Biographie détaillée :
Depuis toute petite, Maci avait un don pour les inventions farfelues. Son père était un menuisier et ébéniste de renom (enfin, dans leur village tout du moins) et elle semblait avoir hérité de son don inné pour le travail du bois. Toutefois, si son géniteur se consacrait à la réalisation de charpente, moulures, meubles portes et autres activités sommes toutes pratiques pour la société, Maci elle, se consacrait principalement à la réalisation de ses propres jouets. Elle avait sculpté sa première poupée à l’âge de 5 ans, après avoir « emprunté » de vieux ciseaux biseautés de son père, dont il ne se servait guère plus. Elle avait une idée très précise de ce qu’elle comptait réaliser, un joli petit cheval de bois, et avait été particulièrement déçue du résultat, qui s’approchait plus d’un âne difforme que d’un fier destrier. Surtout que cela avait manqué de lui couter un doigt, la petite n’étant, à l’époque, pas encore très habile de ses dix doigts.
Avec le temps (car ce premier échec ne la découragea en rien, au contraire), cette activité devint moins laborieuse et elle apprit à se servir des ciseaux biseautés de son père (qu’elle n’avait jamais rendu par ailleurs, préférant mentir à ses parents et fabriquer ses jouets en secret par peur d’une des engueulades mémorables que son père était capable de lui administrer, surtout lorsqu’elle se servait d’outil dangereux) sans s’entailler les mains. Ses jouets se firent plus détaillés, plus fidèle à son imagination, bref, plus réussis.
Tellement plus réussis qu’elle se lassa rapidement de ses simples poupées de bois et appris également à les décorer, à l’aide de tout ce qui lui tombait sous la main. Bout de ficelles, morceaux de chiffons déchirés, pailles, plantes ou autres, tout devenait un instrument entre ses mains. A l’age de 13 ans, elle se considérait comme une artiste accompli (la jeunesse rend aveugle d’autant plus que la jeune Maci souffrait d’un problème d’égo qu’elle était la seule à nier, maintenant que personne ne comprenait son talent) et avait abandonné la confection de jouets pour aider son père dans son atelier d’ébéniste.
Ce dernier avait bien tenté de refuser, mais la force de caractère de Maci s’était développé bien plus rapidement qu’il ne l’avait escompté, ce qu’il attribuait à l’absence d’une figure maternelle dans la vie de sa fille. Sa mère étant morte en couche, elle avait été élevée par son père qui n’avait jamais jugé utile de se remarier (et qui s’en mordait parfois les doigts, compte tenu de l’impétuosité de sa fille et des difficultés qu’il rencontrait régulièrement à communiquer avec elle), et n’avait donc jamais eu comme seul éducation celle d’une figure paternelle un tantinet bourru (ce qui devait bien être un de ses rares défauts).
C’est donc à l’âge de 13 ans qu’elle avait enfin obtenu gain de cause et par là-même, l’autorisation d’assister son père dans de menus travaux qu’elle réalisait avec grand talent (bien que son père ait longtemps refusé d’admettre ce fait, ne voulant pas encourager sa fille dans une activité bien peu féminine). Le travail ne manquait pas par ailleurs et la jeune Maci pu affiner ses talents d’ébéniste au cours de nombreux projets sur lesquels elle avait tenu à aider son père.
Toutefois, sa vie prit un tournant radical alors qu’elle n’avait 16 ans que depuis peu. A cette époque, son père désespérait de la voir un jour marié (en effet, rien ne préoccupait moins Maci que de se laisser courtiser par les garçons de son village, qu’elle jugeait tous plus fades et inintéressant les uns que les autres) et cherchait une solution pour que Maci se détourne du travail du bois et se mette à la couture ou la broderie, ou quelque chose de plus seyant pour une femme bientôt en âge de se marier. Autant dire que les choses ne tournèrent pas comme il l’avait escompté.
Un marchand d’arme et forgeron itinérant, de passage dans leur village, lui avait passé une commande d’arc et de flèches, deux produits que le père Bak n’avait pas pour habitude de réaliser. Il délégua donc la tâche à Maci, qui découvrit, sous les instructions strictes du client, une nouvelle facette de métier de menuisier ou d’ébéniste. Sans qu’elle sache se l’expliquer, la rigueur nécessaire à la création d’un arc équilibré et efficace lui posa bien plus de problèmes qu’elle ne l’avait prévu et elle dû se dépasser afin de satisfaire les exigences du marchands. Deux mois plus tard, ayant travaillé sans relâche à cette commande, elle put enfin livrer la cargaison commandée et s’empressa d’obtenir la validation de son client. Elle s’estimait somme toute particulièrement satisfaite de son travail et lorsque le marchand accepta sa marchandise, complimentant même la qualité de certaines pièces, elle se dit que toutes les ampoules, échardes et autres entailles que cela lui avait couté en valait bien la peine. C’était la première fois qu’elle recevait un compliment pour son travail (son père les lui ayant toujours refusés par peur de voir sa fille s’entêter dans ce métier) et la sensation de reconnaissance qu’elle ressentit ce jour-là lui permit d’entrevoir de nouvelles possibilités auxquelles elle n’avait jusqu’alors jamais pensé.
Dès lors, elle consacra tout son temps libre à la confection d’arc en tout genre que ce soit pour sa collection personnelle (elle devait bien en entasser une centaine dans un coin de sa chambre un an plus tard) ou pour des clients de passages dans le village. Son père ne voyait pas cette nouvelle passion d‘un bon œil et avait tenté plusieurs fois de lui en faire passer le goût (d’autant plus qu’il se jugeait principal responsable du nouveau centre d’intérêt de sa fille), sans succès. Maci passait de plus en plus de temps seule dans son coin à travailler de nouveaux types de bois pour en tester la flexibilité, la robustesse et la résistance, qualité primordiale à un arc de bonne facture. Elle se découvrit aussi des talents d’archère (enfin, elle aimait à le penser mais restait somme toute médiocre en la matière, n’ayant jamais bénéficié d’un entrainement quelconque) à force de mettre elle-même ses créations à l’épreuve.
Au fond d’elle germait un projet un peu fou : quitter son village pour devenir marchande d’arc itinérante. Elle avait conservé un souvenir précieux de sa rencontre avec le marchand itinérant qui l’avait, à son insu, initié à la sculpture d’arc et lui vouait depuis une admiration quelque peu exagérée. Lorsqu’elle en parla pour la première fois à son père, usant du ton qu’elle adoptait quand elle voulait lui faire comprendre qu’elle n’accepterait pas « non » comme réponse, ce dernier faillit en faire une syncope et passa la nuit à s’embrumer l’esprit à grand renfort de chopes de bières, chose qu’il n’avait pas faite depuis la mort de sa femme, plus de 18 ans plus tôt. Devant l’insistance de sa fille, qui ne lui laissait aucun répit, il finit par se résoudre à l’idée qu’elle ne suivrait jamais la destinée qu’il avait imaginée pour elle et accepta à contrecœur d’épauler sa fille dans ses préparatifs.
En effet, elle n’avait qu’une connaissance basique du monde, n’ayant jamais vu une carte de sa vie (elle savait en revanche lire et écrire, deux aptitudes sur lesquels son père avait été intransigeant pendant son enfance, jugeant qu’il s’agissait du B-A-ba de toute jeune fille) et n’ayant donc aucune idée d’où aller, pour commencer. Il lui fallait ensuite de quoi transporter son matériel et, surtout, du matériel, justement. Celui qu’elle utilisait à l’atelier était trop vieux pour convenir et surtout trop encombrant et il lui fallait donc des outils efficaces et faciles à transporter. Une bonne part des économies familiales servirent à passer commande au forgeron du village d’un nouveau set d’outillage pour Maci, ainsi qu’à l’achat d’un gros sac de voyage et de l’équipement nécessaire à tout marchand itinérant, à savoir une gourde, une besace à plusieurs poches lui permettant de stocker son argent et autres commodités (notamment de la viande séchée pour ses repas sur la route, son père n’ayant absolument pas fait confiance aux arguments de Maci comme quoi elle pourrait tout à fait de servir d’un arc pour chasser), une robuste paire de bottes et de quoi bivouaquer dans un confort modique (une grosse couverture, pour faire simple).
Une fois les détails logistiques de son départ réglé, il ne restait qu’une question à élucider : vers où commencerait-elle sa vie de marchande ? Son père lui avait fortement déconseillé de mettre les pieds à Exech, la ville étant réputé pour être mal famée et particulièrement « dynamique », mais l’économie principale y étant le commerce de bois rare, elle imaginait mal un meilleur endroit pour débuter son périple…