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 Sujet du message: Re: Le Castel Enulcard
MessagePosté: Mar 26 Juil 2016 20:38 
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La pièce devait être moins grande que ce que Yurlungur imaginait, puisqu'il ne lui fallut que quelques pas pour sentir, contre le mur, une autre porte et sa poignée. Elle n'avait - Phaïtos en soit loué ! - rencontré aucun obstacle susceptible de la faire ralentir sur le court trajet qu'elle avait parcouru à l'aveugle dans le noir, tandis que la porte refermée derrière elle, par prodige ou par magie, restait vaillamment scellée face aux attaques d'Armont, pourtant terriblement puissantes. Sans même appuyer dessus, le battant s'ouvrit sans résistance, dévoilant à ses yeux le miroir parfait du couloir de tantôt : mêmes fenêtres, même escalier au fond en face, mêmes portes sur les côtés. À la notable différence près qu'aucun monstre géant, constitué de chairs, d'os, de métal et de muscles, ne se trouvait là pour l'écrabouiller d'un seul doigt - et encore.

Yurlungur se précipita au-dehors de la pièce, refermant cependant aussi doucement que possible la porte derrière elle. Il fallait, au possible, faire croire à Armont qu'elle se trouvait encore à l'intérieur, afin de gagner du temps : temps qui lui serait précieux afin de trouver une cachette, du feu, ou encore - sait-on jamais ! - une relique. Malgré le danger accablant qui se cachait derrière les trop frêles battants, elle s'arrêta quelques instants, ferma les yeux et inspira profondément afin de se remettre les idées en place. Depuis combien de temps était-elle dans ce castel ? Depuis combien de temps luttait-elle et fuyait-elle alternativement devant Armont ? Un quart d'heure, une demi-heure, une heure peut-être - le temps fuyait comme le ferait la vie si l'autre colosse l'attrapait.

Cette simple considération suffit à la remotiver pour repartir. Il n'y avait pas de temps à perdre et la porte allait bientôt craquer, si elle ne l'avait déjà fait. Yurlungur ne pouvait qu'espérer qu'Armont n'y voie pas plus d'elle à l'intérieur de la pièce, mais rien ne le lui assurait, bien que le spectre et peut-être une autre présence lui fût amicale par ici. Une pensée lui traversa alors l'esprit, à la fois terrifiante et tout à fait ppossible : et si le spectre, au lieu de lui être amicale à elle, était hostile à Armont, ainsi qu'à la vieille femme ? S'il souhaitait simplement les voir disparaître - en utilisant Yurlungur, venue de son plein gré dans le castel - afin de s'imposer en maître des lieux à son tour ? Il n'y aurait alors plus qu'à espérer que sa sympathie restât, même après que Yurlungur ne lui sera plus utile...

(Réveille-toi, ma vieille ! Quoi qu'il en soit, en ce moment, c'est Armont qui veut te tuer et le spectre qui veut te protéger !)

Elle secoua la tête et, les sourcils froncés en signe de détermination, elle s'élança dans le couloir, examinant les portes et essayant de se remémorer d'un endroit où elle était passée où elle pourrait faire du feu, ou d'un endroit où elle pourrait se cacher, quoique cette seconde option lui parût bien moins fiable que la première. Soudain, par mesure de précaution, elle s'arrêta à nouveau et ferma les yeux pour se concentrer.

(Papillon !)

C'était un ordre, d'un ton aussi impératif que possible. La Faera était restée dans les alentours, puisqu'elle ne risquait de toute façon pas grand-chose, bien qu'apparemment un brin effrayée par la forte teneur en magie du lieu. Pendant un temps infime qui lui parut être une éternité, rien ne répondit à la petite fille, puis un soupir émergea, comme ressortant des limbes de son esprit, aussi timide et apeuré qu'une véritable petite fille.

(Oui ?)
(Je veux que tu retournes dans la pièce, dans le noir, et que tu m'informes en temps réel de l'avancée d'Armont, bien sûr en restant invisible. Compris ? Ça, c'est la tâche numéro un,) indiqua-t-elle sans laisser le temps à la fée bleue de répondre.
(Tu m'as dit que tu pouvais influencer les gens, n'est-ce pas, en les incitant à faire telle ou telle chose ? Bien : tu vas essayer... non, tu vas convaincre Armont que je suis à l'intérieur, sans qu'il s'en rende compte. Il faut qu'il ait l'impression que j'y suis restée, d'acc ? Tu es un ange, mais ne te fais pas mal non plus.)

Elle avait fini avec cette touche de gentillesse sans vraiment y prêter garde. Avant la rencontre de la Faera, les discussions mentales n'étaient qu'intimes, uniquement dans un cercle privé auquel on pouvait accorder une confiance aveugle. C'était tout naturellement que Papillon avait bénéficié, en très peu de temps, de la même considération, si bien que Yurlungur en venait à oublier l'invincibilité des Faeras, tellement la chose lui paraissait encore inconcevable, tandis que ses propres blessures, bleus et pour le moment uniquement légers saignements dus à diverses coupures infimes peinaient à être entièrement atténuées sous l'effet de l'adrénaline qui coulait à flot dans son sang, véritable alcool pour tous ses nerfs en plein milieu d'une fête endiablée dont la fin était encore incertaine.

(C'est que...)
(Quoi ?)

Yurlungur était véritablement à bout de nerfs, pour avoir répondu aussi brusquement à une simple précision, aussi agressive que Papillon était apeuré, faces jumelles d'une même pièce.

(Je ne sais pas si ça va marcher... Je n'ai jamais réussi que sur des êtres dotés d'un minimum d'intelligence, ce me semble, or ici... sans vouloir vexer le... la... chose... enfin, Armont, quoi...)

La fillette aurait pu sourire si la situation n'était aussi grave.

(Eh bien, essaie tout de même, sinon fais un peu de bruit dans un coin, attire-le loin de moi, ou encore, euh... mais tiens-moi au courant dans tous les cas ! S'il te plaît, Papillon...)

Elle retint son souffle quelques instants, puis crut percevoir quelque chose. Était-ce soudain la sensation que la Faera s'écartait ? Elle rouvrit les yeux, ne vit rien, se tourna vers la porte en face de laquelle elle s'était arrêtée, constatant du même coup qu'il s'agissait de la troisième depuis le bout du couloir d'où elle venait, sur les quatre alignées le long du mur, et saisit fermement la poignée pour essayer de l'abaisser. Son choix n'avait été que le fruit du pur hasard, aussi n'y avait-il aucune façon pour Armont d'essayer de la retrouver par un raisonnement logique - si jamais il en était capable. Mais, par expérience, après diverses parties de cache-cache, que ce fût avec de simples enfants ou des miliciens en colère, il lui semblait que la meilleure façon de s'enfuir était de choisir son itinéraire au hasard. Avec l'hypothèse, bien sûr, qu'il pouvait y avoir du hasard sur cette terre...

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 Sujet du message: Re: Le Castel Enulcard
MessagePosté: Ven 29 Juil 2016 13:22 
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Même Papillon ne pouvait rien voir dans la pièce sombre, mais elle pouvait sentir la présence d'Armont dans la pièce. Elle n'avait aucun moyen de savoir si la suggestion avait fonctionné, mais toujours était-il qu'Armont resta dans la pièce, faisant un bruit phénoménale en la parcourant.

Yurlungur, elle, pénétra dans une pièce sombre mais pourvu d'une certaine visibilité comparé à la précédente. Il y avait une couchette simple à l'allure particulièrement inconfortable dans le coin droit face à la porte, un seau en bois dans le coin gauche et... rien d'autre.

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 Sujet du message: Re: Le Castel Enulcard
MessagePosté: Ven 29 Juil 2016 19:15 
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La poignée s'abaissa, la porte s'ouvrit, Yurlungur retint son souffle. Mais il n'y avait pas de quoi. La pièce était modeste, presque vide, à l'exception de ce lit rustique et de ce seau vide. Si seulement il avait contenu, voyons, de l'huile, ou une quelconque substance inflammable ! Actuellement, c'était du feu qu'il lui fallait, et rien d'autre... Elle grommela mais, heureusement pour elle, Papillon l'informa qu'Armont était toujours dans la pièce sombre. En revanche, son aide risquait d'être minime, et pour cause : la Faera n'y voyait pas plus qu'elle à l'intérieur.

(Je vais quitter le couloir,) l'informa Yurlungur. (Lorsqu'il sortira de la pièce, n'oublie pas d'essayer de lui faire vérifier chacune des pièces sur le côté, avec ton pouvoir, d'acc ? Mais préviens-moi, surtout, de chacun de ses agissements ! Dès qu'il sera sorti !)

Sans attendre de réponse de la part de Papillon, la petite fille ressortit, referma la porte, gardant cependant la main sur la poignée à cause d'une réflexion importune. Importune, mais peut-être utile : elle rouvrit finalement la porte, s'approcha précipitamment de la couchette pour saisir le tissu du drap, le tirer violemment et s'aider de sa dague pour le déchirer, si bien qu'elle se retrouva avec un pan de tissu froissé entre les mains, qu'elle roula en boule et fourra dans sa poche. Ainsi, une grande partie ressortait et elle pourrait le saisir rapidement. Certes, ce n'était pas grand-chose, mais une chose aussi simple que du tissu pouvait tout à fait servir à alimenter un feu - si jamais elle trouvait de quoi en faire.

Aussitôt cela fait, elle ressortit et referma la porte, ne jetant qu'un seul regard vers la porte à double battants au fond du couloir avant de se hâter de se diriger vers l'escalier à l'autre bout, espérant simplement qu'Armont resterait bloqué encore longtemps à cet étage. Plus elle aurait de temps pour trouver du feu, mieux ce serait... Mais il était bien trop imprudent de rester encore plus longtemps dans le couloir ou les environs. Il suffisait qu'il passe la porte, prenant Papillon de court, pour qu'elle perde tout avantage : alors que si elle descendait maintenant et fouillait au premier étage, la Faera pourrait véritablement l'informer des agissements du géant en temps réel dès que celui-ci aurait quitté les ténèbres.

Il ne lui fallut que quelques instants pour redescendre les marches, les sautant imprudemment de deux en deux. Mais la hantise d'être rattrapée, l'angoisse permanente qui s'était installée, couplée à l'excitation immense qu'elle ressentait, cette palpitation, cette sensation intense qu'on avait lorsqu'on vivait véritablement, et enfin la volonté ardente de sauver sa peau : tout cela contribuait à la rendre plus vive, plus agile, plus instinctive. À moins que ce ne fussent que les entraînements suivis auprès de Liniel qui portaient leurs fruits ? Cela n'avait guère d'importance, après tout.

Elle arriva ainsi, la respiration saccadée sans être haletante, dans la seule pièce du premier étage qu'elle avait eu l'occasion de visiter, là où elle avait vu Armont pour la première fois, la où le spectre avait tenté de l'effrayer, aussi. Aurait-elle dû fuir ? Elle secoua la tête. Non, évidemment que non. Le Gentâme de Phaïtos savait qu'elle cherchait les reliques d'Aethalin, or son Dieu aurait été extrêmement déçu si elle fuyait devant le danger... Se retournant brièvement, elle constata être redescendue par l'autre des deux escaliers, celui qu'elle n'avait pas emprunté à l'aller. Mais maintenant, où aller ? Le corridor à sa gauche, si elle se souvenait bien, était celui d'où Armont était venu. S'y réfugier pouvait être intéressant, puisque ce serait sans doute le dernier endroit où il penserait à aller, mais il était en revanche fort improbable qu'elle y trouve de quoi faire du feu si son adversaire en avait réellement peur. Donc si elle y allait, elle se condamnait plus ou moins à se retrouver finalement bloquée et acculée une fois que le monstre aura fouillé partout autour...

Quant au couloir à sa droite, c'était celui d'où le sablier était venu, où l'influence du spectre était sans doute la plus faible... Peut-être là où elle trouverait du feu, mais elle n'avait pas l'audace de s'y rendre, préférant croire qu'il s'agissait d'audace et non de courage. Oui, il était possible que la vieille femme use du feu pour soumettre Armont à sa volonté, mais il était également possible qu'elle la tue elle-même là-dedans... L'usage de la magie – contre elle-même – l'horripilait au plus au point et la perspective de se faire vaincre par négligence des pouvoirs mystiques d'un adversaire n'était pas de son niveau. Enfin, redescendre en face n'était guère mieux. Elle ne trouverait jamais de relique par là-bas et si Armont descendait, il lui bloquerait toute issue. Autrement dit, aucune des solutions possibles ne lui convenait... Une lumière s'alluma dans l'esprit de la petite fille, ses yeux s'arrondissant alors qu'elle se rendait compte de la simplicité de la solution.

Elle se tourna vers le second escalier, celui qu'elle avait déjà emprunté une fois pour monter à l'étage, juste à droite. Souriant presque de sa malice, elle gravit presque lentement les escaliers, s'arrêtant simplement à mi-chemin pour fermer les yeux et se concentrer.

(Papillon ? Tu m'entends ? Peux-tu me dire quand Armont sortira de la pièce ?)

Elle n'allait tout de même pas s'aventurer à l'étage, avec la possibilité que le géant sorte par la même porte qu'à l'aller, sans confirmation de la Faera devenue son espionne attitrée. Mais dès que ce serait fait, elle monterait l'escalier et chercherait là-haut... d'autant plus que le spectre y semblait bien plus influent, que ce fût dans la salle de torture ou dans la salle noire. Il suffisait d'attendre, malgré la crispation constante de ses muscles et l'éréthisme de ses nerfs. Tout son corps bouillait d'une rage et d'une nervosité profonde, elle-même jubilant presque de cet état d'exaltation où elle était arrivée. La possibilité de perdre sa vie entre les mains d'Armont était lointaine, seule restait la passion de la fuite et l'adrénaline du combat silencieux qui s'engageait. Une partie de cache-cache ! Qu'y avait-il de plus amusant pour une fillette comme elle, surtout au vu de ce qui était mis en jeu ! Phaïtos recevrait une âme ou les prières de remerciement d'une fidèle comblée, ce soir...

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 Sujet du message: Re: Le Castel Enulcard
MessagePosté: Ven 26 Aoû 2016 14:15 
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Dans la pièce noire, Papillon pouvait entendre Armont faire les cent pas tout autour de la salle, en poussant des grognements mécontents.

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 Sujet du message: Re: Le Castel Enulcard
MessagePosté: Sam 27 Aoû 2016 15:57 
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La réponse de Papillon, tandis que Yurlungur attendait tendue, à mi-chemin de l'escalier, ne se fit pas attendre. Il l'informa rapidement qu'Armont était encore dans la salle noire, rendant l'exploration poussée du deuxième étage dangereuse, néanmoins il ne semblait pas vouloir en sortir dans l'immédiat, trop occupé à fulminer contre la fuite innoportune de sa proie, sans doute. Quelques hypothèses germèrent dans la tête de la petite fille : il était peut-être sous l'influence de Papillon, grâce au pouvoir extraordinaire qu'il lui avait révélé posséder, ou, par une obscure raison, convaincu que la fillette était encore à l'intérieur - le spectre s'en était peut-être mêlé ? Toujours est-il que Yurlungur remettait alors en cause la remontée au même étage que la brute géante. Certes, il était peu probable qu'il sorte par la même porte, mais ce n'était pas impossible... D'autant que, tant qu'à faire, autant fouiller un peu au premier en profitant du fait qu'il ne s'y trouvait pas.

(Papillon, tu es extraordinaire,) commenta-t-elle enfin. (Je t'en prie, continue comme ça à m'informer de tous les mouvements d'Armont. Je vais au premier, dans l'aile gauche,) choisit-elle au hasard, (donc celle d'où il ne provient pas. Je reste toujours ouverte à tout ce que tu pourras me dire ! Si tu y arrives, essaie de le garder le plus longtemps possible là-haut puis de l'envoyer dans l'aile droite, ou au rez-de-chaussée... loin de moi en tout cas !)

En descendant les marches, elle ne cessait de glorifier la Faera, sans se douter que cette dernière pouvait certainement sonder son esprit même lorsqu'elle ne lui adressait pas la parole directement. Avoir un indicateur intangible et immortel était quelque chose d'extraordinaire, digne d'un conte de fées, mais en beaucoup mieux : là où les fées étaient généralement de petites pleurnichardes qui laissaient les héros - ou les héroïnes - se débrouiller seuls - ou seules - comme des grands - ou grandes -, du moins selon Yurlungur, Papillon, quant à lui, prenait part active au dénouement de l'intrigue magnifiquement merveilleuse de la vie de sa “maîtresse”, quoique le mot “amie” ait été bien plus juste... du moins se flattait-elle ainsi, prétendant à une destinée épique, à condition qu'un certain Armont ne la tue pas avant. Enfin, ultime qualité de la Faera, elle était un compagnon : le compagnon le plus fidèle, le plus loyal, et surtout le plus proche qu'on puisse avoir. Si bien que le cercle restreint cousu entre Yurlungur et l'Autre, ayant empêché de nombreuses amitiés de se former au préalable, bénéficiait désormais d'une extension. Trois, n'était-ce pas un nombre idéal ? Cela la dispensait d'être attachée à d'autres personnes, donc vulnérable. Il y avait bien quelques exceptions, mais elle ne serait jamais aussi proche que cela de Calua, de Liniel, ou même de sa propre mère, malgré tout l'amour qu'elle pouvait leur porter.

C'était donc emplie de ces bons sentiments envers sa Faera que la gamine des rues de Dahràm atteint la pièce du premier étage, se tournant donc vers l'aile à sa droite, néanmoins légèrement crispée à l'idée de revoir le sablier ou une émanation équivalente de celle qu'elle appelait déjà la vieille femme émerger de l'ombre. Lentement, alerte aussi bien aux signaux physiques comme mentaux qui pourraient lui parvenir, elle s'avança en essayant de se persuader qu'elle était plus prudente que couarde, et qu'il s'agissait d'une qualité plus importante que la témérité, sans se rendre compte que, effectivement, l'Autre avait soudainement laissé sa place, le danger maintenant suffisamment écarté - en théorie.

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 Sujet du message: Re: Le Castel Enulcard
MessagePosté: Jeu 1 Sep 2016 19:41 
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[HJ : C'est pas dans l'aile gauche qu'il était le sablier hein, j'ai dit qu'il était à TA gauche, contre la balustrade, entre l'escalier gauche et le droit, parce que tu sortais des escaliers de droite]

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En entrant dans l'aile gauche, à sa droite, Yurlungur pouvait voir un long couloir s'étirant sur plusieurs mètres et dont le bout, plongé dans la pénombre, lui était complètement invisible. Sur les murs, de pierre brune, on pouvait apercevoir ce qui ressemblait étrangement à des éclats de sang séché, et le sol semblait encore coller d'une substance gluante sous les pieds de la gamine. Soudain, un son se fit entendre. Ou plutôt une voix, gutturale et immonde : c'était la même qui était survenue dans la pièce sombre, un peu plus tôt.

« Je vais tenter d'ouvrir la porte en bas. Fuis, » conseillait-elle.

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 Sujet du message: Re: Le Castel Enulcard
MessagePosté: Dim 4 Sep 2016 15:42 
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Le couloir s'étendait devant la petite fille qui, malgré ses yeux plissés, ne parvenait pas à percer l'obscurité régnant au bout, obscurité ressemblant étrangement en ce point à la salle à l'étage où devait toujours se trouver Armont. Elle n'y avançait, de ce fait, que pas à pas, souhaitant conserver la possibilité de prendre l'un des murs comme point de repère tactile en le tâtonnant de la main comme elle l'avait fait tout à l'heure, avant de remarquer quelques tâches rougeâtres qui s'étalaient sur les murs bruns. Haussant un sourcil, elle fit un pas pour se rapprocher avant de sentir à ses pieds mêmes un liquide visqueux la ralentir tandis qu'elle reconnaissait distinctement, au mur, la couleur et la texture du sang séché.

Si elle aurait cru à du sang en cours de coagulation, il était néanmoins étrange que, sur la cloison, il soit devenu complètement sec tandis qu'il soit resté liquide au sol, acquérant simplement une certaine viscosité - une viscosité certaine. Si bien qu'elle s'accroupit doucement, venant tendre un doigt jusqu'à ladite substance afin de l'examiner de plus près : si encore il ne s'agissait “que” de sang, c'était pour elle moins inquiétant qu'un liquide inconnu. Mais avant qu'elle eût pu atteindre son but, la voix retentit de nouveau, la faisant se redresser brusquement, bien qu'il ne s'agît que de son allié invisible dans le château hanté : toutefois elle ne put s'empêcher de frémir imperceptiblement en entendant ce ton, cette sonorité à la fois gutturale et comportant quelque chose qui dérangeait malgré elle Yurlungur. À moins que...

À moins que ce ne furent simplement les paroles et les indications données, auxquelles elle ne savait réellement comment répondre convenablement, qui lui donnaient un sentiment d'insatisfaction. Elle était venue, elle avait défié Armont et la vieille femme, elle en était sortie vivante - pour le moment - : allait-elle fuir maintenant ? Pourtant, c'était malheureusement ce qu'aurait fait n'importe quelle autre personne un minimum sensée, et elle le savait pertinemment... Il lui était impossible de répondre abruptement qu'elle cherchait les reliques qu'on disait cachées ici, mais elle en aurait pour longtemps si elle devait fouiller toutes les pièces de la vaste demeure en cachant tant bien que mal ses intentions réelles. Elle essaya de bafouiller une excuse incompréhensible pour gagner du temps et rassembler toutes ses pensées, toutes ses idées, lorsque l'une d'elle émergea du lot, paraissant à la fois idiote, profondément naïve, mais aussi incroyablement simple à mettre en place et lui assurant, quand bien même elle n'allait pas jusqu'à la victoire totale, une bonne marge de manœuvre.

« Je... Je... finit-elle par annoncer distinctement, comme pour laisser montrer qu'elle était tout de même un peu effrayée par Armont.

Je ne sais pas quoi dire pour vous remercier, déclara-t-elle du ton le plus doux qu'elle pouvait avoir en essayant d'y mêler quelques fausses larmes qui ne voulaient cependant pas couler, je veux dire, pour ce que vous avez fait pour moi... mais je ne peux pas. »

Laissant un instant de flottement, juste le temps pour que l'esprit en comprenne les conséquences, elle continua :

« Si je sors, je n'aurai nulle part où aller - je vous l'ai déjà dit, non ? D'un côté, Dahràm, où l'on me refuse l'entrée, de l'autre, le domaine des Shaakts ; je suis coincée entre l'océan et les abruptes montagnes où je ne survivrais pas une journée. Devrais-je donc rester dans les environs, puisque c'est ma seule option ? Mais aux alentours, il n'y a que des bandes de brigands qui finiront bien par m'attraper. Alors, que je meure ici ou là-bas, c'est du pareil au même. Peu m'en chaut de me faire égorger par un monstre, si j'évite de me faire violer par un bandit ! »

Soudainement, sa voix prenait de l'assurance et, prise par sa propre tirade, elle avait levé un poing rageur en direction du fond du couloir où elle imaginait vaguement se trouver son interlocuteur.

« Je n'ai rien d'autre que de simples armes pour me défendre. J'avais cru, sans doute fort naïvement, que le seigneur de ce domaine accepterait de m'accueillir chez lui... On m'avait parlé d'un certain Enulcard, mais il semblerait que je me sois trompée. Et alors, vous dirai-je ! Ici, au moins, je ne serai dérangée que par Armont, non ? Ici, je connais précisément qui est mon ennemi. Je ne vais pas tomber sur un péril nouveau au détour d'un chemin ou au coin d'une ruelle. »

Mais après tout cela, l'essentiel, ce qu'elle souhaitait mettre en valeur, n'était pas suffisamment bien ressorti à son goût. Aussi rajouta-t-elle simplement :

« Je vais donc rester ici parce que... parce que je n'ai rien pour me défendre contre les grandes personnes dehors. »

N'était-ce pas adorable, cette diction, cette ingénuité qu'elle mettait dans son choix de vocabulaire ? Et puis, quoi de mieux, s'il souhaitait vraiment se débarrasser d'elle, que de lui donner l'une des reliques d'Aethalin, puisque celui-ci semblait être mort d'une part, et puisque des reliques, ça servait bien à protéger ! Certes, il fallait reconnaître que l'idée, d'elle-même, était simplette. Mais après quelques secondes qui s'égrenaient tranquillement, Yurlungur laissant un peu de réflexion à son allié invisible, elle rajouta :

« Et de toute façon, il me suffirait de trouver du feu. Je ne sais pas, moi, il doit bien y avoir quelque part une cheminée, une torche, ou quelque chose comme ça ! Et alors, je pourrai vivre ici sans rien craindre de personne ! »

Cette fois, c'en était presque cruel envers le spectre, si du moins c'était bien lui. La voix l'avait avertie qu'Armont avait peur du feu, or elle l'utilisait pour refuser de partir. Enfin, après avoir dit tout ce qu'elle avait à dire, elle s'accroupit à nouveau pour prendre sur son doigt un peu de cette substance collante pour l'approcher de ses yeux et l'examiner. Avec un peu de chance, il s'agirait d'une de ces matières étranges, facilement inflammables, qu'on étalait sur les torches afin de les faire brûler plus longtemps. Alors, du sang, ou autre chose ?

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Dernière édition par Yurlungur le Mer 21 Sep 2016 21:58, édité 1 fois.

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 Sujet du message: Re: Le Castel Enulcard
MessagePosté: Lun 19 Sep 2016 18:11 
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La tirade de la gamine achevée, la voix gutturale se fit de nouveau entendre. Yurlungur pouvait également voir d'imperceptibles mouvements dans la pénombre. Mais même ses yeux aiguisés et habitués à la pénombre ne semblaient pouvoir identifier la nature de la forme face à elle. Tout juste pouvait-elle discerner une silhouette humanoïde, un peu plus grande qu'elle.

« C'est Enulcard, » répondit la voix. « C'est pour cela que tu dois fuir. Je ne pourrai pas te cacher bien plus longtemps de ses yeux. Les bandits te paraîtront bien plus doux que lui s'il te met la main dessus. Alors FUIS. »

La voix parlait rapidement, comme apeurée par ses propres paroles. Qui pouvait donc bien tant effrayer un spectre ?

La substance qu'observa Yurlungur était poisseuse et sentait le gras de cochon. Et en avait la couleur.

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 Sujet du message: Re: Le Castel Enulcard
MessagePosté: Mer 21 Sep 2016 21:58 
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Au sol, le liquide avait la texture, l'odeur et la couleur du gras de cochon, plutôt que du sang, montrant une erreur de jugement de la fillette. Mais il n'y avait pas de cochon par ici et de nombreuses interrogations émergeaient : d'où venait-ce ? Pourquoi du gras alors que du sang aurait été bien plus habituel dans un lieu où l'on cherche à effrayer ? Était-ce seulement du cochon ? Ne semblait-il pas étrange de laisser du gras, facilement inflammable dans les piètres souvenirs de la fillette, dans un lieu où le principal gardien était un géant ayant peur du feu ?

Mais la petite fille n'eut pas le temps d'y réfléchir davantage puisqu'une forme indistincte se mit à bouger dans l'ombre devant elle, la faisant instinctivement porter la main à sa dague. Aucune lumière ne semblait pouvoir percer cette zone mystérieuse, semblable à la salle à l'étage où semblait toujours se trouver Armont et elle tentait vainement de plisser les yeux, comme si cela pouvait l'aider d'une quelconque façon. Néanmoins, quelque chose avait bougé, elle en était certaine – elle aurait même juré qu'il s'agissait de quelqu'un au vu de la forme vaguement humanoïde entraperçue. Était-ce son protecteur, celui qui voulait sans relâche la conduire vers la sortie en dépit de toutes les réticences qu'elle avait formulées ? Était-ce autre chose qui l'épiait depuis l'ombre, prêt à lui fondre dessus ou à avertir ses ennemis dans la maison de sa position exacte ? Soupçonner son imagination dans un tel instant ne pouvait la conduire qu'à la mort : si ses sens mêmes se faisaient défaillants, elle ne tiendrait de toute façon guère et l'unique solution restait de rester à l'écoute de tous les messages que lui envoyaient son corps.

Soudain cependant, la voix reprit, presque tremblante, ou du moins comme inquiète - par ses propres paroles ? - paroles qu'elle avait lancées vivement, trop pour que ce soit naturel. En avait-ce seulement l'intention ? Et, après ces quelques mots, Yurlungur voyait les différentes théories qu'elle avait pu échafauder s'effondrer : non, Enulcard n'était pas mort, non, Armont n'était pas le plus dangereux des habitants du manoir, non, ses propres justifications pour rester ici n'étaient pas suffisantes. Elle plissa derechef les yeux, prise de court par toutes ces informations, le spectre lui révélant une fois de plus qu'il était indispensable à sa survie du fait, sans doute, d'une forme de Magie qu'il usait pour la protéger. Si c'était bel et bien un spectre comme ceux des quelques légendes qu'elle avait entendues, il devait pourtant être immatériel et insensible à toutes les formes d'actions qu'on pourrait avoir sur lui, ce qui rendait son affolement illogique ; de plus les spectres étaient réputés pour leurs mauvaises intentions. Le Grand Prêtre de Phaïtos, à Dahràm, ne lui avait-il pas également expliqué qu'ils étaient de surcroît incapables d'agir directement sur le monde physique malgré leur présence intangible dans celui-ci ? Les manifestations physiques, les messages qu'il lui adressait tout comme la tempête de meubles dont elle ne se souvenait que trop bien ne conciliaient pas avec l'image qu'elle avait de lui : pourtant il n'y avait pas d'autres théorie plus solide.

Toutefois, le plus important était surtout la présence d'Enulcard. Qu'un si vieil être vive encore, alors qu'on disait la maisonnée abandonnée depuis des lustres, ne pouvait signifier que son inhumanité. Un Elfe, peut-être, eux qui étaient connus pour leur âge démesuré ? S'il était réellement aussi cruel que le “spectre” le prétendait, il faudrait opter pour un Elfe noir - mais toujours est-il qu'il devait posséder toutes ses reliques proches de lui, si ce n'était sur lui, ce qui ne pouvait satisfaire Yurlungur. Profaner une tombe n'était pas fameux, mais c'était quelque chose de possible, d'utile à son sens et presque dépourvu de tout danger, puisqu'il ne s'agissait que de récupérer une relique ; tandis que la prendre sur quelqu'un était plus... périlleux. (Différent, dira-t-on...)

Enulcard, dans tous les cas, semblait être un Mage puissant, pour qu'il puisse à ce point effrayer une créature immatérielle, pour qu'il enferme dans son castel une cohorte de monstres de tous genres et pour que ses “yeux” puissent voir tout dans son propre château, a priori, le seul recours des explorateurs venus le déranger étant de compter sur le soutien d'un spectre compatissant.

À nouveau, un conflit émergea entre le cœur et la raison de la petite fille. Que dire d'un enfant qui, malgré ses idées parfois brillantes, ne pouvait s'empêcher de voler à la recherche d'un trésor perdu, d'une nouvelle aventure ou d'un affrontement épique ? Fuir, comme le conseillait le spectre, était l'acte pour lequel tout le bon sens penchait naturellement, ainsi qu'une partie de son cœur - il aurait été absurde d'affirmer qu'elle n'était pas effrayée par Armont, par tous ces événements étranges et obscurs - mais elle savait, elle savait qu'abandonner dès à présent serait contraire à ses opinions, à ses désirs, à ses choix : à elle-même. Et quelle excitation à parcourir ces couloirs surannés, ces pièces délabrées : quelle ardeur surnaturelle prenait un malin plaisir à la saisir dès lors que sa vie était en danger ! Les deux parties s'opposaient, aussi opposées sur le fond que sur la forme.

(Quoi ! Tu fuirais devant l'ennemi !)
(Mais il est trop fort...)
(N'a-t-on pas déjà affronté des adversaires plus puissants ?)
(Mais je ne peux rien contre lui...)
(N'a-t-on pas déjà affronté des opposants plus coriaces ?)
(Mais je risque de mourir !)
(N'a-t-on pas déjà maintes fois failli mourir ? Et regarde où l'on en est ! Yurlungur est vivante, elle vit, elle vit !)

Ce dialogue intérieur, pendant lequel quelques précieuses secondes s'écoulaient, elle ne put s'en sortir que grâce à un souvenir : au souvenir d'un objet. Ce n'était pas un petit machin anodin comme on en ramassait tous les jours sur le sol, comme les cailloux que les gamins émerveillés aiment à collectionner, non : elle l'avait trouvé sur le corps de la nécromancienne qu'elle avait affrontée quelques jours plus tôt, tel un butin de guerre, sous la forme d'une petite fiole semblable à celles que possédaient les Mages et qui leur permettaient, si elle avait bien compris, à déclencher leurs pouvoirs aussi ensorcelants que redoutables. Cette petite fiole, elle l'avait observée, jaugée, examinée sous tous les angles possibles et imaginables, presque fascinée par le mouvement perpétuel de la noirceur mise en fiole.
Oui, sans aucun doute, il s'agissait d'un fluide d'obscurité.

Elle, qu'en aurait-elle fait ? L'ingérer aurait été dangereux - quoique fort exaltant - et il était certain qu'elle aurait pu l'user d'une bien meilleure façon plus tard, quand bien même ce n'eût été que la vendre dans une boutique de Dahràm pour en tirer quelques yus. Mais lorsqu'elle la tira de sa sacoche, elle ne put s'empêcher de lui sourire presque déçue de s'en séparer, comme un enfant qui se sépare d'une breloque brillante avec laquelle il a pris l'habitude de jouer.

Mais pour cacher quelque chose à la vue de quelqu'un, quoi de mieux que de la Magie d'ombre ? Si c'était de la puissance qu'il manquait au spectre pour la cacher et la protéger, cette fiole permettrait peut-être (sans doute !) de l'aider un peu, de faire gagner du temps à la fillette pour trouver sa relique et, qui sait, renverserait éventuellement le rapport de forces entre le spectre et le seigneur des lieux, Aethalin.

Tendant la petite fiole devant elle, Yurlungur affirma d'une voix forte :

« Si vous faiblissez, prenez ceci. Vous en userez bien mieux que moi, sans doute. »

Ne sachant pas trop quoi faire et s'imaginant bien que la tenir simplement devant elle ne ferait rien, elle la déposa au sol et - vérifiant au passage qu'Armont n'était pas juste derrière elle -, elle recula de quelques pas pour laisser le spectre prendre possession du “fluide”, quelle que soit la manière qu'il allait employer.

« Mais... ajouta-t-elle. Si je comprends bien, vous souffrez également de la domination d'Aehalin sur ce castel, n'est-ce pas ? »

La question était rhétorique mais, en l'absence d'interlocuteur réellement visible devant elle, Yurlungur se dandina d'un pied sur l'autre, les deux mains croisées dans son dos, avant de reprendre quelques instants plus tard :

« Il me paraît dès lors difficile de m'enfuir en vous laissant seul à jamais ici. Si je trouve Enulcard et que je le vainc ou que je le convainc, il nous laissera peut-être repartir, n'est-ce pas ? Mais vous connaissez mieux ce manoir que moi, enchaîna-t-elle, dites-moi simplement comment préparer la rencontre et je le ferai. »

En prononçant ces derniers mots, elle avait fixé d'un air plus que déterminé le fond de l'obscurité pour confirmer qu'elle ne plaisantait pas.

« Je le ferai et vous serez libre. Malgré tout, je ne suis pas si cruche que ça, fit-elle avec un petit sourire, et je m'y connais un peu dans le culte de Phaïtos. Votre âme désire se rendre au Royaume du Dieu des morts, n'est-ce pas ? »

Une question à moitié rhétorique, à moitié de confirmation, Yurlungur s'arrêta, laissant le spectre méditer là-dessus et prendre possession de la fiole. Repensant au gras - de cochon ou d'autre chose - étendu à ses pieds, elle se baissa, sortit le bout de tissu qu'elle avait gardé dans une poche et, en essuyant un peu le sol, en récupéra dessus. Prenant garde à le replier de telle manière à laisser le gras à l'intérieur pour ne pas tâcher ses vêtements, elle le replaça dans sa poche. Elle n'avait certes pas de feu, mais elle avait désormais un composé hautement inflammable.

Il ne restait plus qu'une chose à vérifier, étant donné le mutisme étrange de la Faera espionne.

(Papillon, tu m'entends ? Où se trouve Armont maintenant ?)

...

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Dernière édition par Yurlungur le Mar 27 Sep 2016 20:45, édité 1 fois.

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 Sujet du message: Re: Le Castel Enulcard
MessagePosté: Lun 26 Sep 2016 18:58 
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La faera pouvait encore entendre Armont qui dévalisait la pièce à la recherche de Yurlungur. Sans doute manquait-il d'intelligence pour s'apercevoir seul de l'absence de la gamine, et la voix hostile ne s'était toujours pas faite entendre de nouveau.

Face à Yurlungur, la voix amicale, elle, reprit la parole.

« Je suis libre, » expliqua-t-elle. « J'ai choisi de parcourir ces couloirs pour en effrayer les visiteurs. C'est le pacte que j'ai fait avec Enulcard. J'ai dix minutes pour faire fuir les visiteurs sans les blesser, ou bien il les exécute. Comme ça il n'est pas dérangé, mais personne ne meurt. Alors fuis. Si tu t'en vas, après lui avoir donné du fil à retordre, sûrement décidera-t-il que tu ne vaux pas la contrainte que tu lui imposes en restant. »

La silhouette se baissa devant Yurlungur, et ramassa la fiole de fluides.

« Merci, ça m'aidera à le contenir plus longtemps. Mais tu ne le vaincras jamais, c'est impossible. Maintenant fuis. Ses reliques n'en valent pas la peine. Elles ne valent pas la mort douloureuse que tu subiras. »

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 Sujet du message: Re: Le Castel Enulcard
MessagePosté: Mar 27 Sep 2016 20:45 
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Papillon répondit fort vite qu'Armont était trop occupé actuellement, toujours en train de dévaster la pièce sombre. Yurlungur, sans pouvoir s'en empêcher, hocha la tête en signe d'assentiment mais n'osa pas répondre mentalement car, déjà, la voix devant elle reprenait. Et ses révélations étaient tout à fait... hors du commun. Invraisemblables et pourtant criantes de vérité. Inouïes et pourtant d'une logique incontestable. À moins que ce ne fût qu'une ombre malsaine qui lui criait, au fin fond de son âme, que tout cela ne pouvait être vrai, puisque cela l'empêchait de trouver encore un fragile équilibre entre sa propre survie et ses désirs les plus fous mêlés à une avidité constante.

Alors comme ça, l'esprit n'était qu'un bon samaritain, restant ici afin de sauver des vies tout en permettant à Enulcard d'être tranquille. Dix minutes... Yurlungur ignorait depuis combien de temps exactement elle se trouvait dans le manoir, l'adrénaline jouant, mais elle supposait que ce temps de répit était déjà passé : n'était-ce pas la signification évidente de l'énorme sablier de tantôt ? Pourtant, la petite fille n'était toujours pas morte...

- Et cette voix de femme... C'était une manifestation d'Enulcard également, n'est-ce pas ? De même que le sablier...

Elle laissa flotter ces mots quelques instants, ne pouvant avouer à haute voix qu'elle allait quitter le manoir. Mais le spectre avait déjà découvert ses véritables objectifs, apparemment : n'avait-il pas mentionné les reliques d'Aethalin, alors qu'elle-même s'était efforcée de ne pas le faire ? Elle ne pouvait qu'être immobile, fixant la curieuse silhouette d'ombres et de nuit qui se mouvait légèrement devant elle, d'un air hésitant.

Soudain, quelque chose la frappa. La voix... Le sablier...

- Mais... La voix était celle d'une femme, justement. Aethalin Enulcard... C'est un homme, non ? Et pourquoi s'était-il énervé contre vous s'il a passé un pacte censé le laisser en paix ? Je pense que... Je pense simplement que ce n'est pas très logique qu'il ait voulu rester tranquille ici en vous... “utilisant”, disons, mais qu'il intervienne tout de même.

Elle s'arrêta un moment, mais il y avait autre chose qu'elle finit par saisir entre les pensées indistinctes qui voguaient dans son âme.

- Et Armont ! S'il me cherche de ses yeux, pourquoi envoyer Armont ? Après dix minutes, s'il décide de tuer le visiteur comme vous le dites, ne devrait-il pas au contraire venir l'achever lui-même ?

Il était évident qu'elle cherchait - sans doute vainement - à gagner du temps, justement. Enfin, ne venait-elle pas de lui donner un fluide obscur ? Cela en laissait un peu, précisément. Toutefois, elle sentait bien ses interventions plus faibles, moins accusatrices qu'auparavant. Il serait aisé pour le spectre d'y répondre et de continuer à la pousser vers la porte, aisé pour lui de ne lui donner aucune réponse susceptible de la pousser à rester.

Était-ce sa cervelle qui fumait à ainsi cogiter ou simplement l'impression d'un cul-de-sac ? Elle fouillait, mais aucune faille ne se présentait, aucun interstice dans lequel se glisser pour continuer, encore un peu, jusqu'aux reliques du grand Aethalin... Il n'y avait aucune solution viable. Viable... Mais le spectre reprenait.

Tout ce qu'il lui fallait, c'était un plan.

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Dernière édition par Yurlungur le Mar 4 Oct 2016 21:48, édité 1 fois.

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 Sujet du message: Re: Le Castel Enulcard
MessagePosté: Lun 3 Oct 2016 17:46 
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Le spectre parut agacé aux questions de Yurlungur.

« Je te dis que ces reliques n'en valent pas la peine ! »

Mais, après un léger silence, il consentit cependant à y répondre, désabusé.

« Ah, et puis à quoi bon, cours à ta perte si c'est ce que tu veux... Je suis lasse de vouloir sauver des gens qui préfèrent mourir par avidité. Cette voix c'est Enulcard. Sous sa nouvelle forme. Et il s'est énervé car je n'ai pas réussi à te faire fuir, et que tu viens donc le perturber dans son éternel sommeil. Armont est son instrument. Il n'a pas besoin de bouger car il ne te craint pas, il ne te croit pas capable de voler ses reliques. Et c'est ta chance de partir. »

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 Sujet du message: Re: Le Castel Enulcard
MessagePosté: Mar 4 Oct 2016 21:48 
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Un plan... Il lui fallait simplement un plan...

(Le problème est que tu cherches un plan viable,) avertit l'Autre.
(Comment ça ?) répondit Yurlungur, décontenancée.
(Il est évident que, à ce point-là, tu ne peux pas trouver de solution qui conforte à la fois ta position de chercheuse de reliques, surtout que le spectre a découvert tes intentions réelles, et de petite fille apeurée qui, de toute façon, ne marche guère. Un peu de folie n'a jamais tué personne...)

Sans donner d'autre indication, l'Autre se tut, laissant clairement entendre quelle était la marche à suivre selon elle.

(Tu as un plan ?) finit par demander Yurlungur.
(Évidemment que j'ai un plan ! Mais il ne va pas te plaire, si c'est ce que tu veux savoir.)
(Attention, vous deux,) intervint Papillon. (Le temps fuit entre vos mains...)
(Excellent !) reprit l'Autre. (Maintenant, tu dois faire un choix, Yuyu. Es-tu avec moi ou contre moi ?)

Soudain, le spectre répondit, souhaitant vraisemblablement convaincre la petite fille de quitter les lieux en coupant court à ses réflexions internes. Celle-ci, impassible, fixait l'ombre dans laquelle se logeait la voix, les sourcils légèrement rehaussés et les lèvres légèrement pincées tandis qu'elle réfléchissait à la dernière phrase du spectre, n'osant pas croire que la solution était aussi simple. « Je te dis que ces reliques n'en valent pas la peine ! » C'était pourtant limpide. Clair comme de l'eau de roche. Une solution se profilait sous ses yeux, amenée par l'esprit qui souhaitait l'écarter du manoir. Un sourire amusé se dessina sur ses traits juvéniles tandis qu'elle songeait à l'ironie de la situation.

(Que la raison se taise, pour que mon cœur parle libéré.)

Dans les profondeurs de son âme, l'Autre souriait.

La suite de la réponse du spectre semblait lasse. Sentait-il - ou plutôt elle apparemment - qu'elle n'avait aucune chance de faire fuir Yurlungur ? Avidité... Sans doute. Un “éternel sommeil” ? Levé du mauvais pied... Le sourire de la fillette s'élargit davantage, son expression paraissant désormais apaisée et détendue. Allons, un peu de courage pour ce bien faible cœur lorsqu'il est question de témérité, bien fort lorsqu'il est question de folie muette ! N'attisait-on pas son envie insatiable de breloques brillantes à lui répéter que des reliques étaient hors d'atteinte ? Ne la provoquait-on pas purement et simplement à lui asséner qu'il était impensable qu'elle arrive à les voler ? Il suffisait de cesser de croire que c'était impossible pour réussir, diantre ! Mais il fallait l'admettre : il y avait dans son être une forme de peur indéfinissable qu'elle peinait à contrôler totalement.

(Cap' ou pas cap' ?) provoqua l'Autre.

La fillette ne put s'empêcher de laisser échapper un petit rire nerveux. Fermant les yeux quelques instants, son sourire perdurant sur son doux visage, Yurlungur prit enfin la parole en les rouvrant soudainement, devenus taquins et rieurs.

« Ce que vous vous obstinez à ne pas comprendre, c'est ma vision de la vie, fit-elle à l'attention du spectre. »

Elle attendit quelques instants, fixant rêveuse un point dans l'infini des ténèbres.

« Vous n'avez aucune idée de ma vie, continua-t-elle enfin. Soit ! Je vis. Mais encore ? ajouta-t-elle en laissant échapper à nouveau un petit rire. J'ai tenté de vivre heureuse, on m'en a empêché. J'ai tenté de survivre, on a essayé de me tuer. J'ai tenté de m'amuser, on m'a effrayée. J'ai tenté de vivre... »

Elle s'arrêta quelques instants, un voile triste passant sur son visage avant que sa bonne humeur fébrile ne revienne dominer.

« Qu'ai-je donc encore qui soit à moi ? Je pourrais vous parler longtemps de tout ce que je suis, mais cela ne vous intéresserait guère, se coupa-t-elle elle-même.

Ma vie n'a que peu d'importance. Qu'est-ce qu'une vie ! Alors, les reliques n'en valent pas la peine ? Mais ne valent pas quoi ? Vous me direz : Enulcard va me torturer, il va me faire souffrir. Soit. J'ai déjà souffert et je souffrirai sûrement encore souvent. Qu'importe que la douleur soit courte ou longue ! Qu'importe... Du moment que je m'amuse, que je vis. Je finirai par mourir, mais c'est cela, l'accomplissement d'une vie, n'est-ce pas ? Bien mourir... Après avoir bien vécu... »

Était-ce une larme qui avait coulé sur sa joue ? Des accents de vérité transparaissait dans ce qu'elle disait, ce qu'elle ressentait elle-même. La délivrance de la mort... Elle ne pouvait simplement pas la faire elle-même, faute de force dans son trop faible cœur et d'opposition dans son âme déchirée.

« J'aimerais vous faire une confidence, reprit-elle après avoir délicatement essuyé la goutte, un éternel et tendre sourire subsistant malgré tout. »

Elle regarda à droite à gauche, comme pour vérifier que personne d'autre n'écoutait ce qui, en l'occasion, n'était que pur jeu.

« Depuis que je suis arrivée ici... Je crois bien que je m'amuse follement. Bien mieux ! Je me divertis... Je ne songe plus à rien. Je rentre... autre part. »

Un éclat de rire déchira l'ambiance lugubre du manoir.

« Vous me prendrez pour une folle, et vous aurez raison ! »

Elle repartit dans un rire aussi cristallin que dément.

« Mais je ne peux me résoudre à quitter ce lieu. J'aimerais... J'aimerais faire une proposition à Enulcard, s'il accepte de m'écouter. Vous seriez capable de laisser ma voix l'atteindre, n'est-ce pas ? »

Sans attendre la réponse du spectre, la petite fille s'éclaircit la voix et, un regard déterminé plongé sur une tâche au plafond, elle déclara d'une voix qu'elle voulut forte et puissante :

« Enfin, les murs ont des oreilles ! Eh, Monseigneur Aethalin Enulcard ! J'imagine que vous n'avez pas souvent l'occasion de voir des petites filles comme moi dans votre castel... Ça vous enjaille, au moins, de m'épier de là où vous êtes ?

Mais je ne suis pas là pour juger de vos méthodes de travail,
continua-t-elle en levant ses deux mains devant elle. Depuis tout ce temps, vous ne devez pas avoir beaucoup de distraction dans cette sinistre bâtisse... Si je parviens à vous en procurer, aurais-je l'insigne honneur de vous rencontrer ? »

Il ne restait plus qu'à attendre. Elle avait fait fi de tous les conseils du spectre, certes, mais il fallait espérer qu'il resterait de son côté par la suite, faute de quoi elle risquait fort de déjanter. Enfin, si tout s'était bien passé, Aethalin avait entendu... et il devrait répondre d'ici peu.

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Dernière édition par Yurlungur le Jeu 20 Oct 2016 19:00, édité 1 fois.

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 Sujet du message: Re: Le Castel Enulcard
MessagePosté: Jeu 20 Oct 2016 17:43 
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Un long silence accueillit les premières paroles de Yurlungur. Mais, avant qu'elle n'ait le temps de s'adresser à la vieille elfe, la voix gutturale capitula.

« Très bien... » fit-elle.

Lorsque la gamine s'adressa à Enulcard, le spectre fit en sorte que celui-ci (ou celle-ci) l'entende. Le discours terminé, un nouveau silence régna quelques secondes dans le couloir, jusqu'à ce que la voix de la vieille elfe ne se fasse finalement entendre.

« C'est une proposition intéressante que voilà, » admit-elle. « Je dois avouer ne pas m'être tant amusée depuis un long moment. Et bien soit, divertis-moi, et je te dirai comment me rejoindre. »

Mais il y avait un problème. Maintenant que le spectre ne bloquait plus l'accès au maître des lieux, Papillon pouvait sentir qu'Armont se dirigeait vers la sortie avec détermination.

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 Sujet du message: Re: Le Castel Enulcard
MessagePosté: Jeu 20 Oct 2016 18:59 
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Aux paroles de la petite fille, le spectre ne trouva rien à redire, si ce n'était un assentiment découragé. Oh, oui, Yurlungur était désolée de lui faire subir une telle épreuve, mais il fallait bien qu'elle y aille. Qu'avait-elle à perdre autre que sa vie ! Elle perdrait Calua, elle perdrait Liniel : mais aussi la rancune amenée par l'exil et toute l'humiliation rejetée sur sa vie. Qu'était la souffrance ! Qu'était la mort ! Elle rejoindrait Phaïtos dans un repos éternel - du moins se l'imaginait-elle ainsi, douce représentation d'un ailleurs agréable qu'elle était cependant incapable de rejoindre elle-même. Chiche ! Elle pouvait le faire, elle pouvait jouer la carte de la provocation face à Enulcard lui-même, essayer par la pique verbale d'atteindre ce qui était hors de portée physique. Et, tout en se rappelant ces raisons de rester, elle attendait anxieuse la réponse du maître, essayant tant bien que mal de se convaincre que, quoiqu'il arrive, elle était gagnante. Si elle mourrait ? Elle gagnait. Si elle rapportait les reliques d'Aethalin ? Elle gagnait. Il fallait simplement espérer qu'il n'y avait pas d'autre éventualité - ce qu'elle savait pertinemment être faux.

Enfin, la voix féminine répondit. On remarquait à son timbre que ce ne pouvait être un homme, ni tout à fait une femme - c'était une vieille femme, la gorge altérée par les éons passés à attendre dans cette lugubre bâtisse : toutefois, Yurlungur ne pouvait s'empêcher de ressentir un frisson viscéral parcourir ses entrailles tout au long de la prise de parole de ce qu'elle savait être Aethalin. Sûrement n'était-ce que psychologique, mais il fallait considérer cette vieille femme comme l'élément le plus dangereux de la maisonnée, il fallait s'en méfier comme l'on se méfie des rats lorsque la peste arrive, ou comme l'on redoute le pillage lorsque les Garzoks arrivent.

Le sourire de la petite fille ne s'élargit qu'intérieurement lorsque la voix désincarnée répondit par l'affirmative. Il fallait donc faire une diversion divertissante... Mais n'était-ce pas un compliment des plus flatteurs que lui adressait ce qui était, somme toute, un tueur invétéré et sans scrupule ? Il y avait donc bien chez lui une envie de briser le lourd silence qui entourait son existence, une envie de rompre ne serait-ce qu'une seule fois la monotonie latente des jours qui s'enfilaient. Curieux pour un Elfe ! Mais il ne fallait pas faire de commentaire à présent : Yurlungur s'inclina devant l'air du manoir en signe de reconnaissance.

« Je ne crois pas que je vous décevrai, ajouta-t-elle à mi-voix. »

Oh, ce n'était bien qu'une ultime boutade - quel enfant ne désirait pas avoir le dernier mot ? À plus forte raison une enfant, à plus forte raison cette gamine venue tout droit des rues de Dahràm. Et puis, il fallait bien se rassurer soi-même.

(Yuyu ! Yuyu ! Il arrive ! Armont, il arrive !)

L'air de la fillette, étrangement, se renfrogna légèrement.

(Le spectre ne va plus t'aider, je suppose,) continua l'Autre qu'on devinait étonnamment satisfaite malgré le danger immédiat qui les guettait. (Je pense qu'il serait temps de faire du feu, maintenant. Sors ta dague.)

Suivant les instructions de la petite voix dans sa tête, Yurlungur la dégaina rapidement, sortant de l'autre main le tissu qu'elle avait arraché dans la chambre de là-haut, encore imbibé de cette sorte de gras de cochon.

(Pose le tissu par terre, là : maintenant, la courte épée rouillée que tu as récupérée l'autre jour - grouille-toi ! Frotte-là contre ta dague et créé l'étincelle qui embrasera l'étoffe fragile de cette joyeuse mascarade !)

Yurlungur ne pouvait que respirer le plus doucement possible - c'est-à-dire comme un pachyderme asthmatique - tandis qu'elle écoutait inquiète les indications jubilatoires de l'Autre. La joie de cette dernière continuait à s'exprimer tandis que Papillon les pressait toutes deux : et Yurlungur frottait frénétiquement, il ne manquait bien plus que l'étincelle à leur petite fête.

(Et après, tu embrocheras le tissu salvateur sur l'épée pyromaque !)

Le feu d'espoir de la petite fille se rallumait doucement en entendant ses paroles, tandis que l'ardeur de ses désirs continuait de grandir entretenue par la rhétorique flamboyante de l'Autre.

Il ne manquait plus que le feu dans la cacophonie des voix qui se bousculaient dans cette tête, doucement rythmée par les pas pesants du colossal boucher.

...

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