Pff…
Ah non mais là, pff de pff quoi : si quelqu’un connaît une activité plus barbante que de monter la garde, je suis tout à fait disposer à le détromper ! Je vous jure, rester des heuuures et des heuuuures à fixer ce qu’il y a devant soi, avec des variations d’à peine quelques degrés dans le champ de vision pour être sûr d’embrasser tous les alentours, en ne pouvant en plus même pas émettre le moindre son trop élevé afin d’éviter que le reste du groupe ne soit tiré pour rien d’un sommeil réparateur (même si cette notion est assez relative étant donné que le « sommeil réparateur » est hanté de cauchemars pas jojos), ce qui réduit drastiquement les possibilités d’activités pour un amateur des beaux mots et de belle musique comme moi… c’est tout bonnement insupportable, d’autant que les seuls mouvements qui me sont autorisés consistent en quelques pas à gauche ou à droite qui ne sont rien de plus que des trépignements me donnant encore plus envie d’aller me défouler les gambettes dehors plutôt que de faire le pied de grue face à cette nuit fraîche si riche en possibilités qui semble me narguer et me tenter d’aller la rejoindre ! Et je n’ai rien, absolument rien pour me divertir, à part parcourir mes vêtements et mon bagage pour en dégager de-ci de-là par pichenettes les gravillons, cailloux et autres caillasses coincés dans les replis de mon équipement, occupation fort peu épanouissante et qui est d’ailleurs bien vite expédiée. J’ai bien essayé de me remettre à la lecture de ce journal pour me changer les idées, moi qui aime tant lire, mais étant donné que si on peut appeler de livre de comptes de la littérature, je suis un Hiniön, dès les premiers mots que je lis, j’en ai déjà marre, et c’est en tirant la langue que je l’envoie sans regret réintégrer mon sac avec un soupir las.
Heureusement, dix fois, cent fois, mille fois heureusement, il y a cette âme si riche et si fascinante qu’est l’éblouissante Minil’emnil pour me tenir compagnie, et même si nous restons tous les deux aussi silencieux et stoïques que des hiboux aux aguets, le dialogue intérieur qui se déroule entre nous est bien fourni, les messages mentaux que nous échangeons ne s’interrompant jamais plus d’une dizaine de secondes au maximum, elle transmettrice d’informations, inépuisable réservoir de connaissances ; et moi auditeur appliqué, avide réceptacle de savoirs divers et variés. Et que nous disons-nous ? Haha, c’est un secret ! Hé oui, même si je partage ici tout ce qui me vient à l’esprit (je me doute que ce n’est pas toujours très intéressant d’ailleurs, et je m’en excuse), je me réserve le droit de conserver certains éléments de ce qui m’arrive celés, que ce soit pour ne pas appesantir le récit ou parce que je préfère garder ça pour moi. De toute façon, le rapport quantité/informations de mes présents échanges avec l’étonnante faera ne vous satisferait sans doute pas, alors autant estimer que vous vous en tirez à bon compte, et ne vous inquiétez donc pas et croyez moi quand je vous dis que vous avez une bonne part du gâteau !
Mais pour en revenir à la situation présente, je suis occupé à converser avec cette petite créature féerique de génie, les bras croisés, le regard un peu vague bien que toujours alerte, de même que l’est celui de l’animal reptilien enroulé autour de mon cou, quasiment invisible car vert sur vert, qui darde de temps à autre une petite langue pointue en un tic typiquement serpentin, comme pour défier d’éventuelles menaces de venir troubler notre fragile quiétude. Et c’est alors que je suis en train de réfléchir à quelque chose qu’elle m’a dit sur la relation des Worans Sombres avec la nature qu’un message soudain vient interrompre le fil de mes pensées :
(Alerte !)
Sous une légère et subite poussée d’adrénaline, mes capacités se remettent en éveil et, les yeux grand ouverts, je commence à quadriller les alentours du regard tout en me demandant bien ce qu’elle peut avoir repéré, mais une seconde injonction m’interrompt alors dans ma tâche :
(Pas devant, derrière !)
Derrière ? Cette faera travaille du chapeau qu’elle n’a pas ma parole… à moins que cela ait à voir avec nos dormeurs cauchemardants ? Justement, maintenant qu’elle le dit, j’entends un bruit de frottement et, en une espèce de sursaut que ne m’aurait pas envié un chat surpris, j’exécute un demi-tour qui me braque le regard sur le trio ronflant, pour voir avec une légère surprise mon Gatch Bratty se retourner dans son sommeil.
(C’est tout ? - Bien sûr que non, sinon je ne t’aurais pas prévenu. Continue d’observer, pendant ce temps là, je garde un œil sur dehors.)
Le partage des tâches s’organisant ainsi, je fais confiance à la suite dans les idées de Minil’ et obéis docilement à son conseil, fixant donc le corps affaissé du garzok qui ne cesse effectivement pas de remuer (un point à l’actif de la faera donc). Je me demande toutefois où elle voulait en venir jusqu’à ce que tout à coup, dans un mouvement d’air qui me fait bondir le cœur, les deux appendices ailés obscurs de la forme noire se déploient tels ceux d’une chauve-souris. Espérant que les émotions fortes n’iront pas plus loin et que Krochar, tout possédé qu’il est, en restera là, je ne bouge pas d’un pouce, me contentant de me mordre la lèvre inférieure pour évacuer un peu de mon stress, mais je suis vite déçu et dois étouffer un gémissement d’angoisse lorsque je m’aperçois, bien vite, que les mouvements continuent, et ce sans se départir d’une finalité qui s’avère être de se lever quand il prend appui sur le mur proche pour se soutenir dans son entreprise anormalement laborieuse. Me décidant alors à agir, je prononce d’une voix enrouée et quelque peu étranglée :
« Hé be… »
(Chut mon ami sekteg, tes paroles seront vaines ! Sers toi de ta vue et non de tes paroles pour le moment. Regarde plutôt ses yeux !)
Malgré le ton grandiloquent, la réplique n’en était pas moins impérative et sérieuse, aussi j’obtempère, réalisant avec un frisson que même s’il est bel et bien en train de se mettre debout, les paupières de l’humanoïde massif sont tout ce qu’il y a de plus closes, et que d’après le ronflement qu’il lâche et qui me laisse quitte pour un autre bond cardiaque, il est toujours captif des affres de l’endormissement. Par Yumni, c’est de la sorcellerie ! Sous l’impulsion de la crainte, ma main esquisse un mouvement vers la garde d’un de mes couteaux, mais un dicton sektek me revient en tête qui me dissuade de porter mon intention plus loin : « O rhlon lshun, tohnk kahi ! », ce qui se traduit par « Quand l’ours se réveille, ne l’attaque pas ! ». Je sais, la sagesse sekteg est quelque peu simpliste, mais elle s’avère assez probante dans le cas présent pour m’empêcher de faire une bêtise en succombant à la panique face à ce grand gaillard noirci qui pourrait me faire disparaître de la surface de la terre d’un simple coup bien placé. C’est d’ailleurs pour cette même raison qu’après avoir hésité un moment, je décide de ne pas essayer d’écarter sa hache de sa portée : avec les prolongements griffus qu’il a aux mains, il semble loin d’en avoir besoin, et de toute façon, il n’a même pas l’air de vouloir s’en emparer alors autant ne pas faire le malin.
Cependant, le temps que je vous dise tout ça, le voilà debout, et ça m’étonnerait qu’il veuille s’arrêter là ! Que faire alors ? Rameuter les deux autres endormis ? Bof, le temps qu’ils soient sur le pied de guerre, les choses auraient tout le loisir de dégénérer, et si je me mets à brailler, ça risque de réveiller Krochar tout autant que de provoquer la fureur de ce kmel d’esprit qui s’obstine à vouloir lui pourrir l’existence. Allez ! Autant passer à l’action tant qu’il en est encore temps !
(Minil’, tu es avec moi ? - Jusqu’à ta mort ! - ... - Quoi ? - Ca ne me remonte pas beaucoup le moral tu sais. - Bon, « envers et contre tout », c’est mieux ? - Plutôt. -Alors je suis avec toi envers et contre tout. - Merci, tu es un ange.)
Notre dialogue s’arrête là, et je peux d’ailleurs remercier ma faera de ne pas avoir rebondi sur a dernière réplique pour faire remarquer qu’au vu de la tournure que risquent de prendre les évènements, je risque bien d’en devenir un moi-même. Décidant d’opter pour une attitude semblable à celle que j’avais adoptée la première fois face à cette entité maléfique, et espérant m’en sortir avec aussi peu de bobos, je gonfle ma poitrine d’un air qui me paraît filtrer par ma gorge serrée avec difficulté pour me donner du courage, et m’avance d’un pas le plus gaillard possible en direction du garzok titubant (pas trop près quand même hein), bras croisés, tête redressée pour lui faire face bien que cela puisse s’avérer d’une utilité discutable, sourcils arqués en signe de défi et de résolution :
« Qu’est-ce que tu comptes faire ? » Interpellé-je sèchement le noctambule d’une voix basse que je parviens à ne pas rendre tremblante, réussite que j’attribue en partie à l’intervention subreptice de mon petit ange gardien.
_________________ J'ai décidé d'être heureux, parce que c'est bon pour la santé! _____________________________________________ Jakadi, voleur gobelin niveau 4 so unique en son genre vous salue bien. Bilan de la quête 18 : Buffet maritime gratuit , une tenue très tendance (merci beaucoup GM17 ), 1er contact avec les indigènes, découverte des spécialités culinaires locales , rééquilibrage de la balance des possessions Shaakts/Sektegs, tatanage de torkin (c'est une CC messieurs-dames!), un ventousage d'urgence , une obtention de balalaïka , une razzia sur des restes de bataille, du matraquage d'araignées géantes , la perte d'une bonne partie du groupe , un affrontement avec un esprit des ténèbres , un fort agaçant diseur d'énigmes , un combat contre une troupe entière de garzoks, de l'apprentissage de CCs par zigouillage d'araignée .
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