Le nouveau venu, Lelma de Kendra Kâr, annonce la couleur directement, disant que la diplomatie n’était pas son fort, et déclarant préférer les quartiers suspects, le danger ne semblant pas l’impressionner plus que cela. Il reconnaît que sa tenue n’est pas discrète, mais préfère passer pour un original. Ce fût ensuite à Fenouil d’appuyer les paroles de Tina, pertinente comme à son habitude.
Vadokan lui avait interrompu Collin en déclarant vouloir enquêter sur la Maison Kobayashi, car « tout excès de confiance peut s’avérer mortel en situation de complot ». Je n’aurais pas dit le contraire, mais si la maison de Shizune avait renoncé à ses titres, je ne voyais pas vraiment comment faire après pour revenir au pouvoir. Enfin si la Maison tentait quelque chose, les quatre autres n’hésiteraient sûrement pas à s’allier le temps de la mettre hors d’état de nuire, et pour orgueilleuse qu’elle soit elle ne pouvait se targuer de pouvoir leur tenir tête, même avec le Canon, Yumiko et d’autres guerriers.
Pendant que je réfléchissais, mon téléphone vibra dans ma main, téléphone qua j’allumai de suite afin de constater que j’avais reçu un message de Vadokan, message qu’il avait probablement envoyé à tout le monde vu la formulation employée. Je tiquai sur le « seul » employé. Je me retournai alors vers lui, inquiète. Il dut sentir mon angoisse, puisqu’il me prit à l’écart pour me murmurer qu’il savait qu’il pouvait me faire confiance, étant celle qu’il connaissait le mieux ici. Le début était prometteur, mais je sentais que la suite n’allait pas bien passer, s’il n’était pas convaincant.
Pour lui, c’était la raison pour laquelle il fallait se séparer. Que nous obtiendrions plus d’informations en étant séparés qu’en étant ensemble. Il me proposa d’aller du côté de la Maison Atalante, en fait du côté des grandes maisons en général avant de me demander s’il pouvait me faire confiance.
Mauvaise pioche Vadokan. Suite à sa déclaration, mon visage blêmit avec la colère, la tristesse, l’appréhension, l’inquiétude, le ressentiment, la rancœur, le désespoir…tous les sentiments négatifs que je pouvais ressentir. Mon corps se raidit instinctivement, et je voulus le fusiller des yeux, mais je n’y arrivais pas…car si j’étais totalement confuse, et un peu en colère, je comprenais plus que bien sa démarche. Je reniflai, essayant de rattraper les larmes qui allaient couler, refusant par fierté de pleurer. Peine perdue, elles réussirent à s’enfuir de mes yeux, et c’est en essayant de rester la plus joyeuse possible et d’ignorer les larmes qui coulaient que je lui répondis :
- « C’est d’accord ! »
Il se retourna prestement avant de demander à Collin quel danger pouvions-nous rencontrer dans les quartiers de couleur. C’est alors que Phyress lui demanda s’il ne comptait tout de même pas se rendre dans les quartiers chauds. La question me parut horriblement indiscrète, et mal formulée, elle n’était pas sa mère pour lui dire ce qu’il devait faire, mais me rappelant mon rôle de diplomate, je n’en tins pas rigueur et essuyai rapidement mes larmes avec un grand sourire pour me retourner et lui apporter une réponse à ses questions.
- « Je crois qu’effectivement il va s’y rendre, mais plus tard. Tu aimerais y aller toi aussi ? »
Collin prit ensuite la parole pour répondre à nos dernières questions, en répondant d’abord à Tina que les maisons nobles étaient un peu toutes contre les autres, restant unies uniquement quand il s’agissait d’accuser le pouvoir en place. Mais que la Maison Kartage, là où mon ami comptait se rendre, et la Maison Kobayashi, considérée comme « le sous-fifre de la Maison Valaï » elles étaient cordiales entre elles. Par « cordiales », je voulais dire qu’une rencontre ne se terminait pas en bain de sang. Enfin je crois. Il nous précisa que si nous pouvions en apprendre plus sur elles à la bibliothèque, nous en apprendrions plus à la rédaction d’un journal. Et que dans les forces spéciales, à part les guerriers que Shizune et d’autres s’étaient efforcés à procréer, il n’y avait pas d’autres soldats affiliés à des Maisons.
Il se retourna vers moi ensuite pour m’informer de comment verrouiller mon téléphone, chose que je trouvais très utile. J’étais déjà très attachée à ce petit objet, que je sentais très utile, savoir qu’on pourrait me le retirer et que je n’aurais plus de contact avec les autres m’effrayait déjà alors en plus avoir connaissance du fait qu’on pourrait fouiller dans MES affaires pourrait me rendre paranoïaque. Sans compter le fait que certains pourraient être en danger à cause de moi. Le problème était que n’importe quelle sécurité pouvait être passée par un expert, mais que nos téléphones étaient équipés d’un système qui nous permettraient de gagner quelques heures si on venait à le prendre, à savoir que notre…empreinte génétique avait été enregistrée, et que presque personne ne pourrait l’utiliser.
Mais comme avec tout bon côté d’une technologie semblait se ramener le mauvais, il nous précisa également que cela nous signifiait que si nous venions à être capturés avec notre téléphone et que nous n’avions pas eu le temps de le cacher ou de le détruire…je sentais la suite arriver grosse comme une maison, et effectivement Collin déclara que selon la méthode employée pour nous voler notre empreinte cela pouvait être douloureux.
Pour Lelma, il lui répondit que sa tenue le ferait juste passer pour un original avant de se tourner vers Vadokan pour lui répondre sur un ton que je trouvai désagréable que Shizune était hors de soupçon avant que la concernée le fasse taire, déclarant que sa maison était remplie de pièces qui resteraient confidentielles pour la sécurité d’Izurith, mais que le reste lui serait accessible. Tirade servie avec un regard glaçant à geler un elfe. Le genre de regard que j’aurais aimé lui jeter moi-même plus tôt, mais elle s’en chargeait très bien alors…mon ami reprit alors en expliquant que sa pleine confiance ne s’acquérait qu’en lui donnant complètement la notre. Bien qu’encore triste de devoir me séparer de lui, je fus flattée de constater que si sa confiance était si dure à avoir, cela voulait dire aussi qu’il avait pleinement confiance en moi avec ce qu’il avait dit.
Collin reprit avec la question de Vadokan, expliquant que dans ces quartiers la criminalité y était décuplée. Viols et meurtres en tous genres, ce genre de choses accueillantes et charmantes. Il se leva ensuite pour nous déclarer que nous étions les plus prêts possible, et fouilla dans un tiroir pour en sortir des cartes, leur moyen de paiement contenant mille Izurs. J’aurais bien demandé combien de Yus cela faisait si je n’étais pas sûre que l’équivalence entre un yu et un izur était inconnue du sergent. Après une petite explication sur les moyens de paiement, il nous donna une indication sur leur moyen de transport, le train. Un aynore qui ne volait pas et qui fonctionnait à toute heure du jour et de la nuit. Pour l’utiliser, des portiques reconnaîtraient notre téléphone qui avait un droit d’accès illimité à ce type de choses, et nous devions monter dans un wagon vers notre destination, ce qui prendrait quelques minutes au lieu de s’user les pieds pendant deux heures.
Il ouvrit alors la porte d’un cagibi qui donnait vers l’extérieur avant de nous souhaiter bonne chance et de nous assurer leur aide. Tina remercia le Sergent, avant d’appeler par erreur Shizune. Ce téléphone était si maniable que je la soupçonnai un court instant d’avoir fait exprès avant de l’écouter déclarer qu’au moins elle saurait que c’était le sien.
Pendant ce temps, Vadokan utilisa son ton le plus sec pour répondre à Phyress de la suivre si elle en était capable, et de savoir jouer la comédie. Ton que je trouvai assez sec pour la pauvre Phyress, mais qui elle pourrait l’accompagner. Parmi les milliers d’hypothèses qui m’étaient passées par la tête, j’avais pensé que c’était peut-être parce que j’étais de sexe féminin, hypothèse que j’avais tout de suite trouvée stupide. Je fus soulagée de constater que j’avais raison, mais l’idée que la confiance qu’il m’accordait était à la fois une raison et un prétexte pour m’éloigner restait dans un coin de ma tête. J’avais entièrement confiance en lui. S’il m’avait dit qu’en se jetant d’un pont on pouvait voler, je l’aurais cru. Mais le germe du doute s’était insidieusement planté dans mon cœur, envoyant valser toutes mes convictions, alors je décidai de lui faire confiance pour le moment comme toujours et d’aviser par la suite.
Je regardai les alliances se former autour de moi : Fenouil, qui demandait à Lelma s’il pouvait l’accompagner, Vadokan et…Phyress. Tous ensembles, il ne restait plus que Tina, moi et la vieille elfe, avec qui je n’aimerais pas vraiment faire équipe puisque je ne pourrais pas jurer, et pour diplomate et bien élevée que je comptais devenir, personne ne pourrait m’empêcher de jurer si je le voulais. De temps en temps. Jurer comme un charretier n’était pas dans mes plans. Rester seule ne me dérangeait pas, mais j’aimais rester avec d’autres, puisque la solitude n’était pas ce que je préférais.
Je rejoignis Tina, qui était sortie, et l’entendis comparer notre réunion à une réunion de famille, juste avant que les oisillons prennent leur envol. Elle demanda à rester en contact avec tout le monde, avant de déclarer souhaiter apprécier de savoir où elle mettait les pieds, surtout si elle pouvait éviter celui du voisin, avant de demander si nous étions des gens d’action, quitte à rester seuls. Je lui répondis avec entrain.
- « Je comptais aller un peu à la Bibliothèque de mon côté afin de vous faire parvenir les informations dont je prendrai connaissance, ou aller dans une des grandes Maisons, puisque j’ai vécu à la cour de Cuilnen, mais je peux tout aussi bien accompagner l’un d’entre vous, ce qui ne me dérangerait pas car je n’aspire pas à rester seule, la compagnie d’un autre pouvant être agréable à souhait. Si tu le souhaites, ou plutôt si cela ne te dérange pas, je peux t’accompagner. »
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Multis : Avalyn, Hisaya.
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