"Oui, Leona, celle qui aime les plantes. Mais elle est morte il paraît; en tout cas elle est pas encore de retour."
A ces mots elle me guida vers une bâtisse couverte de végétation et ouverte aux quatre vents. A mon grand étonnement, tandis que les gardes faisaient peu cas de ma présence, c'est tout juste s'ils ne tressaillaient pas au passage de la jeune fille, s'écartant respectueusement. Aussi lorsqu'elle m'invita à entrer dans la demeure abandonnée un frisson me remonta le long du dos.
"Viens, ici on sera à l'abri des oreilles indiscrètes."
J’acquiesçai d'un signe de tête en guise de remerciement.
"Qui était cette Leona ?" demandai-je prudemment.
"Oui, Leona, celle qui aime les plantes. Mais elle est morte il paraît, en tout cas elle est pas encore de retour."
A ces mots elle me guida vers une bâtisse couverte de végétation et ouverte aux quatre vents. A mon grand étonnement, tandis que les gardes faisaient peu cas de ma présence, c'est tout juste s'ils ne tressaillaient pas au passage de la jeune humorane, s'écartant respectueusement. Aussi lorsqu'elle m'invita à entrer dans la demeure abandonnée un frisson me remonta le long du dos.
"Viens, ici on sera à l'abri des oreilles indiscrètes."
J’acquiesçai d'un signe de tête en guise de remerciement.
"Qui était cette Leona ?" demandai-je prudemment.
"Leona ? C'est l'une des treize. Comme Crean, Khynt, Karsinar, Xenair ou même Gadory. Tu étais sur un autre monde ou quoi ?"
"Je... Non mais... J'ai été longtemps absente. J'ignorais leurs noms, les noms des Treize, celui de Leona. Mais... Ils ne sont plus vraiment Treize alors ?"
"Pour l'instant ils sont douze. Mais Oaxaca ne tardera pas à ramener Leona, ça serait pas la première fois."
J'avais un instant espéré que la tâche nous serait simplifiée mais il ne devait visiblement pas en être ainsi. L'ombre de la dame noire planait toujours sur nous, et ses noirs pouvoirs ne cessaient de m'inquiéter.
"Ah. La nécromancie bien sûr. Tu les connais bien n'est-ce pas, les Treize, Oaxaca ?"
Elle devait savoir bien des choses, et ne semblait pas craindre de me les révéler.
"Plus compliqué que de la nécromancie, mais j'ai jamais compris la différence. Et je les connais un peu, normal en sept ans après tout."
Plus compliqué que la nécromancie ? Je m'intéressais peu à ces choses mais ça ne me disait rien de bon. S'il ne s'agissait pas de nécromancie, alors de quoi pouvait-il s'agir ? Un pacte ? Un pacte avec Thimoros ?
"Je n'y connais pas grand chose non plus à vrai dire. »
Je lui fis un sourire compatissant, réalisant que sept années ce devait être terriblement long au service des Treize...
"Mais ces colliers, ça j'en ai compris les pouvoirs... Ça fait donc sept ans que tu es leur esclave ? Les gardes pourtant, j'ai bien vu la façon dont ils s'écartaient devant toi..."
"Esclave ? Non, je vous l'ai dit, je suis libre moi. Je suis une des lieutenantes de Crean, c'est pour ça que les gardes s'écartent. Qu'ils essayent de me bousculer et ils vont pleurer d'agonie !"
Je frissonnai et me reculai par réflexe. Je n'avais pas souvenir qu'elle m'ait déjà dit une telle chose...
"Une des lieutenantes. Je comprends mieux... J'imagine que c'est cette apparence qui me trompe."
Je n'avais une plus petite fille en face de moi, mais un adversaire redoutable dont je ne doutai pas un instant des menaces. Au moins ça expliquait ce tête à tête.
"Sans doute, oui. Crean nous avait choisie toutes les quatre pour ça. Vous autres humains et elfes vous vous laissez tellement tromper par les apparences."
Elles étaient donc quatre. Sans doute toutes aussi trompeuses. Avions-nous été choisis de la même façon ?
"Choisies ? Comme il nous a choisi moi et mes compagnons ?" repris-je.
"Comme JE vous ai choisi, tu veux dire. Oui, à peu près. J'ai juste dû vous forcer un peu plus la main."
Je frissonnai de nouveau. Nous étions entre les mains d'une enfant... Des jouets...
"C'est donc à toi que l'on doit de s'être retrouvé ici. Mais pourquoi ? Pourquoi nous avoir choisi ? Nous avoir amené ici ? Que veux-tu faire de nous ? ... Et quel âge as-tu donc ? Pour autant que cette notion ait du sens pour toi..."
"Je vous ai choisi, c'est tout. Crean nous a demandé de trouver des gens puissants et indépendants et d'un peu toutes les races, sauf Garzoks et Sektegs. J'avais même un oudio, mais le collier n'a pas marché sur lui. Et je vous ai choisi parce que vous aviez l'air d'aventuriers ou de mercenaires, enfin ce genre de gens qui n'obéissent à personne quoi. Et Crean vous a fait venir pour voir si les colliers marchaient comme prévu. Quant à mon âge," reprit-elle d'un ton narquois "oh... plus âgée que toi. J'ai arrêté de compter à 400 à vrai dire. Et 400 ans, c'était déjà longtemps avant de venir avec Crean."
Je me sentais à la fois flattée et ulcérée d'avoir été choisie, un vulgaire jouet entre leurs mains oui, sur lequel tester leurs terribles pouvoirs... Et rien d'autre que ça. Et plus la conversation avançait, et plus je craignais mon interlocutrice. Quatre cent ans avant même d'être choisie par Crean - j'ignorais qui était cette jeune fille, ou plutôt ce qu'elle était, et redoutais de l'apprendre. J'allais pourtant devoir éclaircir ceci.
"Et maintenant ?" éructai-je.
"Bah Crean songe à vous tuer, les colliers ne marchent pas à chaque fois. La preuve, il vous chasse et vous êtes revenus même pas une heure après. Mais Khynt n'est pas d'accord, lui. Il veut vous recruter, pour votre puissance."
"Et l'île ? Et ce volcan ?"
J'étais effarée.
"Quoi l'île ? Ah, l'éruption tu veux dire ? Aucun risque, la lave coule sur l'autre versant, enfin d'habitude."
"D'habitude..." Rien de très rassurant. "Et toi ? Que veux-tu ?" fis-je en me radoucissant. Elle serait peut-être notre salut.
"Moi j'vous trouve drôle. Enfin, moins depuis que vous avez caché vos colliers, c'est sûr. Mais vous connaissez l'île et une île secrète c'est moins sympa quand plein de gens la connaissent, t'es pas d'accord ?"
"Si bien sûr. Mais on ne me fera pas croire que les Treize maîtres seraient incapables de nous faire oublier son existence... Il n'a jamais été question de nous laisser repartir n'est-ce pas."
Je la regardai d'un air sincèrement navré. Je doutais que le souvenir de cette île fût le véritable problème. Ils voulaient simplement continuer à jouer avec nous, ou se jouer de nous.
"Vous savez très bien que l'on ne restera pas ici. On partira, ou on mourra en esssayant. J'étais venue dans l'idée de tenter de faciliter les choses, épargner des vies..."
"Si les colliers avaient marché, vous auriez tous été relâchés vivants, à notre service. Mais comme ça n'a pas marché; c'est soit vous acceptez de vous enrôler gentiment, soit on va devoir vous tuer, en effet. Mais si tu veux, moi je te veux bien à mon service, t'as l'air gentille !"
"Je crains avoir déjà prêté allégeance et mes obligations ne sont guères compatibles..." J'étais sur la réserve. Je devais me comporter intelligemment. "A moins que vous ne puissiez laisser la vie sauve - et la liberté - à mes compagnons."
"La liberté et la vie sauve ? Rien que ça. Faudrait que je négocie avec Crean pour ça. Puis avec Kynth aussi. Puis vos compagnons... lesquels ? Le gris et la Garzok ou tous les autres aussi ?"
"Tous les autres..." J'ignorais combien nous étions. Elle ne pouvait désigner par là ce qu'il restait de notre troupe de Kendra-Kâr, il devait y en avoir d'autres... "Vous savez comme moi que vous ne les retiendrez pas si facilement."
"Oulà, une seule vie en échange de plus de trente ? Je doute pouvoir faire avaler ça à Crean. Mais je peux vous faire une autre proposition. Si vous parveniez à gagner l’allégeance du gris qui t'accompagnais, du Shaakt, du vieux mage de feu, du pirate borgne et de la jeune hafiz, alors je laisserais les autres. Cinq personne à convaincre plus vous, ça fait six vies contre les vingt-cinq autres."
Trente. C'était bien assez pour raser ce village si nous pouvions êtres réunis...
"Trente vies, qui ne vous appartenaient pas, contre celles de vos sbires, la sécurité de votre île, et la mienne. Je ne connais même pas ces gens dont vous parlez, et je crains qu'ils se refusent à toute coopération."
"Je peux vous mener à eux, c'est pas un soucis. Et vous ne voyez pas les choses de la bonnes manières. Ces vies, dont la vôtre, nous appartiennent. Nous pourrions vous demander de vous entretuer, vous finiriez bien par obéir. Ce serait une solution pour en finir d'ailleurs. Mais vous êtes puissant, Khynt a raison. Notre proposition est pourtant simple : nous gardons les six plus puissants et laissons les autre en vie."
Ma vie appartenait à Yuia, et elle allait le comprendre bien assez tôt...
"Je vais être plus gentille encore." reprit-elle après un court temps de réflexion. "Pour votre rédition, on libère cinq des vôtres. A chaque personne de la liste venant se soumettre à Crean, à l'une de nous ou à n'importe lequel des 13 d’ailleurs, nous en délivrons cinq de plus. Dans 48h, nous ferons se suicider tout ceux n'ayant pas été délivré ou ne s'étant pas soumis. Oui, ça je peux négocier avec Crean, ça l'amusera !"
Mon coeur manqua un battement.
"C'est ça que vous appelez être plus gentille ? Un suicide sous 48h n'est guère encourageant..." Je me ressaisis et réfléchis rapidement. "Vous pouvez controler tous les porteurs de colliers ? Nous n'avons qu'à les rassembler ici. Je pense que leur exposer le marché rendra les cinq autres éléments retenus plus enclins à une éventuelle allégeance... Ils veront de leurs yeux ceux qu'ils sauveront. "
"Ah oui, c'est plus gentil. Au moins si vous ne parvenez pas à convaincre les autres, tout ceux convaincus auront la vie sauve. Dans la première idée, il faut les six pour que vous ayez tous la vie sauve." Elle fit une pause. "Et non, si on vous rassemble c'est pas marrant. Puis si vous vous rebellez et que vous êtes tous au même endroit, ça serait trop risqué. Vous êtes moins dangereux séparément. Puis ça va être marrant de vous voir courir l'île pour sauver des vies !"
Je lui lançai un regard meurtier.
"Deux jours... Je ne sais même pas quelle taille fait l'île... Et je n'ai ni ailes et ni monture..."
"L'île fait trente kilomètres, d'un bout à l'autre. Et pour les ailes, désolé Xenair a quitté l'île hier matin." Elle s'esclaffa. "Rassurez-vous, ils sont dans un rayon de 10 kilomètres environ, puis d'autres peuvent aussi les convaincre." A mon air dépité elle enchaîna : "Si vous préférez, je peux vous couper la tête tout de suite. Il paraît qu'on ne sent rien."
Je n'avais pas tellement le choix.
"J'imagine que je n'ai plus qu'à me mettre en route dès à présent. Me guiderez-vous vers les autres ?"
"Venir avec vous ? Comme otage ou comme garde du corps ?" Elle rit de nouveau.
Je n'y avais même pas songé. Comme si elle risquait quoi que ce soit... Elle était sûrement d'un tout autre niveau, et pouvait nous ordonner de nous suicider. Je ne souhaitais en aucun cas m'en prendre à elle, à moins d'être dans une situation extrême qui l'exigerait.
"Bonne idée, ça va être drôle de voir comment vous faites, puis je pourrais vous éviter de vous faire dévorer par les monstres en chemin. Ca serait idiot de perdre un soldat de votre niveau dans la gueule d'un simple monstre. Laissez-moi juste le temps de passer chez Crean pour que je sache où ils sont, puis prendre mon équipement !"
J'haussai des épaules en guise d'acquiescement, abattue mais prêtre à la suivre.
"Et vous m'éclairerez sur ce qu'être à votre service implique..."
"On aura tout le temps de discuter en chemin !"
Et tandis qu'elle se relevait et sortait de la bâtisse, moi sur ses talons, je doutai avoir améliorer la situation...
_________________ Sinaëthin Al'Enëthan, alias Silma, Héraut de Yuia, hiniön lvl 21
|