Les paupières tremblantesLes pieds nus de Junas entrèrent bien vite en contact avec une pierre froide dénuée d'aspérités. On l'entrainait de force dans un dédale de marches immenses s'engouffrant dans les profondeurs nauséabondes de la cité. Son esprit dérivait encore et ses jambes se mouvaient irrégulièrement. Ses maîtres s'arrêtaient parfois pour le réveiller de violents à-coups, car il était tenu en laisse comme un chien, son collier de cuir relié par une chaîne.
Alors qu'il commençait à croire cet escalier dénué de fin, il trouva la dernière marche et tituba lamentablement pour s'acclimater à la régularité du sol. Les parages étaient sombres et incertains, mais il y devina une armée de statues le long de l'allée.
Coups de collier et jurons silencieux lui firent reprendre le pas. Un détail lui glaça le sang. Les regards des statues immobiles brillaient dans la nuit et paraissaient inconcevablement le suivre. Alors, il réalisa ! Cette crypte muette et abominable n'était pas habitée par quelques effigies guerrières, mais par une armée immobile et palpitante, un nombre incalculable de soldats postés de part et d'autre du chemin.
Cette épouvantable découverte éradiqua le moindre soupçon d'espoir qu'entretenait Junas, car s'évader d'un camp esclavagiste au tréfonds d'une forêt était possible, presque facile, mais fuir cette cité impie relevait à présent du fantasme.
Une immense façade d'arches et de colonnes attendait dans les ombres. Au-dessus d'un bas-relief cauchemardesque il devina une porte gigantesque. Le garde Shaakts se détourna alors à son adresse et ses lèvres se tordirent de cruauté.
« Les portes de Khonfas, beaucoup d'humains y sont entrés, jamais aucun n'y est sorti. »
Comme pour ponctuer sa tirade infernale, un son tonitruant fit gronder le sol. Un pan colossal s'ouvrit, laissant s'échapper de l’embrasure une lueur blanche et aveuglante.
Glissements de verrous