Le voyage se poursuivit donc. L'équipage resta tout de même calme et Leyna pouvait dormir tranquille. En revanche, elle découvrait peu à peu les affres de la jalousie. Cela la laissait perplexe : elle aimait beaucoup Kassara, et était parfois outrée de la façon dont les sang-pourpres la reluquaient tandis qu'elle apportait de l'eau aux rameurs. En revanche, elle se sentait vexée de l'attention grandissante que lui portait Valgan. Il avait longtemps servi loin de son peuple et avait appris cette chose dont les hommes de la mer ignoraient l’existence : l'art de la séduction. La prêtresse en avait déjà fait l'expérience mais n'avait jamais vraiment réfléchi à l'attirance évidente du bosco.

Maintenant qu'il semblait l'oublier, sauf pour venir de temps à autre lui demander combien de temps elle comptait faire durer cette mascarade avec Galion. En revanche, il n'était jamais loin de Kassara, qui semblait trouver son humour et sa subtilité particulièrement agréables.

La prêtresse les ignorait, se concentrant sur ses prières et son tambourin. Saryon semblait toujours aussi vexé, et elle s'en fichait aussi. Elle doutait de pouvoir un jour lui pardonner, et regrettait même parfois de ne pas l'avoir jeté par-dessus-bord dès le début pour ne plus avoir à croiser son regard. Moura aurait su lui donner les récompenses appropriées dans la mort pour ses loyaux services. Hélas, aussi coupée des réalités qu'elle soit, elle devinait que le tuer aurait déclenché une mutinerie.

Elle passait aussi un certain temps à étudier le livre de Moura. Elle s'était renseignée davantage sur les coutumes des peuples de la mer. Elle était de plus en plus surprise par un détail qu'elle n'avait pas remarqué au début : le livre semblait contenir certaines informations beaucoup trop récentes pour un ouvrage abandonné depuis des temps immémoriaux dans un passage secret. Quoi qu'elle demande en inscrivant un titre de page, elle arrivait presque toujours sur quelque chose. Comment cela était-il possible ?

Cependant, avant qu'elle ne puisse pousser plus avant ses recherches, la brume tomba anormalement vite sur le Chasseur des brisants. La navigation devint plus prudente. Elle interrogea Kéosan l'aéromancien, qui se concentrait sur l'analyse des vents. Il lui expliqua qu'ils longeaient un secteur dangereux, entre autre à cause de ces brumes. Sa science lui permettait heureusement d'identifier certains dangers rien qu'en humant le vent.

La vigie déclara alors avoir vu un navire. Aussitôt, les sang-pourpres se tendirent, inquiets et prêts à en découdre. Mais Galion identifia... le Masamune ! Son propre navire ! Il confia la barre à Valgan pour envoyer des signaux auxquels l'autre navire répondit.

« Ils nous font signe de v'nir ! Bahahahaha ! Moura a vraiment des idées tordues, parfois ! » s'exclama-t-il.

Leyna se leva et sourit, tout juste légèrement surprise par l’événement :

« Vous voyez ? Inutile de courir partout : Moura nous mène là où nous devons aller. Il semble que vous ne soyez en effet pas fait pour mener ce navire... vous allez donc reprendre le vôtre. »

Elle se tourna vers l'équipage :

« Armes à porté de main. Évitons les mauvaises surprises... Nous allons nous approcher. »

L'équipage rechigna quelque peu, mais obéit.

Une fois à bord, Leyna vit un certain respect dans les yeux des marins, et elle sut que cela était bien. Elle avait démontré sa force une fois de plus et en était récompensée. Nul ne pouvait s'opposer à la volonté de Moura... À SA volonté !
Elle regarda Valgan et lança :

« Pas de fausses-excuses ! Tu prends le commandement. »

Il leva fièrement la tête :

« Je ne pourrais quitter seul ce brouillard. J'aurais besoin de l'aide de Saryon. »

La prêtresse ferma les yeux. Dans l'obscurité, le rubis de Thimoros flamboyait encore devant ses yeux... elle prit une profonde inspiration pour se calmer, n'y parvenant que partiellement :

« Soit. »

Elle s'éloigna d'un pas rageur.
Kassara la rejoignit tandis qu'ils se désarrimaient du Masamune.

« Que t'arrive-t-il ? Je ne te reconnais pas dans ce comportement. Depuis quelques jours... »

Elle l'arrêta d'un mouvement de main agacé. Elle avait besoin de prier et de se recueillir. Retrouver la tranquillité d'âme qui l'avait quitté.
Saryon était à côté de Valgan et lui donnait quelques explications. Heureusement, il avait déjà enseigné au bosco comment manœuvrer doucement le navire dans un port. La situation était ici assez semblable, si ce n'est qu'il fallait se fier à chaque instant aux indications de l'homme à la proue et de la vigie pour ne par heurter un rocher.
Or, voilà que l'homme de la proue signala quelque chose d'anormal. Des lumières... un navire ? Fallait-il éteindre celles du Chasseur des Brisants ? Ou au contraire les garder allumées pour éviter la collision ?
Ils savaient cependant que Von Klaash était dans les parages, et Leyna ne tint pas rigueur quand Barbe-rouge lança un commandement : Éteindre les lumières et dévier légèrement de la trajectoire, de façon à présenter les balistes vers l'étrange phénomène. Si c'était un navire, il les laisserait sans doute passer... et s'il les menaçait, ils avaient des hommes prêts à riposter...
Le silence s'approfondit jusqu'à devenir angoissant. Kassara frissonna et s'éloigna en murmurant qu'elle allait trouver une épée. Cela surprit la prêtresse, mais pas plus que de mesure. Elle soupçonnait depuis longtemps que la belle n'était pas qu'une créature de rêve. Elle l'avait amplement montré au harem.
Cependant, la voir s'éloigner privait Leyna de la seule présence réconfortante à proximité, et l'angoisse de la situation menaçait de la submerger. Elle alla trouver Kéosan, l'aéromancien, pour lui lancer un regard interrogateur. Il connaissait si bien le vent... ne pouvait-il deviner ce qui approchait ?
Mais il secoua la tête :

« Le vent ne me dit rien. Il n'y a pas un souffle d'air et je vais me garder d'invoquer Rana sans savoir ce qui se profile... »

Ainsi, ils en étaient au même point... ne restait plus qu'à attendre... et à prier.

Alors, la lumière se changea en un monstre terrifiant, du moins c'est ce qu'il sembla à Leyna. Un cauchemar noir, hérissé de pointes et semblables à un assemblage de crânes grimaçants.
Un navire, pourtant, mais si menaçant qu'elle se sentit paralysée par la peur.
Saryon jura et une grêle de flèches tomba, ainsi que des traits de balistes. Les armes du Chasseur des Brisants tirèrent en même temps, mais le monstre était si rapide que les tires ne firent que l’effleurer.
Heureusement, ses propres attaques avaient été gênées par l'extinction des feux du navire des sang-pourpre. Un javelot léger brisa un morceau du bastingage et deux hommes lâchèrent des exclamations de douleur.

« Tous en armure ! C'est le Redoutable Jugement ! » cria Saryon.

Leyna tourna un regard paniqué vers Kéosan.

« Mauvais, ça... souffla le mage. Un des rares navires capable de nous causer de gros ennuis. Il est rapide et bien armé... »

Et voilà bientôt que la brûme s’empile de lumières. Ils étaient encerclés ! Le Redoutable Jugement n'était donc pas seul ?
Ils se rendirent près du capitaine.

« Il semble que Moura me punisse... Je vous demande pardon... » souffla la prêtresse.

Barbe-rouge haussa les épaules :

« On verra plus tard pour les effusions. Va te mettre à l'abri. »

« Indigne de la déesse serait la prêtresse qui fuit. »

Retrouvant son aplomb, la jeune semi-elfe fit un pas négligeant de côté. Une flèche se ficha là où elle était une seconde plus tôt.

« Mais il va nous falloir riposter... »

Saryon hocha la tête :

« C'est un navire rapide et bien équipé... mais cela veut dire que son équipage est réduit et n'aura sans doute pas d'armes lourdes. Si nous les abordons, ils n'ont aucune chance... »

« Mais ils sont trop rapides... objecta Kéosan. Et s'ils ont des alliés, comme ces lueurs semblent en témoigner, nous n'avons aucune chance ! »

Un sourire carnassier s'alluma sur le visage bleu et pourpre.

« Oh, nous avons d'autres armes... et surtout vous m'avez moi ! Je vais montrer à ces prétentieux ce que vaut un véritable capitaine ! Transmettez les ordres : qu'un groupe prépare les grappins. Si le Redoutable Jugement refait un passage parallèlement à notre position, assure-toi qu'un souffle de vent le ralentisse pour que les hommes puissent agripper ses aspérités. Avec une coque si complexe, ils auront toutes les peines du monde à nous décrocher ! »

« Mais, si l'abordage est impossible à cause des autres navires... »

« Nous verrons ça ! Exécution ! »

Aussitôt, le magicien et la prêtresse se précipitèrent pour expliquer la manœuvre. Leyna ne comprenait pas ce que préparait le capitaine, mais tandis que les lumières approchaient de partout, que le Redoutable Jugement se préparait dans la brume à un nouveau passage, elle se mit à prier de tout son cœur pour qu'il sache ce qu'il faisait...

(((Le Chasseur se dirige vers les lumières, si le Redoutable jugement tente un nouveau passage, Kéosan le ralentit et les marins tentent de l'accrocher au grappin)))

Mais contre toute attente, le Redoutable jugement s'écarta... mais seulement pour laisser paraître un bâtiment encore plus grand ! Bien plus haut et plus imposant que le Chasseur des Brisant, ce navire ne pouvait être que la Laide-les-Maines. Saryon jura par tous les dieux et entama une manœuvre pour s'écarter légèrement, mais pas suffisamment pour éviter les tires. Il devait savoir que rien ne pourrait les leur épargner.

« Kéosan ! Rectification : donne moi tout le vent arrière que tu peux ! »

Le magicien entra immédiatement en action.

« Artilleurs ! Visez juste ! »

Tous se précipitèrent vers les balistes, y compris Leyna à sa propre surprise. Elle vit Valgan s'installer et demanda :

« Pourquoi nous écartons nous ? »

Le sang-pourpre, anxieux, répondit :

« Je pense qu'il va essayer de contourner la Laide-les-Maines pour virer ensuite et éperonner le Redoutable Jugement. Ça risque d'être notre dernière chance. »

La prêtresse hocha la tête. Les sang-pourpres, qui avaient revêtu leurs armures, peinaient de plus en plus sur les rames.
Un autre cri retentit, les avertissant de la présence du Masamune. Leyna sentit son cœur se serrer. Voilà qu'ils combattaient finalement aux côtés des pirates ! Moura devait vraiment être furieuse contre elle... Apprenant cela Saryon clama :

« Hé, l'aéro ! S'il te reste un peu de vent, essaies de rapprocher ces froussards ! »

Sur le bâtiment arrière, l'aéromancien grimaça et se concentra encore plus.

S'efforçant de focaliser son esprit vagabond sur son problème, Leyna essaya d'étudier sa machine de guerre. Valgan lui expliqua les commandes. Sa mémoire ancestrale lui disait aussi que des earions avaient déjà manipulé de telles armes. L'engin, grâce à un astucieux système de contrepoids, était facile à diriger. Il y avait même un petit cran servant de visée.

« Ils ont sans doute des catapultes en face. C'est pour cela qu'on prend de la vitesse. Ces armes ont une puissance de destruction phénoménale, mais manquent de précisions. Ils auront du mal à nous ajuster, alors que nous, vu la taille de leur navire et la distance, nous n'aurons aucun mal à les atteindre... »

« Et à les couler ? »

Le bosco grimaça :

« À les atteindre assez pour les ralentir. Ce sera déjà bien. »

« Alors visons leurs machines de sièges. »

Il la regarda avec une hésitation, puis déclara :

« C'est risqué, car plus difficile à atteindre, mais si ça marche, ce sera une belle victoire. »

Ainsi donc, ils braquèrent les lourds javelots à pointes de pierre sur le pont, se préparant à tirer. Leyna plissait les yeux pour tenter de distinguer les machines de guerre qui devaient les dominer. Finalement, repérant une forme qui semblait convenir, elle ajusta soigneusement. Des images se mirent à bouillonner dans sa tête, la mémoire de centaines d'earions qui avaient effectué des manœuvres semblables lui criaient d'ajuster vers le haut pour tenir compte de la trajectoire courbe, et c'est dans un état de semi-transe que la prêtresse tira sur le levier pour libérer le tir.

(((tir sur le pont de la Laide pour tenter de détruire les machines de guerre. Pendant ce temps, le Chasseur effectue un grand virage pour la contourner par-derrière dans une tentative d'anticipation du mouvement du Redoutable. Si celui-ci tente aussi de passer par-derrière la Laide, le Chasseur tentera de l'épronner. Kéosan augmente la vitesse du Chasseur et cherche, si possible, à dévier légèrement le Masamune vers la bataille)))

Le javelot bondit et frappa le pont du navire, et Leyna crut voir des morceaux de bois voler. La structure qu'elle avait vue avait volé en éclat ! Hélas, les autres tires eurent moins de chance et ne semblèrent guère avoir d'effet. La Laide tira à son tour. Le bastingage vola en éclat à un endroit. Une pierre tomba devant la jeune femme sui fut aspergée d'eau de mer. Plus loin, un homme hurla brièvement avant de se taire à jamais. Le cœur serré, Leyna lui dédia une prière. Que faire ? Ils s'éloignaient maintenant de leur cible...
Mais voilà que Kéosan poussa un cri et s'effondra à son tour. Elle se jeta sur lui et constata avec soulagement qu'il n'était pas blessé.

« J'ai réussi... souffla-t-il. J'ai réussi... »

Alors, la prêtresse leva les yeux et elle vit, plus loin, le Masamune. Brutalement dévié de sa trajectoire, le navire en profitait pour une attaque hardie contre la Laide. Un peu perdue, elle regarda autour d'elle : il y avait quelques débris, et les marins fatiguaient. Elle se tourna vers Saryon, qui restait inébranlable.

« Tempête, droit devant ! » cria la vigie.

Le capitaine hocha la tête :

« On va virer vers le Redoutable Jugement pour tenter de l’éperonner. Ils nous éviteront sans mal, mais ensuite, on vire par bâbord. Cela nous permettra de présenter les balistes qu'on a eu le temps de recharger. Mais surtout, on se dirigera ensuite vers la tempête. Avec un peu de chance, une telle provocation va les forcer à nous suivre... et on verra ensuite ce qu'ils valent par grand vent ! »

Leyna hocha la tête et commença à recharger comme Valgan lui indiquait. Mais si la manœuvre réussissait, ce serait aux artilleurs de l'autre bord de tirer...

(((Virage par tribord pour frapper le Jugement, puis, en cas d'échec, par bâbord pour pour tirer)))

Jet de dès :

Chasseur : Échec




Tandis que les premiers échanges se terminaient et que tous les hommes étaient à leurs postes en proie à un combat brutal, une femme se présenta sur le pont du Redoutable Jugement. Elle rajustait sa coiffure et observa brièvement la mer agitée sur laquelle les navires opéraient.

Son nom est Katalina, elle commandait le Redoutable et analysa le champ de bataille. Entourée de sa garde personnelle, elle prit posément les choses en main, confiante et sereine, elle leva une main et jeta le premier ordre.

Le Redoutable s'arrêta et les rames sorties, il fit brusquement mouvement arrière et se retourna vers la Laide pour lui porter assistance.

Les tirs cessèrent alors. Les artilleurs reçurent des ordres précis et se rangèrent en batterie à tribord du navire, protégés des éclats et des frappes directes que pourrait lancer le Chasseur des Brisants.

Comme pour prendre plus de vitesse, les hommes larguèrent quelques barils et tonneaux à la mer.

( Le redoutable ne vire pas de bord, il recule grâce aux rames (vulnérables à un abordage) pour se diriger vers la Laide afin de l'assister à son abordage. Ton virement fait que tu passera devant lui sans le toucher, il ne chercha pas à te tirer dessus. Les tonneaux largués pour lâcher du lest sont largués du côté bâbord, donc visibles, tu peux également voir la commandante si tu te places assez haut. Les soldats en batterie sont du côté opposé du navire, tu peux éventuellement voir ça aussi si ça te donne des idées dans ton RP.

Le navire va très vite, même avec les rames et sera à proximité de la Laide au RP prochain. )

Mais à la grande surprise des sang-pourpres, le Redoutable Jugement sorti ses rames et partit brusquement en marche arrière. La vigie faisait les commentaires qu'elle pouvait, l'air un peu déboussolé :

« J'ai vu le... la capitaine, c'est une femme ! Elle fait jeter du lest et écarter son équipage du flanc pour le protéger ! On dirait qu'ils vont se aborder la Laide pour lui prêter main-forte ! »

« Grand bien leur fasse, répondit Saryon. Ça nous laisse un peu le temps de souffler. Posez vos rames, les gars, je m'occupe de la manœuvre ! »

Le Chasseur des Brisant vira doucement bâbord pour prendre du large et commença à décrire un grand cercle. Leyna remarqua Kassara qui était reparu, équipée d'un sabre. Cette dernière lui demanda ce qui s'était passé et lle lui expliqua en quelques phrases brèves.

« Tu penses qu'il va y avoir un abordage ? »

« Le capitaine seul le sait... »

Le Chasseur décrivit un grand tour, laissant amplement le temps au Jugement de s'accrocher à la Laide. Inquiète, Leyna alla trouver Barbe-rouge pour désigner du doigt le navire, au loin.

« Moura ? »

« Ils ne m'ont pas laissé le choix, petite. Ils sont plus manœuvrables que nous, mais par contre, il sont maintenant accrochés à la Laide et le leur réserve une petite surprise... »

Le navire des sang-pourpres continua son cercle et Leyna compris. Elle sourit, puis rejoignit Kéosan. Elle tenta d'emporter le magicien en sécurité, mais celui-ci, malgré son épuisement, protesta qu'on avait besoin de lui. Il laissa quand même la prêtresse aidée de son amie de Whiel le traîner un peu plus en arrière, près du château arrière.
Pendant ce temps, Le Chasseur des Brisants s'alignait jusqu'à faire face au trio de navires abordés. Il se présentait maintenant de face et ferait une cible facile à viser... mais si personne ne l'arrêtait, le Jugement n'aurait plus qu'un choix bien simple à faire : soit se faire éperonner par le flanc, soit s'écarter et laisser la Laide se faire éperonner, ce qui déplairait sûrement au capitaine Von Klaash.
Sur un signal de Saryon, les rameurs se remirent en action et le navire commença à accélérer, lentement, mais irrésistiblement...

En réaction, une volée de flèches partit du Jugement... pour tomber à l'eau. Pourtant, quelques-unes continuèrent à brûler. Leyna plissa les yeux... et les vit plantés dans les tonneaux, sans doute le leste dont avait parlé la vigie.
Prise d'une brusque prémonition, elle se jeta à terre. Et alors, l'enfer se déchaîna.
Une série de détonations et une bouffée de flammes balayèrent l'avant du navire. Les hommes hurlaient, les cordages brûlaient, l'avant du navire était roussi.
La prêtresse se releva, catastrophée. Meno rongeait le navire dans sa forme la plus violente ! Elle vit Kassara courir avec des marins de l'arrière pour aller chercher des seaux et des cordes pour les plonger dans la mer et les remplir d'eau. Valgan vint secouer la semi-elfe :

« Utilise ta magie, bon sang ! »

Et il retourna vers les flammes pour aider à évacuer les blesser. Saryon lâcha momentanément la barre pour donner quelques ordres fulminants. Leyna, de son côté, s'efforça de se concentrer et de faire le vide dans son esprit. Ne pas penser aux flammes... ne pas écouter les cris... ne penser qu'à la magie. Moura pouvait les aider.
Elle tendit une main et une lueur bleue l'entoura. Alors, les geysers jaillirent, déversant une pluie abondante sur le pont. Les flammes reculèrent.
Un choc la pris par surprise et elle roula par terre. Ils avaient éperonné le Jugement, mais comme la plupart des sang-pourpres avaient lâché leurs rames pour combattre les flammes et ils avaient perdu de la vitesse.
Saryon cria alors :

« Revenez sur les rames bâbord ! Faites pivoter le navire ! »

Les marins les plus réactifs s'y attelèrent, exécutant un mouvement complexe de sorte que le Chasseur dévia et, bientôt, se retrouva accolé au Jugement. Saryon bondit alors, hache et sabre d'abordage à la main.

« La moitié reste ici pour combattre l'incendie, l'autre vient avec moi ! »

En quelques signes, il désigna les corbeaux et les balistes. Sur le Jugement, les pirates virent toute l'artillerie du Chasseur des Brisants se pointer sur eux. Cependant, c'était la base des passerelles que visaient les armes de sièges, et bientôt, quatre javelots à pointe de pierre déchirèrent le pont dans une pluie d'écharde dans une tentative pour couper les ponts entre le Jugement et la Laide.
Alors, les sang-pourpres, oubliant la fatigue et le fait qu'ils avaient laissé leurs cuirasses au navire, s'avancèrent d'un par de tonnerre sur les deux corbeaux déployés.

« MOURA ! MOURA ! MOURA ! MOURA ! »

Au premier rang, se tenaient trois qui portaient de grands boucliers vert et or. Dès qu'ils eurent posé le pied sur le pont, ils s'écartèrent pour que les harponneurs, derrière, puissent lâcher une volée de traits.
Alors, Leyna sentit quelque chose battre en elle. L'appel d'une force supérieur. Moura... non, le cristal réclamait du sang ! Mais elle devait résister... résister... le cri des sang-pourpres résonnait encore à ses oreilles. Moura... Moura... Elle tenta de se focaliser sur ce qui restait du feu, qui avait déjà rendu la voile presque inutilisable en brûlant les cordages. Mais combien de temps pourrait-elle résister à l'appel de la bataille ?