Précédemment => Premières disputesUne vie contre une parole
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A vive allure et la tête emplie de mauvaises pensées, Kalas progressait dans les rues nuageuses de Dehant. L'altercation avec son ami Cornélius l'avait surprit, lui qui avait toujours trouvé le Sinari doux comme un agneau. Le jeune mage ne pouvait comprendre une telle réaction de sa part, et bientôt, c'est toute la dispute qui se répéta dans sa tête.
Tentant de chasser cette histoire de son esprit, Kalas se dirigeait à grands pas en direction du quartier général de la Milice. Désireux de mettre un terme à cette affaire, il souhaitait voir tout le monde rentrer chez lui et ne plus jamais parler de cette mésaventure.
(Je ne veux plus jamais en entendre parler, jamais !)Après une quinzaine de minutes de marche au milieu des rues bondés par un jour de marché, le jeune homme parvint à atteindre sa destination.
Face à lui, la petite bâtisse se dressait devant lui, ressemblant davantage à une tour qu'à une caserne. Surplombé de plusieurs étages en pierre taillé, le quartier général de la Milice ne se distinguait d'une simple bâtisse que part son ornement de drapeaux aux couleurs de la ville. La large porte de bois qui faisait office d'entrée principale était ouverte d'un seul battant, laissant circuler un garde qui entamait sa ronde.
Kalas rajusta son sac et avança d'un pas plus léger, dans un milieu qu'il ne connaissait pas. Peu habitué à ce genre d'endroit, il dépassa le garde posté près de la porte avec un tremblement nerveux. En pénétrant dans la salle d'accueil, le jeune mage regarda rapidement les murs décorés de diverses tapisseries ornés de l'écusson de Dehant. Au milieu de la pièce se trouvait un homme d'un certain âge, assis derrière un bureau de bois, tentant de lire un parchemin par dessus ses lunettes.
En s'approchant près du bureau, le jeune mage posa ses deux mains à plat sur le bois et tenta d'attirer l'attention du réceptionniste par un raclement de gorge. Ce dernier ne fit pas immédiatement attention au visiteur, mais l'ombre qui lui cachait sa lecture l'interpella et il leva les yeux vers Kalas.
« Ha ! Bonjour, monsieur ! Qu'est-ce que je peux faire pour vous ? »« Oui, bonjour monsieur. Excusez-moi, je cherche un milicien-instructeur du nom de... »« Haaa, l'instructeur Lyan. C'est à quel propos ? »« Je souhaiterais m'entretenir avec lui au sujet d'un certain Ernest Bellevue. »Le vieil homme reposa les yeux un instant sur ses parchemins, qu'il éparpilla un peu partout sur son bureau tout en répétant le dernier nom entendu.
« Ernest Bellevue...Bellevue, Bellevue… Ha, je l'ai ! Restez-ici un instant, je vais l'informer de votre visite. »Sur ces mots, il passa une porte près de lui et referma celle-ci avant d'emprunter un escalier aux planches grinçantes. L'ascension dura une dizaine de secondes, pendant lesquelles le jeune homme ne put s'empêcher de sourire bêtement, avant de se concentrer à nouveau sur les ornements aux murs.
Quelques minutes plus tard, Kalas entendit à nouveau l'escalier couiner sous le poids de plusieurs personnes. Le viel homme ouvrit la porte et la tenu derrière lui, avant de se rasseoir dans un soupir de fatigue.
L'instructeur Daryl Lyan apparut devant le jeune mage, dans son uniforme militaire. Il se décoiffa de son casque et tendit une main amicale vers Kalas, qui s'empressa de la lui serrer d'un tremblement nerveux.
« Jeune homme, merci d'être passé. Venez, allons dans mon bureau. »Après avoir passé la porte et emprunter le fameux escalier, Kalas pénétra dans un bureau fort modeste, mais peu avare en matière de trophées. Allant de l'épée aux reflets azurés à une authentique peau d'ours tannée, le jeune homme descella chez l'instructeur un goût prononcé pour la décoration qu'il n'aurait jamais soupçonné. Ce dernier lui indiqua une chaise en face du bureau, puis il vint s'asseoir sur un beau siège ressemblant davantage à un trône de bois qu'à un fauteuil.
« Asseyez-vous, je vous en prie. »Un peu nerveux, Kalas ne savait trouver sa place dans un endroit aussi distingué. Il tira rapidement la chaise qui cria sur le parquet, avant de prendre le temps de s'asseoir et de poser son sac sur ses genoux.
« J'en conclus par votre venue que vous avez décidé de me donner votre ressenti quant à la peine de Bellevue, je me trompe ?« Pas du tout, je suis bien là pour ça. Où est-il en ce moment ? »« Monsieur Ernest Bellevue est actuellement dans une de nos cellules, il a été mis aux arrêts ce matin même. »« A-t-il récupéré de ses blessures ? »« Ma foi, il à l'air de se porter à merveille. Mais ne perdons pas de temps, voulez-vous ? »« Très bien... »Après une légère inspiration, Kalas raconta une nouvelle fois sa mésaventure chez les frères psychopathes, cette fois-ci sans aucun mensonge. A la fin du récit, il concut avec son avis sur la peine d'Ernest.
« Je ne souhaite pas qu'Ernest passe le reste de sa vie en prison. Le meilleur pour lui serait de le libérer sans aucune charge à son nom. »Daryl Lyan se frotta le menton, le regard libre. Il prit appui sur les deux accoudoirs de son fauteuil, et se tourna vers la fenêtre derrière lui, les mains croisés dans le dos.
« Je ne peux pas retirer toutes les charges qui pèsent à son nom, mais votre version confirme certains de mes dires. Il n'a pas agit par pur sadisme, mais sous la contrainte. Aussi, si vous êtes prêt à le pardonner, la Milice fera de même. Monsieur Bellevue sera cependant contraint d'effectuer quelques mois de travaux publics afin d'aider la communauté. »Après ces quelques jours à se torturer l'esprit, Kalas avait enfin obtenu ce qu'il désirait : la libération d'Ernest.
« Oui, je vous remercie. »« Je ne puis cependant pas vous autorisé à le voir immédiatement, la Milice va devoir prendre en charge ses affectations. »« Je comprends, ne vous en faites pas. »Alors qu'il se levait pour glisser ses bras dans les lanières de son sac, l'instructeur interpella le jeune mage une dernière fois en fouillant dans un des tiroirs de son bureau.
« Par ailleurs, jeune homme. Il me semble que la récompense sur votre tête vous revienne de droit. Après tout, vous vous êtes trouvé par vous-même. » Sur ces mots, il déposa une bourse sonnante de Yus sur le bois, invitant son témoin à la récupérer.
Sans se poser de question, Kalas récupéra l'argent qu'il glissa rapidement dans son sac, se promettant de rendre la récompense à Cornélius.
(Je lui rapporterais son argent plus tard, je ne tiens pas à rentrer de suite.)L'instructeur Lyan invita le jeune homme à passer la porte de son bureau en premier, puis l'accompagna jusque dans le hall d'accueil. Ils se quittèrent avec une poignée de main amicale, tous deux ravis d'avoir mis un terme à cette histoire.
« Au revoir, Kalas. Et merci encore de votre visite. »« Je vous en prie, Mr. Lyan. C'était nécessaire. »En passant la porte de la caserne, le mage sentit un poids s'envoler de son esprit. Les yeux vers le ciel, il en conclu que tout était rentrer dans l'ordre. Même si les deux criminels couraient toujours...