Lindeniel a écrit:
Peu de temps après, après son ascension, il se retrouva sur le pont, le visage éclairé par un soleil flamboyant dont les rayons chauds venaient mourir sur sa peau en une douce caresse de chaleur. La serveuse qui l'avait précédé n'existait plus pour lui qu'au simple était d'objet de service, cruche qu'elle était. Elle ne méritait pas d'être considérée comme plus que ça, de par son rang, de par sa race, et de par sa façon d'agir complètement immorale et irréfléchie envers plus noble qu'elle. Ce n'est pas de la haine, ni même de la colère que Lindeniel ressentait pour elle. Tout juste une lourde indifférence mêlée à son mépris naturel des autres, et doublé d'un mécontentement global qui avait fini de poindre doucement pour former maintenant une saillie immense dans l'esprit de l'elfe concernant les voyages en Aynore, et en particulier celui-ci, qui était à la hauteur de l'image qu'il entretenait de ses lointains cousins Sindel, c'était à dire plutôt très bas... Et les incidents arrivés ici auraient vite fait de les rabaisser dans son estime, pour peu qu'on puisse parler d'estime à un niveau sur peu élevé de sentiments...
Il s'arrêta un instant. Le soleil ne le dérangeait en aucun cas, et s'il avait apprivoisé les ombres, voyant et se mouvant sans aucune difficulté dans les ténèbres nocturnes, il était né au soleil, et la lumière du jour ne le dérangeait en aucun point... Encore une chose qu'il reprochait aux autres races, faibles, inutiles. Les humain par exemple, qui dès la tombée du soir ne voyaient plus rien, et dès le retour du jour se couvraient les yeux pour se protéger de la lumière solaire. N'était-ce pas le comble de la bêtise? Ou encore toutes ces races de l'ombre, orcs, gobelins infâmes, drows parjures et autres trolls mal léchés. Ceux là, s'ils voyaient plus ou moins correctement la nuit, étaient tout bonnement aveuglés par la lumière de l'astre de feu. Quelle était donc cette faiblesse qui les animait tous autour de lui, qui était si parfait... Pourquoi avait-on octroyé le droit de vivre à ces peuplades sans cervelle, tout juste bonne à servir de bétail à d'autres animaux, ou à servir les Hìnions, nobles et beaux, charismatiques et les seuls vrais à pouvoir régner sur Yuimen... Oui, c'était donc cela. Pour Lindeniel, les autres races ne valaient guère mieux que des objets, et pour lui, ceux de sa propre race ne se montraient dans la grande majorité des cas pas digne d'être un elfe blanc.
Sur le pont, c'est l'affolement qui fait place à l'anxiété de la salle commune. En montant d'un étage, la pression est elle aussi montée d'un cran. Tous sont regroupés autour du capitaine, près de la barre, et tous leurs regards sont portés sur un prisme en cristal qui se teint des couleurs du feu, faisant apparaître des flammes rougeâtres dans tous les sens. Lindeniel fronça les sourcils en voyant cet objet. Jamais il n'avait entendu parler d'un tel cristal, et s'étonnait d'en voir un, puisque ça devait être plutôt rare, sur un transport aussi miteux.
C'est alors qu'un couple de drows, ceux-là même qui à Tulorim avaient indiqué à l'elfe, fortuitement, l'existence un transport rapide pour Kendra Kâr, apparu sur le pont, derrière Lindeniel. Le mâle, dans sa fougue et sa folie, visiblement mécontent, bouscula l'elfe sèchement pour aller rejoindre le capitaine, alors que la femelle essayait d'y voir plus clair dans cette lumière diurne plutôt forte. Rattrapant son équilibre avant de choir, Lindeniel leva un regard noir vers le Shaakt qui avançait maintenant vers le capitaine et ses matelots, qui n'étaient pas des enfants de salaud, mais des amis franco de port, des copains d'abord...
La haine qui naissait en lui glaça son regard noir, qui, fébrile, ne quittait pas la silhouette sombre de l'elfe noir qui avançait avec nonchalance, sans prononcer aucune excuse, vers la barre. Sa compagne, ne remarquant même pas son geste outrant, se lança à sa poursuite pour le rejoindre. La consternation s'empara de l'âme damnée de l'elfe blanc, qui pesta intérieurement contre ces impolis, ces rustres, ces stupides, ces imbéciles qui ne méritaient maintenant plus qu'une chose: mourir.
Mais l'heure n'était pas au meurtre, l'heure n'était pas à la vengeance. L'agitation menée sur le pont ne faisait qu'attiser la colère de Lindeniel, qu'on aurait pu comparer à cet instant au cristal flamboyant de la barre, envoyant des flammes de la colère qui le brûlait intérieurement dans tous les sens par sa seule présence. Il rejoignit à son tour l'attroupement autour de la barre, mais ne se souciait plus guère d'un quelconque problème de l'aynore. Il arrivé derrière l'elfe noir, et sans le toucher, attira son attention par une voix glaciale et autoritaire.
« Elfe, retourne toi et excuse toi de ton geste! Tu m'as bousculé! Si Fais! »
Son regard noir était prêt à plonger cruellement dans celui du shaakt. Sa main droite gantée de blanc glissait doucement dans la large poche de sa veste contenant le poignard aigu encore sale du sang de son père, alors que son autre main, elle aussi gantée, glissais dans l'autre poche pour effleurer la forme féline de sa statue porte bonheur...