L'Univers de Yuimen déménage !


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 Sujet du message: Re: La Forêt d'Ynorie
MessagePosté: Sam 6 Aoû 2011 01:45 
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Le temps, parce que le facétieux se plaît toujours à ralentir lorsqu'on souhaite de toute son âme qu'il accélère, parce que le sadique suspend à chaque fois son cours pour nous laisser graver à tout jamais dans notre mémoire l'instant qu'on n'aurait jamais voulu connaître, le temps, vil farceur, se fige. Et parfois, j'ai l'impression que ma vie se déroule au ralenti tant les tuiles me pleuvent sur la tête. Voici donc l'arrêt sur image -un de plus-, voici le portrait qui s'imprime malgré moi sur mes pupilles, la voici.

Un premier coup d'oeil, comme un premier coup de pinceau, ne me révèle que la silhouette de la créature qui se tient devant moi; celle d'une jeune Akrilla, similaire aux centaines d'autres que j'ai vues étant aldron. Légèrement plus grande que moi, elle arbore un corps harmonieux gracieusement enveloppé dans une robe de silm, et des plus féminins, ce qui aurait pu m'émouvoir si je n'avais pas été cloîtré dans une colonne de glace par cette même féminité. S'échappent de son dos des ailes aux plumes aussi blanches que les miennes. Puis un second coup d'oeil m'offre son visage, ses traits, ou plutôt me les jette à la figure sans me demander mon avis. Une chevelure aussi dorée que désordonnée encadre un visage fin dont la pièce maîtresse est sans conteste ce menton à la courbure si exquise que tout autre que moi aurait eu envie d'y déposer une caresse, juste pour vérifier qu'il est tangible, et non une fantaisie rêvée. La plus grande partie de ce visage est pourtant dissimulée par un masque dont le pâle mauve ne fait que fait qu'illuminer le violet profond qui orne son regard, et y allume une étincelle de mystère enchanteresse. Un troisième coup d'oeil me le confirme, maintenant que je puis la contempler dans son ensemble: si je n'avais pas été moi, si mon coeur n'avait pas été arraché et gelé presque un siècle auparavant, j'aurais pu succomber à sa beauté.

Ce petit portrait, je vous le restitue de mémoire, les ans m'ayant donné le recul nécessaire pour le laver de ma subjectivité. Il s'agit de bien ce que mes yeux ont contemplé alors, cependant, voici plutôt ce que j'ai voulu voir, lorsque le temps a retenu son souffle pour me laisser la regarder.

Dès le premier coup d'oeil tétanisé que je lui ai lancé, j'ai pu voir quel terrible vieille Akrilla dégénérée j'ai devant moi: je suis tout d'abord frappé par un regard d'un méchant violet, presque noir, qui peine à dissimuler la lueur de folie malveillante qui couve dans ses pupilles; regard encadré par un masque grotesque, qui Zewen merci parvient à cacher une bonne partie de son visage sûrement hideux (il suffit de voir son menton à la courbure proprement repoussante pour imaginer le reste); puis je découvre sa chevelure, sculpture improbable de cheveux filasses et blondasses, emmêlée dans ce qui semble être les restes d'un buisson; et enfin je détaille sa silhouette dont la féminité, qui m'est intolérable, est grossièrement drapée par un tissu tâché et déchiré. En un mot comme en cent, la créature qui se tient devant moi n'est qu'un sac à patates ailé (un jour, on parlera de l'épithète Aurorique).

Les traits harmonieux (OU PAS!) de ma nouvelle interlocutrice étant gravés dans ma mémoire et dans la vôtre, le temps consent à reprendre son cours. Merci à lui.

Dois-je dire que je m'y serais attendu? C'est un nouveau cri à percer les tympans qui me sort de ma tétanie; suivant le regard de l'aldryde, je me retourne et constate avec effroi que le gros mantruc est en train d'arracher la flèche de glace qui le cloue au sol, ce qui est plutôt mauvais pour... moi (hors de question d'employer le nous. Non mais.), parce qu'il n'a pas l'air très content.

(Nom d'une fichue Akrilla blonde, Aurore, qu'est-ce qui m'a pris de vouloir aider mon prochain?)
(Je ne sais pas Sil', je ne sais pas...)
(La prochaine fois que quelqu'un semble avoir un problème, rappelle-moi d'aller voir ailleurs si j'y suis, d'accord?)
(Pas de problème, mon gars.)

Je sens soudain monter progressivement une flamboyante colère en moi, ce qui me surprend d'abord puisqu'elle aurait dû arriver bien plus tôt, et bien plus vite. La première fois que j'ai ainsi rencontré une Akrilla par hasard, j'étais bien plus retourné. Et la rencontre s'est aimablement soldée par un meurtre. Mes bras en portent encore la cicatrice. Et puis je suis encore tombé sur elles, au fond de l'océan. Il faut le faire, là aussi. A ce moment-là, j'ai bien cru perdre la raison. Et la rencontre s'est aimablement soldée par un meurtre. Encore tout à l'heure, je tombe sur un cortège de ces folles, et me voilà terrifié. Et enfin me voici devant celle-ci. Comment cette rencontre se finira cette fois-ci? Je penche pour la même issue que les autres : ces fichues et foutues Akrillas me pourriront la vie jusqu'au bout, et elles me la pourriront jusqu'à ce que je les raye toutes de la carte. Je ne serai pas libre tant que... Je vous passe la suite de la litanie vengeresse.

Et soudain, la hurleuse me parle:
« Hé petit, c'est reparti? »

Silence abasourdi. Elle m'a appelé « petit ».
(Je l'aime bien, celle-là. Enfin, aimais bien.)
(Le mot de trop.)

Avez-vous déjà eu l'impression d'être prêt à exploser, si prêt à faire hurler votre ire et faire preuve de violence, qu'à la moindre remarque malheureuse, vous passez à l'acte? Et bien, c'est exactement ce qu'il s'est passé. Oubliant totalement le mantruc à quelques centimètres, oubliant totalement le traumatisme d'avoir tué d'autres Akrillas de sang-froid, oubliant mes doutes, oubliant jusqu'à la présence de mes fluides, pourtant prêts à me servir, un voile rouge tombe sur mes yeux et je bondis sur elle.

Le choc est rude, mais je le sens à peine. Nous tombons violemment au sol, et je m'empresse de la plaquer sur l'humus avec toute la force dont je suis capable. Puis, ne réfléchissant plus, je m'empare de sa chevelure de la main gauche, et envoie voler mon poing droit, hargneux et fou, à une vitesse telle que mes phalanges pourraient se briser à l'impact (c'est du moins mon sentiment) en plein dans son menton. Qu'elle a fort joli d'ailleurs.

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Dernière édition par Silmeï le Mar 16 Aoû 2011 23:55, édité 1 fois.

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 Sujet du message: Re: La Forêt d'Ynorie
MessagePosté: Sam 6 Aoû 2011 21:14 
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Et voici passé le seuil de l’Univers analogue – entrelacs d’or de mes veines drainant la divine Lumière de Gaïa, lacis qui, au fil de mes pérégrinations magiques, ont érigé en mon sein une forteresse inexpugnable. Là où, comme vous le savez sans doute déjà, je m’abrite en ce moment afin de me faire oublieuse du monde ordinaire, attentive seulement à la mesure que frappe mon cœur. Les yeux clos, détachée de tout phénomène n’étant pas intrinsèquement mien, je me fait goutte d’eau aveugle qui suit à tâtons le chemin stellaire sillonnant mon être. Jusqu’à effleurer le coffre, Bénédiction suprême de Gaïa. Mon âme porte ses doigts languissants sur le loquet d’or et - voyez comme les antiques paroles des premières reines de mon peuple s’acheminent seules jusqu’à ma bouche ! – tout de suite mon corps entier s’éprouve au contact des trémulations sauvages de la magie. Mon cœur enfle, car en lui désormais se mêlent à l’âpre sang les ruisseaux éclatants de l’Or. Je suis habitée, hantée, comme si des forces qui n’étaient pas miennes me saisissaient tout entière pour me faire agir à leur gré. Mes membres m’apparaissent plus souples, mes sens alertes se repaissent de la magie qu’ils connaissent comme émanant du Mantis d’une part, et de l’Aldron d’autre part. Ma main, sans que mon commandement l’eût fait agir, se porte doucement sur la garde de mon arme.

Mais avant j’aie pu empoigner pleinement la courbe ciselée et froide dans le creux ma paume, tout à coup et sans crier gare survient un événement que jamais je n’eusse pu prévoir. Me sortant sans plus de ménagement de ma méditation ingambe, une masse à la lourdeur indiscutable tombe sur moi – sans que, là encore, je perdisse une once de grâce dans l’action. Elle – il, en réalité, car une fois les yeux ouverts je ne peux que constater que la masse n’est autre que l’Aldryde – écrase de tout son poids mon corps aux charmes ineffables. (Le rustre !! Quelles manières !)

- Woh-woh ! Allons, je sais que je ne suis que vénusté incarnée, mais enfin…

Je n’eusse pu non plus prévoir qu’il abattrait sans merci son poing sur mon menton comblé de toutes les grâces (un sacré gnion, vous voyez ce que je veux dire : défigurant à souhait.) La douleur irradie l’ensemble de mon visage, car il tient dans la main qui ne bat point mes cheveux qu’il s’acharne, ce me semble, à m’arracher. Alors qu’il élève le bras pour porter nouveau coup, je ne peux nourrir que funeste courroux à son encontre. Il ne suffit que d’une seconde pour que mon esprit tout entier se ramasse sur lui-même, et dans le berceau de Lumière que je viens de faire naître, je poursuis les armes qui me rendraient maîtresse de la situation. Sans hésiter, je donne des genoux et parviens à déloger l’Aldryde, m’écartant aussitôt d’un battement d’ailes. Mon esprit tout à la fois cherche ses failles, et comment, par Gaïa, les forces dont je me vois douée pourront les abuser.

Ô, déesse bien aimée, que n’as-tu mille fois assisté à pareille algarade ! Les légendes souventes fois ont narré les horions échangés des Aldrydes entre eux, et voilà les plaines ondoyantes et les bosquets couverts alors transformés en champs de bataille pour peccadille ou pet de lapin ! Mais enfin ! Point ici de lapins !!

- C’EST QUOI TON PROBLÈME ?!!

Je perçois cependant mon sang tout bouillonnant s’épancher de mes veines, et je reconnais là les affres d’une Lumière qui me prend tout entière. Car aculée me rencontrez-vous présentement, l’œil posé, de loin en loin, sur l’Aldryde et sur le Mantis. Oppressée, asphyxiée, tourmentée, je ne peux me résoudre à prendre l’envol, car l’Aldryde, lui aussi, est un enfant des cieux. Je ne suis qu’animal, effarouchée par un ennemi qui ne m’est que trop proche, et les instincts, bientôt, seront seuls maîtres – ma conscience, quant à elle, évincée. Que dire, sinon que de ma peau diaphane de princesse perle, et suinte, l’or transcendant de la magie ? Derrière mes iris, point ne se forme le mirage dédoublé de la réalité qui se présente à moi, car ma rétine s’embrase de faisceaux aveuglants qui, et je le saurai plus tard, ne sont visibles qu’à moi seule. Une brûlure s’adjoint à la douleur que j’éprouve déjà dans mes joues et mon front : là encore, les volutes de nacre dessinées sur le pourtour de mes yeux s'enflamment.

(Gaïa, puisse ta juste colère tétaniser mes ennemis !)

Le Mantis s’approche.

Une seconde à peine s’est égrainée. Une seconde, et de la pointe de mes doigts enfin jaillit une Lumière vive que je voudrais voir s'abattre avec grande violence sur ceux dont l'action m'est funeste. Le Mantis s’arrête sur le coup, hébété. Sans plus attendre, j'avise la créature et, saisissant le coutelas qui palpite à mon flanc, je l’enfonce avec fureur en travers de ses côtes.

Ma poitrine prise de soubresauts témoigne : mon souffle n’est plus qu’anhélation effrénée.

Point n’ai-je pourtant atteint le terme de mes peines, car l’Aldryde ne semble pas avoir subi moindre heurt – éveillé, il me fait toujours face.







(((Lancé de Bénédiction (Maîtrise SA +5 ; Esquive M +5) | Apprentissage de Lumière vive (1/2).)))

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Dernière édition par Cahidrice Aro le Sam 13 Aoû 2011 18:23, édité 1 fois.

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 Sujet du message: Re: La Forêt d'Ynorie
MessagePosté: Mer 10 Aoû 2011 18:45 
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Comment décrire la foule de sensations que me procure le violent écrasement de mon poing contre le menton de mon adversaire ? Comment vous retransmettre fidèlement, à vous, sages créatures qui n'avez probablement jamais brisé sans sommation vos phalanges sur la face de votre interlocuteur, la jouissance qu'un tel déferlement de puissance primaire peut provoquer ? Je vais tâcher de mettre des mots là-dessus. Que vous puissiez vivre ça par procuration. Allez-y, remerciez-moi.

(L'aldryde colle une baffe à une petite blonde, et ça y est il s'enflamme.)
(La ferme Aurore. Et puis d'abord, je ne suis même pas en feu, tu racontes n'importe quoi.)
(… Désespérant.)

Mon ressenti, donc. Je dirais qu'en premier vient la douleur. N'allez pas croire que je suis douillet, mais concentrer toute sa force et toute sa hargne dans son petit poing, qu'on envoie ensuite voler vers quelque chose d'aussi dur qu'un os, c'est quand même sacrément douloureux. Au vu de la brutalité de l'impact, je me demande si je n'ai pas sacrifié une ou deux phalanges dans l'histoire. Mais une chose est sure, j'ai bien amoché son parfait petit menton. Puis la douleur reflue au profit d'une satisfaction sauvage, viscérale. Une part de nous, le bras armé de notre égoïsme, cherche toujours à faire souffrir les autres ; cette part-ci particulièrement ne peut que se réjouir de causer aussi directement du mal à quelqu'un. Frappez n'importe qui, dans n'importe quelles conditions, et vous verrez : ne serait-ce qu'une fraction de seconde, votre estomac fera une pirouette de fierté, tandis que la douleur irradiera. Ce n'est qu'ensuite que tous les autres sentiments, émotions, reprennent le dessus. Dans mon cas, la colère, froide et un peu folle, fait son grand retour, associée au besoin de revanche, qui se fait tellement insistant qu'il semble me battre les flancs.

Sitôt mon coup porté, j'ignore Aurore qui fait perfidement remarquer dans mon esprit que je n'ai même pas réussi à arracher un cri à l'Akrilla et arme mon poing dans l'objectif de déchaîner à nouveau sa puissance enragée (enragé, je dis pas, mais puissance...), tandis que mon autre main est toujours crispée sur la blonde toison de mon adversaire. Cependant, une vive manœuvre défensive me contraint de remettre ce doux projet à plus tard, puisque l'Aldryde, bien plus vigoureuse que je ne l'aurais cru, parvient à me déloger de coups de genoux que le mâle que je suis qualifierait de « bien placés ». Le souffle coupé, ma fierté amochée ne peut se raccrocher qu'à une touffe de cheveux douloureusement, je l'espère, arrachée au crâne de la dégénérée.

Mais alors que je m'attends à ce qu'elle pousse son avantage et se venge prestement tandis que je suis à reprendre mes esprits, voilà qu'elle me demande violemment quel problème j'ai, et qu'elle se détourne de moi pour faire face au mantruc! A-t-on jamais vu pareille IMPOLITESSE ? Alors on me considère comme quantité négligeable ? On n'en a pas assez avec moi, et on préfère aller voir ailleurs pour plus de sensations fortes ? Vert de rage, assoiffé de vengeance, meurtri et piqué en plein dans ma fierté, je me relève, prêt à rayer de la carte cet être échappé tout droit de mes cauchemars.

D'une main ferme, je me saisis de la brindille de saule, qui pendait jusque là en désordre dans mon dos. J'ignore de quoi est capable cette arme, mais je la sais non conventionnelle et magique. De toute façon, vu l'état de fureur irraisonnée dans lequel je me trouve, je suis bien incapable de mobiliser mes fluides. Et apparemment, le simple usage de mes poings ne suffira pas à en venir à bout, alors... Je m'élance...

… immédiatement stoppé par un vif éclat de lumière. Déboussolé, je suis aveuglé un court instant, sans comprendre ce qu'il m'arrive. Quand j'arrive enfin à discerner ce qu'il se passe devant moi, la lumière se fait (à nouveau, mais dans mon esprit cette fois, ohoh) : profitant de la diversion, l'Akrilla s'est précipitée sur le mantruc qui s'approchait subrepticement de nous pour lui planter sa lame dans l'abdomen. Ma flèche de glace n'avait décidément pas suffi.

Tout ceci permet à mon esprit embrumé par la fureur de comprendre deux choses: la bougresse manie des fluides, et est bien plus dangereuse que mes précédentes adversaires. Enfin, comprendre, c'est vite dit. Disons plutôt que je le note dans un coin de mon esprit, sans en tenir compte. Car le fait qu'elle nous ait probablement sauvé la peau au lieu de m'achever ne m'empêche absolument pas, tout aveuglé par la vengeance que je suis, de me précipiter sur elle en brandissant mon arme et en braillant comme un perdu.

Et l'Aldryde de porter un violent coup de brindille dans le ventre de l'Akrilla.

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Dernière édition par Silmeï le Mar 16 Aoû 2011 23:48, édité 1 fois.

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 Sujet du message: Re: La Forêt d'Ynorie
MessagePosté: Sam 13 Aoû 2011 23:28 
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(Ô, Mère, ne m’entends-tu donc plus ?)

Opiniâtreté de Zewen à l’encontre de l’Akrilla princière qui se tient sous vos yeux. Roideur sans cesse renouvelée du destin dont les lignes sont le commandement du monde. Constance tenace et mortelle qui jette face contre terre une reine nantie des plus hautes vertus et des plus nobles charmes. Car vous aussi, ingénus et candides qui faites palpiter mon cœur, vous aussi, lecteurs, auriez cru que cette divine Lumière enfantée dans mon sein serait fatalement portée contre mes ennemis… Et pourtant ! Faible reine en vérité – malgré le faste et la pompe superbe – qui point ne sut d’une seule frappe saisir deux ennemis comme un seul. Double coup eût été meilleur jeu, car si la créature fut suffisamment abêtie pour pâtir de mon coutelas ivoirin, l’Aldryde quant à lui en conçut grande rage dont je fus le martyre.

Ô combien délicate, certes, la dame d’Yscambielle exilée de sa terre – et nonobstant bien plus : pâle, fragile, et même vulnérable me voyez-vous céans. N’ayez point, je vous en fais une humble prière, ce regard de pitié sur qui, agonisant, est laissé presque mort pour qu’au mieux pût le cueillir Phaïtos en personne, lui et ses Guêpes infâmes au bourdonnement terrible. Toutefois, voyez comme l’ennemi me tient à sa merci, monstre odieux, misérable et abject. Point ne suis-je désormais hautainement redressée, ni même belliqueuse guerrière tapie et aux aguets ; je ne peux seulement pas lever farouchement le poing, ou bien dans les tréfonds de mon corps quérir aux sources de magie. Abattue que je fus par un heurt trop soudain, me voici poupée de chiffon entre les racines torturées d’un vénérable frêne.

- Regarde donc gésir, pleutre, l’une de tes reines.

Les mots s’étouffent seuls : je crache seulement, et ne peux point crier…

...

… mais comment narrer, dès lors, comment me faire voix d’événements passés et par trop achevés quand dans ma propre gorge aux courbes indolentes ne se forment plus que borborygmes ineptes et feulements rompus ? Ainsi le temps qui, paresseux, s’étire sans estime pour les pions qui joutent sous son blême équipage – ainsi la meurtrissure exsangue déverse follement des torrents de douleur.

Il m’atteignit au ventre.

J’aperçus tout d’abord sans y croire la haine, insensée et hagarde, asseoir son empire sur son hâve visage. Eût-il la bave aux lèvres, je n’en eusse pas conçu pour autant d’étonnement, car la rage, que dis-je ! la démence écumait sur sa face. Comme mus par un encéphale engourdi, mes yeux dansèrent placidement au gré du geste qu’il porta à son dos ; alors les secondes distendues s’égrainèrent en minutes, et virent sur son épaule rouler funeste javeline – ou sagaie, ou bâton, qu’importe désormais.

Une fenêtre s’ouvrit soudain dans le temps altéré. Ma conscience tout de suite parcourut au galop les milles qui s’étendaient entre moi et elle, envolée dans les limbes et d’où elle m’observait. Le sang reflua à l’instar de la vie. Je respirai toute la violence dont j’étais encore capable après tant de coups portés, et lançai à nouveau la plus Vive lumière qui pût jamais émaner de mon être…

(Trop tard.)

La déflagration d’or jaillit dans le rugissement que poussa l’Aldryde en se ruant sur moi, et tandis qu’elle hérissait les herbes sur le sol et les cheveux de l’ennemi, mon ventre subissait à son tour l’algie féroce d’une arme de magie. Le bâton était une brindille, peut-être, certainement même, mais que de félonie sous ses semblants innocents… Que n’ai-je pu en une fois arrêter deux lutteurs ! Car le choc fut alors des pis que vous pussiez imaginer : point d’hématome, non, et cela je le constaterais plus tard, point de balafre, ni la moindre estafilade sur la nacre opalescente de mon ventre ; mais j’eus du mal une idée très distincte cependant que je m’effondrais tout contre la rude écorce du frêne. Je chus, espérant par mes yeux foudroyer celui-ci qui en était la cause – ma tête s’enivrait de vapeurs, vertiges écœurants, mes membres étaient pris des mêmes étourdissements, sporadiques traces de ma tragique consomption, et dans mes doigts naguères fontaines de puissance, je ressentis les premiers engourdissements. Au hurlement perçant que je ne retins pas succédèrent maintes plaintes d’effroi : mon esprit tout perdu sur lui-même ne pouvait que savoir – le sang point ne se répandait sur l’herbe tendre toute gorgée de rosée ? Il se versait par-delà les veines, par-delà les organes – hémorragie interne.

A l’heure où je vous parle, mon âme léthargique s’égare dans les méandres de la folie, qui sont plus douces, ou moins terribles, que ceux de l’immense souffrance qui fuse par les nerfs et me transperce de part en part. Les tourbillons confus qui s’imposent à mes yeux sont tout d’incarnat et d’onyx, et occultent la forêt où me conduisit Cétayales par ses imprécations majestueuses. Elle ! L’ombre-portée de Gaïa sur la terre de Yuimen !

(Tout ça pour ça ?)

Mes prières s’évaporent dans la brume, je ne saurais faire suivre leurs cascades mélodieuses dans une mélopée funèbre car mon esprit bien trop avant s’engage dans les antres maudits de Phaïtos au cœur noir. Aussi préféré-je de loin la compagnie des errements mentaux, assombris d’agonie, qui me portent à Elles – Gaïa, Cétayales. Faut-il ainsi que ce chemin me mène ici à la plus sotte des fins ? Ne saurais-je plutôt, par les dernières trémulations de vie qui me tiennent, faire pleuvoir sur mon corps mutilé en-dedans le divin Souffle de ma déesse ? Sans qu’il n’en sache rien, Aldryde meurtrier qui sera abusé, une résurgence se fera sentir, et le coup n’en sera que plus destructeur.

Je plonge mon regard dans ses yeux, monstres de nuit sans étoiles, et fomente l’attaque qui l’abattra sans once de mansuétude. Mais avant que de se faire offensive rusée, gardons-nous bien de toute charge qu’il oserait tenter. Voyez, lecteurs, comme déjà, malgré la douleur qui ne se dissipe que par trop lentement et avec trop de piques aigües qui m’étreignent et me crispent, je dessine autour de moi les premières esquisses d’un Sanctuaire






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 Sujet du message: Re: La Forêt d'Ynorie
MessagePosté: Dim 14 Aoû 2011 02:47 
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Plus tout à fait moi-même, ou peut-être pleinement moi-même -n'ai-je pas été transformé à jamais par ma captivité? Ne sont-ce pas ces mêmes Akrillas insensées qui ont implanté la graine de leur folie en moi?-, je suis une nouvelle fois tout à ma rage, tout à ma vengeance opportuniste. Métamorphosé en créature asujettie à sa soif de mort, je remarque à peine l'éclat agressif de lumière qui s'échappe des mains de l'Akrilla, vain. J'ai mis toute ma force dans ce coup qui, lorsqu'il fait mouche, illustre tout ce que peut avoir de choquant et de gratuit la violence. Je suis cependant bien loin de me rendre compte qu'en projetant l'Akrilla par terre, blessée magiquement, je me meurtris plus encore: en étant sur le point de commettre l'iréparable, une fois de plus, je plonge les mains dans ma vieille blessure pour en écarter violemment les lèvres. En clair, je n'arrange pas mon cas, et m'enfonce plus avant dans l'insanité.

Pire, je ne sais même pas si, en pleine possession de ma lucidité, je n'aurais pas décidé d'essayer de tuer cette Akrilla quand même.

Le sang bourdonne à mes oreilles. Les pulsations accélérées de mon coeur résonnent comme un tambour de guerre. Aurore, comme souvent dans ces moments où ma raison défaille, tient sa langue. Je sais qu'elle interviendra lorsqu'elle jugera que ma folie va trop loin. Pas pour protéger l'autre, non. Je crois qu'Aurore m'approuverait encore si je décidais de tuer toutes les personnes qui croisent mon chemin (il faudrait que je lui pose la question, tiens). Elle m'arrêterait simplement pour me faire revenir. Sans elle, je serais probablement devenu fou à plein temps. Irrémédiablement.

Le hurlement de douleur de la hurleuse, s'il meurtrit mes tympans, n'effleure qu'à peine ma conscience. Tout comme ses gémissements heurtés.Son regard chargé de ressentiment et d'incompréhension accroche le mien, mais là encore, mon esprit embrumé ignore superbement sa signification. C'est une sensation très étrange, que de percevoir son environnement sans en tenir compte. C'est à se demander jusqu'à quel point l'esprit de nous autres créatures pensantes est capable de lâcher prise.

Les mains toujours fermement serrées sur mon arme, je fais un pas en direction de mon adversaire, gisant en proie à la douleur à deux pas devant moi, à demi-appuyée contre un arbre. Un pas lent, mécanique et pourtant incertain. La démarche aussi absente que la raison. Me mouvant avec ce même cahotement, je lève au dessus de ma tête mon arme, que je m'apprête à, disons-le vulgairement, écraser sur la tronche de l'Akrilla.

C'est alors que je croise à nouveau son regard. Il n'a presque pas changé, il est toujours aussi colérique et réprobateur qu'interrogateur. Et pourtant... Il recèle une étincelle supplémentaire, un petit je-ne-sais-quoi que je suis bien incapable d'identifier, mais qui me touche droit au coeur. Je me fige, mouvement interrompu et souffle coupé. Dans mon esprit, la brume de la rage est soufflée par des souvenirs qui luttaient pour remonter à la surface. L'espace d'un millième de seconde, je suis assailli par les images les plus traumatisantes de ma triste existence. Je revois cette Akrilla, dans la forêt, étranglée par mes soins. Je revois la lumière de la vie s'éteindre dans son regard tandis que ses ongles gravaient leur haine stupéfaite sur mes avant-bras. Je revois le cadavre d'une autre Akrilla, emmêlée dans un cocon de filins d'acier; cocon qui allait ensuite m'accueillir.

Le fil de mes pensées se reconstitue dans l'instant, et d'un coup d'un seul je comprends la différence de taille entre ce combat et les précédents: cette Akrilla, étalée devant moi de mon triste fait, ne m'a menacé d'aucune manière. Elle m'a même probablement déjà sauvé la mise, face au mantruc. Je ne l'ai attaquée que par instinct de préservation, alors qu'elle ne m'a absolument rien fait.. Et, -ô horrible constatation!-, en quoi est-ce un comportement différent de celui des Akrillas qui congèlent les Aldrydes mâles, qui m'ont congelé, pour perpétuer l'espèce?

(Et merde...)

Horrifié par cette révélation, je suspends toujours mon geste quand Aurore balaye mes pensées d'un cri:
(Sil', derrière toi!!)

Je me retourne vivement en direction du mantruc, pour me demander illico si je n'ai pas pris un coup sur la tête sans m'en rendre compte. La créature a doublé de volume, et semble encore enfler au fur et à mesure qu'elle me bousille les tympans d'atroces crissements. Comme si les pauvres n'avaient pas déjà assez été mis à mal. Aurore intervient à nouveau:
(Il va exploser! Protège-toi maintenant!)
(Et si je suis touché?)
(Crois-moi, tu ne veux pas être touché, le bouloum.)

Bon, j'ai une seconde pour éviter de mourir. Je passe à toute vitesse en revue les possibilités qui s'offrent à moi: me cacher derrière un arbre? Pas le temps. Me cacher derrière l'Akrilla? Tentant, mais pas le temps non plus. Me rouler en boule par terre? Possible, mais potentiellement dangereux. Brailler comme le désespéré que je suis? Séduisant, mais peu digne. Alors il me reste une dernière option: la magie. Dans un bruit sourd, ma brindille de saule tombe sur le sol.

Je retourne à toute vitesse dans ce recoin de mon être où sont stockés mes fluides de glace. A la fois étonné et satisfait, je commence par constater qu'ils semblent être plus nombreux et plus rugissants que jamais à crécher là-dedans. Désormais familier de l'opération mentale qui consiste à puiser mes fluides récalcitrants de ce puits, je les envoie rapidement parcourir mon corps, qui frissonne de plus en plus à mesure que le pouvoir à l'état glacé envahit mes veines. Je tâche de saturer mon corps de magie, car si j'ai une vague idée de ce que je veux obtenir, je n'ai encore pas le moindre indice sur comment le créer.

Réfléchis, Sil', réfléchis. Tu as besoin d'une barrière, d'un bouclier. D'un dôme protecteur. Commençant à entrevoir la quantité de fluides dont je vais avoir besoin, je pâlis. J'essaie cependant de me rassurer en me disant que ce sort est à ma portée; après tout, il n'est que la suite logique de mon apprentissage. J'ai commencé par concentrer mes fluides dans mes mains, puis dans tout mon corps. J'ai ensuite appris à éjecter ces fluides de mon corps, et à former des projectiles de plus en plus gros. Ici, il faut simplement que je m'entoure de mes fluides, que je les dresse entre l'agression imminente et moi.

Me vrillant la cervelle, je commence à faire sortir mes fluides de mes paumes tendues devant moi, tout en visualisant une bulle qui m'englobe. Infléchissant d'un revers de volonté sur la trajectoire de mes fluides, je me hâte de les enrouler autour de ma bulle imaginaire. La quantité de fluide exigée par l'opération manque de me faire tituber; je reste cependant fermement planté sur mes pieds, déterminé à réussir mon sort. La bulle est enfin terminée, pourtant mon intuition me souffle que ce n'est pas suffisant.Je serais bien incapable de l'expliquer clairement, mais j'ai le sentiment que mes fluides doivent être tournés vers l'extérieur, qu'une infime torsion dans le filet glacé est nécessaire pour parachever le tout. Je complète alors mon image mentale: ma bulle devient plus épaisse, opaque et réfléchissante. Suivant ce changement de plan, je sens mes fluides se contracter puis se dilater, et d'un coup, le cocon de glace réfléchissante est matérialisé autour de moi. Quel talent, je vous jure.

Remerciant la providence pour sa clémence (pour une fois!) et son timing, c'est enfermé dans ma bulle magique que j'assiste à l'explosion du mantruc. Pour résumer l'événement en un mot: dégoûtant. Dans un bruit improbable de succion et de crachat, une vague d'un liquide vert et fumant est projetée dans ma direction. La substance, à mon grand damn, se révèle être visqueuse, et recouvre en un clin d'oeil mon cocon promu au rang de prison.

Partagé entre la panique de me voir piégé, et la fierté de voir mon édifice magique tenir le choc, j'avoue (avec la plus grande honte) que ma concentration se craquèle.

(C'est malin.)

Il n'en faut pas plus pour que mon cocon suive le mouvement, et dans un fracas annonciateur de mort (ou du moins d'une douleur intense), ma protection n'est plus, me laissant la proie du liquide fumant, dernier leg du mantruc. Les yeux écarquillés, je vois la première goutte de l'acide tomber sur mon bras.

Je ne m'entends même pas hurler. La brûlure est insupportable. Horrible. Impensable. C'est alors que les larmes plein les yeux, j'assiste à la chute (au ralenti, le temps prend à nouveau son pied) simultanée de trois gouttes de la mortelle substance. Et avant même d'être touché, mon esprit brandit son dernier bouclier: je sombre dans l'inconscience.



(Apprentissage spontané de Miroir)

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 Sujet du message: Re: La Forêt d'Ynorie
MessagePosté: Mer 17 Aoû 2011 00:54 
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LÀ, C'EST LE FOND DE LA GAMELLE.
- Tu l'as dit.

Hé bien non, lecteurs qui savez être de moi adorés, les miracles – et Zewen sait que comme nulle autre j’en suis capable – ne sont pas à l’ordre du jour. Certes, mon esprit rebâtit soigneusement sa citadelle d’or et de marbre d’antan, au gré de la très haute magie de par laquelle agit le Souffle de Gaïa ; certes, il s’habite insensiblement, de minute en minute, de son acuité et de sa clairvoyance de jadis, ô combien chantées dans les légendes et auréolées de gloire ; certes, il échauffe à nouveau mon cœur qui frappe cette si belle cadence d’autrefois, et enjoint à mon sang de pénétrer mes veines qui sont son seul asile décemment permis. Certes, oui – certes à tout cela. Et toutefois, lecteurs, voyez comme présentement je m’adresse avec complicité et familiarité au scélérat, à l’hargneux, au malveillant Aldryde auquel mon seul désir eût été d’inoculer le scorbut, la peste bubonique, ou (tout simplement) la mort… !

Que dois-je être à cette heure proche des portes de Phaïtos, pour ainsi me laisser aller à un échange amical avec ce monstre de malfaisance ! D’autant que, et cela je ne le saurais que plus tard, je ne me rends pas compte qu’il est à l’heure où je vous parle à gésir sur le frais humus du matin et que, de fait, il ne peut pas se laisser lui-même aller à un échange amical – ni même échanger tout court et quoi que ce fût.

(Non mais Aro, hé, ça suffit de déconner, là ?)

Le fait est que mes yeux ne peuvent honorer qu’une seule exécration du monde à la fois, et que céans en est une bien pis – ce n’est que malaisément envisageable, je vous le concède – que l’Aldryde assassin…



… Mais revenons à nos chonkras, et laissez-moi auparavant reprendre mon récit là où nous nous quittâmes naguère – oui, le Sanctuaire. Vous n’eûtes à l’œil, en cet instant où j’achevai le récit, que de pâles prémices de la magie que je peux à chaque instant verser à l’encontre du Mal. Ces liminaires brouillards, en effet, n’étaient que blêmes volutes, à peine comparables aux brumes de l’aube par un jour de tempête, et n’étaient guère de taille à affronter les démons de ce rustre sans âme. Néanmoins, ô vous qui m’êtes si chers, comprenez bien ici l’estocade que je reçus de lui : n’était plus dès lors en mon pouvoir, si grande et noble que je fusse, de produire pareils trémors de thaumaturgie grège. Point n’était seul le besoin de rebâtir corps et esprit tout entiers, mais fallut-il encore faire renaître les sources tarie de la Lumière divine.

(Un sacré boulot, en somme.)

Je vis l’ennemi s’avancer, marionnette dont les fils sont la haine et le maître la mort, et si la Lumière vive fît mouche, je ne le perçus point – l’excellence viendrait du travail acharné – quoique… L’instant advint trop tard pour y trouver concomitance, mais il y eut une braise, et puis une lueur - fugace et vacillante, mais tout de même : Gaïa, dame de miséricorde, m’avait accordé un espoir, et je l’en remerciai. L’Aldryde se figea comme statue de sel, l’œil à la noirceur sans fond semblant en proie à d’affreuses tergiversations intérieures. Il ne discernerait pas, à coup sûr, la nuée du Sanctuaire se concentrer peu à peu sous l’effort extraordinaire de ma conscience tout entière à la tâche. Les fumées s’épaissirent, appesanties qu’elles étaient par leur réalité à naître. (Elles existaient pour de vrai, quoi.) Réel, en effet, se construisait le temple où reposerait mon corps : les teintes muèrent, et les originels spectres qui ondoyaient se métamorphosèrent, inexorablement, en un péristyle peut-être humble mais non moins présent. Son charme était immense, car ses colonnes ciselées sous l’ardeur de ma volonté chatoyaient d’un bronze solaire, merveilleusement semblable au céleste san-divyna ; et tandis que leurs chapiteaux, pour mon plus grand bonheur, se paraient d’héliotropes éthérés, leurs empattements avaient en tout point la semblance de parterres de digitales et de valérianes, qui font, comme vous le savez certainement, l’admiration immémoriale des Guérisseurs.

Mais trêve de description, car l’heure était grave, et le destin pointait d’un doigt apostat et félon les lieux pourtant charmants où je me trouvais alors. Sans que j’eusse la moindre idée de ce qui le provoqua, les yeux de l’Aldryde furent soudain animés des pires sentiments d’effroi que l’on pût jamais connaître, et ses mouvements s’agitèrent dès lors dans un tel imbroglio d’angoisse que je n’en pusse concevoir que le reflet en moi-même – car comment imaginer possible que qui vous tenait à sa merci rompît en un instant le pouvoir qu’il avait sur vous, si ce n’était pour cause de grand et imminent péril ? J’ignore encore maintenant comment il l’apprit sans même détourner le regard de ma majestueuse figure, mais lorsqu’il porta l’œil sur ce qui se trouvait dans son dos, j’aperçus du même coup ce que depuis longtemps il cachait à ma vue – de toute sa stature, comme vous vous la représentez sans doute, de colosse barbare bardé d’armes et de puissance monstrueuse à tous égards. Se trouvait là celui qui restait à ma mémoire comme seul second rôle de l’histoire, cependant que je l’avais ouvert de mon coutelas et que j’étais moi-même à demi éventrée par le ressors impromptu et sauvage de qui deviendrait mon terrible ennemi – se trouvait là, je vous le donne en mille, le Mantis escrimé.

ARO.
ARO ?


Voilà ce qui maintenait son empire sur mon esprit à l’heure où tendrement je vous enjoignais d’écouter mon propos – et là non plus, maintenant encore, je ne m’offusque point que l’Aldryde écœurant connût mon nom, vestige de lignées de reines tant et tant célébrées dans les contes. Car le Mantis, inéluctablement, forcit à mesure que les secondes se bousculent, dans de repoussantes postures torturées. L’espace d’un battement de cil a-t-il déjà doublé dans la hauteur et l’épaisseur, et son cuir lentement s’étire, distendu peu à peu dans une épouvantable transparence qui laisse à l’œil indiscret la jouissance des organes.

ARO !

Le fondement des alarmes de l’Aldryde s’impose à moi comme sa vocation à un prêtre (c’est dire !) et l’épouvante qui déferle sur moi est désormais voisine de la sienne – le Mantis, par tous les dieux, est sur le point d’éclater en grandes gerbes d’acide !

(Je savais bien que j’avais oublié un truc !!)

Ces subites altérations de mes velléités vengeresses ne sont pas pour plaire à mes instances de magie, et tout de suite le Sanctuaire défaille, effaçant à ma vue la seule égide qui m’eût gardée de ce mal qui parmi tous m’emplit de détresse : point ne veux-je en effet ni offrir mes charmes au sombre Phaïtos, ni moins encore garder la vie et perdre la beauté que me ravirait sans coup férir pareille sinistre macération. Les derniers soubresauts de volitions m’emportent dans un chaos flamboyant : ma résolution opiniâtre n’a que faire que mes ultimes résistances manquent de s’évanouir à chaque palpitation de mon cœur, je vivrai (un point c’est tout). Virulent apparut le dôme moiré et diapré des étoiles de la nuit, tout droit né de ma ténacité belliqueuse et sagace, et, comme de bien, couronna les colonnes du temple ainsi parfait.

ARO.
ARO, AIDE-LE.


Une considération cédée à l’infâme Aldryde que j’oubliai un instant me l’apprend : l’acide prélude sa nauséabonde et macabre valse, et, venu par deux fois déjà au contact de mon ennemi dans d’immondes larmoiements verdâtres, tandis que j’observe de loin le théâtre des atrocités, il lui ravit son outrecuidance tout autant que sa vie. A son tour, à présent, de déchoir. Et tant mieux.

ARO.
ARO, PROTÈGE-LE.

- Ah non, hein ! Il a essayé de me tuer !!

Je discours, toute entière à mon ravissement : point n’aurai-je besoin de salir mes délicates mains créées pour nulles autres choses qu’actes gracieux, car ici sera le tombeau vivant de l’Aldryde qui voulut m’occire. Seuls vous, lecteurs, savez combien je me félicite de mon Sanctuaire, où rien ni personne ne peut m’atteindre, et d’où je contemple le spectacle de ma vengeance, et combien…

ARO. ECOUTE DONC UN FRÈRE QUI TE PARLE EN AMITIE.

La voix est celle, douce, apanage de jeunesse, d’un homme à la sagesse séculairement mûrie. A l’instar de la rose étiolée, sa beauté s’épanouit dans la mélancolique brume des âges qui s’attachent à la nature vivante et la mènent vers le tragique oubli des heures malheureuses.

ECOUTE QUI TE PARLE, ECOUTE LA VOIX DE QUI PRIE. ARO, IL VA MOURIR.
- … oui.
TU AS DEJÀ PRIS UNE VIE AUJOURD’HUI. VEUX-TU RECOMMENCER ?
-
EST-CE LÀ DONC LA PAROLE DE GAÏA ?

...

...

Lecteurs, comment pourrais-je vous conter sans médire l’effondrement d’un monde ? A ces mots, le ciel se déchire et s’écroule soudainement sur mes frêles épaules, dans un de ces sourds silences qui succèdent aux grandes catastrophes. C’est une implosion, et l’univers entier bascule, entraînant l’anéantissement de toute chose et l’avalanche fatale de tout ce qui était alors en mon esprit une certitude. Mes yeux contemplent les lacs acerbes et fumants qui s’épandent de part les plaies béantes du Mantis, et alors qu’une troisième goutte tarde à blanchir la peau de l’Aldryde, mon sang ne fait qu’un tour.

Quel a été le malin qui assaillit mon âme pour qu’ainsi je pusse avoir pareille pensée ? Est-ce donc pour de telles exactions que Cétayales m’a mandée en Ynorie ? Quel drame d’avoir ainsi lardé la chair d’une créature douée de vie, et de n’avoir point ressenti en mon cœur le deuil et le chagrin de le voir dépérir ! Ce n’est certes pas là l’honneur dû à la déesse que je chéris tant et tant – comment ai-je pu… Comment ai-je pu ?

POUR GAIA.

Peu importe qu’à son réveil son premier acte soit de taillader mon ventre, d’estourbir mon crâne ou de rompre mon cou – je me dois à ma déesse, entièrement, et je lui suis vouée.

A nouveau le Sanctuaire de s’affaiblir, et les jaillissements d’acide de se faire plus proches et plus pressants – mais point. Mon esprit se ramasse une dernière fois sur lui-même, en recherche de ses armes ; car il en demeure bel et bien, quand bien même elles seraient cachées au plus profond de mon être. Un dernier assaut de puissance théurgique redonne à mon temple toute sa superbe, et parvient à l’étendre, pouce par pouce, jusqu’à contenir pleinement le corps inanimé de l’Aldryde. Seuls quelques mots bouillonnent dans mon cœur tout entier porté à sa tâche :

(Je ne tuerai pas. Je ne tuerai plus. Je ne tuerai pas. Je ne…)


*


Y AVAIT QUE TOI POUR Y ARRIVER, COB'.
ASHREL ?
OUI ?
LA FERME.
D'ACCORD.







(((Apprentissage de Sanctuaire (2/3).)))

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 Sujet du message: Re: La Forêt d'Ynorie
MessagePosté: Mer 17 Aoû 2011 13:19 
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Inconscience. Je cauchemarde.

Prisonnier de mon corps, enfermé dans la glace. Douceureusement ironique.
Retrouvailles acides avec la morne existence d'un siècle. Caressante, glaçante geôle.
Claquemuré. Seul?

Une présence, douce et chaude comme les rayons de l'astre du jour qui s'étire et baille le matin, veille sur mon trépas temporaire.

Je dérive, la respiration apaisée.

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 Sujet du message: Re: La Forêt d'Ynorie
MessagePosté: Mer 17 Aoû 2011 15:04 
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J’ai cru pendant longtemps que le Sanctuaire souffrirait sans faillir les assauts incessamment réitérés de la créature – c’est-à-dire tant et tant de sang âcre et corrosif que nous eussions péri à défaut de salutaire auspice – oui, j’ai eu dans l’idée que l’Aldryde malveillant et moi-même sortirions indemnes de cet écueil acrimonieux, sans rencontrer plus d’affliction que nous n’en avions déjà éprouvé.

C’était là sans compter sur la défaillance ô combien redoutée des ultimes déferlantes de magie, qui s’abattent désormais dans une houle affaiblie à mesure que la conscience s’échappe de mon esprit engourdi et que ma toute-puissance s’amenuise jusqu’à s’éteindre. Les héliotropes s’altèrent sur l’ambre versatile des colonnes, les digitales s’étiolent peu à peu et, éphémères, s’évanouissent sous mes yeux terrorisés : me voilà tout entière proie des acides qui meurtrissent et lèsent le derme fragile des princesses dont je suis, quand bien même décline la vigueur de leurs jaillissements. Lorsque mon temple n’est plus que mirage austère dans ma mémoire, ma réponse ne se fait point attendre : aussitôt je me projette contre le sol qui me reçoit avec rudesse et m'érafle le visage. Le Sanctuaire reprend ses droits et s’impose à nouveau, entre les arbres séculaires baignés de la lumière aurorale, exalté par l’adrénaline qui a soudain galvanisé le moindre de mes nerfs. (Comme si de rien n’était.) Mais le mal est fait.

- Formidable. Parfait. Merci beaucoup.

Ô lecteurs, apitoyez-vous comme je le fais moi-même en cet instant, et laissez à l’envi sourdre la cataracte de vos larmes, car grand est le chagrin qui m’étreint et me plonge dans des ombres d’agonie ! Déployez comme se faut les étendards funèbres, psalmodiez les oraisons et couvrez vos visages du deuil bienséant qui sied à pareille événement ! Voyez entre mes mains la dépouille tant chérie de qui fut mon plus fidèle allié face aux malheurs dont regorge le monde du dehors, faites-vous empreints de…

ARO ? CE N’EST QU’UNE ROBE…

Mais quelle robe ! Elle qui me vêtit le jour sacré où je fis naître en moi les torrents de magie et découvris la colombe d’or et d’azur, héraut de Gaïa et emblème de son pouvoir, elle qui me vit m’offrir à ma déesse depuis lors, elle qui fut avec moi quand je gagnai l’antre de Cétayales la Grande, elle qui fut ma compagne quand je combattais farouchement dans la clairière et défiais le comble de la perfidie et de la désobligeance dans ce bois où je vous parle !

UNE ROBE.
(Ah ! Mais quelle insensibilité ! Cœur de pierre, vraiment !)
PAS DE CŒUR DU TOUT EN FAIT.
(C’est ce que j’ai dit.)

Je repousse ces propos des plus désobligeants d’un revers de main et ne me tends que dans la sollicitude immense à apporter à ma robe de silm qui, vaillante au combat, pâtit des définitives résurgences du Mantis. Ses falbalas ne sont plus que mélancoliques dentelles, chagrines traces d’une pluie amère, et mon cœur défaille à la vue de cette teinte verdâtre qui en entame l’ourlet fastueux. Les étoffes qui ondoient dans mes mains ne sont plus que le spectre de ce qui fut naguère création de noble facture, et je ne peux que mourir à la pensée de ce qu’il me faudra faire pour que la pellicule d’acide qui en suinte ne putréfie point la peau sur laquelle elle se déposera – si je n’en arrache point immédiatement les pans corrompus, ma vêture sera sur moi comme l’œuvre de Thimoros en personne. Alors avec solennité me mets-je à l’ouvrage, et écartèle ma robe en deux parts inégales ; l’acmé de mon crime résonne comme le glas, et les hurlements étouffés des soieries retentissent de concert avec ceux, terrifiants et mortellement poignants, du Mantis sur sa fin.

TU SOIGNES LA ROBE AVANT L’ALDRYDE ?

Eus égards à son statut d’être vivant, même s’il est une répugnance certaine sur la surface de Yuimen, je lui concède un regard – et en réalité, je le vois pour la première fois. La solitude des lieux me laisse désormais le loisir de le détailler, car point n’ai-je à combattre, ni lui, ni l’étrange créature qui voulut faire de moi son repas. De ma main choit le morceau de silm gâté, tandis que je somme mes dernière forces de me mener au blessé. Ne riez pas de me voir ramper comme serpent dans les fourrés, car mes muscles ne souffrent point de me porter de nouveau : un coude après l’autre, je me tire, épuisée, à son chevet sommaire. Mes yeux, insensiblement, caressent son visage aux rondeurs presque enfantines, uniquement vieilli de rares estafilades qui font montre de bravoure – comment se fait-il qu’un visage qui se fait chantre de douceur dissimule si parfaitement l’ignominie et l’abjection dont il fit preuve à mon encontre ? Ma main se perd sur ses traits tandis qu’elle les effleure.

(Il m’eût aisément tuée.)

Une estampe de Gaïa lumineuse s’esquisse sur ma rétine fatiguée, mais je ne peux dès à présent faire usage de son don si précieux car il s’est peu à peu tari. Je devrai attendre, et faire jouer les leçons de Cérahe : onguents et décoctions seront mon seul recours pour promptement panser l’Aldryde, et le feu divin n’agira que plus tard. En un regard je balaye les environs, et avise un ruisseau murmurant qui serpente entre les hautes herbes : idéal pour préparer les remèdes dont les ingrédients tourbillonnent déjà dans mon esprit.


*


Le liseron sauvage laisse un instant s’échapper un filet du breuvage rosé qui dessine en son sein une absconse nébuleuse, et écume sur ses pétales veloutés une mousse légère. Vous n’oserez me croire, mais je me dois de vous en instruire : ci se trouve de la bave de crapaud, qui contre toute attente est plus appétissante encore que la crème au beurre sucrée des Hobbits de Shory – cependant, gare ! Son goût est si atroce que l’on peut s’inventer dévoreur de cadavres en y trempant lèvres. Délectable coup du sort que je pusse chasser sur les rivages du ruisseau les bêtes qui dans leur goitre forment ce remède fameux, car si tant est que cela réveille l’Aldryde de sa léthargie funeste, il aura dans la bouche les délicates efflorescences d’une fleur avariée.

Longues heures se sont égrainées depuis que je vous laissai : depuis longtemps s’est évanoui le Sanctuaire, et de même est trépassée la créature qui jusqu’à son dernier souffle voulut nous empoisonner. La vie reflue à nouveau dans tout mon être, et je ne ressens plus qu’un tourment passager là où la brindille mécréante m’atteignit au ventre. Je parvins pour mon plus grand plaisir à traîner l’Aldryde le long de quelques pieds, afin de nous éloigner scrupuleusement des longs lacets fétides et pestilentiels que dessine le sang du Mantis. Pour mon plus grand plaisir ? C’est dire que je ne ménageai point sa tête, qui rencontra souventes fois cailloux aigus et branches malvenues. Mais bref, je l’installai auprès du ruisseau, et lui jetai fréquemment un coup d’œil cependant que je préparai sa décoction salvatrice.

Il est l’heure à présent de la lui mettre en bouche, pour qu’enfin son derme estompe les lésions putrides qui le parcourent. J’ai souvenance, subitement, de cette flasque en ailes de libellules où se trouvait jadis le fluide doré de magie : elle contiendra commodément la potion que j’ai préparée, et il me sera plus aisé d’en user le goulot que de tenir le liseron à large corolle au-dessus de l’Aldryde. Aussitôt dit, aussitôt fait, mais la posture dudit scélérat ne sied guère à ma tâche, et je...

- WOAAAAAAAAAAAAAAAAAAAHAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAH !

...

...

Lecteurs, soyez comme moi saisi de l’incongruité des mésaventures présentes ! Voulant redresser l’Aldryde, je le positionne contre l’écorce rêche d’un arbre au faîte immense, et nos poids combinés ouvrent le sol dans un fracas retentissant ! L’univers à nouveau bascule, et nous tombons, âmes perdues et sans possibilité d’ouvrir nos ailes, dans une nuit menaçante. Rude est le sol qui frappe nos côtes meurtries, et c’est dans d’insolites positions que nous atterrissons dans un rocambolesque tumulte. S’ensuit alors un fracassant silence de fin du monde ainsi que de fulgurantes douleurs dans tous les membres, et je ne peux discerner dans l’obscurité opaque qu’une goutte infime de lumière ténue.

(Et merde.)

J’attends, atone, qu’un bruit se fasse entendre pour déterminer l’endroit où nous nous sommes brisés – mais rien. Lentement, avec grand soin, je place mon blessé dans un sens plus coutumier, et ne trouve rien à faire que de lui donner le remède. A son réveil, peut-être en saura-t-il plus que moi.


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On raconte que le royaume cristallin de Camélia avait été offert à sa noble grand-mère par les Gnomes, avant que le dernier d’entre eux n’eût rejoint ses frères et n’eût quitté la terre de Yuimen pour s’abîmer dans les profondeurs ténébricoles du monde, auxquelles nulle carte ne saurait mener. Ainsi les abysses purent devenir en ce lieu lumineuses et fleuries, musicales et célestes, comme si la magie archaïque avait, en cadeau à la reine des reines, inversé en son royaume la Terre et le Ciel.







(((Apprentissage de Sanctuaire (3/3) | Acquisition de la potion de bave de crapaud | Reste deux doses.)))

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 Sujet du message: Re: La Forêt d'Ynorie
MessagePosté: Ven 19 Aoû 2011 01:57 
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Quelques secondes avant d'ouvrir les yeux, j'émerge de mon état d'inconscience. Encore incertain de mon retour parmi les vivants, je vois les dernières images de mes rêves s'estomper sans parvenir à déterminer si des souvenirs s'y cachent. Peu à peu, je reprends possession de mon corps et renoue avec mes sens. Le premier des cinq à se manifester -que dis-je, à chanter son retour- n'est autre le goût : des relents immondes d'une substance à demi-ingurgitée, dont j'ignore la provenance, parasitent mes papilles et me filent joyeusement la nausée. Mon odorat, lui, salue mon réveil en me dispensant de puissantes effluves d'humus, et s'accorde avec le toucher puisque je sens sous mes doigts de la terre meuble et douce. Pour ce qui est de l'ouïe, j'entends vaguement une respiration près de moi, mais suis bien incapable de m'en inquiéter pour l'instant. Enfin mes yeux m'offrent une vue sublime sur l'envers de mes paupières, certes sombre et unie, mais adaptée à mon cerveau tout juste opérationnel.

Malheureusement pour moi, les retrouvailles avec ma carcasse sont plutôt douloureuses, car d'un coup s'abattent sur moi la fatigue du combat, la douleur de mes plaies et contusions (qui me semblent étrangement plus nombreuses que lors de mon évanouissement), la souffrance vive qui sourd des points d'impact des gouttes d'acide. Cependant dans l'ensemble, je me sens plutôt en forme, ce qui est pour le moins surprenant.

Une voix familière retentit alors dans mon esprit, aussi chaleureuse que goguenarde :
(Les bouloums, toujours à tomber dans les pommes quand ça devient intéressant.)
(Oh ça va, hein. Ce n'est pas toi qui t'es prise des gouttes de mantruc dessus, madame la boule de fluide immatérielle.)
(Je reconnais que ça ne devait pas être très marrant. Tes bras sont dans un piteux état. Heureusement que les cicatrices, ça fait vie-rhile.)
(Hey, j'ai une super idée : et si tu te la fermais?)
(…)
(Bon d'accord, raconte-moi ce qu'il s'est passé.)
Rire suffisant et éclaircissement de gorge (peut-on s'éclaircir la gorge alors qu'on parle par la pensée? Quelle comédienne cette faera!).(HEY!) Faut-il énoncer l'évidence ? Je suis sacrément content de la retrouver, quand même.

(Alors, après que tu as défailli comme un...)
(Aurore!)
(D'accord, d'accord. Après ta perte de connaissance, l'Akrilla a fait un truc avec sa magie pour te protéger et...)
(Pour me QUOI?)
(Sil'!)
(Je la ferme.)
(Merci. Donc, elle t'a protégé puis t'a extirpé de la glace. Ensuite, elle est partie pendant un bout de temps, et quand elle est revenue, elle t'a traîné dans ce trou et t'a fait boire un truc.)
(Un trou ? Un truc?)

Ah, eh bien inutile de chercher plus loin l'origine du goût de crapaud mort que j'ai dans la bouche. Tout comme celle de mes contusions supplémentaires. Soudain, les paroles d'Aurore prennent tout leur sens : j'ai été enlevé et peut-être même empoisonné ! C'est la fin, ça y est ! J'ai été capturé, elles m'ont retrouvé ! Voilà pourquoi elle m'a gardé en vie, cette sale Akrilla dégénérée! Une vague de panique sans nom m'envahit tandis que j'ouvre brusquement les yeux et me redresse sur mon séant en poussant un gémissement horrifié. La panique se mue en franche trouille lorsque je constate que je suis dans un noir presque complet, et que je prends pleinement conscience de la présence de l'ennemi à deux pas de moi.

Trop patraque et trop apeuré pour mobiliser mes fluides, je tâtonne néanmoins autour de moi pour vérifier que je n'ai rien perdu (heureusement, mes maigres possessions semblent m'avoir suivi au fond du trou), et suis légèrement rassuré lorsque ma main se referme sur la brindille de saule. Je m'empresse de la brandir devant moi, dressant un rempart entre mon corps vulnérable et la (les?) monstre(s) qui se dissimule(nt) dans l'obscurité. Mes yeux commençant à s'habituer au noir, et aidé par la très faible lueur bleutée dispensée par l'une de mes bagues, je parviens à localiser l'Akrilla. Je déglutis ; elle est à portée de brindille.

J'ai cependant repris un tant soit peu le contrôle sur moi, aussi décidé-je de parler avant de frapper, cette fois-ci (on louera ma sagesse plus tard). D'un chuchotis sec et nerveux (pourquoi chuchote-t-on toujours dans le noir ? Mystère...), je lui demande :

« Qui êtes-vous et pourquoi m'avez-vous traîné ici ? »

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 Sujet du message: Re: La Forêt d'Ynorie
MessagePosté: Ven 19 Aoû 2011 12:40 
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- Traîné ici ? TRAÎNÉ ICI ?!!

Oh, lecteurs, voyez comme mon cœur en un instant se brise d’ouïr telle sentence, où point, sans honte aucune, terrible menace tout autant que frayeur ! J’aurais subi l’estocade, et j’aurais réprimé la parade, car la démence au cœur et à l’esprit ne se peut contenir – il eût été hagard, il m’eût à nouveau vilipendée, que j’aurais reçu les heurts avec la magnanimité prodigieuse dont m’a douée ma déesse au jour heureux parmi tous où je naquis… Mais quoi ? Qu’il soit seul à se fendre d’alarmes ?

(On aura tout entendu !)

Ainsi l’Aldryde se réveille-t-il dans les profondeurs obscures où nous choyâmes naguère, et s’adresse-t-il au personnage que je suis, noble et majestueux s’il en est, avec dans la voix les emportements familiers de ceux qui sont les malheureuses proies ! C’est moi, par toute la Lumière de Gaïa, qui eusse dû ainsi crépiter de foudroyante ire et de terrible crainte ! Lui qui fut en premier offensif, lui qui fustigea mon corps d’Akrilla parfaite de funeste algie et d’abominable souffrance, lui qui, dominé par la rage et la déraison, me laissa pour morte entre les racines – et le voir, lui, me demander qui je suis et pourquoi je l’ai traîné ci-bas ?!

(NOMD’UNEMEUTEDELOUPSAFFAMÉSARRIVANTTOUTDROITSURYSCAMBIELLEPOURENDÉVORERTOUTESLESREINES
SANSEXCEPTIONETDÉVASTERLAPLUSBELLECRÉATIONALDRYDEDETOUSLESTEMPSJUSTEPARCEQU’ILSONTFAIM...)

- … JE T’AI JUSTE SAUVÉ LA VIE…
(… ESPÈCE DE ROGNURE INSENSÉMENT CRÉTINE DE NOUILLE HALLUCINÉE ET PHOSPOHORESCENNNTE !)


Pour sûr, avisant sa fourbe brindille à la faible et céruléenne clarté qui s’épand de son armure, ô combien étrange et assurément gorgée de magie, je me refuse à l’injurier céans et séquestre les affronts dans mon esprit. D’autant plus qu’il semble maintenant brandir l’arme vers moi dans une dernière manifestation d’imbécile insanité.

- Bon, et puis baisse ça de là, tu vas finir par le regretter. Moi aussi j’ai…

(Mon coutelas !)

Se put-il qu’un jour le fatum s’acharnât plus encore sur un être rompu d’innocence ? Seule garde à l’encontre de qui me tourmente et me rosse, la lame offerte des années de cela par la grande Cérahe ne se présente aujourd’hui plus à portée de ma main, car, jetée en travers du Mantis, elle doit gésir dans l’acide, putréfiée, rongée, brisée.

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 Sujet du message: Re: La Forêt d'Ynorie
MessagePosté: Ven 19 Aoû 2011 13:30 
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De la part de cette Akrilla inconnue et hargneuse, au comportement douteux, je me serais attendu à une réplique typique de chasseuse de primes aussi cruelle qu'impitoyable, du genre « Mon nom est sans importance. Ta liberté prend fin cet instant, vermisseau. », suivi d'un rire démoniaque. Quelle n'est pas ma surprise quand du noir relatif qui nous englobe surgit d'un coup les cris offusqués de mon interlocutrice ! C'est à croire qu'elle va s'étouffer dans son indignation, et ce que la lumière me laisse deviner de son visage déformé par le courroux n'est pas très engageant (même si assez divertissant, il faut le reconnaître).

Alors là, je n'ai jamais vu quelqu'un feindre aussi bien. Je suis confus, à moitié terrifié, endolori, j'ai du mal à retrouver mon souffle, mais il ne faudrait pas non plus me prendre pour une bille. Elle m'aurait juste, simplement, innocemment sauvé la vie ? Je ne marche pas. C'est à une Akrilla dégénérée à qui j'ai affaire, pas la première donzelle venue. Je suis sûr qu'elle m'a attiré dans un piège tordu pour me capturer. D'ailleurs, je compte bien lui faire cracher le morceau à coups de brindille.
(Euh Sil'...)
(Quoi?)
(Tu serais pas un peu paranoïaque, là, par hasard?)
(Paranoïaque? Je me contente de me méfier de tout et de tout le monde. N'abuse pas.)

Ne laissant pas le temps de répliquer à Aurore, j'ignore l'injonction de mon ennemie et brandit avec plus de vigueur encore mon arme devant moi, prêt à en faire usage si jamais elle se rapprochait. Je veux tirer toute cette histoire au clair, et s'il faut encore amocher son joli petit menton pour cela, je n'hésiterai pas.

D'une voix que j'essaye de débarrasser de toute trace de peur, mais dans laquelle transparaissent parfaitement la colère et la détermination du héros en quête de vérité (comment ça d'une voix chevrotante?!), je m'adresse de nouveau à elle :
« Sauvé la vie ? Pourquoi ?! Pour me capturer ? C'était pour ça, toute cette mise en scène avec le mantruc ?! Qui êtes-vous, nom d'une Akrilla dégénérée ?! »

Pour être honnête, je crois que mes cris sont surtout des témoins poignants de la révolte lasse et désespérée d'une mouche malmenée par le destin.

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Dernière édition par Silmeï le Ven 19 Aoû 2011 21:04, édité 1 fois.

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 Sujet du message: Re: La Forêt d'Ynorie
MessagePosté: Ven 19 Aoû 2011 16:10 
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Ce ne peut être là, à n’en point douter, que le signe de Gaïa !

Mais oui, lecteurs à l’ardeur encéphalique par trop réduite et que pourtant je chéris plus que tout, voyez comme ma déesse, elle-même pénétrée tout entière d’entendement et d’intellection, s’empara de mon arme sitôt qu’elle la vit nuire à sa parole ! Quelque fût la vie que j’eusse prise alors par sa tragique médiation, cette lame avilie par le sang ne pouvait rester mienne, ou bien j’eusse dû braver la décrépitude des chairs pour y porter la main de nouveau. Elle fut maudite à la seconde-même où la verte hématie la pervertit, et jamais, du fait de cette fatale exaction dont je fus instigatrice, ne serait dès lors portée à mon flanc. Ce coutelas était œuvre de bien, œuvre de Guérisseuse qui en use pour concocter quelque salvateur remède, œuvre de praticienne vouée à la lumière qui soigne et ne tue pas… J’ai failli. Toutefois, que ce soit par mon propre sacrifice, et cela j’en fais l’auguste vœu devant Gaïa elle-même qui vit dans l’Ether, j’agirai dans le repentir et ce jusqu’à mériter pleinement sa miséricorde.

La voix de l’Aldryde, portée par force modulations discordantes, m'arrache à moi-même et à mes prières sourdes. Son timbre peine à dissimuler, une fois encore, une savante mixtion de trouble, de menace, et de ressentiment – spectre de ce qu’en mon cœur je conçois également à son égard.

- Tu veux dire « Mantis » ?

Certes, il me fait responsable de tout – le Mantis, le combat, ainsi que la chute mortellement induite – et, nonobstant, mes pérégrinations par-delà le temps, aux confins du monde visible, tendue que j’étais dans mon recueillement et dans l’appel à l’absolution, ont soudain pansé mon âme de son outrancière irascibilité – que sert en effet de s’emporter ? Nous sommes là, dans ce gouffre béant abîmé dans la nuit, à affliger nos yeux qui, quoi que l’on fît, ne verraient point plus clairement – et là, que devrions-nous nous apaiser, et nourrir grande force pour outrepasser les ténèbres et rejaillir dans la lumière ! Mais nous ne formons à l’encontre de l’autre que rancœur pusillanime et honteuse.

(Il m’eût aisément tuée.)

Mais ma déesse, dans sa clémence et sa sagesse, m’accorda de survivre pour honorer son nom et mander à tous son céleste message : à moi, désormais, de me faire chantre de tempérance et de discernement pour m’en faire l’écho.

Alors à l’indignation succède la lassitude – celle de ce jour qui à l’aurore paraît déjà trop long – ainsi que, et je m’en emplis tout entière, la confiance et la douce quiétude.

- Que tu me crois ou non, je ne te veux aucun mal. Je suis au service de Gaïa.

Et cela sous-tend un très haut avertissement qui résonne pour moi comme le chant de l’oiseau dès que poignent dans l’horizon les premières lueurs de l’aube. Il pourra tout tenter, le massacre ou l’injure, ou tout autre chose qui fera battre son petit cœur assouvi par la haine ; de moi il ne pourra plus obtenir désormais que je répondisse à l’outrage, et ne sera plus satisfait en aucun moment de me voir bondir terriblement, empoignée par un courroux qui me serait trop funeste.

Ma décision est irrévocable.






(((Perte du Coutelas en croc de loup effilé.)))

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 Sujet du message: Re: La Forêt d'Ynorie
MessagePosté: Sam 20 Aoû 2011 02:41 
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Le regard fixé sur la silhouette de l'Akrilla, je fais de mon mieux pour bâillonner ma colère et étouffer ma peur. Cela ne me sert en rien de n'être qu'une pelote de nerfs qui sursaute au moindre frémissement ; j'ai besoin de retrouver un semblant de maîtrise. Mais surtout, j'écoute attentivement les paroles qu'elle prononce. Son ton, une nouvelle fois, me surprend ; il y a cinq secondes encore, elle me hurlait dessus, et voilà qu'à présent, elle s'adresse à moi d'une voix presque apaisée. Elle est vraiment cyclomy... cyclitho... cyclothy... changeante, celle-là.

Ou peut-être s'astreint-elle au calme, tout comme moi. Peut-être avons-nous compris tous les deux que se castagner une nouvelle fois sans autre forme de procès n'était pas vraiment raisonnable.

Si je tique lorsqu'elle me corrige sur le nom de la bestiole puante (mantis ou mantruc, quelle importance, je vous jure) et lorsque je constate qu'elle s'obstine à me tutoyer (c'est vrai, quoi, on n'a pas gardé les larves tisseuses ensemble), je suis profondément troublé par la sincérité qui semble émaner d'elle quand elle m'affirme qu'elle ne veut aucun mal. D'un côté, l'expérience d'une vie crie, hurle au mensonge. Mais de l'autre côté de la balance pèsent son sauvetage et sa convaincante prestation. Complètement paumé, je me tourne vers Aurore :

(Je suis perdu, Aurore. Ne vit-on pas dans un monde où toutes les Akrillas chassent les Aldrydes mâles pour les congeler sans états d'âme ? Dans un monde où je suis frappé d'ostracisme, condamné à fuir jusqu'à la fin de mes jours ? Dans un monde où toutes ces folles méritent de payer?!)
(Je ne sais pas trop, Sil'. Le fait est qu'elle a l'air honnête, et qu'elle t'a effectivement sauvé la peau. Mais serais-tu en état de la combattre à nouveau, de toute façon?)
(Non, tu as raison... Et puis d'abord, c'est qui, cette Gaia?)
(La déesse de la lumière, de la vie et de la connaissance. Une gentille, quoi. Ses disciples sont censés respecter la vie partout où elle se trouve. Même dans les bouloums apeurés.)
Pensif, je m'abstiens de répondre.

Je cesse un instant de fixer l'Akrilla pour jeter un coup d'oeil aux alentours. Je ne distingue pas grand chose à part du noir, bien évidemment. Nous nous trouvons dans une sorte de caverne qui se prolonge en couloir, qui lui-même se perd dans l'obscurité la plus opaque. Où diable suis-je, bon sang ?

Puis, avec un soupir amer, je m'adresse à celle qui me fait face :
« Oui, je suppose que vous ne nous voulez aucun mal, lorsque vous nous congelez et volez nos vies. Vous ne faites que les anéantir, mais ne les détruisez pas ; voilà qui doit satisfaire votre déesse. »
Mon dernier mot claque, cinglant. Inutile de préciser à qui réfèrent le « nous » et le « vous ». Soudain las, très las, j'abaisse lentement mon arme, puis la dépose à mon côté. D'une voix radoucie, mais toujours aussi peu indulgente, je lui demande :
« Comment-vous appelez-vous ? Et savez-vous où nous sommes ? »

J'insiste subtilement sur le vouvoiement. Elle se prend pour qui, à me tutoyer comme ça, une princesse ?

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 Sujet du message: Re: La Forêt d'Ynorie
MessagePosté: Lun 22 Aoû 2011 13:38 
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- QUOIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIII ?!!!

Eût-il été possible, ô lecteurs, que de part le vaste monde une promesse eût été si épineuse à tenir et que si élevée parole ne rencontrât que disgrâce et force haine ? Puissiez-vous, vous qui pourtant point n'êtes de l'engeance majestueuse des reines Akrillas, exprimer aujourd'hui conseils éclairés afin que je (N'ÉCRABOUILLE PAS LA TRONCHE DE CE PETIT VERMISSEAU PUTRIDE ET DÉLOYAL !!) et essuie de fait la mortelle damnation de mon adorée déesse ; puissiez-vous les exposer très haut, en cette heure, dans cette froide nuit où la fatalité insidieusement nous conduisit, car il me semble discerner dans les tréfonds de mon cœur – et de cela j'aime à vous avertir de peur que vous ne sussiez plus comment appréhender la tournure des événements imminents – le sentiment le plus noir qui lui eût été donné de concevoir, lui si humble et si pur.

Mais avant toute chose, laissez-moi vous narrer ce qui accueillit mes si charmantes paroles, présages de pondération, promesses de confiance, auspices sacrés de la concorde que nous eussions pu bâtir de commun labeur ! Car, ainsi que je le devinai de par mes augustes dons de prescience, ce ne fut point la chimérique allégeance pour laquelle pourtant longuement je priai que je reçus au confluent de mon engagement, mais au contraire pléthore d'arrogance et mépris. Et de quelle engeance, encore ! Ainsi me faut-il braver mon orgueil et ma pudeur pour vous conter, lecteurs qui savez être de moi adorés, comment le délictueux Aldryde avilit et pervertit en quelques mots à peine l'œuvre immense et ô combien glorieuse de mon éblouissante déesse. Ce ne fut pas tant dans sa sentence, dont je ne fus à même de saisir aucun tour, mais dans son timbre aux inflexions sournoises parmi toutes que je perçus sont indéfectible haine à l'égard de celle qui est ma Reine tout autant que ma Mère. Sans bornes serai-je le témoin de ses intolérables insanités, et aussi les rendrai-je exhaustivement : ma déesse, être de Lumière et d'absolue bienfaisance, se révèle à ses dires source des plus grands malheurs que j'eusse un jour entendus – affres de malédiction, apanage des Frères psychopompes – en diamétrale opposition à sa réelle homélie.

(Mais qu'est-ce qu'il raconte, celui-là ? Depuis quand Gaïa congèle les gens ?)

Guère ne m'est possible, en telles vicissitudes, de m'astreindre à la paix. Grande est la parole de Gaïa, et certes s'applique-t-elle à toute forme d'existence, mais point ne serai-je en mesure de cautionner pareils blasphèmes. Sitôt ouïes ces irrémissibles turpitudes, je n'ai d'autre désir que de m'y soustraire dans une irrépressible fuite, et c'est en entendant l'impie exiger mon nom que je me rétablis sur mon séant, m'agrippant furieusement aux saillies affleurant dans la dureté de la roche et la douceur de l'humus. Une salvatrice radicelle perdue dans l'obscurité m'offre de la suivre, car la route qui glisse paresseusement devant moi n'est que confusément irisée par l'armure de l'Aldryde, et s'immerge aussitôt dans les ténèbres les plus impénétrables qui m'aient été données de connaître.

- Je t'ai sauvé, maintenant tu peux te débrouiller tout seul.

Aucun son ne profane le seuil ourlé de mes lèvres tandis que je maugrée – et je n'ai de cesse de m'assombrir chemin faisant, cependant que, sous ma main, caressants se font la glaise meuble et le froid argile. Un pied devant l'autre, irrésolu et timoré toutefois, m'achemine pouce après pouce de plus en plus loin dans la noirceur sans moire qui m'escorte...

...

(Oui, je boude. Et alors.)

Mais gare ! A peine une minute, à tâtonner du bout de mon pied aux mirifiques grâces pour m'esquisser une voie dans la nuit, et voilà le méphistophélique bourdonnement des Guêpes de Phaïtos qui m'ensorcelle et me piège. Je ne saurais que trop dire quelles craintes soudain m'envahissent, face aux tourbillons fantasmagoriques qui empennent leurs par trop sinistres emblèmes dans mon imaginaire si empreint des légendes de mon peuple ! Entends-je les préludes d'un vrombissement menaçant ? Tout de suite s'éveillent et s'exacerbent torrents de figures infernales, celles, insoutenables à la vue, des impétueuses et bestiales guerrières de la Mort qui trop tôt surent que nous mourrions de faim, de froid et de peur dans ces abysses englouties dans une noirceur qui leur est coutumière.

(Gaïa, Sainte Mère, je suis trop belle pour mourir... si tôt !)

Derechef, mes ailes duveteuses armées des plus languissantes splendeurs s'animent avec toute la grâce qui leur sied (oui, enfin... comme elles peuvent dans ce boyau riquiqui) pour s'attacher à protéger mes yeux du périlleux spectacle qu'ils s'apprêtent à contempler – car subite est la mort pour qui rencontre l'œil des belliqueux apôtres de Phaïtos ! Leurs yeux aux fatales diaprures percent les brumes du sommeil et n'ont cure de la nuit ou du jour ; lumière ou non, ils achèvent quiconque se fend d'effronterie et l'abattent sans recours. Et là, que leur ordre nouvellement donné soit de présentement, promptement et âprement me venir quérir afin que dans les Enfers aux mélancoliques diapasons je ne puisse...

HEIIIN ?

...

(HÉ, MAIS ?! C'est vous ?!!)

Quelle n'est pas la surprise qui m'étreint tout entière tandis que je distingue, dans les vapeurs de mon esprit par la peur égaré, trois graciles lueurs qui virevoltent alentour avec force agilité et diligence ! N'avez-vous donc nulle mémoire pour les logorrhées sans fin que je vous dispense à loisir, pour ainsi ne point reconnaître les délicieuses créatures dispensatrices de lumières qui se plaisent à faire pirouetter leur petit cul doré dans les bas-fonds et les venelles ? Ci, certes oui, sont les lucioles qui me conduisirent à l'antre de Cétayales Éternelle par méfaits outranciers et ruses malicieuses, et avec grande mutinerie déchirent-elles aujourd'hui de leurs traits voluptueux l'opacité funèbre qui comme un linceul m'enveloppe et me mène résolument à la folie. Elles jaillissent, empanachées de leurs vibrantes rumeurs, et se font éclairs surprenants, ébouriffant comme se doit le vil Aldryde qui souille de ses mots la puissante Gaïa – leur course effrénée les arrête à moi, devant qui elles prêtent obédience par moultes cabrioles joyeuses.

(Bien sûr que j'ai pensé à vous à chaque seconde !!)

Nous terrons, faites-en-moi l'inébranlable serment, la vérité qui éclate au grand jour : dans la lutte acariâtre que je menai pour ma vie depuis que je me réveillai face au mirage myrmidon, nulle pensée ne s'égara vers elles, qui pourtant sont les hérauts chéris de Gaïa et de Cétayales.

A point nommé surgissent-elles de leur taciturne somnolence, car, à l'heure où je vous parle, bien infortunée me serais-je trouvée sans leur chamarrure luminescente ! Un pas de plus, lecteurs, et je posais malencontreusement le pied sur ce qui eût causé ma perte ; un pas de plus, et je glissais – en fracas rugissant – sur un orbe limpide qui s'égare là, à même le sol, sans la moindre raison. Un coup d'œil à gauche, des lucioles ravies, un coup d'œil à droite, des lucioles réjouies : elles tournoient dans les airs sans que mes yeux aient le temps de saisirent leurs détours, mais force m'est de constater que nulle inquiétude n'interrompt leurs prestes circonvolutions ; et ces jeux spiritueux m'enjoignent sans mot dire à me pencher plus avant sur cet objet intriguant.

...

...

YOP, SALUT !
- AAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAARGHHHH...!!!

Oh, lecteurs, comment vous faire le conte de ce qui survient à l'instant même où sur l'orbe glacé se pose ma délicate main ? Grande foule se rassemble sous mes yeux ébahis, et cependant que je lâche l'artefact poignant de magie sous la terreur qui inonde soudain mon être, toute entière elle s'éteint, me laissant en proie à un effarement sans nom. La poitrine battue de heurts déchaînés, j'adresse un nouveau regard aux lucioles qui persévèrent dans leur ballet – réjouissant eût-il été si mon cœur n'avait subi tant de frayeur. Attentive, pleinement à l'application que je veux voir régner dans mon corps, j'hésite un geste vers le globe... et mon ongle à peine en effleure-t-il la surface hyaline qu'à nouveau vaste foule se fait-elle connaître, toute d'argent et de nimbes vêtue. Et de toutes parts, quel est le singulier écho qui se fait entendre ?

QUI ES-TU ?
QUI ES-TU ?
QUI ES-TU ?
- Yscaelle Cahidrice Aro... Heu ?
MAIS OUI, C'EST ARO BANDE D'IMBECILES ! ON PEUT RIEN EN TIRER DE CEUX-LÀ.

Que penser, et que dire ! Voilà cet indigent, non bien plus grand que je ne le suis moi-même, qui s'approche de moi en faisant ondoyer sa vêture brumeuse – gris, de pied en cape, il a le cheveu rare et une tessiture à présent bien connue de moi.

- Et vous ?
DE QUOI ?
- Vous avez un nom ?
OUI.
- Et ?
HEIN ?
- C'est quoi ?
DE QUOI ?
- Votre nom.

...

… un dialogue qui se perd dans la nuit.

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 Sujet du message: Re: La Forêt d'Ynorie
MessagePosté: Lun 29 Aoû 2011 00:17 
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Poursuivant son alternance d'humeurs insensée, l'Akrilla dont j'ignore toujours le nom choisit d'oublier la réserve de sa réplique précédente, et pour toute réponse, me beugle littéralement dessus un pronom interrogatif dont la longue et discordante élocution n'est pas sans rappeler les cris de certains volatiles agressifs. Avouerais-je que je suis à peine surpris par ce subit revirement? Mon interlocutrice semble cruellement manquer de constance; c'est à croire qu'elle cherche à justifier pleinement la pertinence de l'appellation « Akrilla dégénérée » créée par votre serviteur. Bien évidemment, il ne me vient pas à l'esprit, tout étranger que je suis aux choses de la religion et de la vénération d'un autre être, qu'elle a pu prendre ombrage de mon lugubre persiflage à propos du sort des Aldrydes mâles. Et puis de toute façon, il faudrait être fou pour vénérer quelqu'un d'autre de son plein gré; n'est-ce pas l'expression-même d'un désir malsain de fusion à l'autre, d'un déni de soi, d'une volonté d'anéantissement de son individualité? Se vouer un culte à soi-même, voilà qui semble plus sensé. On ne risque pas de s'y perdre, au moins.

(C'est drôle, le mode de penser de quelqu'un totalement étranger à la religion. Tu es le premier maître que j'ai qui rejette l'idée-même de culte.)
(Ca me semble logique pourtant... Pas à toi? Attends, je ne suis pas ton premier maître?)
(Oh que non, le bouloum. J'en ai eu bien d'autres.)
(Et?)
(Quoi, « et »?)
(Je ne sais pas, parle-m'en!)
(Peux pas. Confidentiel.)
Je ne sais pas ce que veut dire « confidentiel », mais je devine qu'il me faudra revenir à la charge plus tard. Cette Faera ne cessera jamais de me surprendre. Et ça m'agace autant que ça me ravit.
(Évidemment! Ton esprit insignifiant ne peut même pas rêver espérer imaginer ce dont je suis capable et ce que j'ai vécu.)
(La ferme, la boule de fluide vantarde.)
Voilà, on laisse échapper un compliment, et la vile se précipite immédiatement dans la brèche pour fanfaronner et quémander d'autres éloges. Non mais, je vous jure.

Où en suis-je, déjà? Ah oui, le beuglement. L'Akrilla sans nom se détourne donc, sans que la pénombre ambiante me donne l'occasion d'apercevoir ses traits, probablement griffés d'indignation. Apparemment sans plus s'intéresser à moi, cette dernière part à l'aveuglette dans le long tunnel qui s'esquisse derrière elle, non sans marmonner dans sa barbe des paroles inintelligibles. Je ne peux m'empêcher d'éprouver une soudaine bouffée d'irritation devant son refus de me répondre et son outrageuse fuite. C'est la seconde fois qu'elle ose me considérer comme quantité négligeable pour passer son chemin: elle cherche la guerre ou quoi?! Elle a bien de la chance que je ne sois pas en état de lui coller la rouste qu'elle mérite.
(C'est surtout que la rouste, c'est toi qui risque de la prendre!)
J'ignore cette remarque insidieuse d'Aurore, tout comme l'éclat de rire malin qui résonne dans mon esprit. Drape-toi dans le silence et la dignité, Sil'.

Je ne peux pas m'empêcher de marmonner à mon tour une réplique si peu puérile du style « Très bien, bon débarras! » tandis qu'elle s'enfonce dans le tunnel et se soustrait à ma vue. Je décide immédiatement, plus vexé que je ne l'admettrais jamais, de quitter cette lugubre caverne et par la même occasion cette Akrilla complètement folle. Profitant de la lueur dispensée par la bague sur mon bras, je vérifie que toutes mes possessions sont bien toujours en ma possession (oh oh!) et m'accroupis pour récupérer ma brindille de saule avant de lever la tête pour scruter le puits par lequel nous sommes arrivés. Il semble être assez large pour que je tente de m'en échapper en volant, aussi joins-je aussitôt le geste à l'idée. Actionnant mes ailes, je m'élève doucement dans le puits, ignorant la douleur qui sourd encore de mes membres et prenant garde à ne pas heurter une paroi. Centimètre par centimètre, je m'élève et me rapproche, je l'espère, de la surface. Vaguement inquiet, je suis les légers entortillements du boyau dans un silence pesant. Je ne peux me départir de l'impression glauque de fuir ma tombe. Soudain, ma tête heurte quelque chose. Désorienté, je lève les bras pour tâter ce qui se révèle être un éboulis conséquent qui bloque complètement le boyau. Je suffoque de panique: bon sang, cette saleté d'Akrilla nous a enfermés sous terre!! Elle a beau avoir affirmé ne me vouloir aucun mal, il faut croire qu'elle n'a pas résisté à sa nature et a claquemuré le premier mâle qui lui tombait sous la main! Maudites, maudites Akrillas!

Je redescends rapidement, cahin-caha, m'éraflant plusieurs fois les bras au passage. Je n'arrive guère à déchiffrer l'embrouillamini d'émotions qui m'assaille: colère, lassitude, peur, tristesse, douleur se mêlent les unes aux autres pour former un sentiment lugubre d'oppression qui s'abat sur ma poitrine, gênant ma respiration. Il faut que je trouve une sortie, et vite. Et si pour ça, je dois piétiner une saleté d'Akrilla paumée dans un tunnel, ce n'est que du bonus.

Je finis par toucher terre -c'est-à-dire le sol de l'entrée du tunnel, à peu près horizontal-, et n'hésite qu'une seconde avant de m'élancer vivement dans les profondeurs obscurcies à peine révélées par la faible lumière émise depuis mon bras. Je tâche d'ignorer la peur qui fait de plus en plus entendre sa voix dans mon esprit. Ce n'est que du noir, Silmeï, rien d'autre qu'une Akrilla sans nom ne se cache devant toi. Les secondes d'une marche angoissée s'égrènent. Les échos de ma respiration irrégulière se font sinistres. Malgré mon animosité à l'égard de l'Akrilla, j'ai hâte de n'être plus seul.

Subitement, j'aperçois droit devant moi une vive clarté. Je suis immédiatement envahi d'une onde de soulagement, et mes jambes accélèrent d'elles-mêmes pour rejoindre le plus rapidement possible la lumière salvatrice. Aurore a à peine le temps de me faire remarquer que je partage mon héliotropisme avec bon nombre d'insectes car je distingue déjà la silhouette de l'Akrilla à côté des sources de lumière (des lucioles, d'après Aurore), qui semblent virevolter joyeusement, et me stoppe net dans ma course. J'entends alors sa voix s'élever, demandant à quelqu'un son nom. Intrigué, je me rapproche de quelques pas, mais j'ai beau scruter le tunnel devant moi, je ne vois absolument personne. Ressentant à nouveau une vive poussée de colère (non mais c'est vrai, pourquoi faut-il que je sois cloîtré sous terre avec la timbrée du coin?), je me remets vivement en marche tout en l'apostrophant violemment:

« A qui parlez-vous, espèce de cinglée?! Ôtez-vous de mon chemin, je veux sortir d'ici! » ajouté-je en la bousculant pour lui passer devant. Ce faisant, il se trouve que mon pied bute malencontreusement contre quelque chose par terre, et sitôt ma glorieuse réplique lancée, je me retrouve à mordre la poussière. Nom d'un bouloum, pourquoi ce genre d'événements se produisent-ils à répétition?
(J'aurais bien une théorie là-dessus, mais elle remet en cause tes capacités mentales.)
(C'était une question rhétorique. Chut.)

Je relève la tête en grommelant et jurant contre mon sort, tandis que mon pied est toujours en contact avec la surface froide et lisse de l'obstacle responsable de ma chute. Mon regard, qui pourtant cherchait simplement à balayer la pénombre, bute alors sur une silhouette grisâtre et éthérée qu'on dirait constituée d'une brise et de poussière, effrayante dans la clarté étrange dispensée par les lucioles. Elle flotte juste devant moi, et j'en suis à distinguer une esquisse de visage goguenard perché en haut de cette ombre quand j'entends une voix profonde déclarer:

« C'EST A MOI QU'ELLE S'ADRESSE, PAUVRE POMME. »

Toujours allongé par terre, proprement figé par le prodige et avouons-le, n'en menant pas vraiment large, je bégaie en retour:
« Vous...vous, qui? 
-MOI.
-Et... vous êtes quoi, « moi »?
-PAS TOI, MOI.
-C'est bien ce que je dis, vous.
-VOUS QUOI?
-Vous êtes quoi?! J'en sais rien, moi!
-PAS TOI, MOI, J'AI DIT!
-Non mais c'est pas vrai, vous êtes aussi timbré que l'autre folle derrière, là!
-ARO?
-Eh bien je vous souhaite bien du plaisir, bande de cinglés! »

Exaspéré, stressé, complètement décontenancé par ce dialogue surréaliste, je me relève vivement, et sans que je comprenne pourquoi, l'ombre disparaît. Allons bon, il ne manquait plus que je devienne taré, moi aussi. Je cligne plusieurs fois des yeux, en proie à l'abasourdissement le plus total, mais non, la silhouette de poussière ne réapparaît plus. Foutu tunnel! Je décide immédiatement d'oublier l'incident, tout comme ma chute (c'est tellement plus commode comme ça), et je me retourne vers l'Akrilla pour m'écrier:

« Le puits s'est écroulé, on ne peut plus sortir de l'autre côté! Alors restez ici tant que vous voulez à parler au vide, faire la fête avec des lucioles, et encenser Gaïa la Lumière, mais moi, je m'en vais! »

(Tu sais parler aux femmes, toi. Exactement ce qu'il fallait pour te la mettre à dos, ni plus, ni moins. Finement joué.)
(La ferme!)
(Qu'est-ce que je disais. L'efficacité même.) conclut-elle me lançant un pied-de-nez mental.

Avec un dernier grognement exaspéré, je tourne les talons et m'enfonce plus avant dans le tunnel, avec pour seul éclairage la clarté émise par la bague passée à mon bras et les lueurs mourantes des insectes dansants.

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