J'attache Harniän à un des nombreux piliers du bâtiments et pénètre à l'intérieur, toujours dévisagée par les braves gens trop honnêtes. A peine ai-je mis un pied dans l'immense boutique, que je suis interpellée par un soldat, un garde de la cité, à n'en point douter. Il m'attrape par le bras et me murmure à l'oreille :
"Que faites-vous ici ?" "Il me semblait qu'on était libre de faire ses courses en terre Sindel. Ce n'est plus le cas ?" "Vous savez très bien de quoi je veux parler !" "A vrai dire, non, je ne sais pas de quoi vous voulez parler !" "Vous avez reçu comme consigne de demeurer dans la caserne et vous allez et y retourner de suite !" "Ahhh, vous parlez de ça..."
J'ai naturellement ou presque repris le ton de ma voix normal, ce qui me permet d'être entendu autour de moi.
"Non, je ne fais pas partie des échappés de Tahelta, ne vous inquiétez pas pour moi. Je reviens bien de la capitale, ce qui explique peut-être mon état d'ailleurs..." "Taisez-vous !" me chuchote le garde. Je fais fi de sa remarque et continue tranquillement. "Vous avez parfaitement le droit de maintenir les rescapés à l'écart de la population, pour éviter d'affoler la foule... Mais vous comprenez, moi j'ai un laisser-passer spécial." "Je vous crois, mais je vous en prie, taisez-vous maintenant."
Je sors le parchemin de Naémin pour le montrer au garde, tandis qu'autour de nous, plusieurs personnes, tout en faisant semblant de ne rien écouter tendent l'oreille à mes propos. Un homme finit par intervenir, un elfe, âgé d'un millénaire bien avancé, aux yeux vert de gris fascinant et à la chevelure blanche tressée. Ses vêtements sont à l'antipode des miens : accordés de bleus et d'or, cape légère, pourpoint sans le moindre faux plis en tissus précieux; collant bleu assortis et bottes légères mais montantes.
"Qu'est-ce qui se passe ici ?" "Oh mais rien, monseigneur, rien du tout, je vous l'assure."
J'ignore qui est cet individu, mais manifestement, il doit être haut placé, vu la tête du garde.
"Il se passe juste que ce garde importunait une honnête citoyenne venue faire ses courses." "Et que fait une honnête citoyenne dans une tenue aussi... dépravée ?" "Elle revient de Tahelta avec une mission urgente." "De Tahelta, dites-vous ?"
Il prend mon laisser-passer, le parcourt rapidement des yeux avant de me le rendre.
"Je m'en charge." "Oui, messire, bien sûr, messire, à vos ordres, messire." "Quant à vous, suivez-moi, je vous prie."
Je regarde la boutique, le garde qui s'en va en courbette dans les allées, et le nobliau qui se dirige vers là d'où je viens. Je reste durant une poussière de secondes interdite devant la scène qui vient de se jouer, ne sachant ni quoi faire, ni encore moins quoi penser.
"Vous venez ?"
Si la question est polie, le ton est ferme, supportant difficilement une réplique.
(Même des courses y a plus moyen de faire ça sans problème avec toi...) (Je fais quoi ?) (Tu le suis pauvre andouille. A vue de nez, il vaut mieux perdre une journée avec lui qu'un mois dans un cachot pour trouble à l'ordre publique.)
J'ignore si les menaces d'Anouar sont fausses, mais j'ai peut-être poussée le bouchon un peu trop loin cette fois-ci. Soupirant, je fais demi-tour, regrettant déjà l'odeur des petits pains chauds et du miel.
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Je suis aussi GM14, Hailindra, Gwylin, Naya et Syletha
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