Ma tentative ne fonctionne pas. Bien évidemment. Comme d’habitude, je me lance tête baissée sans réfléchir aux détails. Et en terme de détail, cette fois, c’est un enfant qui me manque, comme se targue de me le rappeler le Sindel nommé Hawke. Aussitôt dit, aussitôt fait, la p’tite Huguette, dont le pseudonyme me rappelle non sans gêne une chanson paillarde aux couplets éhontés et particulièrement gaillards hurlée par mon frangin dans ses longues et arrosées soirées de débauche, rapplique et s’attache à la chaîne de trois maillons que nous formons l’elfe, moi et la porte.
Flash.
Un flash, c’est bien ça. Et puis une seconde d’aveuglement, où main sur les yeux, je frotte mes paupières pour me rassurer la pupille : non, je ne suis pas aveugle. En revanche, je ne suis plus du tout dans la bibliothèque-taverne-salle de réunion-quartier général des enfants perdus. Ici, l’ambiance est bien plus chaleureuse. Stricto sensu, car même si nous sommes sans doute autorisés à hurler notre soudaine détresse, c’est bien à la température que je fais allusion. Étouffante. Suffocante. Chaude, quoi. Et l’explication s’en fait vite ressentir : des volcans partout droit devant nous, striant de fissures rougeâtres et de pics creux plein de lave un paysage d’obsidienne et de roche volcanique. Des fumeroles, des rocs sombres, des giclures incandescentes, et des cendres… Décor paradisiaque où, sans plus y réfléchir, j’ai décidé de me rendre. Me voilà bien, maintenant, sans plus d’autre précision sur l’endroit que l’autochtone grisé qui m’accompagne.
À quelques endroits, des herbes séchées, buissons morts et arbres tordus et dépouillés persistent tant bien que mal dans le chaos volcanique. Ici, la nature a tous ses droits… Dommage qu’ils soient si destructeurs, même si c’est plaisant à observer, en un sens.
Mes comparses commentent d’un pléonasme évident la chaleur de l’endroit, et le sindel préconise à la môme de ne pas glisser. Il est vrai que cette pierre a l’air aussi glissante que coupante. Ça serait dommage de perdre des morceaux avant même d’avoir découvert la moindre chose sur les silnogures. Il avertit aussi du danger des coulées de lave, impromptues, et de son désir ardent (hem) de rejoindre l’arbre tordu non loin de notre position. De toute façon, à part explorer l’endroit, nous n’avons pas grand-chose à faire.
« Oui. Puis l’feu ça brule. »
Lancé-je, un peu taquine, à notre équipée. Avant de me rendre compte que l’air vicié est saturé de souffre. Pour éviter des irritations des voies respiratoires, je remonte mon foulard vert sur mon nez. Ça ne filtrera pas grand-chose, mais c’est mieux que rien ! Le son un peu étouffé, derrière cet écran de tissu, je commente :
« Essayez de repérer le moindre truc louche dans les alentours. Recoin sombre de rochers, grotte, trace de présence animale, ou… si on a de la chance, une trace de civilisation : habitation, porte, fenêtre… qu’importe. Même un semblant de chemin, ça pourrait nous aider. »
Si chemin il y a, passage il y a aussi. Et donc… des êtres vivants. Armée de toute mon attention, je scrute les alentours, à la recherche du moindre indice permettant de trouver… un objectif à atteindre. Ce faisant, j’avance doucement, à tâtons, jusqu’à l’arbre tordu, déclaré par Hawke comme notre point de rassemblement.
_________________ Asterie
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