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nudité et gore... âme sensible ou plus jeune, ne pas lire !
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Anouar m'interrompt avant que j'ai eu le temps de réveiller mon compagnon. Elle me demande de la rejoindre au cœur du sanctuaire pour préparer le cérémoniel. Je la rejoins donc au centre de la grotte, non sans avoir ôté mes jambières et mes bottes, comme dans tout lieu de culte. Je vais d'ailleurs pour ôter mon épée, mais elle me conseille de la garder, celle-ci sera utile, pour ne pas dire décisive pour la suite. Je trésaille un peu en imaginant des scénarios pouvant utiliser une épée puis décide de me reconcentrer sur mon objectif, oubliant temporairement cette brusque et puissante évocation du sang non contrariée par ma faera.
(Il va falloir dessiner un cercle glyphique !)(Comme celui de mes glyphes de lianes ?)(Oui, en plus grand, tu crois que tu pourrais me dessiner ça ?)(Si tu me gardes ça à l'esprit, ça devrait être possible.)(Aucune erreur surtout ! Ça pourrait être dangereux !)Je respire un grand coup. Ca y est, je démarre dans une danse seule, avec la pointe de ma lame. Le dessin est complexe, bien plus que celui de mes deux petits glyphes. Celui-ci est un joyeux mélange de runes courbes aux formes anciennes qui me sont totalement inconnues et de runes droites comme on trouve sur les cailloux de puissance. Je me concentre bien, Anouar fixe au fur et à mesure dans mon esprit les traits et les courbes. Celles-ci se croisent et se recroisent formant des arabesques étranges et incompréhensibles. Ce n'est qu'au bout de plus de deux heures que j'achève le travail, sautant d'un point à l'autre pour éviter de marcher et d'effacer un morceau de mon œuvre.
Elle est grande, bien plus que mes petites rosaces glyphiques, bien plus aussi que je ne l'imaginais lors de la première projection. A vue de nez, elle est assez grande pour permettre à un Sindel de s'étendre totalement, sans que ses cheveux ni ses pieds ne dépassent, ni d'un côté, ni de l'autre.
(C'est le but.)Le dernier geste est de planter l'épée, dans le cercle, sur une des runes bien précises qui, d'après ma faera, veut dire "lame".
"Joli travail.""Oh, tu es réveillé ?""Depuis plus d'une heure déjà, je te regarde faire. J'ignorais que tu dansais aussi bien.""Moi aussi, à vrai dire."(Demande-lui d'aller se placer près du cristal.)Je lui transmets l'information de ma faera, en le conviant à rejoindre un point précis de la grotte, en y allant pieds nus et surtout sans toucher mon dessin.
(Bien, on va pouvoir démarrer. Mais pour ça, il va falloir que tu te déshabilles.)Abusant de toute ma pudeur, je me dénude totalement, laissant mes affaires près de mes bottes. Je ne ressens aucune gêne, je suis telle que Yuimen m'a faite. Le regard de Sel ne me lâche pas en revanche, bien que mon corps ne soit pas celui d'une femme mûre au regard de notre race. Le fait de plaire à un homme a quelque chose de flatteur normalement pour un membre du sexe féminin, mais je suis déjà trop dans le rituel pour vraiment m'en rendre compte.
(Bande-lui les yeux, il ne faut surtout pas qu'il voit la suite !)Je prends une bande de tissus que je garde pour panser mes plaies et m'approche de mon compagnon, qui ne peut cacher totalement son excitation. Il est bien plus gêné que moi, ça se voit.
(Tu aurais pu lui bander les yeux AVANT que je me déshabille, non ?)(Oui, mais je n'y ai pas pensé.)Suivant les ordres de ma faera, je me dirige vers le centre du cercle, marchant à des endroits extrêmement précis, jusqu'au petit cercle intérieur.
"Que le sang de la gardienne éveille le cercle de Yuimen !"J'attrape mon épée et la plante devant moi, au coeur de deux courbes. Anouar ronronne comme rarement. Je déglutis difficilement, avant de me trancher les veines des deux mains, glissant sur la lame de cristal. Je me retiens de crier tellement la douleur est intense, surtout du côté dentelé. Mon sang s'écoule sur le fil de mon épée jusqu'au sol, se faisant absorber par le sable. Mon cœur se met à battre la chamade, quoi de plus normal après tout, vu le traitement. Je sers mes deux mains contre la lame, de manière à garder hémorragie active.
Je ferme les yeux et m'active à prier Yuimen, récitant la moindre prière qui frôle mon esprit tandis que mon liquide vital s'active à s'échapper de mon corps, me vidant un peu plus de mes forces. Je sens une magie se déclencher autour de moi, je la sens vibrer et m'envahir comme pour m'arracher ma vie.
"Que la terre qui permet la vie mène la Gardienne aux limites de ses pouvoirs."Un éclair de lucidité me gorge d'horreur quand je comprends que c'est aux portes de la mort que je me jette. Mon propre sang est en train d'abreuver le sol d'où sort des lianes et des ronces qui viennent fouetter mon corps, m'arrachant des cris qui viennent cingler le silence des lieux. Mon pouvoir me régénère au fur et à mesure, prolongeant l'agonie d'autant. Ma conscience s'ébranle, mais je ne cesse de prier, même si je ne suis plus certaines des textes ni de la logique de mes phrases. Je crie, je hurle à chaque coup qui vient entailler ma chair à chaque fois un peu plus profondément. Je sens le sang qui perle de mon dos et de mes fesses tandis que mes hurlements résonnent de plus en plus. La douleur fait résonner en moi l'écho de ma courte période d'esclavage. J'ai envie de mes débattre, de me rouler en boule, de me protéger. Mais mon bouclier de plantes illusoires vient lui aussi se confondre dans les lianes qui m'agressent. Cette magie est plus puissante que la mienne et dans un réflexe, je vais pour ôter mes mains de l'épée, pour fuir ce lieu, mais il est trop tard, je suis désormais attachée à cette lame par des lianes lignifiées, véritables troncs magiques.
J'en peux plus, ma conscience vacille de plus en plus et tous mes sens se brouillent. J'ai l'impression de ne plus avoir de peau du tout, que mon corps n'est plus que sang et douleurs. Je ne prie même plus, je hurle tout mon corps avant de m'effondrer sur mon épée.
"Que la douleur de la gardienne éveille l'âme endormie !"De l'épée de cristal s'échappe une âme, Astinor, la femme devenue panthère. Elle rode, elle tourne autour de moi. Je suis à peine vivante, seule ma volonté me tient encore, sinon je serais morte. Les fouets se sont arrêtés, mais la douleur est désormais transmise par le sable tandis que ma régénération fait effet, petit à petit, me rendant la vie et la vue. Ainsi, je la vois, Astinor, ce n'est pas la première fois, certes. Mais elle est là, tellement réelle, puissante, rusée, véritable fauve de guerre.
Je me guéris et regagne de la conscience. Les lianes dansent autour de moi, ajoutant un murmure chantant à cette scène irréelle.
"Lothindil." Prononce-t-elle d'une voix forte et victorieuse.
"Astinor." prononcé-je difficilement, essayant de donner une contenance à ma voix encore tremblante du supplice que je viens de vivre.
"Que le sacrifice lie l'âme et la Gardienne"Je me redresse, ne parvenant à me relever que grâce au pouvoir dont Yuimen m'a fait don. Astinor se lève en même temps que moi, gardant ses yeux dans les miens, même si elle est plus petite que moi. Sa carrure est impressionnante, sa manière d'être aussi. Je ne suis pas facilement impressionnée, mais ses muscles taillées, son poil noir, ses yeux tellement humains et violents malgré tout.
(Lothi, pose la main de Sel sur le cristal.)(Quoi ?)(Si tu romps le rituel maintenant, tu meurs ! Fais pas l'andouille et obéis !)Le ton est sans réplique et je sens Astinor s'agiter et grogner, la queue battant l'air et les dents se dévoilant. Je n'ose pas imaginer un combat contre cette guerrière, d'autant que je suis nue qu'elle a mon épée en main. Je sens aussi que mes fluides sont tous partis avec mon sang. Je suis nue et vulnérable, le sang perlant encore de mes multiples blessures. C'est en pleurant que je rejoins mon compagnon, chaque pas étant extrêmement douloureux.
Je prends le bras de Sel, il tremble, mais c'est pourtant d'une voix assurée qu'il me murmure :
"Faites-le, Gardienne. Je suis là pour me sacrifier. Vous devez vivre, vous. J'ai entendu votre agonie, car même en étant aveugle, je ne suis point sourd. N'ayez pas peur pour moi. Je suis sûr que c'est moins douloureux."Derrière moi, Astinor feule et souffle en sautillant d'excitation. Je guide la main de mon congénère que je pose contre le cristal. Celui-ci s'illumine, mais c'est tout ce qui se passe. Si je n'entendais pas l'âme ancienne se calmer derrière moi, je craindrais l'échec.
"Le pacte est scellée. Je serai toi et tu seras moi !"Je lâche Sel, à regret, et me retourne vers la femme panthère. Elle tient toujours l'épée en main et, d'un geste adroit, vient passer sa main, car c'est bien une main de femme couverte de fourrure et non une patte comme les worans, le long du fil pour faire couler son sang.
(Fais de même !)Je m'approche et, une nouvelle fois, fait couler le sang de ma main, à peine cicatrisée. D'un geste, elle plante l'épée entre nous et vient coller sa main contre la mienne, blessure contre blessure, plaie contre plaie, sang contre sang.
"Nous sommes du même sang, toi et moi, Lothindil.""Nous sommes du même sang, toi et moi, Astinor."A ces mots, elle vient et s'infiltre dans mon corps, se changeant en âme pure qui vient dans mes veines à travers la plaie. Je verrais presque des rayures apparaître sur mon bras, mais la vue se trouble à nouveau, mon corps cède, submergé par cette présence incongrue contre laquelle il ne parvient pas à lutter. Je m'effondre, ma tâche accomplie...