Pas de porte apparemment dans cette nouvelle pièce, mais des commodes supportant d'étranges petites boites.
Mais ce qu'il nota surtout, c'était la jolie aniathy qui se tenait dans la pièce. Il ouvrit la bouche pour protester, décidé à lui faire comprendre son déplaisir au sujet de sa dernière farce. Mais déjà, elle le mettait au défi avant de disparaître...
… laissant apparaître Célimène.

Faëlis resta immobile, comme foudroyé. Il n'y avait pas d'artifice, pas de beauté étincelante et surnaturelle... c'était bien Célimène. Elle n'avait de toute façon pas besoin d'artifices pour que sa beauté l'éblouisse.

« Il paraît que je fais partie de l’objet de tes désirs. » murmura-t-elle de son éternelle voix douce et un peu rêveuse.

Elle portait toujours sa jolie jupe et sa délicate tenue qui laissait voir son délicieux nombril. Faëlis rougit de la réaction instinctive de son propre corps. Il pensait savoir à quel point elle lui manquait, il découvrait maintenant que ce n'était pas le cas. Pire, il découvrait maintenant à quel point il brûlait de désir pour elle.
Mais la passion fut bientôt remplacée par la colère. Célimène n'était pas ici, elle ne pouvait pas y être... si ? Il lui avait demandé de le rejoindre à Kendra Kâr... Mais non ! Cette petite peste d'aniathy lui avait déjà joué ses mauvais tours d'illusion, il n'allait pas se laisser prendre de nouveau !

« Ce n'est pas drôle ! Assez joué avec des illusions cruelles ! »

Des larmes lui montaient aux yeux. Cela avait au moins l'avantage de brouiller la terrible vision de Célimène.

« Je commence à croire que tu es vraiment maléfique, Dolly, pour jouer ainsi des sentiments des gens... Si tu n'as pas mérité d'être enfermé ici, prouve le par un bon geste ! »

La voix de la poupée retentit, estimant qu'elle devait mieux es laisser entre eux.
Célimène, telle une incarnation divine, s'approcha et essuya les larmes du jeune elfe. Ses mains si douces... un pur enchantement.

« Je ne suis pas une illusion, je suis bien ici. » murmura-t-elle.

Faëlis avait les jambes toutes flageolantes. Par tous les dieux, aucune fille ne lui avait jamais fait cet effet ! Son visage emplissait le monde entier. Ce contact surnaturel... Il sentit les remparts de son esprit céder. Ses bras puissants enserrèrent doucement son corps et il l'embrassa avec passion.

Bonheur ! Enfin ! Une fleure qui s’épanouit en une explosion de lumière. Depuis le temps qu'il en rêvait...

« Pardon, ma douce amie, pardon... »

Il recula légèrement la tête sans la lâcher, il en aurait été incapable, même pour toute la gloire du monde. Il rêvait. Il rêvait éveillé. Les mots coulaient de sa bouche comme le flot impétueux des fleuves des duchés.

« Je n'aurais jamais dû te laisser... Comment es-tu arrivé ici ? Je me souviens de notre nuit d'amour, lorsque nos âmes se sont unis en même temps que nos lèvres sous les feuilles nocturnes de l'Anorfain... Cela semble si lointain. J'ai bien démérité depuis... Aurais-je une chance de regagner ton amour ? De caresser de nouveau la perfection de ton corps ? Réponds-moi, aussi dure que soit ta réponse si elle doit l'être, je l'endurerais. »

La réaction ne se fit pas attendre et elle le gifla à toute volée, lui reprochant de l'avoir abandonné avant de repartir se blottir dans un coin de la pièce.
Pendant un instant, l'elfe resta paralysé, voyant trente-six chandelles. Pourquoi avait-il dit ça ? Bon sang, il se rappelait ! Mais sa mémoire se dérobait, aspirée par la souffrance de la voir si furieuse.
Se reprenant, il tenta de chasser la douleur qui lui paralysait aussi bien le cœur que le cerveau.

« S'il te plaît ! Je n'ai fait ça que pour te protéger ! »

Il s'approcha pour la reprendre dans ses bras, laissant glisser ses mains en une caresse suppliante vers son ventre sur lequel il décrivit de petits cercles. Ce contacte... il crut qu'il allait devenir fou. Il l'appuya doucement contre le mur et enfouit ses lèvres dans sa chevelure. Avec une fille, il fallait se comporter en gentleman ! C'était la moindre des politesses ! Mais en même temps, Faëlis était adepte de la démesure et il ne rêvait que de la voir revenir à lui, de pouvoir à nouveau se noyer dans ses yeux.

« Je ne t'abandonnerai plus jamais. Ma mère m'a fait jurer de te protéger partout à travers le monde et plus rien ne m'empêchera d'accomplir mon serment ! »

Alors qu'il allait perdre la tête, elle le repoussa violemment, l'accusant de trahison.

« Les hommes font toujours des promesses qu'ils ne tiennent pas, pourquoi les tiennes seraient-elles différentes ? »

Il recula de plusieurs pas et ses idées se remirent en place. Il n'avait pas prononcé ces paroles pour rien ! Son esprit dépassé avait réussi à trouver un moyen de rompre l'illusion. Soudain pris de colère, il regarda cette chose qui se faisait passer pour Célimène. Il tira son sabre d'un ample mouvement et l'appuya sous la gorge de la belle :

« La vraie Célimène ne douterait pas de mes promesses... pas plus qu'elle ne me laisserait prétendre des inepties comme le fait que nous soyons amants, ou que j'ai juré à ma mère de la protéger ! Pourquoi ne pas t'en étonner ? Parce que tu n'avais aucun moyen de le savoir ! »

Il plissa les yeux. Il fallait en finir. Il ne savait pas comment mais il fallait en finir. D'une voix dur, il grinça :

« Je ne me laisserais pas avoir par une nouvelle illusion, Dolly ! Maintenant, mettons fin à ce petit jeu cruel et dis-moi comment sortir ! »

Il ne pouvait masquer le tremblement de la lame, mais son geste restait déterminé.

Et voilà que l'illusion se dissipa. Tremblant et les larmes aux yeux, l'elfe regarda la jolie poupée reparaître. Elle se moquait de lui, proposant tout de même de répondre à une autre question.
Faëlis garda les yeux baissés. Il était choqué, en colère... cette rencontre l'avait bouleversé.
Célimène... La reverrait-il seulement un jour ?
Pour cela, il fallait s'échapper, mais il commençait à se demander si ce genre de jeux ne finirait pas par avoir raison de ses forces. Il était fatigué, il avait faim... Il avait besoin de réponses. Besoin d'avancer.

Il resta un instant silencieux, puis murmura :

« D'un certain sens, j'aurais envie de savoir pourquoi tu es aussi cruelle... mais je suppose que c'est lié à ta précédente réponse. Je doute cependant de la qualité de l'excuse. Je vais donc te poser une autre question : Pourquoi certains esprits, comme toi, ont de tels pouvoirs et d'autres, comme Alfy, non ? »

Visiblement prise par surprise, la poupée murmura :

« Nous avons des pouvoirs parce qu'on nous les a donné. Pour Alfy et ses amis, ils n'en ont pas pour la simple et bonne raison que nous avons joué avec leur esprit et que ceci a causé leurs morts. »

Elle semblait secouée. Le jeune elfe, lui, était carrément stupéfait. Qui ? Qui avait bien pu faire ça ? Un être seul pouvait-il donc être responsable de tout cela ? Si c'était le cas, il fallait le découvrir, et probablement mettre fin à ses actes. Malgré le fait qu'elle ne lui avait pas proposé de nouvelle question, il ne put s'empêcher de demander :

« Mais... es-tu satisfaite de cela ? De tuer des gens avec des pouvoirs qui t'ont été donnés par quelque sinistre individu ? C'est terrifiant ! »

Il fallait découvrir de quoi il en retournait. Avec un peu de chance, comme elle avait l'air un peu secouée, il pourrait la raisonner...

« Est-ce vraiment ce que tu veux ? Ne vaut-il pas mieux mettre fin à cette triste tragédie ? » demanda-t-il encore, le visage emplis du désire d'aider et d'une compassion qu'il avait pensé ne plus pouvoir ressentir pour l'aniathy.

Touchée, la poupée baissa les yeux. Elle ne pouvait répondre sans qu'il passe au préalable une épreuve.

« Nous sommes en train de nous libérer en vous aidant à comprendre mais nous sommes limités dans nos actions par un maître que je ne connais pas. Seul Jack l'a rencontré et même de cela je n'en suis pas sure. »

Faëlis sentit son cœur s'accélérer. Il devait trouver ce Jack ! Et peut-être pourrait-il mettre fin à cette folie ! S'agissait-il du clown qu'il avait vu dans la salle précédente ?
Mais avant qu'il puisse poser plus de question, Dolly disparut dans les airs. Elle en avait sans doute déjà trop dit, répondant presque à deux questions... Jusqu'où était-elle limitée par ce 'maître' ?
De toute évidence, ces esprits n'étaient pas vraiment mauvais, mais forcés à faire de mauvaises actions. Il ne devrait pas perdre cela de vu. Mais en attendant, il devait continuer son enquête, et essayer de retrouver les autres. À en croire Alfy, l'escalier tueur devait se trouver au nord. Le jeune elfe décida donc d'aller au sud pour essayer d'intercepter l'une des ravissantes jeunes femmes pour les prévenir de la menace...

Avec le sentiment qu'il avait bien avancé, il se dirigea donc vers le sud... puis s'interrompit. Il y avait de belles boites, posées sur les commodes... C'était plutôt élégant, et il décida de tenter d’ouvrir la boite du coin sud-est, tentant de soulever le couvercle du bout des doigts. Dans cet endroit apparemment dangereux, mieux valait ne pas prendre de risque...