Yuélia a écrit:
Premièrement, tous les livres sont bons. Je dirais juste qu'il n'y a plus trop d'innovation, c'est tout.
Libre à toi de ne pas partager mon avis, si tu le souhaites, mais j'aimerais comprendre le tien.
Il n'y a plus vraiment trop de livres qui aujourd'hui ont vraiment une idée différente, innovatrice. En matière de jeux j'aimerais faire un Tomodachi life qui ne lassera pas aussi vite que le premier.
Premièrement, à mes yeux, tous les livres ne sont pas bons. Il y en a de très mauvais, des illisibles, des trucs qui selon moi ne méritent même pas qu'on ait coupé des arbres ou recyclé du papier et produit de l'encre pour les imprimer. A cet avis, nous pourrions m'objecter que tous les goûts étant dans la nature, ils sont forcément bons pour quelqu'un, la preuve, certains les achètent, et pire les lisent. Ce à quoi je répondrais que je me fiche des goûts de ces gens là la plupart du temps, et que le relativisme absolu du tout est bon m'ennuie au plus haut point. Je préfère prendre, à l'occasion, du temps pour identifier les critères que je retiens, les énoncer, et entamer une discussion avec ceux qui le veulent bien sur une base commune ; nous pourrons alors, sur la base que j'ai posé, qu'ils ont posé, ou sur laquelle nous nous sommes accordés, discuter de la position de divers livres par rapport auxdits critères, et simplifier les résultats de la discussion par un barbare mais rapide "c'est un bon livre", c'est un "mauvais livre". Faute d'avoir toujours le temps et l'envie de préciser mes critères et ma pensée, je prends le risque de passer pour un connard n'ayant aucun respect pour les goûts de chacun en affirmant péremptoirement que tel ou tel livre est une bouse infâme.
Mes lectures, mes critères, me laissent à penser qu'il n'y a pas moins de littérature, de bonne littérature, ou d'innovation au cours de ce vingt-et-unième siècle naissant par rapport à un dix-neuvième siècle ou à un vingtième siècle fantasmé. Le temps, les politiques éditoriales, le jeu des critiques, des universitaires, des groupes divers et variés, des mondes de l'art et autre joyeuseté ont selon moi opéré une sélection dans les textes passés, nous permettant de voir nombre d'auteurs, de livres, désignés comme marquants, innovants, suivant des critères que nous avons peut-être incorporé. Les classiques, parce qu'ils sont le fruit d'une sélection qui ne se dit pas - il y aurait une évidence du génie, de l'oeuvre, du goût, de je ne sais quoi - ne sont pas représentatifs d'une époque, d'un siècle, d'un courant, dans sa majorité, mais surtout ils nous sont présentés, expliqués, rangés : ils sont livrés à une forme de consommation paresseuse. Faire le tri dans un monde de l'édition démultiplié, rendu encore plus vaste par la dimension numérique, incorporer de nouveaux critères, est un travail bien plus long, difficile, exigeant, auquel nous ne pouvons pas tous nous livrer. Dans mon cas, le manque de moyen réfrène certaines de mes envies, de mes explorations. Cependant, je suis prêt à accorder à mon époque de produire autant de textes innovants, dans le fond, dans la forme, dans l'idée, que ce qui a été produit dans un laps de temps identique au siècle passé.
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C'est par la sagesse qu'on bâtit une maison, par l'intelligence qu'on l'affermit ;
par le savoir, on emplit ses greniers de tous les biens précieux et désirables.
Proverbes, 24, 3-4