert de merde pour le tenir au chaud et que le coyote a sorti et croqué...
C'est la morale des temps nouveaux.
Ceux qui te mettent dans la merde, ne le font pas toujours pour ton malheur
et ceux qui t'en sortent ne le font pas toujours pour ton bonheur.
Mais surtout ceci, quand tu es dans la merde, tais-toi !

--------------------
Jack Beauregard (Henry Fonda), Mon nom est Personne, écrit par Sergio Leone, Fulvio Morsella et Ernesto Gastaldi


Dernière édition par Mercurio le Sam 11 Aoû 2012 12:46, édité 2 fois.

Haut
 

Afficher les messages postés depuis:  Trier par  
Forum verrouillé Ce sujet est verrouillé, vous ne pouvez pas éditer de messages ou poster d’autres réponses.  [ 34 messages ]  Aller à la page Précédente  1, 2, 3  Suivante


Qui est en ligne

Utilisateurs parcourant ce forum: Aucun utilisateur enregistré et 0 invités


Vous ne pouvez pas poster de nouveaux sujets
Vous ne pouvez pas répondre aux sujets
Vous ne pouvez pas éditer vos messages
Vous ne pouvez pas supprimer vos messages

Aller à:  
Powered by phpBB © 2000, 2002, 2005, 2007 phpBB Group  

Traduction par: phpBB-fr.com
phpBB SEO

L'Univers de Yuimen © 2004 - 2016