Accueil chaleureux
Le soulagement d’être arrivée à destination et surtout le plaisir de rencontrer le gardien de Barkhane me fit oublier quelques instants la fatigue accumulée et mon ventre affamé.
Bien que Kalas faisait près de dix fois ma taille, il semblait plus intimidé par la présence du gardien. C’est en effet avec un léger bégaiement qu’il se présenta à son tour. Le gardien, dénommé Monta’kh s’inclina plus bas cette fois nous partageant son plaisir à nous recevoir dans sa cité sous les dunes.
Le cheval de Kalas présentait de flagrants signes de fatigue et d’épuisement que son cavalier ne manqua pas de remarquer. A la demande de celui-ci, le gardien accepta volontiers de nous conduire immédiatement à l’endroit où nous allions loger. Derrière l’habitation, qui nous était destinée, se trouvait une écurie pour les montures de Kalas et Birhû.
Le golem, cette montagne de muscles en pierre, se retourna donc et, à grands pas lents, nous dirigea vers l’intérieur de la ville. Les rues de Barkhane s’avéraient larges et ensoleillées. Les rayons, qui s’infiltraient entre les zones d’ombres procurées par les bâtiments et la végétation, nous réconfortaient par leur douce chaleur nettement moins intense que dans le désert.
Toujours bien assise sur la tête du bouc, je me laissai porter par ce dernier tout en regardant avec curiosité les habitants de cette cité. Petits, grands, maigres ou gros, végétal ou minéral, les golems présentaient d’innombrables variétés. Tout en les observant, je leur faisais de polis signes de tête arborant mon plus beau sourire qui s’affichait naturellement sur mon visage rousselé de lutine. J’étais bien consciente que nous étions, sans doute nous aussi, objet de curiosité pour ces sympathiques villageois. Je constatai par contre que beaucoup de maisons étaient inhabitées, ce qui ne m’étonna outre mesure puisque Birhû nous avait déjà précisé qu’il n’y avait que très peu de golems qui y vivaient à longueur d’année. Après une petite marche bien appréciée, Monta’kh s’arrêta devant une maison semblable à ses voisines de droite et de gauche.
Le golem de pierre nous présenta ce logement comme le nôtre le temps de notre séjour, précisant à l’intention de Kalas que l’écurie juste derrière était accessible via un petit sentier de terre.
Ayant sûrement remarqué notre fatigue, il prit poliment congé de nous, nous précisant que nous pourrions nous restaurer et nous reposer à l’intérieur de la demeure et qu’ils avaient tout prévu pour nous procurer un agréable séjour. Et puis, lorsque nous serions prêts, l’esprit pourrait nous rencontrer, un après l’autre.
(Un seul à la fois ? Pourquoi pas les deux ensemble? )Je fronçai légèrement les sourcils, mais je conservai cette question pour moi. Je ne voulais pas les retarder davantage, car j’avais hâte de me rafraîchir le visage et me remplir l’estomac. Et puis, l’esprit lui-même pourrait sans aucun doute répondre à mon interrogation.
Birhû descendit de son bouc et ajouta que sa maison était adjacente à la nôtre. Je glissai alors sur l’encolure de l’animal pour me rendre sur son dos. De cette position, il me suffit d’un petit saut pour atteindre le sol sans dommage. J’en avais l’habitude et puis le bouc n’était pas très haut au garrot. Le golem végétal offrit de faire visiter sa ville à l’un de nous pendant que l’autre s’entretiendrait avec l’esprit.
Ils nous précisèrent qu’ils seraient tous les deux dans la maison de Birhû et que nous pouvions prendre notre temps, les golems étant des êtres patients !
Je ne m’occupai pas du choucas perché sur les branchages de Birhû, l’oiseau connaissait les aises mieux que moi, et je me doutais bien que le golem végétal le prendrait en charge.
Avant d’entrer dans notre demeure temporaire, je me tournai vers Kalas :
« Je te laisse reconduire ton cheval, je m’en vais me débarbouiller le visage et ensuite je mangerai un brin, on discutera ensuite si tu le veux bien ! »J’attendis sa réponse et puis j’entrai dans la maison. Le rez-de-chaussée était constitué d’une immense salle dont le plancher était recouvert en grande partie d’un grand tapis bicolore jaune et brun. Des bancs de bois longeaient les murs et au centre se trouvait une grande table pourvue de chaises en bois également. Bien que je ne puisse le voir, des odeurs agréables et alléchantes m’annoncèrent que la table était bien garnie de victuailles diverses.
Je traversai la pièce principale pour me rendre jusqu’au pied de l’escalier. Au prix de quelques petits sauts, je gravis une à une les marches me séparant de l’étage supérieur. Comme le bon sens me l’avait dicté, je découvris deux chambres. Et à ma grande satisfaction, une troisième pièce plus petite constituait la salle d’eau. Ce fut là ma première destination. J’y entrai et poussai la porte afin de bien la fermer. J’ignorai le grand récipient de bois servant de bain et escaladai une petite table de bois. Sur cette dernière était installé un petit pot de grès rempli d’eau. Ce dernier servant probablement à rafraîchir le visage des gens me constituerait un luxueux bain.
Me départissant de mon sac, de mes armes et de mes vêtements, j’entrai dans le bassin d’eau chaude à souhait. À l’aide du savon qui avait été déposé là à mon intention, j’entrepris de me laver énergiquement souhaitant me débarrasser de la poussière collée sur ma peau.
Quelques minutes plus tard, je sortis de ma baignoire fraîche et disposée à me ravitailler. J’enfilai une tunique propre prise dans mon sac puis je ramassai mon arc, mon carquois et mon sac et je sortis de la salle d’eau. J’avisai une chambre qui semblait adaptée à ma taille et y déposai mes effets sans m’y attarder. Je me dirigeai ensuite dans l’escalier et y descendis beaucoup plus rapidement que je n’y suis montée.
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