La Cathédrale Sombre
Deux yeux se réveillèrent sur l’ombre de ces lieux. Deux yeux encore engourdis du sommeil le plus profond. Le sommeil de la mort. Deux yeux qui purent admirer cet endroit gigantesque et pour le moins inattendu. Le corps qui petit à petit se réveillait, totalement nu, était posé sur un autel de marbre froid et noir nervuré de quelques veines blanches. De sombres chandelles et bougies couleur de nuit ou de sang brulaient partout autour, éclairant sommairement cet endroit gigantesque, à l’architecture prodigieuse. Un lieu de culte, à n’en pas douter. Le plus grand et le plus décoré qu’il ait été donné de voir au ressuscité.

La pierre constituant les hautes et robustes colonnades soutenant le plafond très haut de cet endroit était sombre, et finement sculptée de détails impressionnants de précision. Des visages monstrueux, grimaçant en dévoilant des dents acérées. Des visages suppliciés, tordus par la douleur. Tout le tour de l’endroit était parcouru d’un bas-relief mural représentant des scènes de bataille mettant en scène toutes les races et espèces vivantes qui puissent exister. Des elfes, des hommes, des orques, des nains, et bien d’autres encore… Tous semblaient, dans leur position, se diriger vers une statue colossale, à l’une des extrémités de l’endroit, représentant un être sombre aux traits dissimulés sous une ample capuche de pierre. Un élément permettait toutefois de le reconnaître aisément : un corbeau magistral était posé sur son épaule. La mort. Phaïtos. En guise de collier, la statue colossale avait une chaine d’or, qui se terminait par un pendentif flamboyant, semblant fait de flammes intenses, si bien qu’il semblait impossible d’en déterminer la forme exacte. Une sombre, lente et régulière pulsation semblait en provenir.
L’être qui se réveillait sur cet autel glacé n’était plus tout à fait semblable à ce qu’il avait été. Déjà, il ne voyait plus que d’un seul œil. Le second, orné sur son pourtour d’anciens tatouages d’une aventure passée, était désormais entièrement noir, lisse, sans la moindre aspérité. Le sacrifice l’avait exigé…
À l’autre extrémité de la salle, une vaste double-porte de bois, immense, formait la seule sortie visible de l’endroit. Mais entre cette sortie et l’humain qui se réveillait lentement, il y avait un être, tout de rouge vêtu. Son visage respirait la mort, la chair pourrie, et son regard glaçait les sangs… Mais il était bien vivant, et se tenait debout, sévère, tenant à la main un bâton de bois rougeâtre, cerclé d’or. À son cou pendait une chaine d’or munie d’un gros rubis finement taillé.
Patiemment, il attendait le réveil du défunt.