Rosemary en parfaite connaissance des sombres boyaux souterrains marcha d’un pas confiant, toujours flanqué par le bandit. Ce dernier s’amena à sa hauteur et elle put le dévisager convenablement. D’apparence affable, avec ses joues bien rondes et ses grands yeux, il avait toutefois le visage constellé de stigmates, sans doute l’œuvre de la variole. Cette maladie avait tant de fois errée en Exech, fauchant les plus faibles, laissant aux plus forts sa marque inaltérable… Rosemary avait toujours eu de la chance, sa santé de fer l’avait maintes fois protégée du mal qui sévissait les temps de grands froids dans les bas-fonds d’Exech.

Elle continua de le regarder de biais, il était plutôt musculeux quoique son ventre semblait gras, surement à cause de la bière. Il se trouvait entièrement vêtu de noir, ce qui contrastait avec son air amène. Elle était dorénavant certaine de ne l’avoir jamais croisé par le passé.

Le bandit dut apercevoir que Rosemary l’épiait car il commença à parler d’une voix rude :

« T’as bien d’la chance qu’Jonquille t’ai à la bonne, tu l’sais ça ? T’voir m’débecte… J’ai envie d’aller m’bourrer la gueule, pas d’faire le guide pour une donzelle et une vioque décharnée, qui plus est complètement cinglée. J’vois bien que t’es qu’une putain qu’aime s’vautrer dans le sang… »

Rosemary ricana avant de rétorquer d’une voix doucereuse :

« Sois assuré de ma haine à ton encontre également, étant donné que nous nous vouons un désamour réciproque, concluons un marché qui nous sera à tous deux profitable. Indique-moi le quartier, l’apparence de la demeure et de son propriétaire, je connais Exech comme ma poche et n’éprouverais aucun mal à la trouver. »

L’homme hocha de la tête et indiqua avec précision la localisation de la cible. L’individu, un milicien d’au-moins soixante lunes, avec un crâne dégarni et un nez de rapace. Il avait des yeux bleus, était plutôt maigre. Il siégeait dans le nord de la ville, près du marché à poissons, dans une maison arborant un magnifique jardin. Il faut dire que l’homme tenait beaucoup à ses plantes et ses fleurs. Il était maniaque, orgueilleux et plein de cette noblesse écœurante. Cette dernière remarque ne manqua pas d’affermir la résolution de Rosemary. Ce milicien semblait tout désigné pour être sa prochaine victime.

L’homme continua sa description des lieux, apparemment il y avait toujours un garde à l’entrée. Quant à l’intérieur… Il avait entendu ceci de la part de voisins peu désirable de se faire trouer la peau donc ce devait être fiable. Il semblait s’y trouver un valet, plutôt vieux et un gros chien. Pour finir le milicien lui-même, appelé Rodrick.
Une odeur d’air frais atteignit alors les narines de Rosemary, cette dernière n’avait pas vu le temps passer, elle n’avait eu de cesse d’écouter les dires du porc et de fomenter des plans. Ce dernier sans la saluer s’esquissa vers la sortie et s’en alla.

Rosemary qui tenait toujours fermement la main d’Ingrid pris la même direction. Elle voulait déjà rentrer à la maison, récurer son aiguille de tout ce sang et essayer de retrouver dans tout son fatras de quoi essayer de soudoyer le garde. On ne savait jamais jusqu’où l’avidité menait les hommes, ces déchets…