Coquillages et macchabées - Chapitre ICoquillages et macchabées
Chapitre II
Mais la seule réponse qu'ils eûrent ne fut que le silence et le vent marin qui forcissait dans leurs oreilles.
"Bon, elles ont déménagé tes copines ou quoi ?", lança Mercurio, qui commençait à faire les cents pas en s'approchant des maisons, tentant de regarder aux travers des interstices des volets s'il pouvait y avoir la moindre vie à l'intérieur.
Soudainement, une bourrasque emmena avec elle une odeur pestilentielle, comme si toute la poiscaille des environs avait pourrie.
"Pouah, c'est quoi cette puanteur ?", releva Ranos.
Mercurio était dubitatif. Snori avait raison, il y avait quelque chose d'anormal dans cette histoire... Soudain, alors qu'il tournait le regard vers Samrik, il vit celui-ci regarder droit devant lui, mettant sa main au sabre. Ce fut à peu près au même moment qu'Eliwin baragouina, avec sa gueule ravagée, ce que l'on pouvait deviner être un appel à l'attention vers une baraque en particulier. L'humoran vit alors se dévoiler à l'embrasure d'une porte une jeune et belle elfe bleue à la peau très pâle. Bien que l'idée de lui faire du rentre-dedans lui effleura rapidement l'esprit, il se rendit vite compte que celle-ci n'était pas dans son état normal. Elle se tenait le dos courbé, le visage camouflé par ses cheveux roux et commençait à traîner les pieds envers leur direction.
Snori s'avança en lui adressant la parole :
"Ah, bonjour !"Elle ne répondit mot, s'avançant toujours doucement vers eux.
Il réessaya, s'éclaircissant la voix :
"J'ai dit : Bonjour !"Surpris par ce silence, il recula de quelques pas en direction du groupe.
"Pas très causante celle-là." ajouta Ranos.
Mercurio, guérisseur oblige, songea avant tout à ce qu'elle fut peut-être victime d'une maladie qui aurait mis à mal le village. Il en savait quelque chose. A Dahràm, la milice ne se faisait pas chier avec ce qu'elle ne comprenait pas. Pour éviter toutes sortes de maladies qui pullulaient à cause de l'hygiène pourrave de la ville, ils enfermaient -voire carrément emmurer !- la plupart des gens qui semblaient malades chez eux pour ne jamais leur rouvrir. Ils n'avaient même pas besoin d'être contagieux. Juste avoir l'air malade suffisait. Les maisons abandonnés étaient donc très nombreuses et personne n'osait y rentrer par peur d'être touché par la maladie à leur tour. Superstition pas tout à fait stupide, mais pour un guérisseur qui savait se protéger ou, le cas échéant, se soigner de telles maladies, n'avait absolument aucune crainte à avoir. Donc, au moindre symptome, les plus riches se faisaient des stocks de potions de soin, ceux qui ne pouvaient pas se le permettre allaient le consulter et sinon, il savait où trouver les maisons des plus pauvres pour y piller ce qu'il pouvait. C'était de toute façon juste une question de jours, parce que s'ils ne mourraient pas de leurs maladies, la déshydratation s'en chargeait. Dahràm pouvait vraiment être un enfer, mais avec un peu de ruse et son petit talent, on pouvait vraiment bien se démerder.
Bref, souvenirs mis à part, il songeait qu'avec des maisons calfeutrés, une odeur dégueulasse et une femme pâle comme un cul qui mouftait pas, on avait ici tous les symptômes d'un village touché par une épidémie. Ça pouvait être une bonne occasion de se faire un peu de fric.
"Là ! Y en a une autre !", lança Jiro en pointant une autre jeune femme, visiblement dans le même état, se dévoiler au coin d'un mur.
Puis, rapidement, d'autres apparurent. Le groupe n'était clairement pas tranquille, dégainant leurs armes, même Snori. Seul Mercurio gardait un air apaisé.
"Pas de panique, c'est qu'des bonnes femmes malades, à coup sûr.", dit-il à l'équipe.
Puis, en s'adressant aux villageoises :
"Salut les cocotes, j'vois bien qu'vous avez toutes choppé une salop'rie, là et on peut dire qu'vous avez d'la chatte, j'suis guérisseur ! Alors j'vous propose un marché ! Il nous faut des vivres pour not' rafiot et..."Jiro l'interrompit :
"Non mais attends, si faut c'est ce qu'elles bouffent qui les as mis dans cet état non ?""Ah, ouais. C'est pas con c'que tu dis. Bon ben..." (Il reprends une voix plus audible)
"Non, laissez tomber les vivres. Par contre si vous avez des yus, des bijoux, des conneries d'valeurs, bah j'vous soigne. Ou de l'alcool tiens pourquoi, c'est bien ça aussi. Et vous donnez tout hein, c'est ça ou mourir, à vous d'choisir, on est pas non plus dans un temple d'Gaïa ici, faut pas déconner."Eliwin et Snori le fusillèrent du regard, mais ça ne faisait que donner à l'humoran l'envie de sourire, fier de sa malice griveuleuse qui s'apparentait beaucoup à un "la bourse ou la vie".
"Allez, rentrez chez vous et j'vais faire l'tour des baraques !"Mais il parlait dans le vide. Elles avançait encore et encore vers eux, sans un mot...
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Playlist de Mercurio
A propos, j'ai trouvé la morale de la fable que ton grand père racontait,
celle du petit oiseau que la vache avait recouvert de merde pour le tenir au chaud et que le coyote a sorti et croqué...
C'est la morale des temps nouveaux.
Ceux qui te mettent dans la merde, ne le font pas toujours pour ton malheur
et ceux qui t'en sortent ne le font pas toujours pour ton bonheur.
Mais surtout ceci, quand tu es dans la merde, tais-toi !
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Jack Beauregard (Henry Fonda), Mon nom est Personne, écrit par Sergio Leone, Fulvio Morsella et Ernesto Gastaldi