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 Sujet du message: Les rues de la ville souterraine
MessagePosté: Ven 31 Oct 2008 14:18 
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Les rues de la ville souterraine


La partie souterraine de la cité, extrêmement surveillée par la garde, est on ne peut plus sécurisée quant à la présence d'étrangers même si, au delà de ça, le peuple aime à y faire régner le chaos et la loi du plus fort ou du plus haut placé.
Les rues sont relativement sombres puisqu'il n'y a pas énormément de lumière, les Shaakts aimant bien vivre dans l'obscurité. Seule la population elfique noire a accès à cette zone.
Ces rues sont relativement propres car les égouts sont sous le sol et on y accède par des petits caniveaux ouverts en bordure des bâtiments.

En plein milieu de la cité souterraine se dresse un grand escalier de pierre montant vers le coeur de la cité haute, donnant sur les rues de cette dernière. Il y a également, au Sud de la ville souterraine, un autre escalier donnant, lui, directement sur les alentours de Caix Imoros, en surface.

Les rues souterraines ont tendance à se finir, au nord-ouest, en petits boyaux donnant alors sur des galeries souterraines plutôt inexplorées et dangereuses...

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 Sujet du message: Re: Les rues (ville en surface et souterraine)
MessagePosté: Mer 16 Déc 2009 20:49 
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(... Aux rues)

La colonne soumise déboucha sur un gigantesque escalier serpentant à flanc de falaise qui menait droit au cœur de la citadelle et sur lequel piétinaient d’autres centaines d’épouvantails régulièrement secoués de spasmes qui passaient pour un semblant de marche. Bientôt l’air fut empli d’un parfum familier pour l’Aldryde, le fumet tenace de la peur et de l’effort conjugué qui donnèrent naissance à la plus primale des odeurs, celle de la proie terrée attendant jusqu’à la folie l’heure de sa mise-à-mort. Cette armée de vaincus fumante dans les rafales glaciales se resserra en colonne de plus en plus étouffante et bientôt en une phalange grelottante devant l’impressionnant portail gardant la cité haute. Chaque travailleur avait appris dès le premier jour à trouver sa place dans la cohue muette et à devoir supporter la pression de toute cette chair crasseuse et poisseuse de peur pour enfin aller décharger son fardeau dans les ateliers de leur maître et y espérer un repos sans rêve ni espoir qui en mènerait la plupart vers une nouvelle nuit de travail. Un vieillard, dont la démarche cahotante n’avait pas échappé à la guerrière camouflée, peinait juste derrière elle. Entre les branches et les minuscules feuilles rêches, elle avait eut tout le loisir d’observer l’aide discrète que lui apportait les autres esclaves profitant de la pression de la masse pour le soutenir à la dérobée. Hélas, le petit contingent de gardes, figé pareil des vautours royaux perchés entre les cinq hautes portes, à l’allure faussement frêle, n’eut pas la clémence de fermer les yeux sur les difficultés du vieil homme.

L’un d’eux sortit une main gantée de fer de sa cape, le premier signe de vie perceptible depuis des heures et la dressa d’un geste d’une simplicité et d’une beauté impériale. Les hordes pouilleuses se stoppèrent dans un discret murmure et bientôt quatre gardes fendirent les foules d’une démarche aristocratique, leur regard glacial déjà braqué sur leur proie. Les esclaves fuyaient et courbaient l’échine devant ces princes de noirceur et dès que les augustes se stoppèrent, un cercle se dessina subitement autour d’eux et de l’impudent. Deux Shaakts saisirent avec une violence contrôlée les fardeaux des gueux les plus proches d’eux et les jetèrent aux pieds du vieillard qui, tout tremblant, se baissa pour ramasser le premier et le hisser avec une lenteur pitoyable sur le cintre pâle qu’étaient ses épaules. Oona entrevoyait les regards angoissés des hommes et des femmes autour d’elle, certains n’osaient pas regarder la scène pendant que d’autres récitaient en silence des prières, le poing droit fermé sur leur cœur tressautant. Le vieil esclave dut poser un genou à terre pour se saisir d’un deuxième fagot aux senteurs enivrantes, puis il tenta de se relever mais sa jambe vrilla et le poids de sa charge le fit chuter tête la première. A peine le malheureux avait-il eut le temps de poser une main sur le pavé pour se rattraper que le fouet avait jailli à une vitesse inhumaine pour le cueillir et le rejeter en arrière dans un claquement assourdissant. La foule entière tressaillit et commença à s’agiter mais bien vite les autres elfes noirs sortirent martinets et matraques pour imposer l’ordre et le silence. Comme une minable tortue, le vieux se tenait sur le dos, tremblant à s’en briser les os tout en protégeant les restes de son visage de dix brindilles exsangues.

Cormoran sadique faisant sécher son arme serpentine, le garde n’avait pas bougé, son bras était toujours tendu et la gueule d’acier de sa main laissait s’échapper une langue de cuir bavant quelques gouttes de sang. Le Shaakt fit à nouveau claquer l’instrument de terreur devant lui, au-dessus du vieillard et de la foule inquiète qui s’ouvrit alors en un mortel corridor pour le condamné. Lorsque ce dernier se redressa dans un ultime effort, la jeune femme capta une résignation qu’elle avait déjà maintes fois vue et pourtant l’exilée eut la désagréable impression que ce dernier regard était pour elle seule et qu’elle se devait d’être la gardienne des ultimes suppliques de l’esclave.
Et il partit en une course désordonnée. Avançant autant sur les pieds que sur les mains, comme poussé par une force bien trop grande pour lui et qui le ferait trébucher au lieu de lui sauver la vie. Il avait presque atteint l’extrémité du lacet quand il se stoppa et comprit que s’il voulait s’échapper il devrait poursuivre la descente, continuer de lacet en lacet et donc se rapprocher de ses bourreaux. Là était toute l’ironie de sa fuite, il devrait frôler à plusieurs reprises la mort pour pouvoir y échapper, mais ses geôliers lui en laisserait-il seulement l'opportunité ? Il n’eut certainement pas le temps d’y réfléchir car, porté par cette liberté soudaine, il voulut entamer la descente du deuxième tronçon quand un carreau le cueillit en pleine tête. Il dégringola par-dessus la balustrade de pierre moussue et s’écrasa deux étages plus bas.

Certains tournèrent la tête vers l’un des gardes posté au sommet des portes qui tenait encore son arme magnifique d’une taille impressionnante mais qu’il maniait pourtant avec une légèreté et une grâce tout simplement féline. Sous l’effet de la tension ou peut-être d’un mauvais sort déchaîné par cette nouvelle âme errante, le buisson dans lequel Oona était cachée se mit brusquement à faner. Elle ne comprit absolument pas ce qui se passait à mesure que les branchages se recroquevillaient, l’enserrant de plus en plus proche, que les feuilles jaunissaient à vu d’œil, se ridant horriblement avant de tomber en une pluie crissante à mesure que la cohorte d’esclave reprenait sa marche. En vain, l'aventurière tenta de gigoter pour échapper au fléau qui allait bientôt détruire sa cachette mais il semblait bien qu’elle en était la cause, chaque bouquet de feuilles qu’elle touchait expirait dans la seconde et la laissait dangereusement vulnérable.

Quand l’esclave que le petit ange avait choisi s’arrêta avec une dizaine d’autres, devant une boutique toute élancée, il ne restait de la récolte qu’un amas de brindilles et de racines racornies avec une Aldryde complètement immobile à l’intérieur. Tous déposèrent leur fardeau devant un maître somptueusement vêtu qui remarqua au premier coup d’œil l’état de sa marchandise. La réaction qui s’ensuivit allait devenir habituelle pour la guerrière mais pour cette première fois, elle fut certainement plus pétrifiée que l’esclave incriminé. La violence allait surgir avec une intensité et une précision telle, qu'elle en devenait presqe absurde ce qui au final la rendait encore plus forte, elle serait constamment alimentée par une inhumanité rapace planant dans un ciel constellé de doute.
Comme si l'esclave n’était déjà qu’un cadavre ambulant, le maître le repoussa du talon de sa botte ferrée, agrippa avec la vélocité d’une vipère sa main tendue pour toute protection, puis sortit une sorte de pince argentée délicatement ouvragée et sectionna d’un coup l’auriculaire de l’esclave. Le cri de celui-ci déchira l’angoissant silence de la ville mais déjà le Shaakt s’était emparé de sa mâchoire pour la maintenir toute grande ouverte, menaçant de lui couper aussi la langue, seule une respiration affolée se fit désormais entendre.

Comme s’il venait simplement de castrer l’une de ses bêtes, sans aucune trace d’émotion, pas même de colère ou de satisfaction, le maître inspecta consciencieusement le reste de la marchandise, laissant le blessé souffrir en silence. Autant que faire se put, Oona avait redoublé de précision dans son immobilisme, suivant à la perfection la chute du fagot et serrant des mâchoires pour lutter contre un cri de rage coupable. Elle savait que si elle avait été plus courageuse en entreprenant de passer à nouveau par-dessus les remparts, cet innocent n’aurait pas eut à subir ce triste sort. La jeune femme tenta de ne pas voir le petit doigt ensanglanté juste devant elle, ni l’esclave recroquevillé serrant son moignon dans ses frusques immondes tout le temps que dura l’inspection. L’exilée était à la fois surprise et inquiète qu’après un si long séjour à Omyre la Sombre et autant de mésaventures elle fut encore capable d’être envahie par une telle empathie, au risque même d’être débordée par ce sentiment et de mettre sa vie en jeu. Mais la délivrance se fit annoncer par le rythme martial d’une colonne de prisonniers strictement encadrés par deux gardes dont on ne pouvait toujours voir que la rigueur de la cape, le cimier impeccable et le début d’une armure pourpre à chacune de leur foulée. De la pointe d’un fouet lové, on releva le prisonnier qui, par habitude, attrapa de sa main valide la botte desséchée et rentra dans le rang.


Oona se demanda soudain pour quelle raison elle prenait autant de risques. Une si petite pièce valait-elle la peine d’errer dans les endroits les plus sordides ? Pourquoi donc devait-elle se jeter à corps perdu dans les plus atroces cauchemars ? Cherchait-elle tant que cela la mort ou bien était-ce quelque chose d’autre, une communion sadique avec son bien-aimé ? Noyées au milieu de centaines d’autres, ces questions la hantèrent durant toute la traversée de la ville, garnissant les ombres moites et tranchantes des plus détestables sentiments. Malgré tout, la beauté perverse du lieu ne manqua pas de la subjuguer et bientôt ses interrogations dévièrent vers le cas de ses habitants. La jeune femme n’avait jamais connu de créature pareille, pas un seul des Garzoks ou des Sektegs qu’elle avait croisé ne lui avait inspiré une réaction de peur si primale et l’exilée en arriva à la conclusion que ces elfes n’appartenaient tout simplement pas à cette réalité. Dispenser la mort et la torture était pour eux une routine sans émotion, ils avaient dépassé le stade de la violence et de l’excitation pour se complaire dans une théâtralité magnifique et glaciale de fléau vivant. En vérité le sort d’autrui, même celui de leurs frères et sœurs ne les intéressait absolument pas, car drapés dans leur narcissisme dément, ils étaient pour chacun leur propre dieu régnant sur les infinités de leur âme sadique.

Finalement, le petit cortège s’arrêta une première fois devant un portail d’une démoniaque beauté, éjectant sans ménagement une dizaine de ses membres qui allèrent s’engouffrer dans une cave infernale, puis une seconde fois devant un parvis aux colonnes somptueuses.
L’Aldryde avait eut le temps de s’apercevoir que la majorité de ces pauvres âmes avait déjà été mutilée et en fonction des caprices ou de l’humeur de leur ancien maître, on leur avait tranché doigts, oreilles ou bien nez avec une inhumanité égale. Devant ce qui semblait être un manoir, un garde poussa brutalement quatre esclaves, s’arrêta devant l’estropié et le bouscula aussi alors que son confrère menait ce bétail humain à travers les colonnades magnifiques, rendant vivantes les plus épiques batailles issues d’une mythologie dégoulinante de suffisance. Les sandales crasseuses glissaient sur les mosaïques abstraites vers une impressionnante porte flanquée de chaque coté d’une majestueuse statue rubis devant lesquelles rougeoyaient les braises d’offrandes nombreuses. Le garde de tête déposa aux pieds fumant de l’un des avatars de la guerre, sa lance dressée contre l’ennemi, une bandelette de tissu qui se consuma immédiatement, puis il poussa la porte et entra, laissant les esclaves sous le regard sanguinaire des monuments belliqueux. Il revint très vite accompagné d’un Shaakt dont le charisme menaçait d’écraser la moindre créature se dressant devant lui voire même de faire mettre un genou à terre aux statues rubis. Sans même en avoir reçu l’ordre, deux esclaves se jetèrent au sol et Oona pensa que les autres n’allaient pas tarder à suivre le mouvement tant elle sentait elle-même la panique l’envahir. Cet elfe transpirait d’une autorité surnaturelle, totalement assuré qu’il était de sa supériorité sur l’ensemble du monde, si proche du divin que sa quête de perfection avait depuis longtemps cessé.

Depuis le premier arrêt, l’esclave qui servait de transport à la jeune femme avait fait passer son fagot miteux devant lui et maintenant sous la pression insoutenable de ce nouveau maître, il serrait le buisson de plus bel et la guerrière sentait les branches l’écorcher de partout. Lorsque l’un des branchages s’aventura un peu trop profondément dans son conduit auditif, l’Aldryde ne put refreiner une pulsion et s’extirpa de sa cachette dans une volée de bois sec mais, mal assurée et tractée soudainement par le poids de son paquetage qu’elle avait presque oublié, elle se retrouva elle-aussi à embrasser les mosaïques. Au comble de l’inquiétude les humains menacèrent de défaillir devant ce nouvel incident, persuadés que la faute, quel qu’elle soit, leur incomberait. En revanche la guerrière transforma sa peur en action et d’un même mouvement elle se libéra de la courroie de son sac et bondit, sans s’en rendre véritablement compte, comme menée par un instinct de sauvage, droit vers ce demi-dieu impassible.

Elle pointa sa ridicule rapière et chargea aveuglément, peut-être même qu’elle cria pour se donner du courage mais elle n’en était pas sûre, son adversaire ne bougea qu’au dernier moment comme s’il venait enfin de se décider à accorder de l’importance à se qui se déroulait autour de lui. Tout ce qu’Oona vit de l’action fut deux doigts graciles saisir son épée et déjà elle était littéralement soufflée contre la porte, écrasée et à demi-sonnée, son arme se plantant à moins d’un cheveu de sa tête, vibrant encore de l’intensité de cette passe incompréhensible. Au comble de l’étrangeté, l’échange se poursuivit nonchalamment et silencieusement comme si rien ne s’était passé, la jeune femme reprenant ses esprits, adossée à l’un des battants. Quand les esclaves patauds défilèrent devant elle, l’exilée n’osa rester sur place de peur de devoir affronter ne serait-ce que le regard de ce démon et elle suivit docilement le petit troupeau en traînant son paquetage, sentant désormais en elle cette sensation d’insignifiance et de crainte qui avait figé sous une chape de silence inquiet l’intégralité de la citadelle.

On la mit au travail avec une autre femme du lot dans une salle adjacente au hall principale, salle aux murs couverts de trophées divers, d’armes et d’armures les plus exotiques. Immédiatement et sans bruit l’esclave se dirigea vers un recoin de la pièce et en sortit un seau, quelques brosses et chiffons. La stupidité de la scène ne frappa l’Aldryde qu’au moment où la femme lui tendit l’un des morceaux de tissu en pointant de ses yeux timides et cernés les trophées hors de sa portée. Espérait-on vraiment qu’un moineau de sa taille et cette seule pauvre hère nettoient l’intégralité de la salle du sol au plafond ? Elle voulut protester mais déjà sa camarade se brisait le dos à brosser le marbre de la salle, la guerrière entama donc son travail sans une once d’entrain, curieuse de savoir ce qu’il allait se passer. Au final, il n’y eut que de la sueur et une absence totale de poussière, l’ensemble de la pièce était absolument parfaite, même les sabres avaient un fil impeccable à même de trancher à travers n’importe quel audacieux. Oona cessa alors bien vite de travailler et la voyant ainsi tirer au flanc, l’esclave redoubla d’ardeur pour perpétuer l’immaculée propreté. Au coucher du soleil on les jeta dehors et s’en était fini d’eux jusqu’à demain, à peine l’exilée avait-elle eut le temps de contempler la majesté des ombres ondulantes entre les piliers que déjà sa camarade avait fui vers un sombre recoin de la ville.

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Et sur moi si la joie est parfois descendue
Elle semblait errer sur un monde détruit.

Oona

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Dernière édition par Chak' le Sam 9 Jan 2010 12:04, édité 7 fois.

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 Sujet du message: Re: Les rues (ville en surface et souterraine)
MessagePosté: Mer 16 Déc 2009 20:52 
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La guerrière ne comprenait absolument rien de ce qui venait de se passer, cette ville était un musée à ciel ouvert, une collection pétrifiée et impeccable de merveilles, hantée seulement par de silencieux prédateurs cruels planant de perchoir en perchoir, voguant chacun sur leur propre mer intérieure sans que rien, pas même la mort sans doute, ne puisse les faire vaciller. Oona ne savait véritablement pas quoi faire, tout le monde semblait avoir sa place exacte et ces armées d’esclaves obéissaient à des multitudes de règles muettes alors que la simple communion de leur cri de haine aurait suffi à faire vaciller la cité entière, à la faire sombrer à tout jamais dans la noirceur des flots d’où peut-être avaient jailli leurs bourreaux. Ce nouveau monde était un casse-tête gigantesque qu’on livrait à une Aldryde rendue sourde, aveugle, muette et handicapée fasse à l’ampleur de cette abstraction froide. Envahie par la stupéfaction et un début de détresse, elle décida de chercher à manger quand elle tomba sur divers offrandes encore comestibles qu’elle embrocha hors des braises. Puis, n’ayant pas le courage d’aller chercher plus loin, l'aventurière se coucha aux pieds de la statue, se collant le long de la pierre chaude contenant le brasier. Il lui semblait qu’elle venait à peine de fermer les yeux quand la jeune femme sentit qu’on tirait sur ses ailes, la guerrière dégaina et s’apprêta à frapper quand elle se rendit compte que les premières lueurs du jours pointaient et que l’esclave de la veille tentait de la réveiller. Devant ce regard de chat égaré et maltraité, Oona n’eut d’autre choix que de la suivre à l’intérieur pour récurer encore une fois la salle immaculée.

Deux jours s’écoulèrent ainsi et le petit ange était prêt à fuir ce repère de fous quand un brouhaha presque agressif déchira le sacrosaint silence. La jeune femme laissa choir son chiffon qu’elle ne faisait que véritablement agité en tous sens et sans grand entrain, pour observer discrètement l’agitation dans le grand hall. Une cinquantaine d’elfes noirs vêtus pareillement d’un pantalon ample et d’une tunique luisant d’un noir soyeux, se tenaient au parfait garde-à-vous devant un Shaakt que la guerrière reconnaissait et un autre confrère à l’air tout aussi méprisant, immobile à deux pas derrière le maître des lieux. L’esclave derrière la petite espionne se mit à frotter plus ardemment comme pour la ramener à la tâche qu’elles venaient à peine de commencer, mais l’Aldryde n’y prêta pas attention, se calant sur un perchoir confortable d’où elle put observer la scène.
Les Shaakts étaient rassemblés comme des pièces sur un jeu d’échec, alignés sans défaut et absolument immobiles, quand soudain ils se mirent à réciter d’une voix mélodique aux accents enchanteurs une sorte de prière incompréhensible pour leur unique spectatrice. Puis chacun alla se saisir d’une sorte de longue épée oblongue en pierre et pendant près d’une heure, ils battirent en rythme l’air sur une cadence parfaite, suant à peine malgré le poids de l’épée lestée. Le Shaakt sublime, qui devait certainement être leur instructeur, défilait au milieu des rangs, suivi par son acolyte se tenant exactement à la même distance, pour corriger d’un coup sec d’une fine canne les défauts de ses élèves. Du point de vue de l’intruse, la correction semblait minime mais elle fut à chaque fois étonnée de voir les elfes accuser le coup comme si leur maître injectait en eux à chaque remontrance une sorte de poison invisible, ou bien encore les blessait sans laisser de trace. Mais au final ces corrections étaient rares et après ce dur labeur, ils enchaînèrent des mouvements ainsi que des figures de plus en plus complexes et de plus en plus rapides sans pourtant paraître souffrir d’une quelconque fatigue.

Sans doute continuèrent-ils ainsi une autre heure et déjà Oona, d’observer la scène, devait se retenir de ne pas répéter les exercices sur son discret perchoir. On venait d’ouvrir devant elle une encyclopédie entière contenant certainement des millénaires de savoir martial. La guerrière était littéralement débordée, captivée même par la fluidité de chacun de leur mouvement et par la perfection mécanique de leurs efforts cumulés. Cela n’avait rien à voir avec le vulgaire « parez-fendez » appris avec sa maitresse d’arme, ni même avec les quelques conseils du Surin et encore moins avec les attaques périlleuses et autres piquets ardents dont elle finissait par être fière. Il s’agissait d’une discipline stricte et exigeante ne laissant aucune place à l’approximation, ni à la fantaisie, chacun des élèves se devait d’incarner l’idéal de perfection et la guerrière brulait d’envie de se joindre à eux. Après ces exercices, il y eut une sorte de pause méditative, puis ils entamèrent de nouveaux travaux avec des sabres véritables, sans fioriture et pourtant fascinants de par leurs courbes audacieuses parfaitement équilibrées. Malheureusement pour Oona se fut le moment où on décida de les mettre dehors, juste au moment où l’esclave finissait de raccrocher un lourd bouclier.

Deux nouveaux jours passèrent ainsi, deux après-midi où l’Aldryde tentait de reproduire les gestes vus la matinée dans l’ombre de la terrifiante statue martiale mais sans autre résultat qu’une sensation de ridicule. D’autant plus qu’elle entendait les élèves redoubler d’efforts lors de nouveaux exercices en faisant tonner de formidables échos monosyllabiques dont la jeune femme sentait la puissance depuis l’extérieur. Un autre jour passa comme les précédents, sa camarade suant dans une tâche absurde alors qu’elle restait cachée à observer le ballet de tous ces corps sculpturaux répétant leurs futures danses mortelles. En revanche, cette fois-ci on ne les jeta pas dehors, mais un garde se fit discrètement voir à la porte, laissant le maître observer un nouvel arrivage d’esclave, puis après quelques paroles à voix basse, le soldat vint chercher la femme et l’entraina dehors avec le reste du cheptel, laissant Oona seule avec un labeur inutile.

Sur l’instant elle comprit qu’on la punissait et qu’on la mettait à l’épreuve, l’exilée ne doutait pas que les elfes n’auraient aucune faiblesse à lui trancher un membre si cela avait pu lui donner plus d’ardeur. L’Aldryde se mit donc à la tâche avec pour seul but de pouvoir finir rapidement et ainsi observer l’entraînement, hélas la labeur était colossal et quand on la mit dehors les sols étaient encore trempés, cependant il n’y eut aucun commentaire et le lendemain elle dut alors redoubler d'ardeur pour rattraper ses erreurs.

Mais la jeune femme avait beau suer sang et eau, elle ne parvenait jamais à achever correctement sa mission et encore moins à atteindre son but, elle était si percluse de fatigue qu’elle sombrait dans le sommeil dès son déjeuner volé et ne se réveillait que pour un dîner dès plus frugale avant d’être à nouveau happée par le sommeil. L'aventurière s'abrutissait en une tâche dépourvue de sens, languissant d'un espoir de plus ne plus flou qui menaçait de la faire regresser à un stade antérieur de désespoir, seule dans cette cité inconnue, vaste et froide. Puis le petit ange comprit que cette salle était en elle-même un symbole, celui d’un type de perfection, de la propreté absolue et que chaque personne désignée pour s’en occuper se devait de l’atteindre. La pièce des trophées n’avait aucun but, elle n’était qu’un miroir sans faute dans lequel le moindre travers de l’individu se reflétait et le marquait jusqu’au moment où l’imperfection du nettoyeur s’effacait, emportant avec elle son reflet.
L’endroit ne devait pas être propre, il se devait d’être sans tache, immaculé de toute trace, parfaitement plat et lisse, prêt pour accueillir de nouveaux condamnés à ce défi. Oona doutait que la femme esclave eut comprit cela car au fur et à mesure qu’elle se perfectionnait, au fil des semaines, voire des mois, elle vit que la saleté avait été masquée, cachée et non pas combattue. Peut-être avait-on fait venir cette femme pour lui montrer le début du sentier à parcourir, car pour les autres esclaves, leur arrivée dans ce manoir signifiait irrémédiablement disparaître au fond d’un couloir sinistre pour ne plus jamais réapparaître. Et dès que l’exilée eut comprit cela, elle trouva la porte menant à la salle des trophées close et le hall vide.

L’Aldryde était entrée comme d’habitude dès que la porte s’était mystérieusement ouverte seule, mais aujourd’hui il n’y avait rien, ni personne. Elle voleta quelques temps dans la grande pièce vide, admirant les fresques, les tentures et les peintures perdues dans l’obscurité du plafond quand, se retournant, elle fut frappée par le charisme du maître des lieux juste à ses cotés. Son immobilisme était tel qu’elle douta de sa réalité et à la dérobée la jeune femme observa les rares défauts de son visage de cendres. Quelques cicatrices légères, loin de l’enlaidir, affirmaient sa beauté et son œil droit à peine plus fermé que le gauche lui donnait un air inquisiteur permanent, hormis cela elle ne put que relever les muscles secs et vifs de sa mâchoire et de son cou, laissant son imagination dessiner le reste du corps. Il lui tendit, dans la paume de sa main incoyablement fine, une dague dont il exigeait la parfaite maîtrise pour ses élèves et qui, à l’échelle du petit ange, ressemblait davantage à une épée de grande taille. Elle s’en saisit donc et courba le dos sous le poids de l’arme, battant lourdement des ailes pour compenser le déséquilibre, quand d’un autre geste gracieux, le guerrier sublime l’invita à démontrer ses talents. Oona décida alors de reproduire la première et seule véritable séquence de mouvements qu’elle avait réussi à mémoriser imparfaitement. La guerrière se posa alors et s’exécuta brandissant gauchement son arme à deux mains, utilisant toute la force de ses ailes pour garder l’équilibre et ne pas chuter ou bien laisser tomber la dague. Les jointures de ses mains étaient déjà blanches d’avoir à serrer un si gros manche et bientôt ses bras se mirent à trembler si fort qu’elle ne put finir convenablement les derniers mouvements qu'en une pirouette douteuse. S’apercevant seulement maintenant qu’elle était trempée de sueur par l’effort et la concentration, l'aventurière se tourna vers le maître d’arme qui avait été silencieusement rejoint par son acolyte. Le guerrier observa un instant l’Aldryde soufflant bruyamment puis se tourna, échangea un bref regard avec son second et disparut d’un pas impérial derrière un rideau bordeaux au fond de la salle. Et soudain on lui parla dans une langue inconnue. La jeune femme fut si surprise qu’elle ne sut quoi dire, puis au bout de longues secondes, elle bredouilla quelque chose ne voulant pas passer pour une demeurée.

« - Je suis désolée, enfin, je ne parle pas, je ne comprends pas cette langue.

- Ne jamais être désolé, mademoiselle, c’est un signe de faiblesse et une créature aussi ridicule que vous devrait mettre un point d’honneur à combattre les faiblesses inhérentes à sa nature, répondit le second dans un langage orque que sa voix rendait soudain charmant. Désormais appelez-moi Deïnshav et référez-vous au grand Zuol, par maître et uniquement maître. Je doute d’ailleurs qu’il vous adresse un jour la parole. Quoi qu’il en soit je vais vous mettre au courant d’une chose.

- Vous m’obligeriez, hasarda l’Aldryde sur son ton le plus respectueux.

Hélas, elle venait de commettre un des nombreux faux pas qu’elle se devrait d’éviter à l’avenir. La guerrière ouvrit la bouche pour s’excuser mais se ravisa, se contentant de subir un silence lourd de reproches et pourtant bruissant de ses propres incertitudes.

- Une faiblesse en moins me semble-t-il. Vous êtes avant toute chose l’objet d’un pari. Je n’est pas été sot au point de défier, même courtoisement, le maître, mais il convenait de profiter de votre incursion, fort opportune, pour lui proposer une petite distraction. Je lui ai donc proposé de faire de vous une combattante, l’idée m’en est venue après votre petite assaut et comme l’entraînement de ses élèves l’occupe la majeure partie du temps, c’est à moi que revient la tâche de vous apprendre quelques ficelles. Bien, revenez demain à l’heure où les autres élèves arriveront et je vous conseille d’être plus sagace que lors de l'épreuve dans la salle des trophées. »

Ce qui lui sembla de prime à bord quelque peu incongru, prit tout son sens à mesure qu’Oona se fit au mode de vie Shaakt. En effet, Deïnshav se retrouvait à devoir lui-même relever son propre défi avec pour conclusion d’en assumer l’échec éventuel et d’en céder la victoire au maître Zuol tout en recevant la fourbe tâche d’assumer l’entraînement de l’ensemble des disciples. Elle comprit que Zuol avait puni son confrère en lui laissant la charge de tous ses élèves et celle, supplémentaire, d’un insignifiant petit oiseau, sans doute pour avoir eut l’outrecuidance de lui parler d’une telle idée. Mais Oona comprit surtout que Deïnshav ne pouvait échouer et de surcrois, que chacun des élèves ne pouvait pas même envisager l’échec.

Dire qu'on l'instruisit de quoi que se soit aurait été un bien grand mot tant on laissait la guerrière suer des matinées entière dans un recoin de la salle. La même chiche poignée de syllabes étaient lâchées du bout des lèvres de l'instructeur et s'en était fini pour plusieurs jours, jusqu'au moment où l'elfe trébuchait presque sur elle comme un objet que l'on croyait avoir perdu depuis des années. Il l'observait alors quelques instants corrigeant sans ménagement et avec un agacement certain les milliers de défauts de l'incapable ou bien la chassait tout simplement, lui refusant l'accès aux cours de l'après-midi. Car durant cette période, période durant laquelle la fatigue propulsait Oona dans le sommeil, les Shaakts étaient instruits de l'essence même de leur future profession, on leur instillait avec autorité toutes les vissicitudes de la stratégie militaire, de l'espionnage ou de l'assassinat. Bref Deïnshav poursuivait l'oeuvre de son maitre évanescent, il faisait d'eux le corps d'élite des armées de Caix Imoros.

Quant au corps de l'Aldryde, il lui sembla que se fut davantage ce dernier qui profita du maigre enseignement que son esprit desséché de solitude et de fatigue. L'équilibre s'imposa comme le véritable architecte chargé de la réfection de cette sculpture vivante imparfaitement battie, travaillant par l'effort et la douleur tel muscle inconnu ou paresseux pour qu'il rebâtisse sur le champ les symétries indispensables de la perfection. La petite élève pratiquait avec sa propre arme lestée et à chaque fin de session, une force nouvelle l'envahissait perçant sa confortable chrisalyde pour lui confectionner un nouveau corps à même de satisfaire les plus hautes exigences. Oona s'attela donc à résoudre l'énigme banale, très tôt élucidée par la plupart des créatures, d’autant plus si elles avaient quelque aptitude pour le vol, recélant pourtant un mystère grandiose qui pouvait même être la clef de voûte de l’univers : l'équilibre. Là encore, l’exilée comprit avec le temps, qu’il ne s’agissait pas de l’univers tel qu’elle le concevait, mais de l’univers intérieur, le seul véritablement porteur d’un quelconque intérêt pour les elfes noirs. Elfes noirs qui n’avaient même aucune velléité à l’étendre autour d’eux car tous ceux qu’ils croisaient étaient des ennemis par défaut et la notion d’équilibre ne pouvait être respectée quand les terrassant ou en les dominant.

Lors de leur très rares discussions, guère plus d'une dizaine au cours de ces mois interminables, Deïnshav lui confia qu'il doutait réelement gagner ce pari tant il était surpri de l'emprise dégoûtante des sentiments et des émotions sur un si petit être. Une faiblesse si grande qu'elle menaçait à chaque instant d'engloutir les efforts qu'il considérait avoir fait avec le plus grand dévouement. Et derrière cet avertissement lâché à mi-mot transparaissait une préoccupation à son encontre bien plus grande qu'elle ne l'aurait espéré, l'Aldryde s'efforça dorénavant d'être plus attentive et de considérer l'abandon plus ou moins total dans lequel on la laissait comme une chance. C'est ainsi qu'elle se hasarda, la nuit venue, à marauder dans les rues en quête principalement de guenilles qui l'abriteraient de l'hiver annoncé, mais aussi pour admirer, haut perchée, les fantasmagories de la cité. Délivrée de la brume ou de la pluie, la citadelle offrait à ses habitants noctambules des spectacles fascinants dans lesquels ils étaient faciles de s'oublier et une fois le sol si méprisé abandonné, Oona trouvait quelques réconforts en se laissant pénétrer par le malaise d'une perte de repère. En effet, il devenait difficile de savoir si les sculpturales spires s'élevaient des pavés pour prétendre à l'absolu des cieux ou bien si le firmament lui-même n'était que le sol faussement concave d'une gigantesque salle à colonnades. Car avec l'arrivée d'un froid plus mordant, chacunes des pierres couvertes d'embruns à peine gelés, se transformaient en autant de vieux miroirs floux reflétant imparfaitement les constellations impassibles, transformées ainsi en bas-reliefs magiques.
Ainsi les rares comploteurs nocturnes semblaient marcher comme des dieux dans les halls de l'infini, martelant la voûte céleste ou son reflet avec une égale grandeur.

Parfois, il prenait l'envie à l'instructeur d'arracher tous ses secrets à sa nouvelle disciple et c'est avec un ton acerbe, un véritable poignard de runes rendu habile par des siècles de joute verbale qu'il la dépiautait sans ménagement pour en abandonner distraitement la carcasse une fois sa faim éteinte. Tout comme cet apprentissage sans fin, semblait-il, ceci était de l'ordre du jeu et de la distraction et il y avait bien longtemps qu'Oona avait renoncé à toute sympathie ou familiarté. Cependant, l'imprévisibilité souvent perverse des Shaakts la surprit lorsque Deïnshav s'épancha un court instant dans une sorte de confession rituelle n'appelant même pas à l'absolution. D'un ton neutre qu'elle crut d’abord chargé de reproches ou de mélancolie macérée, car il évoquait en permanence les autres, c’est-à-dire, les autres elfes noirs et plus généralement le reste du monde, il soliloqua. Et la guerrière comprit que c’était au final le résultat de siècles d’observation et de sagesse et bien qu’elle-même arrivait à la fin de son premier siècle, il lui semblait qu’il avait été gaspillé en futilités évanescentes.
Deïnshav considérait l’histoire des rebelles et de l’annexion par Oaxaca de Caix Imoros comme un état à peine dérangeant et seulement passager, tout au plus une piqure de moustique que seuls les jeunes chiens fous grattaient jusqu’à en faire jaillir le sang. Que pouvait bien faire la fille des ténèbres face aux elfes noirs ? Cette conquête n’était qu’une manière d’affirmer sa puissance face aux espèces inférieures en prétendant que la plus noble des races était désormais sous son joug. Pour lui, les rebelles oubliaient que les vrais Shaakts nobles et purs, n’avaient pas à se soucier des autres races qui grouillaient un bref instant entre les passages de l’implacable meule du temps. Ils s’agglutinaient dans ses sillons, totalement ignares de l'inéluctabilté lancée à pleine vitesse, grondante juste au-dessus d’eux. Ces francs-tireurs donnaient un bien triste crédit à toute la vermine se croyant au-dessus des enfants du divin, au-dessus de ce qu’avait toujours été et que serait à jamais les elfes noirs.

Comme Deïnshav l'avait confié à Oona, Caix Imoros était bâtie à l’image des ses habitants, une collection de tours sublimes et sans défaut, toutes isolées malgré la foule compacte et rechignant à nouer des relations avec autrui. Du moins en allait-il ainsi à la surface, car malgré l’interdit tacite, la jeune femme avait osé interroger l’elfe sur la ville souterraine qu’elle entrevoyait et devinait ou bien sur les propres femmes de son peuple. A ses questions, l’instructeur avait répondu par un silence et une distance glaciale de plusieurs jours.

Rarement, maître Zuol répandait son angoissante présence dans le hall et lors de ces précieux passages, chacun redoublait d’effort y compris sa plus petite élève bien qu’il ne s’intéressât jamais à elle, totalement ignorant de son sort. Jamais il ne corrigeait ses apprentis plus d’une fois, si par malheur il devait intervenir à nouveau lors du même exercice, le coupable était chassé jusqu’à nouvel ordre. Un jour cependant, la jeune femme assista à une scène qui lui dévoila alors toute l’étendue de la violence et de la cruauté que pouvait abriter le maître.
Les élèves étaient rangés en fonction de leur capacité, de leur intelligence, de leur potentiel et dans une moindre mesure, selon leurs titres de noblesse, les derniers rangs recevaient donc rarement l’attention du maître ou de l’instructeur. Et lorsque Zuol défila, ce fameux jour, devant ses parangons, il reprit l’un d’eux si violement du plat de sa canne que l’arme de l’élève tomba à proximité du maître. A ce moment toute la salle se pétrifia et Oona put même apercevoir sur les traits des plus jeunes un semblant de peur qui lui donna la plus longue sueur froide de sa vie. Le silence absolument insupportable qui aurait dû habituellement suivre n’eut pas lieu et c’est avec une célérité ahurissante que le maître marcha au-dessus de l’arme puis dans le même mouvement, grâce à une passe splendide, fit décoller le sabre derrière lui avec ses pieds. La seconde d’après il saisit l’arme tournoyante au-dessus de lui et trancha la main droite du coupable qui alla rebondir à l’autre bout de salle laissant une traînée absolument rectiligne depuis son ancien propriétaire. La scène avait été incroyable de précision froide et de résignation absolue, et tout le crédit de l'élève s'était évanoui, le laissant nu avec à peine plus de majesté que celle d'un crucifié. Avant que le cours ne reprenne, Zuol sanctifia son geste en ordonnant qu’à jamais la place de l’incapable restât vide pour signifier à tous qu’aucun membre de la garde d’élite de Caix Imoros ne devait jamais perdre son arme même face au néant. Ces mots réinsufflèrent un semblant de vie à l’auditoire littéralement tétanisé.

Un autre évènement vint changer la monotonie du strict entraînement. En effet pour beaucoup, l'apprentissage, long parfois d’un demi-siècle, prenait fin et ils se devaient de se faire forger l’armure du corps d’élite. Tous, y compris Oona, se rendirent donc de l’autre coté de la ville, chez ce qui ressemblait le plus à un ami de longue date pour le maître de l’école d’escrime selon Deïnshav. Dans les rues le groupe ne passait évidement pas inaperçu, marchant au pas impeccable et arborant déjà un uniforme semblable, cependant il n’y eut que quelques esclaves pour lever timidement la tête et remarquer la présence d’une curieuse élève au milieu de la cohorte arrogante. Chez l’armurier, cette dernière fut fascinée par la beauté quasi parfaite de toutes les œuvres, les armures rayonnaient d’une aura si puissante qu’elle doutât que quiconque puisse ne cesserait-ce que les érafler et quant aux armes, elle resta pantoise devant leurs courbes mortelles.
L’artisan, un Shaakt d’un calme si intense qu’il semblait presque physique, prit chaque compatriote à part pour en prendre les mesures et le conseiller sur ses futures choix d’armes. Et alors que la compagnie allait rebrousser chemin, l’Aldryde tenta une approche à la manière de tout bon elfe noir, se plantant devant le forgeron et lançant tout de go :

« - Il me faut une armure maître forgeron ! utilisant au passage le terme Shaakt pour maître comme elle l’avait entendu si souvent.

- Prenez donc place, mademoiselle et dites moi exactement, il insista sur le mot, ce que vous désirez.

- Je voudrais …

- Vous voulez chère cliente, vous ne souhaitez pas, nous sommes dans une maison de prestige ici.

- Je veux donc une armure légère et peu encombrante, quelque chose qui n’entrave en rien mes mouvements ni mes capacités de vol. Je veux quelque chose qui impressionne, qui fasse comprendre à mes adversaires qu’ils ne croisent pas le fer avec un insecte méprisable mais avec une guerrière en puissance. Je veux quelque chose de beau et de terrifiant comme vous seul savez le faire. Elle stoppa, fière de sa diatribe.

- Combien de temps avez-vous répété votre discours, je me le demande. Mais soyez assuré que ce genre de défi me plait, sincèrement. Veuillez vous dévêtir que je puisse prendre vos mensurations exactes et que nous procédions à quelques exercices de souplesse. »

Oona s’exécuta et bientôt l’étrange compas de l’artisan se mit à cavaler sur chacune des parties de son corps, reportant ses mensurations, calculant l’amplitude de ses mouvements, examinant les écartements maximums de chaque orteil jusqu’aux ailes. Il n’y avait aucune commune mesure entre ces investigations professionnelles et les violations intimes que lui avait fait subir feu Gakmar, il y a si longtemps. La jeune femme profita d’ailleurs de cette nudité pudique, pour admirer son nouveau corps dans le miroir d’un bouclier d’argent poli. Ces heures à soulever des poids et à effectuer les mêmes mouvements avaient comme gainé son corps d’une nouvelle enveloppe de muscles nets et propres qui glissaient avec ravissement sous sa peau diaphane encore marquée de taches noirâtres indélébiles et de quelques cicatrices. L’elfe noir ne semblait pourtant pas passionné par ses relevés pointilleux car d’un coté il prenait grand soin de mesurer chaque particularité de ce petit corps alors que de l’autre il griffonnait à peine quelques traits sur un lointain parchemin. L’exilée mit ça sur le compte de l’habitude et qu’elle ne fut pas sa surprise de voir au final son image exacte, plusieurs fois reproduite, sur le papier jaunâtre et cela sans la moindre trace de rature ou d’hésitation. Le forgeron garda un long moment le silence en frôlant du bout de ses longs doigts les vêtements de l’Aldryde, puis il dit :

« - Voilà une bien étrange étoffe, à plusieurs niveau elle ressemble à nos plus fines soies d’araignée, mais j’y sens clairement une densité magique importante. Quant à cette feuille que vous utilisez comme cape, savez-vous de qu’elle espèce il s’agit ?

- J’ai bien peur que non. Je l’ai trouvée dans les Bois Sombres, près d’Omyre, il n’y a guère de feuilles valables là-bas, j’ai pensé qu’elle pourrait m’être utile.

- Intuition bienheureuse au final, gardez la précieusement, elle aussi recèle de grands pouvoirs. Je veux en revanche gardez la tunique pour m’en servir de base pour l’élaboration d’un gambison léger ou d’une broigne de type elfique, qu’il sera possible de couvrir d’une cuirasse légère.

Il stoppa net son discours et Oona crut qu’il avait fini alors qu’elle était encore à moitié nue, puis le silence s’installa de plus en plus lourd. Le petit ange comprit qu’il venait de faire une erreur et en subissait les conséquences. La guerrière réfléchit mais elle ne vit aucune sortie possible et s’avoua vaincue en sacrifiant à la tradition de se racler la gorge à la manière des perdants et des animaux.

Lorsqu’il répondit sa voix avait changé du tout au tout.

- Mes émoluments.

- Oui, bien sûr.

Elle refreina un « désolé » et sortit son fuseau de cuir patiné d’où elle fit jaillir une majorité de pièces d’or, un perle et un morceau de corail qui capta l’attention de l’artisan.

- Ceci est des plus intéressants, dit-il en se saisissant de l’objet précieux. Un somptueux corail de la Côte des Larmes, un corail royal encore vibrant de la fureur de l’océan. Je crois être en mesure d’en faire quelque chose de parfaitement prodigieux grâce à une alchimie dont j’ai le secret. Voilà qui promet un intéressant défi. »

Il se saisit négligemment de plusieurs pièces d’or, les fit disparaître dans un tiroir de son bureau et confirma que c’était un premier versement satisfaisant tout en fixant un rendez-vous pour plus tard. L’Aldryde se vêtit d’un simple carré de tissu noué à la taille et retourna à ses épuisantes journées d’entraînement et à ses très rares vagabondages tout en imaginant le résultat final qu’elle espérait prodigieux. A la date convenue, elle ne fut pas déçue.

Elle fut d’abord confrontée à un mannequin de bois sans tête et de peu son jumeau, recouvert d’une armure plus belle et imposante qu’elle n’aurait pu l’imaginer. C’est avec un plaisir non feint que l'artisan aux multiples facettes lui en fit la réclame tout en la couvrant du fruit de son labeur.

« - Comme je l’avais espéré, la soie de votre peuple s’est très bien comportée et j’ai pu sans difficulté la repriser et surtout la doubler à la manière d’une broigne. Il y a donc plusieurs couches de très fine soie arachnide, rembourrées avec des résidus de cocon très légers et résistants, le tout étant cousu en damier selon une technique personnelle avec ce que l’on pourrait qualifier de fil métallique. Le résultat doit normalement être une superposition de couches protectrices dont le fin maillage empêche les dégâts d’estoc. En revanche à cette échelle il ne faut rien espérer hormis si l’un de vos condisciples tente de vous empaler.

Oona enfilait son ancienne tunique de silm et de feuilles magiques, appréciant avec ravissement cette nouvelle doublure robuste qui tombait à la perfection sur ses épaules et n’entravait en rien ses mouvements. La finesse des coutures l’émerveilla à tout point de vue.

- Ensuite, je vous avais promis une cuirasse et ce méticuleux travail m’a permis de tester un matériau dont j’avais les plus hautes espérances. Ceci est donc une cuirasse, évidement plus renforcée à l’avant qu’à l’arrière au vu de votre physiologie, en cuir de requin des abysses. Normalement ce cuir se comporte pauvrement et réagit globalement mal au divers traitement sauf sur de petites surfaces. Son emploi me semblait donc nécessaire. Vous remarquerez l’ajout de cinq courtes lames effilées dans le dos qui en plus de rehausser la noblesse de mon œuvre protégera quelque peu vos ailes.

Quand il eut finit de nouer les fines cordelettes de soie sur les flancs de la guerrière, celle-ci eut tout le loisir de s’admirer avec sa nouvelle armure. Le cuir était d’un marron sauvage, à peine tacheté d’un léger noir fauve qui ne faisait que donner plus de relief à la cuirasse qui épousait parfaitement ses fines courbes tout en restant d’un poids négligeable. La jeune femme battit des ailes et se contorsionna pour observer les lames, dont la taille allait crescendo, courir le long de sa colonne, lui donnant un curieux aspect barbare.

- N’imaginez pas que tout ceci arrêtera un coup d’épée normale, mais si par mégarde la pointe vous frôle d’un peu trop près, il ne vous arrivera rien, le fil glissera sur vous, laissant vos entrailles bien au chaud. Passons maintenant à ce corail qui enserrera désormais votre bras gauche d’un rempart carmin du plus bel effet, sachez que j’ai bon espoir qu’une partie des énergies de l’océan aient été conservées lors du processus. Mais, je tenais à garder le meilleur pour la fin évidement.

- Voici donc vos nouvelles cuissardes. Elles aussi sont en cuir de requin des abysses et doublées de soie, elles vous protégeront d’autant plus que je les ai renforcées de grèves, je crois que le terme exact dans cette langue est cnémides, qui ont donc été tirées d’un acier très fortement laminé. Elles sont ainsi vraiment minces, mais conservent beaucoup de leurs propriétés même à votre échelle.

Oona s’admira un long moment en silence devant le miroir du bouclier, déambulant et ne résistant pas à l’envie de mimer quelques passes d’armes. Ces bottes terminaient admirablement l’œuvre de l’artisan, s’enfilant comme une seconde peau douce et déjà chaude avec juste assez de talon pour rendre l’Aldryde un peu plus menaçante. Les cuissardes s'arrêtaient à mi-cuisse, laissant un fin bandeau de chair entre leurs extrémités et le début des coutures de sa nouvelle tunique, l'ensemble s'approchait au maximum de la perfection. Même les anneaux, témoins inaltérables de son enfer passé, tombaient exactement sur ces chevilles comme des ornements princiers. Mais surtout, les grèves étaient ornées, aussi improbable que cela puisse paraître, de sculptures d’une finesse impensable. L’une représentant la déesse des profondeurs, une Méduse terrifiante à la chevelure de serpents qui s’enroulaient jusqu’à l’enflure du genou, l’autre magnifiant les traits de la déesse des souterrains, l’Araignée-Mère au torse de femme posé sur un gigantesque corps de veuve noire bouffie dont la toile emplissait toute la hauteur du tibia. La guerrière était convaincue qu’elle n’avait pas attendue en vain et que cette commande lui apporterait une pleine et entière satisfaction. Au risque même de faire durer le défilé trop longtemps, la jeune femme scruta longuement les moindres détails de sa nouvelle parure martiale, s’interrogeant sur les moyens utilisés par l’artisan pour parvenir à coudre si minutieusement pareils objets tenant, au final, tout juste dans sa main. Finalement quand l’exilée lui confia qu’elle était dans l’incapacité de lui verser le reste de la somme demandée, il parut s’offusquer et la sermonna pour son langage déplacé. L’argent ne devait jamais être un problème et le temps encore moins, l’elfe avait une entière confiance en ses clients et, dans sa boutique, il ne devait être question que d’art et jamais de vulgaires espèces sonnantes et trébuchantes. De plus, il lui confia avec un sourire pervers, qu’il ne valait mieux pas qu’elle trahisse un Shaakt aussi puissant que lui.

Lorsque au cours d’un déjeuner, l’instructeur se contenta de déclamer de sa voix neutre que tout cela avait été une expérience intéressante, Oona comprit que son enseignement était bel et bien achevé et pourtant elle ne pensait pas avoir appris grand-chose. Certes la guerrière était plus rapide et un peu plus forte, elle ressentait davantage les mouvements et comprenait plus en profondeur les mécanismes des déplacements, mais elle n’avait jamais encore combattu, tout son savoir restait relativement abstrait. Sentant la fin approcher l’Aldryde passa le reste de sa dernière journée à revoir à fond l’ensemble des exercices, déambulant sans cesse et voltigeant dans le corridor fouetté par un vent mordant qui nimbait de givre les colonnes à la nuit venue. Cette nuit là d’ailleurs, elle dormit peu, collée contre la pierre chaude, l’exilée força le flot de sa mémoire à remonter vers l’amont de ses souvenirs, louvoyant à rebours dans les rapides de réminiscences fugaces et remontant même d’infranchissables barrages de douleurs et de fatigue révolues. En revanche, elle ne trouva aucun méandre paresseux qui aurait invité au calme, ni même de petits lacs paisibles, seule l’inquiétude et l’incompréhension avaient foré des gouffres tourbillonnants qu’elle pouvait désormais franchir sans trop de heurt. Oona finit par s’endormir avec un mauvais goût dans la bouche et lorsqu’elle pénétra seule dans la salle au petit matin elle crut qu’un mauvais charme l’avait renvoyée des semaines dans le passé tant l’atmosphère était inquiétante de silence. Et de la même manière qu’il était apparu auparavant, maître Zuol se retrouva juste derrière l'aventurière qui ne put réprimer un mouvement de surprise, c’est alors que l’elfe s’exprima sans doute plus qu’il ne l’avait fait depuis bien longtemps.

« - Je suis fort aise d’avoir gagné ce pari dont les chances ne semblaient pas être en ma faveur. C’est un point que l’on peut qualifier de positif pour l’école, peut-être qu’avec de meilleurs élèves je pourrai tester mon art martial plus en profondeur à l’avenir.

En dépit de toutes convenances, Oona répondit au maître et osa même le questionner.

- J’en suis moi aussi très satisfaite comme vous pouvez l’imaginer et je veux donc profiter de cette chance pour vous poser une question capitale.

- J’entends bien.

Et l’Aldryde crut même discerner un soupçon d’ironie dans le ton cassant de sa voix.

- Avez-vous entendu parler d’un certain Eurast, peut-être un magicien de votre race ?

- Ainsi le petit vermisseau est au final un espion des forces sombres. C’est une possibilité que nous avions envisagé avec ce cher Deïnshav mais sans trop y croire. De plus cette histoire remonte à une vingtaine d’années si ce n’est davantage.

Il pausa pour faire monter un début de suspens ou tout simplement pour retrouver les exacts détails dans sa mémoire millénaire.

- Eurast s’est fourvoyé en offrant ses services à Oaxaca, il a choisi la facilité alors qu’il aurait pu correctement servir le Dieu Sombre. Quoi qu’il en soit il a fuit au sud de nos terres, loin dans les forêts et les marécages de l’Atha Ust, mais il s’est bien vite fait rattraper et à été châtier de la plus terrible façon. Si vous le cherchez tant que ça cet infâme, il ne sera pas difficile à trouver. Sa tour est l’une des plus hautes et elle est surtout gardée par une petite armée de damnées, des morts qui n’ont pas non plus eut le droit au repos de leur âme. »

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Et sur moi si la joie est parfois descendue
Elle semblait errer sur un monde détruit.

Oona

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 Sujet du message: Re: Les rues de la ville souterraine
MessagePosté: Mar 28 Juin 2011 01:52 
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Dehors la chaleur du jour s’estompait peu à peu, laissant place à une nuit fraîche et agité. Bien qu’il fût encore tôt, la population nocturne que nous sommes commençait à s’éveiller et à vaquer à ses occupations. Je marchais silencieusement dans les rues évitant de croiser d’autres regards, pour ne pas me faire questionner sur ma mine soucieuse. Je préférais garder mes ennuis pour moi seule et trouver la solution de par moi-même. Le décor du chemin que j’empruntais n’était pas différend des autres jours. Tous les soirs c’est la même routine, après le coucher du soleil j’empruntais cette rue et d’autres petites ruelles sombres qui me conduisaient vers le temple, puis je priais notre déesse. Ce soir n’était pas différent des autres, seul les idées qui me traversaient l’esprit était autres.

J’accélérai le pas le temple de Valshabarath était en vue, mais je n’avais aucune raison d’aller plus vite dans cet endroit ou la souffrance régnait. À mesure que le temple grossissait, je contemplai sa splendeur. Je gravissai les marches en pierre qui menaient aux grandes portes noires qui gardaient le temple de la cruelle, puis poussai les énormes panneaux de bois et entrai dans le lieu de prières malsaines.


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 Sujet du message: Re: Les rues de la ville souterraine
MessagePosté: Mer 29 Juin 2011 07:08 
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Je sortis du temple de Valshabarath toute excitée à l’idée d’avoir trouvée un moyen digne de quitter Caix Imoros. J’empruntai les mêmes ruelles à sens inverse pour rentrer chez moi, que pour aller au temple. Il y avait plus de gens dans les rues qu’à mon départ, je n’avais pas conscience de temps que j’avais passée à prier et à penser. Tous s’étonnaient de me voir cavaler dans les rues de la cité, moi qui d’ordinaire avais un tempérament calme, mais personne ne fit de remarques. Les shaakt sont tous préoccupés par ce qui les concernent ou par ce qui leur apportent avantage, une fille qui a l’air très pressé ne les intéresse pas.

Plus je me rapprochais de ma demeure, plus mon excitation diminuait et se transformait en crainte et angoisse. Je ralentissais le pas, comment j’allais annoncer à ma famille que je les quittais? Et pour aller où? Je ne savais pas vers quelle ville me tourner pour mon expédition.

Ma maison était en vue, avec sa sinistre architecture, taillée dans cette pierre noire dont était faite toute la ville, elle ressemblait à toutes les autres habitations du milieu aisé. Maintenant j’hésitai à leur en faire part, mais je ne devais pas reculer. La réaction qu’ils auraient me faisait peur, mais je ne pouvais pas rester plus longtemps. Je tournai la poigné de la porte et entrai dans ma lugubre demeure.


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 Sujet du message: Re: Les rues de la ville souterraine
MessagePosté: Lun 4 Juil 2011 06:10 
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Alaena était peut-être celle qui tenait le plus à moi dans la famille, c’est pourquoi une fois dehors elle me bombarda de questions à propos de mon départ. Je percevais sa frustration de devoir me laisser aller, mais aussi le bonheur qu’elle avait pour moi.

« Alors, mère est en accord avec ton départ? »

« Oui, je lui ai annoncée ce soir et elle a insistée pour tout organiser. »

Le visage d’Alaena devint méfiant, comme moi elle connaissait les habitudes de notre mère et son goût du complot.

« Où vas-tu aller? »

« Je ne sais pas encore, mère organise tout. Mais ma destination m’est égale, tant que je peux servir notre déesse. »

Je parlais toujours de Valshabarath comme étant la déesse de tous les shaakts et non la mienne uniquement. Alaena grimaça encore, visiblement elle n'aimait pas que ma mère dirige tout. Nous marchâmes un moment en silence, s’était peut-être la dernière fois que je voyais la sœur qui m’avait servi de modèle et à qui je m’efforçais de ressembler. Alaena aussi savait que cette marche avec elle était possiblement l’une des dernières, je la sentais à la fois triste et heureuse.

À quelques mètres de la porte elle m’arrêta, posant ses mains sur mes épaules et me regardant avec ses yeux rouges désormais légèrement humides. Elle ne voulait pas me montrer qu’elle avait des émotions autres que la colère et retenait ses larmes. La voir comme cela me donnait aussi les larmes aux yeux, mais comme ma sœur je le cachais.

« Promets-moi de revenir! »

En un clignement d’œil, elle devint sérieuse me regardant dans les yeux.

« Promis, je reviendrais un jour, ne t’inquiète pas. »

Je lui souris, elle ne se doutait pas que quand j’allais revenir ce serait pour prouver aux shaakts que la lumière aussi méritait leur vie.


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 Sujet du message: Re: Les rues de la ville souterraine
MessagePosté: Dim 10 Juil 2011 06:02 
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Une fois la porte de la maison fermée et mes adieux terminés, je découvris avec horreur un chapeau ridicule sur la tête d’un bâtard qui attendait dans la rue. Je le reconnus même s’il était de dos, son chapeau ne tromperait personne. À ce moment j’en voulus encore plus à ma mère et je portais un mépris encore plus grand pour ce semi-shaakt. J’allais à sa rencontre en espérant que ce soit un hasard qu’il attende précisément devant chez moi ou qu’il soit perdu.

« Par la grande déesse, dites-moi que vous n’êtes pas Adrennor Elerossë. »

L’homme se retourna un air las au visage, il me détailla sans aucune gêne et soupira. Lui non plus n’était pas très enclin à l’idée de m’avoir comme compagnie.

« Malheureusement pour vous … » Il cherchait comment m’appeler. « Dame Sienna, c’est bien comme ça que je me nomme. »

Il retira son chapeau et effectua une révérence, avant de reposer son horrible couvre-chef sur sa tête. Je croisai les bras mécontente de devoir faire le voyage avec l’homme désagréable de la taverne. Je m’en débarrasserai le plus tôt possible, je m’en fis la promesse! Cependant, je savais désormais pour qui il avait des comptes à rendre et ma curiosité en demandait plus.

« Vous n’avez pas de bagages? »

Il ne portait pas de sac de toile remplis de victuailles comme moi, je trouvai cela étrange pour quelqu’un qui allait entreprendre un aussi long voyage.

« Elles sont avec Estelmist. »

Je me demandai qui était cet Estelmist, ma mère ne m’avait pas parlé d’une autre personne qui nous accompagnerait. Cela commençait à devenir gênant, comment voulait-elle que je prenne ma vie en main si elle me collait sans cesse des nuisances? Je ne dis rien et rattrapai Adrennor qui se dirigeait déjà vers le grand escalier.

« Ça vous gênerait de m’attendre? »

Sans ralentir le pas il me répondit que la route serait longue et qu’il fallait partir un jour si nous voulions arriver. Ce qui n’était pas faux, mais je n’appréciai pas la manière arrogante avec laquelle il me l’avait dit. Je continuai en silence de le suivre.


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 Sujet du message: Re: Les rues de la ville souterraine
MessagePosté: Mar 17 Déc 2013 14:47 
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Inscription: Jeu 12 Déc 2013 00:56
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Une milice implacable

Wyken venait de quitter les gardes et se sentait déjà plus à lèse. En effet il était plus habitué à l'ambiance de la ville souterraine que celle d'en haut. Wyk marchait nonchalamment dans ces rues, heureux d'avoir quitté la ville haute. La voie était peu éclairée, comme à son habitude. Seuls des lampadaires, maintenant une torche en hauteur, offrait un peu de lumière. La chaussée était propre et un fin ruissellement d'eau coulait sur les côtés de la route.
Pas mal de personnes étaient encore présents dans les rues. Certaine, comme Wyk se baladait, d'autres plantés au pied d'un lampadaire discutaient. Après une dizaine de minutes de marche, suivant toujours la route que le garde lui avait montée, il aperçut un homme. Son visage était triste, marmonnant des injures dans son coin. Wyken arriva à hauteur de l'homme ce qui lui permit d'entendre son désarroi.

« Merde, merde, merde... J'ai tout perdu... Nan c'est pas possible ! Pourquoi il a fallu que ça tombe sur moi? Comment je vais faire... »

Wyk le visage interrogateur se demandait la raison qui avait bien pu mettre l'homme dans un tel état. Poursuivant son chemin, il finit par entrevoir une enseigne "La taverne noire".

(Ha enfin, je vais pouvoir boire un coup)

Avant qu'il n'arrive jusqu'à la porte, Wyk put voir plusieurs personnes sortir. Certains affichaient un grand sourire, d'autres en revanche, à l'image de l'homme croisé précédemment, arboraient un air triste et déprimé.

(Intéressant, visiblement cette taverne n'offre pas seulement le loisir d'un rafraîchissement)

Une fois arrivé face à la porte, il marqua une pause. Un mélange de méfiance et d'excitation l'envahissait. Excité de pouvoir savoir ce qui se tramait d'intéressant à l'intérieur mais inquiet de l'éventuelle galère dans laquelle il pourrait être embarqué. Il prit une grande bouffée d'air, sourit et entra.

Le parieur

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 Sujet du message: Re: Les rues de la ville souterraine
MessagePosté: Lun 28 Déc 2015 13:10 
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Inscription: Sam 12 Déc 2015 23:07
Messages: 13
Une fois dans les rues, je me revêts de mon masque d’indifférence et de grâce, chose que toute shaakt digne de ce nom apprend dès son plus jeune âge. Les passants, dans la ville, ne sont que des individus de mon peuple. Je reconnais des visages, celles de filles de maisons rivales, d’autres de maisons plus ou moins alliées. Elles sont accompagnées par les serviteurs qui leur sont dévoués. Majoritairement des individus du sexe masculin, selon les apparences, et de toutes races. Mais la plupart sont des sekteg, des êtres misérables et bon marché ; je le sais pour en avoir moi-même achetés quelques-uns au marché des esclaves. Un bon rapport qualité/prix, mais uniquement viables pour les tâches les plus débilitantes, physiques et qui ne nécessitent aucune réflexion.

Lorsque je circule entre les maisons, mon regard parcourt les façades noires, pour certaines recouvertes partiellement d’ossements blanchis par la magie. Je ne peux m’empêcher d’admirer certaines demeures : elles sont vraiment sublimes ! La Maison Upvel Kaz a toujours été plutôt sobre, du fait de son exigence largement supérieure à la moyenne en ce qui concerne le talent de ses propres membres. Nous sommes assez humbles, même si nous sommes conscients de notre valeur : et nous n’exposons sur nos murs que les individus véritablement extraordinaires de notre dynastie. Pas comme ces rustres d’Eldar An, qui seraient prêts à exhiber les ossements de leurs serviteurs si cela pouvait leur faire gagner en prestige.

-Par Valshabarath, que ces prétentieuses m’exaspèrent ! marmonne-je entre mes dents sans même y faire attention.
-Vous avez raison, maîtresse ! Souhaitez-vous que je le leur signifie ?

C’est un de mes esclaves sekteg qui vient de prendre la parole. Je ne me souviens pas de son nom, mais son faciès m’est familier : il est très appliqué, et propose sans cesse de prendre des initiatives. Je résiste à lui annoncer sur le champ qu’il fera partie des prochains sur lesquels je m’entrainerai. Je le corrigerai plus tard pour avoir pris la parole sans me le demander : j’ai actuellement l’esprit ailleurs.

-Silence ! me contente-je de siffler.

Nous continuons notre progression entre les maisons de marbre noir luisant, dans les rues d’une propreté exemplaire. Sur certaines Maisons sont fichées les têtes de Mères opposantes. Seules deux catégories de Maisons s’amusent ainsi : les puissantes et les idiotes. Les Upvel Kaz ne sont pas encore suffisamment ancrés dans la première catégorie, et n’appartiennent certainement pas à la deuxième. Mais un jour, un jour proche si les plans de Mère, avec mon support et celle de ma soeur fonctionnent, nous pourrons nous aussi prouver ainsi notre puissance. Plusieurs maisons nous sont d’ores et déjà soumises : encore quelques-unes, et nous seront à même de prouver notre puissance.

Enfin, nous arrivons à la milice. Le bâtiment, fait du même matériau que les autres habitations, montre l’emblème de la ville des matriarches : une araignée sur un fond mi violet, mi noir. Il émane de cette construction ancestrale une autorité naturelle dans sa sobriété. Rien de négligé, de laissé au hasard. Les Shaakts ne sont pas un peuple qui laisse le destin guider leur vie. Notre destin, nous le forgeons, sans laisser la chance de décider à notre place. Voilà le message de ce bâtiment : en nous fiant aux enseignements de Valshabarath, en adorant Phaïtos, nous assureront le futur de notre peuple. Je souffle avant de prendre une grande inspiration, et de reprendre mon avancée. Je pénètre dans l’édifice.


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