Lothindil a écrit:
Je m'écarte alors en proue du bateau, là où seule les dernières mouettes sont visibles. Je sens un léger souffle de vent, sans doute le reste de celui de Bogast qui s'use à faire gonfler les voiles.
Assise en tailleur, je regarde l'horizon et notre point d'arrivée, tentant de comprendre pourquoi Yuimen me pousse à une telle épreuve. Pourquoi moi et qui sont vraiment ses gens, je prends le temps doucement de récapituler chacun des voyageurs:
(Tout d'abord, il y a le rouquin, Selldel... Il a l'air d'être parmi les plus jeunes du groupe, on verra ce qu'il donne, il m'inspire confiance et sympathie au moins.)
Toujours aussi calme, je tente de me rappeler tous les visages qui étaient dans la salle à manger.
(Bogast, qui est le maître des lieux. Peu expressif, on ne devine rien de lui. Il semble juste être un militaire en mission. J'espère qu'on pourra compter sur lui en cas de coup dur pas comme dans certains corps d'élite ou c'est la mission qui prime, quelle que soit la difficulté et quitte à laisser certains plus faibles derrière.)
(Andélys, le barbare. Il a l'air d'être fiable, bien que moqueur. Des deux guides c'est celui avec qui je préfèrerais travailler. L'autre me semble très froid.)
(Cheylas. C'est une elfe comme beaucoup d'autres. Elle semble très maternelle vis-à-vis de Seldell. J'en sais trop peu sur elle à l'heure actuelle...)
(Arevoès. Un aristocrate peut-être. Je me méfierais de l'appellation "médecin" en revanche. Pour avoir vu les résultats en Naora, les guérisseurs sont plus efficaces. Enfin personnellement, je pourrais compter sur mes dons... les autres aussi au besoin.)
Ca c'était ceux qui nous avaient été présentés, les autres je n'en sais rien. De base, je me méfiais d'un individu cachant son visage, les autres sans m'être spécialement agréable était, à défaut, de bons combattants. Il faudra juste garder un oeil sur le cryomancien et lui apprendre à rester dans la limite de ses capacités, sans quoi nous courrons au désastre.
Une fois l'analyse de la situation faite, je sors mon fluide de ma poche. Durant plusieurs longues minutes, je jongle et joue avec cette entité qui n'est liquide, ni lumineuse. Je ne sais toujours pas ce que c'est exactement, mais j'en connais assez la nécessité pour une personne maniant la magie comme moi.
Je finis par fermer les yeux et m'ouvrir le plus possible au fluide. Me concentrant sur la moindre sensation de mon corps, je parviens à me sentir le moindre frôlement de mes cheveux sur ma nuque et mes oreilles. L'odeur du sel marin vient heurter mes narines.
(Sarya l'aurait appréciée cette senteur...)
Petit à petit, je sens mon tatouage me démanger légèrement ainsi que la marque dans ma nuque. Un bien-être m'envahit complètement, me rendant comme ivre de bonheur. Une impression de complétude rare me submerge, j'ai l'impression en absorbant ce fluide d'appartenir totalement à Yuimen.
Les pouvoirs de Yuimen coulent à présent en moi, autant que faire ce peut vu ma condition de mortelle. Ce dernier fluide semble compenser le don de mon ancienne armure, mais pas tout à fait...
(Ainsi j'avais dépassé le maximum juste avec cet artefact.)
Je baisse mon regard sur mon tatouage qui brille à nouveau légèrement. A ma grande surprise, l'arbre est en fleur.
(La fleur... Symbole de renaissance, mon symbole depuis toujours.)
Je me redresse et m'accoude au bastingage. Nous voguons à vive allure malgré le manque complet de vent.
(Suis-je donc née juste pour faire revivre les ermites? Non, je suis vouée à devenir une gardienne d'un des sanctuaires.)
Je regarde au loin dans la mer, ne voyant rien d'autre qu'un calme plat.
(Le calme avant la tempête. Le calme avant le réveil et les combats...
"ERMITES DE YUIMEN, REVEILLEZ-VOUS! Faites votre devoir envers votre Dieu! Puissiez-vous vous lever à travers le monde pour vous battre!"
Etrangement ces paroles ont un effet galvanisateur sur moi. Je me retourne alors et regarde l'aéromancien nous faire voguer vers notre destination, au devant des périls.