Cataclop, cataclop, le compère Jakadi galope, circulant entre les amoncellements de maisons en ruines qui semblent le contempler d’un œil morne à travers les trous béants dont elles sont garnies avant de retourner à leur immobilité morbide de mastodontes de pierre sans doute à jamais voués à avoir perdu ceux qui les ont jadis peuplés et qui ne réintégreront très probablement pas une cité marquée d’un si tragique passé de mort et de malédiction irrépressible faite d’elfes sanguinaires de sitôt, véritable étoile filante et vaillante, ses trois couteaux récemment récupérés et glissés à sa ceinture lui donnant la dégaine d’une espèce incongrue mais gaillarde d’aventurier paré à batailler sans trêve pour sa survie ou celle de ceux qui lui sont chers : de fait, cela va probablement être nécessaire étant donné que ce qui aurait précisément dû être une trêve dans le petit habitat que nous avions élu comme domicile s’est révélé ne consister pour moi qu’en un cauchemar onirique suivi d’un cauchemar à caractère beaucoup plus réel dans lequel j’ai bien failli perdre la vie ; et même ceux qui pourraient avoir l’air d’avoir eu une bonne nuit de sommeil ont d’après ce que j’ai pu glaner comme informations auprès des intéressés dû au lieu de ça lutter sur le terrain vraisemblablement fort délicat à aborder du monde des rêves, personne n’ayant ainsi apparemment été épargné niveau tourments excepté peut-être Lindeniel qui l’aurait pourtant bien mérité et qui est de toute façon tellement insignifiant de suffisance que je ne me donnerai même pas la peine de dire un mot sur ce gros dindon blanc qui se pavane en glougloutant sa propre gloire… déjà que la phrase est suffisamment gargantuesque comme ça, ce n’est pas le moment d’en jeter plus !
Et de fil en aiguille, courant avec une énergie provenant du ravissement que j’éprouve à avoir été ramené aussi parfaitement d’entre les morts par notre bonne Glaya, je parviens à la porte grande ouverte de ce qui a été notre maison provisoire pour pénétrer dans cet habitacle toujours envahi de cette senteur moite propre aux dortoirs, fonction qu’il a rempli l’espace de quelques heures. La tentation que représente ce lieu d’y faire une petite sieste est plutôt forte, mais je passe outre une telle faiblesse, gardant en tête que nous devons faire diligence pour prêter assistance à la Dame des Rêves mais aussi pour sauver Krochar de sa possession : en un tournemain, j’ai récupéré mon sac dont je passe les bandoulières sur mes épaules, reprenant évidemment au passage mon outre de boisson très forte et ma balalaïka, mais alors que je commence à emprunter le chemin du retour, je me rends très vite compte que personne ne m’a suivi pour aller récupérer ses affaires ! Ah les scélérats, ah les filous, ah les faquins, quand il s’agit de jouer les héros, ils s’empressent de me rejoindre, mais dès qu’une basse besogne doit être remplie comme faire office de chair à canon ou de portefaix, je me retrouve tout seul bien évidemment ! Oh je ne l’entends pas de cette oreille, et même si, pour la simple et bonne raison que la situation presse autant, je ne vais pas m’amuser à laisser leurs bagages ici, je ne vais pas me priver de profiter de l’occasion pour satisfaire ma curiosité quant aux possessions de mes chers amis, tralalère ! Je sais, c’est pas très sympa, mais ça me démange trop de savoir, et puis ce n’est pas comme si j’allais leur voler quoi que ce soit sauf si c’est vraiment très très intéressant alors pas de quoi me faire un cas de conscience de cette petite fouille sur le pouce qui ne fera de mal à personne !
Et allez hop, au pif, commençons donc par l’aquamancien du groupe : comme c’est un magicien je me précipite avec avidité sur son sac vu qu’il doit avoir des objets assez sympas (et peut-être aussi des pièges ensorcelés !) tout en faisant évidemment preuve de ma prudence coutumière afin d’éviter absolument tout tracas (ben tiens) et en tâchant de faire abstraction des influences extérieures néfastes à ma concentration ! Enfin bref, c’est une relative déception, car au lieu de bidules qui irradient de puissance, tout ce que je trouve, c’est un anneau à l’utilité manifestement uniquement décorative, une bourse remplie de quelque chose qui pourrait difficilement me sembler être autre chose que du sable (d’ailleurs il doit vraiment falloir être jeteur de sorts pour avoir l’usage d’une poignée de sable), un parchemin sur lequel est écrit un tel charabia qu’il pourrait tout aussi bien contenir la recette d’une soupe de pois chiches qu’une prophétie sur la destruction du monde, deux petite baies à moitié écrasées auxquelles je préfère ne pas toucher à cause de leur couleur bizarre, et enfin, une fiole au contenu brumeux bien étrange dont le toucher me fait éprouver d’étranges picotements même au travers du verre, picotements dus d’après Minil’ à la présence de fluides, ce qui m’enjoint de ne pas déboucher ce truc. Rien de très folichon en somme, mais en désespoir de cause, de manière a me dire que je n’aurai pas perdu ma journée, je rafle tout de même la bague qui devrait valoir quelques yus et me fera au pire un autre souvenir, la planquant dans le plus reculé des coins de mon pantalon : on va dire que c’est pour m’avoir manqué de respect, et si jamais il remarque l’absence du bijou, rien ne l’empêchera de croire qu’il a tout simplement chu à la faveur d’une embardée un peu trop violente !
(Vaurien. -Y’a pas de petit profit !)
Suivant, et ce coup-ci, je me promets de ne rien voler à mon gatch bratty et de me contenter de voir ce qui peut bien se tramer dans ce contenant qui me paraît receler bien des promesses pour un guerrier baroudeur comme lui ; et à voir le résultat des courses, je me dis qu’on aurait plutôt cru que c’est lui le sorcier : pour les deux gourdes, on s’en fiche, même si ce ne serait pas mal qu’il me rende la seconde, ainsi que pour l’arc cassé en deux, car ce qui me fait naître des étoiles dans les yeux, c’est la grosse pierre précieuse légèrement luisante d’où sourdre une indéniable impression de puissance à son contact enivrant. Ezemgol, pour quelqu’un qui s’habille de bric et de broc, il a de belles choses dans son barda, et si ce n’était pas affreusement suspect, je lui demanderais bien où est-ce qu’il a pu dégoter un joyau pareil ! Bien évidemment, je n’ai rien d’un érudit ou d’un mage, aussi je me vois contraint et forcé par la nature des choses de remettre cette belle chose qui ne m’appartient de toute façon pas à sa place, mais alors que je m’apprête à refermer la pochette supérieure, un petit objet étincelant attire mon attention, et je m’empresse de m’en saisir pour découvrir une fois de plus un anneau… décidément c’est une manie, mais si je ne vais pas le chiper celui-là, il n’en est pas moins intriguant étant donné que je n’ai jamais vu un matériau comme celui dont il est composé…
(Mithril. -A tes souhaits. -C’est le nom du minerai.)
Ah d’accord ! Tiens c’est bizarre, ça m’est familier ça cet idée d’anneau en mithril… anneau en mithril… où est-ce que j’ai bien pu entendre parler d’un anneau en mithril ? C’était il n’y a pas longtemps, dans le village dans nains et… aaaaaah oui, l’autre barbe-noire là qui n’arrêtait pas de gueuler qu’on lui avait volé son anneau en mithril et que… oh Yumni ! Mais qu’est-ce que ça veut dire ? Ce serait Krochar qui… non, il est beaucoup trop honnête pour ça et est de toute façon loin d’avoir le physique qu’il faut pour être un cambrioleur ou un escamoteur, aussi à moins qu’il cache bien son jeu, il faut bel et bien croire que ce truc a atterri dans son équipement pour ainsi dire par miracle, sans qu’il y soit pour rien ! Bon, tant pis pour les soupçons qu’une telle question pourra faire peser sur ma probité, dès que je l’ai sous la main pour une entrevue en particulier, je lui en toucherai deux mots histoire de savoir ce qu’il en retourne et éventuellement aviser avec lui à ce sujet. Mais en attendant, dernier spécimen à étudier, le sac de Glaya qui doit certainement receler des choses fort intéressantes pour une guérisseuse d’une puissance telle qu’elle !
(Un garçon bien éduqué ne fouille pas les affaires d’une dame Jak’ -Ça tombe bien, j’ai été très mal éduqué ! -Tss…)
Faisant fi des grommellements désapprobateurs de ma faera, je me livre à mon inspection en règle dont le résultat ne s’avère en fin de compte pas si folichon que ça : un petit carnet ainsi qu’un bout de fusain pour écrire là-dessus (même si les deux sont intacts, ce qui n’est pas étonnant vu qu’avec tout le remue-ménage de l’aventure, elle ne doit pas avoir eu beaucoup de temps pour prendre ses notes), un anneau qui a la dégaine d’un serpent qui se mord la queue (une constante vraiment), du matériel de survie somme toute banal pouvant fournir de quoi s’éclairer et de quoi conserver de l’eau, ce qui montre qu’elle a plus de bon sens qu’on l’aurait pu croire… et pour finir, un petit pot ayant admirablement bien résisté au voyage et qui contient, ô mes bons amis, une sorte de crème au parfum si divin que rien qu’à déboucher le couvercle qui en clôt hermétiquement l’ouverture, je pourrais avoir l’impression que des fleurs se sont mises à jaillir de toutes parts, et lorsque j’en approche mon nasalissime appendice pour prendre une petite bouffée de cette odeur, je ne peux m’empêcher de laisser échapper un soupir de contentement et de fermer les yeux avec le sentiment d’être niché au sein d’un cocon protecteur fait des végétaux les plus suavement odoriférants qui soient, aaaah…
(Jakadi… -Hmm ? -Jakadi !)
Hein, hein, quoi, quoi ?! Oui, oui, présent, à vos ordre, paré, je ne traînasse pas, non non, je ne m’endormais pas, je me reposais juste les yeux un moment histoire de reprendre des forces vu que c’est quand même du boulot de leur ramener tout leur bazar à ces traîne-la-patte ! Allez, allez, on se remue, pas de temps à perdre, on remet tout vite fait bien fait comme c'était avant, on prend tous ces sacs avec soi…ggnnnf… bon sang, pris un par un, ça va, mais tous ensemble, ça fait un sacré poids nom d’un sanglier farci aux châtaignes ! Oh et en plus, faut que je prenne cette espèce de gros bouclier là qui ne peut appartenir qu’à cette paladine trop souvent survoltée : allez, dans le dos, et le poignée de cuir dans la bouche, à la guerre comme à la guerre pour transbahuter tout ça en un seul voyage parce que sinon on en aura jamais fini ! Zut, Krochar a aussi oublié sa hache que l’esprit ne s’était évidemment pas donné la peine de ramasser en partant, ils oublient tout ma parole ces aventuriers, et sans Jakadi pour leur rattraper le coup, ils auraient pu aller jusqu’à la Porte des Rêves avant de pouvoir se souvenir qu’ils ont laissé tout ce qu’ils avaient amené avec eux derrière ! Le manche de l’arme du garzok glissé dans son sac avec tout le reste, me voilà parti aussi chargé qu’une mule, râlant et soufflant en maugréant mille malédictions à l’égard de ces satanés bon sang de bonsoir de kmels. Et le pire dans tout ça, c’est qu’après avoir fait tout le chemin et être revenu jusqu’à Kerkan tout seul, ce qui prouve au passage qu’en plus d’être oublieux, ils sont si bille en tête qu’ils fonceraient dans la gueule d’un dragon avant de se rendre compte qu’ils ont pris une cuillère à soupe à la place de leur épée, ce petit godelureau, au lieu de me proposer de m’aider, n’a même pas l’air de se rendre compte que je sue sang et eau pour lui, ne me faisant pas regretter de lui avoir chipé un de ses biens. Je ne sais pas ce qui me met le plus en colère, que tous les autres soient partis sans nous ou que ce jeune écervelé d’aquamancien se mette en marche comme si de rien n’était, me laissant à deux doigts de tomber d’épuisement tellement je suis maltraité par les poids que je porte que j’ai l’impression que mes bras vont en tomber au sol. Oh mais si mes jambes protestent énergiquement, il n’y a pas de raison que ce ne soit pas le cas de ma bouche aussi, et je m’en vais lui démontrer d’une bien belle manière !
« Ker…kan! Grrr ! »
Bon d’accord, c’était pathétique, mais je voudrais vous y voir si vous deviez littéralement traîner votre propre poids derrière vous avec une lamelle de cuir entre les mâchoires : pour héler quelqu’un et lui dire de se retourner à moins qu’il ne veuille se prendre une tarte dans la figure, je ne crois pas que vous auriez fait mieux !
_________________ J'ai décidé d'être heureux, parce que c'est bon pour la santé! _____________________________________________ Jakadi, voleur gobelin niveau 4 so unique en son genre vous salue bien. Bilan de la quête 18 : Buffet maritime gratuit , une tenue très tendance (merci beaucoup GM17 ), 1er contact avec les indigènes, découverte des spécialités culinaires locales , rééquilibrage de la balance des possessions Shaakts/Sektegs, tatanage de torkin (c'est une CC messieurs-dames!), un ventousage d'urgence , une obtention de balalaïka , une razzia sur des restes de bataille, du matraquage d'araignées géantes , la perte d'une bonne partie du groupe , un affrontement avec un esprit des ténèbres , un fort agaçant diseur d'énigmes , un combat contre une troupe entière de garzoks, de l'apprentissage de CCs par zigouillage d'araignée .
|