L'animal avait pris son élan et littéralement volé au dessus de la zone marécageuse. Sans encombre, il prenait pied de l'autre coté. La jeune femme reprit alors forme humanoïde et réajusta ses affaires.
Derrière elle, Ciryior la regardait et se demandait ce qu'elle allait faire. Deux choix s'imposait pour lui. Le premier, la jeune femme l'aidait à sortir de là, le second, elle filait et il n'aurait plus qu'à attendre que l'effet du sort se dissipe petit à petit. Ce qui pouvait prendre quelques heures et …
Le deuxième choix n'étant pas des plus réconfortant.

Dites, vous n'allez pas me laisser ici?

N'Kpa était contente de sa performance et l'appel du prêtre l'interrogea sur ses sentiments à son égard. La paranoïa précédente refit surface. (Puis-je lui faire confiance?… Hum ! n'a t-il pas découvert en brisant la pierre que cela nous sauvait de l'emprise du collier? Il semble sincère… Ok !…) Elle regarda autour d'elle et le sous-bois s'offrait à elle avec tout ce qu'il fallait. je reviens, je vais chercher des branches

Elle disparait vite à la vue de l'humain inquiet, il fait toujours nuit, il n'a pas sa vision nocturne. Le temps passe égrainant des minutes bien trop longues. L'inquiétude s'installe, le silence qui l'entoure ronge son moral et fait place à une crainte fondée. Après tout, il ne la connait pas la sauvageonne. Ils sont là sur cette ile pour un enjeu macabre dont-il ne saisit pas toutes les règles et où les meilleurs doivent survivre. Alors, il se met à prier…
Lorsqu'elle réapparait enfin avec ce qu'il faut, il souffle de soulagement. La Shamane traine derrière elle quelques longues perches de bois mort et de jeunes pousses suffisamment longues pour former un tapis léger.

Ah ! Dieu merci vous voilà enfin !… Elle le regarda et décida de l'asticoter. Après tout, il n'était pas d'une grande utilité, mais elle ne pouvait se résigner à l'abandonner. Ils étaient tous les deux dans le même navire, la même galère et un allié serait toujours bien venu. S'il était honnête, il y a bien un moment où il aurait à prouver sa valeur.
Oh ! j'ai eu envie d'aller me balader et je me suis perdue !… Déclara t-elle avec un sourire espiègle. Très drôle, j'aimerai vous voir à ma place !... Elle penche la tête, alors qu'une natte vient barrer son regard brillant. Son visage exprime la duplicité, elle se met à rire.
Tout se faisant le temps passait. N'Kpa sentait bien qu'il ne fallait plus trainer ici trop longtemps. Alors, elle sortit de sa besace la corde et lui en lança un bout. nouez ça à votre taille. Puis vous allez tirer les bouts de bois que je vais attacher à l'autre bout. Vous allez faire venir doucement la branche jusqu'à vous. Une fois la passerelle mise, vous me relancer un bout de corde, je vous assure, vous rampez sur le pont improvisé et je vous tire doucement… Allez !

Il fallait en finir vite, la jeune femme le sentait…

L'aventure avait été difficile, le pont précaire ne résista pas au poids de l'humain. Mais heureusement, la corde sauva le jeune homme, non sans lui offrir un bain de boue des plus "saillant".
Son amour propre en avait prit un sérieux coup. Cela l'avait ramené à la réalité et surtout sauvé d'un isolement précaire, voir pire. Il avait du faire confiance à la femme chat et sa vie en dépendait. Alors, il était tout de même heureux qu'elle ait trouvé un moyen de le sortir de cette impasse. Force était d'admettre qu'il se sentait un peu inutile.
(Hum! si j'avais été avec la Garzok, probablement m'aurait-elle laissé en plan…)
Le jeune homme se secouait, se débarrassait tant bien que mal de la boue qui maculait ses vêtements. Malheureusement, plus il s'activait, plus il en répandait ailleurs et s'énervait. L'image était risible, mais N'Kpa se retint d'en montrer une quelconque moquerie. Alors par dépit, le jeune homme finit par en conclure :
Me voilà bien crotté et inconfortable… euh … Merci...

La Shamane lui sourit et hocha de la tête. N'Kpa remballait sa corde, l'essuyant au passage.
Cyrior tenait fermement le paquet dans lequel était enfermé le collier de Lillith. Il ne l'avait pas lâché à un seul moment, même lorsque le pont précaire avait cédé. Elle tiqua sur l'utilité de transporter l'artefact rendu inoffensif grâce au bris de la pierre blanche.

Ne serait-il pas judicieux de se débarrasser de ça? désignant le collier.

Comme vous pouvez le constatez, depuis que la pierre blanche est brisée, nos esprits semblent plus libre. Je pense que ce collier aura son utilité avant la fin de cette aventure… Et je ne voulais pas le laisser dans la nature, au cas où...

Je voudrais bien me débarrasser du mien et vous devriez en faire autant. L'instinct lui dictait de retrouver sa liberté. Après on suivra les traces des meurtriers de Lillith.

Alors ni une ni deux, sans plus d'explication, elle ramasse un galet, s'approche du mage surpris, jeta un regard sur l'ensemble des pierres, Ne bougez pas !… Mais? … , lui releva le menton d'une main et frappa la pierre blanche d'un grand coup sec.





(((tentative de briser la pierre blanche et poursuite des meurtriers)))

Le groupe prit le chemin, Nellia au côté de l'humoran, les nains, Drizton et le mage de feu juste derrière. Katsu fermait la marche. Sirat perçut alors un bruit sourd, le son d'une pierre contre une autre. Nelia l'avait entendu aussi et se rapprocha doucement suivi de l'enchanteur. Quand celui-ci vit un jeune homme tenant dans sa main levée une roche, prête à l'abattre sur sa compagne, il perdit le contrôle de son corps. Ce qu'il craignait le plus, allait arriver, son absence l'avait mis en danger et la culpabilité explosa en lui, rependant sa colère dans ses artères. Il dégaina son marteau et se lança à l'attaque. Il avait perdu toute notion de raison ou de logique, seul l'idée de transpercé cet homme qui s'attaquait à la Shamane, martelait son esprit au rythme de son palpitant. Il frappa de toutes ses forces.

Le jeune éphèbe s'exécuta et ne bougea pas d'un sourcil. Le galet s'abattit avec juste ce qu'il faut de puissance et de précision pour briser la petite pierre du collier dans un claquement sec… N'Kpa était satisfaite et sourit...



... Cependant, quelque chose d'étrange s'insinua dans son esprit et au plus profond de son cœur. Un étrange sentiment de rejet, quelque chose qui se renforçait soudainement. Ses soupçons, son impression de ne pouvoir lui faire confiance grandissait. Le jeune homme n'était plus son ami, même s'il ne l'avait jamais été. Elle doutait et son anxiété augmenta, accompagnée d'une envie de le fuir, voir de le frapper…



(Comment ai-je pu abandonner mon libre abrite à cause de ce satané collier? ) Ce fut instantané. Le mage ressentit le retour de sa liberté mentale. Soulagé de ne plus être sous le contrôle de cet artefact, Cyrior s'empara de la pierre sans laisser le temps à l'Humoran de réfléchir.
Il pressentait quelque chose de mauvais s'il attendait ne serait-ce qu'une minute. L'esprit démoniaque derrière tout ça, ou la magie de l'objet ferait son possible pour retourner la jeune femme contre lui. Sans attendre, il lui arracha la pierre, saisit N'Kpa derrière la nuque pour lui soulever la tête et dressa un bras menaçant…



... Des pas lourds martèlent le sol derrière eux, un bruit de course, un râle profond et une respiration forcée se rapprochent. Une odeur coutumière portée par une brise légère du large atteint ses narines. (... Sirat?...) La jeune femme surprise par la rapidité de Cyrior reste tétanisée, le temps que son esprit comprenne. Le jeune homme concentré sur son action n'entend pas le danger qui fonce droit sur lui…

« SIRAT NOOOOOON »

Le choc fut terrible. La fureur de l’enchanteur se déchaina en une seule et unique frappe. Le mage mourut sur l’instant sans même s’en rendre compte et sous l’impact son crâne explosa éparpillant morceaux d’os, de cervelle et flot de sang.
La scène horrible laissa un instant N’Kpa hébétée, sous le choc, la bouche entrouverte, les pupilles dilatées, souillée des éclaboussures des restes de Cyrior.

Tout doucement, elle tourne la tête vers son sauveur et O combien meurtrier. De son visage et coiffure maculé dégoulinent des gouttes de sang.
La joie de revoir son prétendant fait vite place à à la colère qui couve. Son regard se durcit et les muscles de sa mâchoire se contractent. Elle se redresse, se tourne vers Sirat et lui envoie une gifle mémorable, sans se soucier du monde qui les observe.

Tu files comme un voleur sans te retourner me laissant seule et sans explications et lorsque tu réapparais, tu assassines ce pauvre Cyrior alors qu’il allait me libérer ! … Je te hais !

La pression libérée, elle s’effondre en sanglots et se blottit dans les bras du géant roux…

Le cri de l'elfe noir ne fut qu'un bruissement, il arrivait trop tard, Sirat n'entendit pas l'appel, l'avertissement. Le marteau s'engouffra d'abord dans le crane du demi elfe, sa chevelure s'éventra sous son poids laissant apparaitre un magma poisseux et carmin. L'arme termina sa course dans son épaule. Il déboîta l'articulation dans un craquement sourd. Il s'effondra. Le pantin désarticulé, dans sa chute, laissa une trainée de sang et d'os dans l'air. Sirat observa le corps disloqué et sans vie de son ennemi. Il l'avait tué d'un seul coup, une telle facilitée le surprenait.

Il se retourna vers la shamane, celle-ci restait sans voix, paralysé, immaculé par le sang de la dépouille. Elle releva le regard de l'enchanteur, la mâchoire crispée, le visage tordu par un rictus de rage. Il sentit toute la colère de sa compagne. Une gifle rapide et brusque, déchira le silence et fit plier la tête du guerrier. Sa fureur déchargée, ses yeux ambres s'emplirent de larmes. L'homme qu'avait tué Sirat n'était pas un ennemi.

Elle lui reprochait sa fuite, lui aussi et le meurtre de l'homme qui allait la libérer. Elle s'écroula dans ses bras, sanglotante et perdue. Sirat était désemparé, il avait tué un innocent, avait-il encore une fois subi l'influence du collier ou l'artefact lui servait-il d'excuse. Il n'avait pas perçu l'emprise et pensait avoir agi de son propre chef. Il serra dans ses bras N'kpa et huma son parfum. Il était heureux de la retrouver. Les nains braillaient déjà que le géant roux était un assassin, il n'y prêta pas attention. La chaleur de N'kpa malgré la fraicheur matinal, le soulageait. Peut-être qu'il était réellement le monstre qu'ils décriaient, mais peu lui importait son humanité si elle restait en vie.

Je suis désolé, je croyais qu'il allait te tuer, je n'ai pas réfléchi. Comment allait-il te libérer?

Son regard se posa sur les pierres de la parure maléfique de la shamane. Leur lueur l'intrigua, il passa doucement ses doigts dessus. Un opalescent, un céruléen et le troisième écarlate, ils formaient le bijoux. Il n'avait jamais essayé de comprendre ce qui le composait, leur nature même. En attendant la réponse de son aimée, il les contemplait, cherchant leur origine et comment ce Cyrior aurait pu libérer N'kpa d'un simple coup de pierre.

La jeune femme se ressaisit rapidement à la voix de son compagnon. Elle jeta un regard autour d’elle et remarqua la présence de la troupe qui accompagnait Sirat.
Elle connaissait de vue certain d’entre eux, mais pas le Shaakt, ni le couple de nains. Sa haine c'était renforcée envers les membres de ce peuple d'elfes, après ce qu’elle et Sirat avaient vécu. Une peur fondée sur les histoires colportées et sur leur réputation de cruauté. Force était d’admettre qu’il était beau et dégageait une puissance contenue. Instinctivement, il lui faisait peur.
Son expression qui c’était radoucie un instant, se renfrogna. Elle attira à lui l’enchanteur pour lui parler à l’oreille.

Qui c’est celui-là et les deux autres? … une pose, elle observe Daïo s’approcher et se pencher sur les restes de Cyrior et se saisir du paquet contenant le collier cassé de Lillith.
Son sang ne fit qu’un tour et la question restée en suspend de son amant lui revient. "Comment allait-il te libérer?"

Eh ! vous, remballer ça ! Elle saisit le paquet avec brusquerie et colère, restant tendue comme un arc prête à agir au cas ou… Elle n’a pas confiance et craint ses réactions. Elle se retourne vers son amant. Sirat… Lillith qui était blessé est mort cette nuit. Les deux esclaves qu’il avait libéré sur la plage se sont retournés contre nous. Aidé d’une forte troupe, il semblerait qu’ils ont voulu l’emmener, ils l’ont tué. Pourquoi, je n’en sais rien? Je n’ai pas découvert de traces de lutte… Les pas s’éloignent dans cette direction… Elle montre le nord ouest. Lillith a été décapité, son collier… celui là, gisait dans les herbes et la pierre blanche c'est brisée lorsque Cyrior lui a donné un coup de pied. Nous avons eu l’impression d’avoir l’esprit libéré, comme une longue inspiration après une longue apnée sous l'eau. Du coup, nous avons fait le rapprochement que cette pierre pouvait bien être celle qui nous dirige… Et chacune des autres, doivent avoir un pouvoir propre.

Elle souffle un peu épuisée par cette nuit peu réparatrice, par les émotions et cette longue tirade.

A quoi servent les deux autres?... J’en ai déduit que si nous cassions les pierres, nous pourrions nous débarrasser du collier… Je venais de briser la blanche de Cyrior et il allait en faire de même pour la mienne, avant que…

… Je veux me débarrasser de ça, nous sommes captifs, enchaînés par magie et de ces trois pierres émanent le pouvoir maléfique de l’homme métallique…

Rappelles toi, le fou aux yeux rouges dans le bateau, nous a dit qu’il y avait des volontaires et d’autres non. Je préfère faire partie des deuxièmes et pouvoir ressentir, assumer mes sentiments, mes peurs, mes joie, mes peines et savoir que tu m’aimes aussi fort que moi… Même si tu n’es pas tout proche et si je dois en mourir.

Elle laisse les mots s’envoler Avant de conclure : Oui, je préfère être libre. Si tu fracasses les pierres, le collier tombera tout seul. J’en suis sur. Et nous serons libre de pouvoir agir sans risque de s’entretuer pour le plaisir de fous furieux. Après, nous irons libérer les esclaves, punir les meurtriers de Lillith et comprendre, j'espère le fin mot de l'histoire... Hein?.

Tandis qu'ils s'enlaçaient et que Sirat tentait de décrypter dans son esprit les pierres du collier. Du carmin se dégageait puissance et force, mais le blanc semblait obscurcissait tout et l'obnubilait. Drizton s'approcha du corps sans vie, ce qui mit la shamane dans une colère spontanée et réveilla Sirat de sa torpeur. Elle s'extirpa de l'étreinte, soustrayant les gemmes de son artefact à l'inspection de l'enchanteur. Elle arracha un paquet que l'elfe noir avait récupéré sur le mort. Celui-ci contenait le collier du montagnard. N'kpa expliqua alors sa décapitation et la trahison des esclaves. Elle et Cyrior avait récupéré le collier. Pendant qu'elle lui expliquait l'enchanteur lui reprit des mains. Il inspecta encore une fois et le redonna à Drizton.

Ne t'inquiète pas amie, il n'est pas comme les autres de sa race.

Il s'adressa au Shaakt.

Tu le connaissais, j'ai remarqué ton expression quand je l'avais mentionné la nuit dernière.

Il aurait aimé lui dire qu'il comprenait, mais il en était incapable. Il laissa reprendre son amante. Elle développa sa thèse selon laquelle chacune des pierres avaient un pouvoir. En les brisants ils pensaient se libérer de l'emprise du bijou maudit. Elle conclut et termina sa tirade par le désir d'être libéré. Sirat la jaugea, prenant le temps de la réflexion.

Si ton ami est mort c'est parce qu'il venait de briser la pierre blanche. Elle doit aussi être lié à la puissance que nous confère les colliers.

Il soupira et prit le temps de s’accroupir pour essuyer son marteau ensanglanté. Les nains s'étaient calmés, tout le monde écoutait la shamane. Chacun prenait l'information avec plus ou moins de prudence. Sirat se redressa il regarda sa compagne avec beaucoup d'inquiétude.

Si nous brisons ces pierres nous serons certes libre, mais notre liberté aura le prix de nos vies. Nous ne pourrons pas prétendre vaincre nos ennemis.

Il posa sa main sur son épaule délicate.

Si tu y tiens je le ferais, je te rendrais ta liberté. Mais je garderais ce collier et sa force afin de te permettre de quitter cette île saine et sauve.

Il se retourna vers les autres, sauf Drizton il se doutait de sa réponse.

Réfléchissez bien et si vous voulez je le ferais pour chacun d'entre vous.