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 Sujet du message: Re: Château de Keresztur
MessagePosté: Lun 14 Mar 2011 22:55 
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Les échanges suivant donnèrent beaucoup à réfléchir Tisis, la baronne semblant véritablement emprise d'une folie des grandeurs. Tout d'abord elle voulait prêter une centaine d'hommes, soit au moins vingt fois que ce dont avait besoin la future duchesse. Ensuite, il lui faudrait des vignes sur le territoire de Blanchefort, la propriété étant sienne. Elle voulait aussi que les prisonniers soient torturés selon les moeurs de Kerezstur. Pour couronner le tout, elle voulait que la Dame Chevalier arbore un blason à elle et fournisse des garanties.

Pour agrémenter son discours, elle avait fait entrer trois hommes, représentant trois corps d'armée différents. Visiblement la baronne semblait extrêmement fière de ses troupes, qui d'après elle étaient capable de prendre le château. Si les hommes avaient l'air bien entrainés en effet, Tisis avait ses doutes quant à leur suprématie, surtout après les événements qui avaient déjà eu lieu. Dans tous les cas, il allait falloir qu'elle contredise poliment chacun des souhaits fantaisistes de son hôtesse:

"Tout d'abord, je vous remercie pour votre offre, je ne m'attendais pas à tant il est vrai. Pour tout vous dire, il n'est pas question de prendre le château par la force, mais plutôt de faire entrer la duchesse dans les lieux au moment du sacrement. Elle demandera alors l'Ordalie, en publique, ce qui empêchera son frère de répliquer."

La jeune fille n'avait pas quitté l'hôtesse des yeux, gardant sa fermeté.

"Pour ce qui est de la guerre, la duchesse se chargera elle-même de lever des troupes en nombre, une fois que les terres seront officiellement siennes. Pour ce qui concerne votre requête pour le traitement de prisonniers, au vu des éléments que je viens d'énoncer, je doute qu'il y en ait."

Quand bien même Victoire aurait mené une attaque, elle n'aurait en aucun cas pu compter uniquement sur des troupes étrangères, servant un autre domaine que le sien. D'une part cela l'aurait mise en péril et elle n'aurait guère voulue être prise en otage, surtout si pour prendre le château elle avait dévoilé les faiblesses de celui-ci, en terme de passages secrets notamment.

D'autre part, cela serait très mal perçu par sa noblesse et par les habitants, donnant de fait le rôle d'usurpatrice à la jeune fille. Elle devait à tout prix éviter cela, pouvant tout au plus justifier la présence de quelques mercenaires, de Keresztur ou d'ailleurs.

"Concernant la compensation que vous suggérez, il serait en effet possible, à mon sens, de vous fournir gracieusement une parcelle de terrain. Le duché vous prêtera l'exploitation d'une ferme et de ses vignes pendant deux récoltes. La parcelle sera toujours gérée par le duché, mais les profits seront vôtres. Quant à une garantie pour la vie de vos hommes, ce serait entièrement justifié dans le cadre d'une déclaration de guerre, ce qui n'est heureusement pas le cas. Votre participation ne sera pas dévoilée si vous ne le souhaitez pas, vous évitant les foudres de la noblesse et de nos ennemis."

La contre proposition était honnête et réaliste, compte tenu de la demande qu'elle avait formulée. Elle était bien entendue toujours prête à négocier les termes, mais jamais elle ne mettrait l'intégrité ou la réputation de ses terres en jeu. Elle conclut sa tirade par un commentaire sur le blason que la baronne voulait qu'elle porte, ne pouvant accepter de renoncer à ses couleurs ne serait-ce un instant:

"Enfin, je suis très flattée que vous me proposiez d'entrer dans votre Zalina. Il serait toutefois très malvenu que j'abandonne les armes de ma Dame. Néanmoins, en signe de bonne foi et d'amitié, j'accepterai de porter votre blason en écharpe."

Sur ce point, elle n'accepterait aucun compromis.

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 Sujet du message: Re: Château de Keresztur
MessagePosté: Lun 14 Mar 2011 23:45 
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Katalina semblait effarée des propos qui s'en suivaient, Erzébeth quant à elle, agacée, interrompit la jeune femme en reversant du revers de la main le verre de vin. La servante se leva et recula de quelques pas. Laissant les deux éminentes femmes en tête à tête.

« Il y a quelque chose que vous ne comprenez pas ! »

Erzébeth l'aurait bien traitée d'idiote, son idée de la considérer était devenue bancale, le fait que Keresztur soit pour l'instant plus ou moins protégé par son armée était un fait. Le risque était encore le soutien des paysans, elle n'était pas au pouvoir depuis assez longtemps pour qu'ils puissent lui offrir une pleine confiance. La garde assurait la sécurité partout, une omniprésence militaire qui avait fait farouchement baisser la criminalité et le risque sur ses terres. Bien que les punitions cruelles réduisaient considérablement la moyenne d'âge, les paysans ne se montraient pas toujours enjoués de participer à la pérennité des terres.

Le problème que rencontrait la Baronne était l'armée, elle avait besoin d'une compensation, elle ne la jugeait pas suffisante, ne pouvant se contenter d'une parcelle non plus grande qu'une ferme. L'intérêt était le long terme, aussi la disparition des taxes de commerce.

« Mesdames, si je peux me permettre une supposition. Fut un temps, dans un vaste royaume enclin à de nombreux conflits intestins, deux domaines avaient fait un échange de biens. Les paysans d'un domaine allèrent dans celui du voisin, qui en échange, envoyait ses contingents militaires afin qu'ils soient formés. L'un devenait très influent dans le commerce grâce aux ressources de son voisin, et l'autre dans le domaine militaire, ayant formé une armée deux fois plus grande, et de façon si rapide que les envieux n'eurent pas le temps d'intervenir... La terre est si dure ici, les paysans travaillent dur pour trop peu de résultats... En revanche, l'armée est loin d'être mauvaise, rapidement formée, d'autant plus que la présence des lignes de la Déesse noire offre de nombreux combats, et les troupes deviennent soit aguerries, soit mortes...»

Ses derniers mots avaient été prononcés avec une légèreté qui fit tiquer la Baronne, qui n'avait certainement pas apprécié qu'on lui souvienne à quel point la faiblesse même de ses troupes était bien Oaxaca, si une attaque soufflait que ce soit un quart de son armée, elle serait dans une position bien trop délicate. Son domaine ayant été offert, elle ne pouvait pas compter sur le soutien de qui que ce soit.

« Arborez le blason qu'il vous sied, vous représenterez votre Duché sur mes terres. Lydia décidera de vos responsabilités. Cependant, vous disiez Ô combien mon commerce était bancal, et cédant à votre requête, je mets une de mes plus précieuses ressource en danger. Ma garde personnelle. S'il vous faut un demi-millier d'hommes, je peux aisément le faire déplacer sur vos terres, j'en garderai de quoi protéger le château et les villages. Cependant, il me faut une garantie de ne pas risquer de tout perdre pour un complot qui à présent n'a jamais été mien. »

La femme se tourna, marcha quelque pas jusqu'à la fenêtre qui luisait de l'éclat de lune. Les bras croisés, elle semblait ignorer totalement la remarque de Katalina qui retombait dans un pieu silence. La Baronne se tourna, Cèles lui proposa une seconde idée qui se valait plus équitable, prolifique sur le long terme...

« Je cède l'armée que vous désirez, mais doutez-vous bien, le Duché voisin répliquera très rapidement, mes terres sont difficiles d'accès, le château est, sur de nombreux points inexpugnable, il faudrait le prendre de l'intérieur ou être assez nombreux pour pouvoir grimper la côte... Je n'ai rien contre le fait que mes hommes soient reconnus sur vos terres, si Valorian lance une attaque contre mes terres... Soyez assurée qu'il regrettera son geste, à moins qu'il ne me tue lors du premier raid; car je n'aurai de cesse que lorsque mes terres seront assez riches et prospères...

Les alliances, est-ce donc tout ce qui manque ? Votre Duché est une alliance qui me serait chère, croyez le, cependant, je pense que la meilleure des choses ne serait pas de demander simplement l'ordalie, pensez-vous qu'il se laissera faire ? Le Roy déclina sa précieuse aide à Victoire, votre Dame. Qu'en sera-t-il de son frère... Mais, ce n'est que mon humble avis... Disposez des troupes avec mon consentement, vous aurez tout le temps de partager leur entraînement qu'il soit à l'épée, à cheval ou à l'arc. Mais que proposez vous en échange ? Je ne parle pas d'une vulgaire ferme dont je ne tirerai les bénéfices que pendant deux maigres années, vous désirez une alliance, sera-t-elle aussi fugace qu'un printemps ? »

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 Sujet du message: Re: Château de Keresztur
MessagePosté: Mar 15 Mar 2011 00:49 
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La baronne s'emporta, renversant son verre de dépit, la servante se reculant prestement, laissant les deux femmes face à face. Tisis ne fit pas le moindre geste, gardant son calme au mieux. Elle n'avait jamais encore participé à des négociations politiques, mais elle avait assisté à nombre d'entre elles. Elle avait appris qu'il ne fallait mêler aucun sentiment dans ce genre de moment, le pragmatisme et le réalisme étant des plus importants.

Katalina s'exprima alors, mentionnant une idée somme toute intéressante, relevant plus de la vision d'une conseillère que d'une servante. Quelque chose n'était pas clair quant à son statut et à sa relation avec sa maîtresse. Dans tous les cas, il ne fallait pas la considérer comme de simples oreilles, mais aussi comme un esprit interprétant avec acuité des questions pointues.

La baronne s'exprima de nouveau, laissant à Tisis le choix du blason qu'elle arborerait, ce qui était un bon point. Elle parla alors de nouveau de guerre, proposant cinq cent âmes pour livrer bataille et aider Blanchefort, demandant de nouveau des garanties. L'adolescente se demanda si ses propos avaient manqué de clarté ou si son hôtesse se jouait simplement d'elle.

La future duchesse ne savait pas quoi répondre à cette proposition. Elle n'avait jamais songé à entrer en guerre aussi tôt, ce qui d'ailleurs serait une erreur monumentale. Le roi ne laisserait jamais passer de telles actions, il éliminerait aussi bien la duchesse que la baronne, s'assurant que leurs terres soient désarmées par la suite. Non, il ne fallait pas déclarer la guerre, pas de cette façon. Si des combats devaient avoir lieu, ce serait uniquement dû au refus de Valorian de quitter les terres.

La baronne énonça une vérité cependant: il serait difficile de demander justice le jour du sacrement. Pour se faire, il lui faudrait avoir en sa possession toutes les informations nécessaires pour que son accusation soit totalement irréfutable. Plus elle réfléchissait, plus l'idée de raisonner son frère s'évanouissait. Elle avait du mal à s'y résoudre, mais une idée naissait dans son esprit...

"Vous avez raison, l'ordalie est un vœu pieux. Je ne vois qu'une solution, qui ne plaira résolument pas à la future duchesse. Je n'aurai pas besoin d'autant d'homme, il en faudra seulement une poignée pour m'accompagner et mettre un terme à la vie d'Anatole de Blanchefort la veille de sa prise de pouvoir. L'assassinat devra être imputé aux soldats de Valorian, Victoire apparaissant alors comme la sauveuse de ses terres. Sa propre noblesse la suivra dès lors que les troupes de Tristan seront considérées comme l'envahisseur."

La jeune fille ne mentionna pas le danger important qu'elle courrait à cet instant, les hommes de Valorian risquant de l'attaquer dans la confusion. Il faudrait qu'elle compte sur la protection des seigneurs et chevaliers qui seront présent. Ce serait un jeu dangereux, mais qui déterminerait efficacement les alliés des ennemis; il restait à espérer qu'elle aurait suffisamment d'alliés.

"Je ne puis vous donner de garantie valable si les choses tournent mal, vous vous en doutez. Si elles tournent bien, cependant, il n'est pas question que vous soyez lésée. L'octroi de terres me parait délicat, cela risquerait de diviser la noblesse qu'il sera nécessaire d'unir si une guerre a lieu. Je pense ainsi réitérer la première proposition de Mademoiselle Victoir, à savoir l'ouverture d'une route commerciale pour vos terres. Vous aurez du fer au prix de la production, disons un convoi par mois la première année, puis un tous les trois mois par la suite. De même, les taxes seront totalement abolies la première année pour vos marchandises, étant revalorisées les années suivantes à hauteur de cinquante pour cent de ce que doivent régler les autres domaines."

Tisis marqua une petite pause, réfléchissant toujours:

"Ces conditions seront respectées, si vous vous engagez militairement là aussi sur le long terme. Victoire de Blanchefort n'a pas besoin d'une armée étrangère pour le moment, mais nous ne savons de quoi demain sera fait. Nos accords commerciaux tiendront aussi longtemps que les accords militaires."

La proposition avait des airs de tributs, mais Tisis pensait sur le long terme. La baronne avait peut-être menti, mais elle proposait ni plus ni moins de déclarer la guerre à un duché sous la protection du roi. Cela signifiait que son engagement envers la royauté était des plus précaires, ce que la jeune fille ne pouvait laisser passer: elle trouverait peu d'alliés prêts à recourir à la force de cette manière. De plus, sa proposition ne tenait que si elle montait sur le trône du duché, assurant que la baronne ferait tout pour que Victoire devienne duchesse.

Cela coûterait cher, mais le jeu en valait la chandelle.

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 Sujet du message: Re: Château de Keresztur
MessagePosté: Mar 15 Mar 2011 20:12 
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Katalina vint murmurer quelque chose à Erzébeth, elle trouvait la proposition très intéressante, d'autant que le fer n'était produit que loin de ses terres, ici elle disposait de charbon, de tourbe, de nombreux minerais...

Le fer était assurément une chose chère et qui trouvait son usage absolument partout, l'armée en avait autant besoin que lors des constructions qui se devaient être plus solides que la pierre. D'un geste de la main, elle repoussa doucement sa conseillère qui obtempéra en reculant comme un aimable animal apprivoisé.

« Pardonnez mon coup d'éclat, j'attendais tellement de cette entrevue que la patience me faisait défaut. J'accepte votre requête. Lors de votre entrainement, vous pourrez choisir à loisir les éléments qu'il vous faut parmi mes soldats. Zalina est un excellent contingent, je suis sûre que vous lui ferez honneur. Travaillez et trouvez ceux qui apporteront la victoire à ... Victoire, si je puis dire. »

La Baronne réfléchissait, l'objectif de cette inconnue des Duchés était pourtant clair, il y avait quelque chose qui la dérangeait. Tout n'était basé que sur le bon vouloir des habitants qui seraient spectateurs de la scène opposant Victoire à son frère. Si elle désirait assassiner sa propre famille et faire porter le chapeau au Duché voisin, ça risquait de ressembler à une guerre. Aussi, les troupes de Keresztur, étant étrangère aux deux Duchés étaient une aide...

« Katalina, rédigez les termes de notre accord. Tisis, j'ai également une offre à faire. Votre Dame aura besoin de tout le soutien de son peuple pour cela. Si le moindre doute plane quand à l'identité de mes soldats, on pourrait croire à un complot, et elle sera plus en danger d'une révolte que je ne le suis moi même.

Mes hommes porteront l'uniforme de Valorian. Je peux proposer d'autres hommes ainsi travestis pour incendier quelques bâtiments, sans perte humaine afin de rendre crédit à la situation. En sous nombre, vous pourrez faire semblant de les bouter hors de vos terres vers le Duché de Tristan. Je couvrirai vos pertes matérielles, cela va de soit. Voyez ceci comme un cadeau, à supposer que l'idée puisse séduire votre Dame. Ainsi, le doute ne subsistera presque plus et vous n'aurez que peu à craindre de votre peuple, pouvant concentrer toute votre attention et vos efforts sur vos adversaires. »


Katalina rédigeait sur la table, faisant crisser la plume sur le parchemin. Lorsque tout était terminé, elle présenta le document à Tisis afin qu'elle puisse l'étudier à sa guise. Pendant ce temps, Erzébeth continuait son discours, presque à voix basse sans donner l'impression qu'elle se souciait d'être entendue.

« Bien sûr, nos deux domaines pourraient être lieu de convoitise, non maintenant, certes, cependant, les choses passent si vite. Nous devrions redoubler de prudence, tenez vous en pour sûre que vous serez responsable de votre Dame lorsque le jour fatidique viendra. Le roi doit croire à un meurtre de Valorian, plus de personnes le penseront, plus il y aura de crédit. Lorsque ce sera fait, je pourrai vous céder une partie de mes troupes, non pas pour la guerre, mais pour assurer la garde de vos terres. J'imagine qu'après le drame connu par Victoire, vos terres ne manquent que de sécurité. Vous pouvez, en même temps que vos chargements de fer, conduire vos apprentis soldats ici même. J'assure qu'ils seront formés gratuitement sur une terre hostile...»

« Aguerris ou morts...» murmurait doucement la conseillère...

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 Sujet du message: Re: Château de Keresztur
MessagePosté: Mar 15 Mar 2011 21:30 
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Cette fois les deux prédatrices trouvèrent un terrain d'entente, Tisis devant choisir les hommes qu'elle prendrait pour le coup d'état, ou plus justement la reprise de son patrimoine familial. La baronne émit une idée intéressante, sur l'identité que prendraient ses hommes sur le territoire ducal. Il ne fallait pas que l'on sache que Keresztur avait quoi que ce soit à voir avec la duchesse et celle-ci devrait compter sur ses troupes propres, officiellement. Faire passer les hommes pour des soldats de Valorian était en effet une bonne idée et, soit dit en passant, un juste retour des choses.

La servante fut chargée de la rédaction de l'accord, alors que l'hôtesse suggérait un dernier point, à savoir la présence de troupes de Keresztur pour maintenir l'ordre et la possibilité pour les armées du duché de s'entrainer dans la baronnie, au contact des orques.

Alors qu'elle allait répondre, la porte de la grande pièce claqua violemment, faisant sursauter la Dame Chevalier. Elle pensait que la porte était fermée et elle n'avait pas senti de courant d'air depuis son arrivée. Pourtant, elle doutait qu'on les ait espionnées...

Elle reporta bien vite son intention sur leur affaire, le contrat entre ses mains. Profitant de la petite pause qu'offrait la lecture, elle laissa le silence s'installer, parcourant chaque ligne et chaque mot avec une attention toute particulière. Aucune ambiguïté n'y avait été glissée, ni aucune clause risquant de se retourner contre l'une ou l'autre des deux femmes.

"Je suis on ne peut plus en accord avec vous en ce qui concerne l'identité de vos hommes. La lutte contre Valorian passera avant tout par un rejet des influences extérieures, la noblesse ne devant pas avoir vent de cela. Pour la... mort d'Anatole, je serais d'avis d'utiliser simplement la discrétion, Victoire dénoncera les assassins le lendemain. Par contre, provoquer des dégâts par de faux valorianois serait extrêmement préjudiciable pour eux."

Tisis réfléchit un moment. Elle n'aimait pas du tout cette idée, que de tout son cœur elle savait cruelle mais qui semblait tellement efficace. Les choix de conscience s'enchainaient à une vitesse folle depuis que son frère avait tenté de la tuer, ou laissé la tentative se faire. Elle ne pouvait pas reculer cependant:

"Je ne pense pas que de simples dégâts matériels suffiront. Non, ce qui serait utile serait de provoquer des débordements sur les terres de certains des seigneurs de Victoire... Le tout avant la prise de pouvoir du duc... Des actes suffisamment cruels pour être notés, mais pas suffisamment important pour que Valorian ne s'en inquiète. Nous pourrons voir les détails, mais je pense que ce sera efficace, pour saper l'image de sauveur que veut se donner Tristan."

"Pour qu'une garde de Keresztur reste sur place, j'ai bien peur que cela soit perçu comme une autre occupation. Néanmoins, des échanges de troupes ne devraient pas poser de problème. Pourquoi ne pas créer une compagnie mixte qui se chargera d'accompagner les convois et les marchands?"

Tisis résuma intérieurement les étapes du plan d'actions:

En premier lieu l'entrainement de Tisis au sein de la troupe Zalina de la baronne, portant ses propres couleurs mais répondant à la baronne de Keresztur. En second lieu, des troupes de la baronne seraient envoyées en secret dans des comtés préconisés par Tisis, pour s'y faire passer pour des Valorian et ruiner l'image du duché voisin. Viendrait ensuite l'assassinat d'Anatole, la veille du jour où il aurait du prendre les rênes du duché. Victoire se montrerait alors, au milieu de ses vassaux, accusant Tristan du meurtre de son frère et reprenant de fait le pouvoir. Il lui faudrait alors compter sur l'appui des nobles et des chevaliers du duché, appui que l'action des faux hommes de Valorian aura sollicité.

Cela paraissait faisable et crédible. Elle en sourit tristement, attendant la réponse de son hôtesse.

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 Sujet du message: Re: Château de Keresztur
MessagePosté: Mar 15 Mar 2011 22:33 
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Erzébeth se rendit jusqu'à la cheminée, le foyer cessait d'illuminer la pièce de ses vives flammes, il n'était plus qu'un aura rouge brûlant. Lorsque le bois sec tomba, secouant les braises, elles s'en trouvaient ravie de ce festin et léchaient l'écorce avant de le dévorer dans une lumière flamboyante. Katalina quant à elle apportait les candélabres situés au divers coins de la pièce jusqu'à la table. Le vin avait coloré le bois et la fierté de Beauclair luisait des flammes des bougies.

« Lydia assure l'entraînement à l'arc, les soldats disposent du matériel nécessaire, vous pourrez utiliser celui qui vous appartient, de toutes évidences.

En ce qui concerne l'assassinat de votre éminente Duchesse, il faudra s'assurer que votre victime soit sans sa garde... J'imagine qu'il sera protégé, surtout s'il sait votre Dame toujours de ce monde. Par conséquent, il y a toujours l'idée d'un poison, sauf si l'envie de passer le mal par le fer est inébranlable... »


La Baronne faisait les cent pas dans la pièce. Katalina ne cessait d'observer les deux femmes d'un geste attentif, elle alla s'assoir près de Tisis, posant ses deux mains sur le document qu'elle venait de rédiger. La Baronne vint rejoindre les deux femmes, assises à la table. Elle était pensive, les indications de sa Faera lui éclairait peu à peu les idées.

« L'idée de mélanger les troupes n'est pas forcément intéressante, il faut toujours un leader, qui sera le commandant des troupes chargées de l'escorte ?»
« A votre proposition d'escorte, il faut toujours un commandant pour ces opérations, le mélange voudrait prononcer un choix quand à une autorité militaire. Ca se rapprocherait de la proposition de Katalina, un état se charge des troupes, l'autre du commerce... Tout en harmonie avec son voisin. »

Erzébeth posa doucement les mains sur les épaules de sa conseillère, la brune vicieuse au traits mesquins souriait alors que les serpents blancs entouraient son coup peu à peu, la Baronne lui dit :

« Ma chère, pourquoi n'iriez-vous pas nous chercher quelques fruits ? »
« Que nous soyons seules...»

Lorsqu'elle fut sortie, la Baronne continua, le sourire au lèvre, Cèles se moquait intérieurement d'elle de sa simplicité naturelle à découvrir les véritables objectifs de la femme.

« Pour aider votre Dame, nous devons mettre en place un plan d'action énergique, aucune éclaboussure. »
« Tuer les opposants, les tuer, tous.»
« Acceptez mon aide comme pour sortir votre Duchesse de sa situation si terrible. »
« Il ne faut pas que ça se passe ici... »
« Je ferai déplacer les hommes de votre choix par les routes peu fréquentées, question de discrétion. »
« Que l'armée régulière du roi l'ignore...»
« Il faudrait commencer tout ceci de façon discrète, bien entendue. »
« Dans le plus grand secret.»
« Peut être informerons-nous les concernés lorsque sera le moment. »
« Quand tous seront pris au piège politique et que s'en retourner sera devenu... Impossible.»
« Alors, votre Duchesse sera libre »
« Complice !»
« Et fière de retrouver son domaine... »
« Coupable. »
« Se pose la question de la garde qui protégera le Frère prétendu à la tête du domaine, ces petites choses méritent attention, je peux très bien vous proposer de vous en charger, ou un de mes officiers s'en chargera. »
« Empalés, égorgés, décapités, quoique ce soit, tant que c'est radical...»

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 Sujet du message: Re: Château de Keresztur
MessagePosté: Mar 15 Mar 2011 23:30 
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La pièce s'était faîte fort sombre, la baronne et la servante s'attelant à la rendre plus lumineuse. Tisis se demandait si elle prenait la bonne décision. Elle était en train d'orchestrer la mort du dernier membre de sa famille, mais aussi celle d'innocents qui subiraient des attaques cruelles simplement pour un jeu politique. Les événements étaient bien sombres, mais ce qui l'était plus encore était le serpent de la vengeance, enfoui profondément dans le cœur de Victoire. De Tisis.

Lorsque Katalina fut sortie, la baronne s'exprima comme si elle était possédée, les mots coulant cruellement entre ses lèvres. C'était quelqu'un de dangereux et pourtant Tisis nouait une alliance avec elle. Peut-être était-ce ce danger qui convainquait l'adolescente, qui l'attirait, qui lui susurrait qu'il fallait saisir cette chance, que c'était la voie de la vengeance...

"L'idéal pour tuer Anatole serait un poison ne laissant pas de trace. Ou mieux: un serpent. Il ne doit avoir aucune chance ceci dit, s'il survivait..."

Victoire avait été traumatisée par la vipère, mais elle ne voulait pas que la peur la bloque, la stoppe et l'entrave. Non, tuer son frère de la sorte serait un excellent moyen de se libérer. Après tout, si elle-même avait subi cet enfer, c'était de la faute de Valorian, dont Anatole jouait le jeu.

"Une fois Anatole mort, Victoire s'occupera personnellement de la suite des événements. Elle devra le faire seule, mais notre alliance ne fera que commencer."

Au-dehors le vent s'était mis à souffler, sifflant de manière lugubre. Tisis prit un second parchemin, recopiant mot pour mot et avec soin le premier accord, avant de sortir son arme de son fourreau. Elle se coupa le pouce, posant le sang sur chacun des exemplaires, avant d'y apposer le sceau de Blanchefort:

"Au nom de Victoire de Blanchefort, par son sceau et par mon sang, je scelle notre accord. Tant que la duchesse vivra, celui-ci ne sera pas rompu."

Elle poussa les deux parchemin vers la femme ténébreuse, attendant qu'elle aussi s'engage par le sang.

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 Sujet du message: Re: Château de Keresztur
MessagePosté: Mer 16 Mar 2011 16:54 
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Le vent déferla en épaisses rafales bruyantes, allant vomir ses flots sur les pans de murs du château sous les roches naturelles qui l'entourait. Cette pièce était particulièrement bien exposée au vent, les pierres et roches déchiquetées faisaient chanter le souffle nocturne, le rendant sinistre, d'autant plus lorsque les loups des sous bois prenaient part au chant de la nuit.

« Un de ces reptiles serait trop risqué, il n'est pas dit que la bête n'attaquera pas d'abord une servante, trahissant sa présence et réduisant les chances de réussir. Un serpent dans une chambre serait trop suspicieux. Les poisons naturels sont bon effet, à supposer encore une fois qu'il n'y ait aucun goûteurs. Croyez moi, par expérience, je sais que rien n'est plus efficace qu'une lame. Et elle vous sera d'autant plus utile si affrontement il y a par la suite. »

Erzébeth s'approchait, lisant avec attention les parchemins identiques, sa mine triste ne reflétait plus qu'à cette heure devenue tardive, sa langueur naturelle. Elle reposait les parchemins sur la table, s'en allant vers un petit guéridon dont elle ouvrit le tiroir. Elle en tira le sceau de Keresztur, au blason qui tenait en son sein une longue croix fine. Elle embrasa la baguette de cire noire sur l'une des bougies allumées à table, faisant tourner entre ses doigts blancs la tige jusqu'à ce qu'elle soit suffisamment liquide pour faire office de sceau, elle fit couler quelques gouttes au bas du parchemin, près de celui de Blanchefort.

« Puissiez-vous et votre Duchesse avoir bonne chance, si vous ne souhaitez pas m'impliquer dans vos complots. Sachez mes troupes néanmoins présentes et disponibles. »

Erzébeth le rappelait par malice, elle savait que si les choses se déroulaient mal, elle devait rester dans l'esprit de Tisis, sachant qu'en cas de raid, peut être feraient-elle appel aux Ieles. L'heure n'était pas encore aux hypothèses. Katalina rentra dans la pièce sans frapper, portant sous le bras un panier en osier qui contenait quelques grappes de raisins rouge, des poires, pommes, figues ainsi que quelques fruits secs.

Tandis qu'elle déposait les vivres abondantes sur la table, elle demanda où en était l'accord, prenant à coeur son rôle grandissant de conseillère, profitant sournoisement de l'absence de Mircalla pour tenter de prendre du galon sous le joug d'Erzébeth. La Baronne tira le couteau à peler de son panier, pensant non sans malice à entailler la main de Katalina pour sceller le pacte, sachant que Tisis le faisait au nom de sa Duchesse, elle ne voyait pas pourquoi Katalina ne pourrait faire de même. Elle prit doucement la main de la brune qui regardait le couteau et sa main avant de plonger ses yeux dans ceux de la maîtresse, qu'elle tenait rivés sur sa main. Le chuintement de la lame s'entendit doucement, tendant les muscles de Katalina qui s'empêcha un petit gémissement. Elle appliqua le précieux liquide également sur le pacte, avant d'user de la même lame pour s'entailler le doigt et imiter les autres marques sanglantes.

« En ma qualité de Baronne de Keresztur, j'assure aide et soutien à la Duchesse de Blanchefort. J'ai dit.»

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 Sujet du message: Re: Château de Keresztur
MessagePosté: Mer 16 Mar 2011 17:24 
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Tisis contempla les deux parchemins identiques, scellés dans le sang, celui de Victoire, de Tisis, de la Baronne et de sa conseillère. Un engagement irréversible, allant bien au delà des mots qui y étaient inscrits: Victoire avait signé la mort de son frère. Elle avait commis le crime de fratricide, dans cette pièce lugubre, avec cette femme cruelle. La vertu disparaissait dans le sang, c'était là les mots qu'elle avait toujours entendus et que ce soir, elle comprenait.

L'innocence avait disparu.

Souriant tristement, elle prit le parchemin rédigé par Katalina, laissant sa propre écriture entre les mains de la baronne. Elle avait à présent beaucoup à faire, elle avait un mois pour devenir une femme de guerre, soit beaucoup moins de temps que le moindre soldat professionnel. Il allait falloir qu'elle donne tout ce qu'elle avait, qu'elle s'investisse comme jamais, toujours poussée par l'esprit de la vengeance qui la hantait.

Elle n'avait pas beaucoup mangé, mais la faim l'avait quitté. La vue même des fruits et des mets de viande la repoussait. Les flammes des bougies voletaient tristement, alors que la jeune fille ne se sentait pas bien, comme oppressée par les choix qu'elle venait de prendre. Elle n'en montrait rien, bien sûr, mais cela l'habitait.

"Je vous remercie pour ce repas, Madame la Baronne. Je saurai me souvenir de votre accueil. Si vous le permettez, j'aimerais me reposer quelques peu, le voyage a été long et je compte bien servir votre garde de toutes mes capacités."

Elle avait surtout besoin d'être seule, loin de la présence de sa sombre hôtesse.

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 Sujet du message: Re: Château de Keresztur
MessagePosté: Mer 16 Mar 2011 20:08 
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Cette offre était le mal. Le vice. La perversion et le piège redoutable inventé en quelques secondes par une poignée de femmes. Erzébeth souffla quelques bougies, tapissant encore plus la pièce d'un voile de ténèbres, le manteau noir prenait toute son envergure, devenant de plus en plus opaque, presque palpable.

La Baronne répondit à la jeune femme, elle disait vouloir prendre un peu de reste.
« Je vous prie. Katalina va vous accompagner, une chambre a été préparée pour vous, vous ne serez pas loin de votre servante, le barde, faute d'information quant à sa venue a trouvé refuge dans une autre chambre, aux sous-sol.»

Dit-elle non sans un sourire malicieux, se demandant où en étaient les interventions des quatre valets qui jouaient actuellement leur vie sur la découverte du lieu funéraire. En dernier recours, elle ferait appel à un de ces étranges érudits qui se disent capable de chasser les esprits devenus trop entreprenants. Elle tendit un candélabre à Katalina, la brune souriait à Tisis, ses lèvres prenaient une courbe cruelle qui évoquait le tranchant d'une hallebarde. Il était difficile de cerner Katalina, c'était la principale raison pour laquelle elle était crainte des servantes qui n'avaient de cesse de la comparer à un loup ou à un serpent.

Tous et toutes regrettaient qu'elle soit la conseillère d'Erzébeth, d'autant que depuis la venue de Lydia, beaucoup tentaient de faire en sorte qu'elle remplace cette femme ô combien sinistre.

La Baronne jeta un dernier regard sur l'écriture de Tisis, elle savait que le piège allait se clore, que tantôt, les griffes de la mort viendraient saisir les premières âmes, premières d'une très longue liste. Car elle savait, oui, Cèles aussi savait pertinemment que ceci n'était qu'un immense tas de foin que l'on aspergeait de poix alors que quelqu'un frappait du silex à côté. Très dangereux, les complots une fois percés à jour - et ça serait le cas - impliqueraient Valorian, le Duché de Blanchefort et le domaine de Keresztur...

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 Sujet du message: Re: Château de Keresztur
MessagePosté: Mer 16 Mar 2011 22:13 
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La conseillère avait laissé la jeune fille devant la porte de sa chambre, lui mentionnant que l'entrainement commençait avant que le soleil ne se lève. Tisis n'appréciait guère cette femme, qui semblait aimer jouer à des jeux dangereux. Elle n'y prêta pas plus d'attention que cela cependant, refermant la lourde porte de bois dénuée de tout verrou.

Une bougie faible éclairait les lieux bien sombres. Les murs étaient de pierre nue et froide, le lit trônant au milieu de la pièce, non loin d'une petite fenêtre qui donnait sur les montagnes. La jeune fille déposa ses armes sur une petite table, avant d'ôter la maille, respirant enfin. Le silence était opaque, blessé uniquement par le son du vent voire, quelque fois, par le cri d'un loup lointain.

Il y avait une cheminée, éteinte, au-dessus de laquelle se trouvait une toile montrant un homme aux traits sévères, habillé de noir et de rouge. Il semblait regarder la jeune fille, de ses yeux perçants et cruels. Si la baronne n'avait été propriétaire des lieux depuis aussi peu de temps, il n'aurait pas été étonnant que ce soit un de ses ancêtres. Vu la situation, Tisis avait quelques doutes néanmoins.

Posant le candélabre sur une table de chevet, elle s'installa dans les draps froids, sentant toujours le poids de la culpabilité lui écraser la poitrine. Les ombres se mouvaient lentement, la flammèche réagissant au moindre courant d'air, semblant former une fresque vivante de ténèbres.

La future duchesse était épuisée, physiquement et nerveusement, pourtant elle ne trouva pas le sommeil. Elle était rongée, repensant aux mots de ce contrat, un contrat qu'elle aurait pu passer avec Thimoros en personne. Elle ne ferait pas marche arrière, jamais, mais ses chairs elles-mêmes semblaient lentement pourrir, le remord la dévorant.

"Victoire..."

Elle se redressa en entendant son nom, murmuré au loin. Sa première idée fut que ce soit la voix de la servante, mais celle-ci n'était pas en vue. Victoire ralluma la chandelle puis se releva, ses pieds nus se posant sur le sol froid. Elle ouvrit lentement la porte, pour voir si quelqu'un était là ou s'il s'agissait simplement de son imagination. Personne, les bougies avaient fini de se consumer et seuls de faibles rayons lunaires éclairaient le couloir sinistre.

"Victoire..."

Victoire se retourna, lentement. La voix était venue de derrière elle. Fermant la porte et s'appuyant contre elle, elle fouilla la pièce du regard. Celui-ci s'arrêta sur le lit, une forme étant sous les draps, comme-ci quelqu'un s'y était glissé quand elle s'était levée. Sa main enserra la garde de l'épée, qu'elle avait posée non loin, avant de s'approcher. Elle retint son souffle, voyant les draps se lever à un rythme régulier, au rythme de la vie.

Toute proche, serrant l'arme dans sa main droite, elle approcha ses doigts du bord des draps. Elle était prête à frapper, la peur montant peu à peu en elle. N'hésitant plus, elle tira un grand coup, lame levée, avant de reculer. Ses yeux manquèrent de se révulser devant le spectacle, celle d'une femme aux cheveux blonds, la tête tranchée et posée juste au-dessus du cou.

La tête, morte, se tourna lentement vers Victoire qui la reconnut. L'arme lui échappa des mains, tandis que le visage de la prostituée qu'elle avait conduite à la mort la fixait de deux yeux vitreux.

"Victoire..."

La jeune fille tomba à genoux, son cœur battant la chamade, la gorge se serrant alors que des larmes commençaient à poindre. Une main de la morte continua de tirer les draps alors que son corps décharné se redressait gauchement. Le monstre saisit sa tête, la posant sur ses genoux, les yeux n'ayant pas quittée Victoire une seconde.

La bouche du cadavre s'ouvrit, dans un son de régurgitation infâme. De la bile verdâtre coula des lèvres violacées, alors que lentement quelque chose se glissait hors de la bouche de la prostituée, déversant le liquide gluant et dégoûtant. Victoire se couvrit la bouche, se rendant compte qu'un serpent visqueux tombait sur le sol, frétillant mollement. Le serpent, miséreux et repoussant, le corps humide et suintant, poussa un gémissement ô combien humain. Sa tête n'était pas celle d'un reptile, mais avait l'apparence humaine, miniature, chauve et aux veines gonflées. Malgré tout le visage était reconnaissable. Un visage que Victoire ne connaissait que trop bien. Son visage.

La porte claqua violemment, l'air soufflant la bougie unique, plongeant la pièce dans la pénombre.

"Victoire..."

La jeune fille se releva, contournant le lit à tâtons, la panique montant en elle. Elle ouvrit le petit meuble de chevet, y cherchant un fusil et un silex, tentant tant bien que mal d'allumer de nouveau la bougie. Elle entendait le serpent, qui dans l'obscurité se déplaçait, glissant sur le sol tout en gémissant le nom de la duchesse.

Finalement la lumière revint, la mèche s'allumant mollement, éclairant peu à peu les lieux, entre les mains tremblantes de Victoire. Il n'y avait plus de corps dans le lit, plus rien, seulement la chambre. La jeune fille posa sa main sur son front, se demandant si elle était folle.

"Ma fille, Victoire ma fille, ma belle enfant."

Cette fois-ci l'adolescente reconnut la voix de Pierre de Blanchefort, une voix qui ne semblait pas venir d'un endroit en particulier. Elle resta figée, se demandant si elle rêvait ou si elle avait simplement perdu la raison. Prenant son courage, ou sa folie, à deux mains elle s'exprima:

"Père?
-C'est bien moi mon enfant. Ma belle enfant.
-Comment?
-Je suis condamné à errer dans la nuit éternelle, comme un spectre. Mon âme a été damnée par la parricide, le meurtre du père par l'enfant, le crime le plus monstrueux de la création. L'attrait du pouvoir, la séduction du trône. Ton frère, ton frère a plongé sa lame dans mon corps, les yeux toujours dans les miens. Il m'a assassiné, tué, occis, abattu, exécuté... Il m'a arraché la vie de ses mains sales."

Le vent soufflait tristement au-dehors, tandis que Victoire restait glacée. Sa peau était froide, la faisant frissonner. Elle ne voyait pas le spectre de son père, mais elle savait qu'il était là. Que c'était lui. Elle le savait.

"Vengeance... Tu es le bras de la vengeance. Tu hésiteras, je le sais, mais sache que Anatole n'a pas hésité. Il m'a tué, venge moi, de la manière la plus horrible et la plus atroce. Donne lui la mort et donne moi son âme que je jetterai en pâture aux chiens infernaux. Tue le, tue le et venge le duché. Mais prends garde."

Victoire ne parlait pas, ne disait mot, écoutant l'esprit de son père.

"Prends garde, le mensonge t'entoure, il entoure ton alliée. Prends garde à la folie et à la démence, à l'engeance du mal qu'elle incarne. Humaine elle ne l'est pas, ne l'a jamais été, huit décennies que le malheur la suit. Femme elle n'est pas. Prends garde. Son nom, perdu, enfoui mais réel. Je te donne le pouvoir ma fille, le pouvoir de défaire le mirage. Je ne te dirai qu'un seul mot, un seul nom, une seule arme et je disparaitrai, tapi dans les ténèbres et attendant la Vengeance."

Victoire avait cessé de respirer, buvant les paroles de l'âme devenue errante.

"Silmeria..."

Ce furent les dernières paroles de Pierre de Blanchefort. Les derniers mots, marqués au fer rouge dans l'esprit de la jeune fille, un nom qu'elle n'oublierait jamais. Elle sentit un souffle glacial l'envelopper, la porte de sa chambre s'ouvrant devant elle avant de se refermer. Plus loin, plus tard, on entendit un vase se briser.

Victoire ne savait quoi penser, elle était perdue. Anatole, s'il avait vraiment commis le parricide, elle se devait de lui trancher la tête elle-même, de lui faire subir les pires tourments.

La vengeance...

Tisis...

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 Sujet du message: Re: Château de Keresztur
MessagePosté: Jeu 17 Mar 2011 13:12 
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Alors qu'elle courait le long du chemin escarpé, les jambes molles et le souffle court, elle regrettait. La maille était lourde, l'air était froid et le rythme engagé par les soldats était intense. Elle regrettait...

Elle regrettait les mots qu'elle avait adressés à Lydia, quand les deux femmes avaient pu discuter seules un instant, avant que le soleil ne se lève, avant que l'entrainement ne commence. Elle regrettait les mots qu'elle avait prononcés quand elle avait quitté les bras amies de l'archère, qui était visiblement heureuse de la voir saine et sauve.

"Lydia, mon amie, ma protectrice. Tisis, ou plutôt je, suis le dernier espoir qu'a Blanchefort. J'ai besoin de devenir forte, pour pouvoir mener mes hommes. J'ai besoin de devenir comme toi. Au nom de notre amitié, je te le demande, je t'en supplie et je t'en conjure, aide moi..."

Lydia passa sa main sur la joue de Victoire avec tendresse pour la dernière fois, lui faisant comprendre qu'elle acceptait la requête de son amie.. Depuis et pendant quatre heures elle l'avait fait courir.

Simplement courir, avec quelques hommes qui n'étaient pas de garde, autour du château et dans les bois. Courir sur les pentes escarpées, dans les ronces acérées, dans les rivières glacées. En maille, en sueur, l'épuisant d'une manière simple et pourtant si vive.

Lorsque le soleil fut au zénith, Lydia lui dit de se servir de son arc, car c'en était fini de manger la nourriture du château. Elle n'était pas à Blanchefort et n'avait pas de cuisinier: si elle voulait manger, qu'elle se débrouille seule, mais dans l'heure. Tisis obéit, partant seule dans les bois vides, pour chercher à manger. Elle se souvenait du terrible chemin qui l'avait menée à Kendra Kâr, faisant attention à tout ce qui risquait d'être mortel.

Elle évita les pièges à loups, s'écarta des traces de pas d'ours et prêta l'oreille. Hélas, si aucun danger ne se présenta, elle revint bredouille au point de rendez-vous. Lydia la regarda avec fermeté, lui tendant une simple pomme. La jeune fille comprit de quoi il en retournait et, malgré la faim, refusa de se nourrir de la sorte. L'archère ne montra aucun sentiment, rangeant le fruit sans faire de commentaire.

L'après-midi fut consacrer à l'arc:

"Les pieds ! Mets-toi droite ! De l'effort ! Tu crois que c'est comme ça que tu aideras ta duchesse ? Un nouveau né ferait mieux ! Encore ! Recommence ! "

C'est finalement longtemps après que le soleil ne se soit couché que Tisis se fit ordonner de rentrer dans ses quartiers. Lydia lui avait jeté quelques biscuits rassis, lui suggérant de les manger car le lendemain elle saurait ce qu'est un vrai entrainement.

Épuisée comme jamais, la jeune fille s'écroula dans sa chambre, mangeant le frugal repas avec un appétit dévorant, tout en respirant lourdement. Chaque muscle, chaque parcelle de son corps la faisait souffrir intensément. Une souffrance qu'elle appréciait, en cet instant. Elle aimait sentir les crampes de l'effort, la dureté de ses membres: cela lui montrait qu'elle agissait, qu'elle se battait déjà, ne serait-ce contre l'épuisement. Toute cette douleur qui la parcourait l'aiderait à en infliger tellement plus à son frère et à son ennemi.

Elle souriait, malgré tout, ne regrettant rien.

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 Sujet du message: Re: Château de Keresztur
MessagePosté: Ven 18 Mar 2011 00:00 
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Adenisio entra dans la chambre de la duchesse, qui s'était habillée de manière moins martiale que la journée. Il n'avait pas l'air d'avoir été maltraité plus que cela, même si sa moue suggérait autre chose. Reprenant de son aplomb il s'approcha de Tisis, lui saisissant les mains avant d'y déposer un baiser.

"Que me vaut le privilège de votre invitation, Dame Tisis de Blanchefort?
-Il se trouve, messire barde, que j'aurais besoin de services d'une personne aussi... expérimentée que vous l'êtes."

Intéresse, l'homme sourcilla. Tuisis savait pourtant que la suite serait bien moins à son goût. Elle lui proposa de s'asseoir, avant d'aller plus avant dans la discussion:

"Vous aimez les femmes, n'est-ce pas?
-Je... Bien évidemment, elles sont la quintessence de la beauté et de la poésie, l'âme même de l'aspiration supérieur que nous autres, artistes, éprouvons.
-Connaissez vous le duché de Valorian?
-Oui, mais je n'y es jamais séjourné personnellement: un côté rustique qui n'a pas su, pour le moment, attirer ma plume.
-Tout cela est parfait, messire Adenisio. Voyez vous, j'ai besoin que vous vous rendiez à Valorian et que vous approchiez sa duchesse, que vous la séduisiez et m'informiez de tout ce qu'elle pourra vous vire sur l'oreiller."

Le barde resta figé, la bouche bêtement ouverte, s'étant visiblement attendu à tout sauf à cela. Il bafouilla un peu, avant de tout de même reprendre de l'ardeur, passant machinalement sa main dans les cheveux:

"Et bien, cela me parait difficile, n'ayant pas encore mes entrées auprès de cette charmante dame. De plus, utiliser mes atouts de la sorte serait...
-Soit, je comprends votre refus. Je conçois qu'il est difficile que de devoir séduire la duchesse et forniquer avec elle, ou sa fille, voire même ses servantes. Puisqu'il en est ainsi, je ne peux hélas guère considérer que vous faîtes partie intégrante de ma suite. Je vous ai sauvé la vie et lorsque je vous demande compensation vous refusez. Sans rancune, j'informerai donc Madame la Baronne que vous êtes totalement indépendant. Je suis sûre qu'elle sera ravie de mettre en pratique vos nombreux talents ne relevant pas de l'usage de votre membre."

Elle avait dit ça d'un ton tellement naturel qu'elle en frémit elle-même. Adenisio s'était tu, la jaugeant, pesant intérieurement le pour et le contre de la situation. Soit il prenait un risque pour la jeune fille, y gagnant au passage des instants de luxure, soit il devenait un malvenu sur la terre même de la sadique baronne. Le choix ne fut pas long:

"Bien entendu, même si je n'ai pas encore mes entrées, cela ne saurait tarder. Qui pourrait donc refuser ma présence?
-Qui le pourrait en effet... Si vous étiez pris, ce dont je doute, mais si c'était le cas, ne parlez jamais de notre discussion. Si on vous prenait pour un espion et non un simple fornicateur, seuls les dieux savent qu'elle inimaginable torture on pourrait vous infliger. Torture que je ne manquerais nullement de compléter, si elle ne me semblait pas suffisante...
-Cela va de soi que ma présence en ces terres lointaines tiendra uniquement de ma passion artistique pour les beautés de madame, nullement pour un quelconque pouvoir voisin.
-Vous voilà bien sage, messire barde. Je compte sur vous, la récompense saura être présente une fois votre... débauche... terminée."

Elle le congédia, faisant informer la Baronne que l'homme était libre de partir, ayant enfin trouvé une utilité. Tisis s'entretint aussi avec Millana, à qui elle donna la tâche de servir avec les domestiques de la maison. Elle ne précisa pas de manière intelligible qu'elle souhaitait avant tout que la jeune servante se serve de ses deux oreilles, mais ce genre d'implication était totalement inutile.

C'est d'ailleurs de la sorte qu'elle apprit la présence d'un esprit dans la demeure, qui terrorisait le personnel depuis quelques temps, bien avant qu'elle n'ait eu la vision de son père. Il était difficile de faire la part entre le vrai et le faux, mais dans tous les cas les lieux semblaient sinistres...

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 Sujet du message: Re: Château de Keresztur
MessagePosté: Ven 18 Mar 2011 13:07 
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"BOUCLIER !"

Tisis obéit, levant l'écu à temps, reculant sous le choc violent, le bras endolori. Elle écarta le bras, faisant glisser la lourde arme de bois de son adversaire avant s'abattre sa propre lame sur celui-ci. Le bois claqua avec violence dans l'air, des copeaux éclatant sous le choc. Le soldat détourna son propre bouclier pour la déséquilibrer, mais elle s'y attendait, reculant à temps pour éviter la contre attaque.

"RECOMMENCE !"

La voix de Lydia explosait dans la cour d'entrainement, recouvrant aussi bien le bruit des boucliers et des épées de bois que les grognements des hommes qui se lançaient dans des assauts furieux qui auraient été mille fois mortels s'ils avaient été réellement armés. Tisis se plaça face au grand brun, qui recommença, chargeant en poussant un grand cri, abattant son arme avec fureur sur le bouclier de Tisis qui à chaque coup sentait ses genoux plier.

Elle-même poussait des cris, parant les coups de justesse et contrant, frappant l'écu de son ennemi, enchainant les coups sans clémence. Il arriva finalement à la déséquilibrer, profitant de la brève faille pour se baisser et administrer un coup violent dans le tibia de la jeune fille. Elle poussa un cri de douleur, cri qui s'étouffa quand le bouclier de l'homme la heurta dans l'abdomen, la faisant décoller du sol.

Le sol se rapprocha, la heurtant de plein fouet. Son propre écu lui avait échappé des mains sur le coup. Elle n'eut pas le temps de cherche son souffle, roulant sur elle-même par pur réflexe avant que l'arme de bois ne s'abatte sur elle. Elle frappa tout en se relevant, son épée heurtant avec bruit celle adverse, déstabilisant l'homme. Elle en profita pour lui porter un coup de pied violent au genou, avant de faire tourner son arme. Le bois se fracassa contre la tempe du soldat dans une petite gerbe de sang, le faisant tomber au sol dans un nuage de poussière.

"Cibor, c'est qu'une gamine !"

Tisis reprenait son souffle, son dos lui faisant un mal de tous les diables. Elle n'eut pas beaucoup de répit cependant, car déjà Gerwazy se présentait, se mettant en garde. La jeune fille réajusta son bouclier, se jetant de nouveau dans la mêlée, criblant de coups son ennemi et reculant à chaque choc terrible.

***

La jeune fille lâcha les rênes du cheval qui allait à toute vitesse, encochant maladroitement une flèche. Elle visa le mannequin, lâcha la corde et se rattrapa de justesse à la crinière de Caelia, la faisant lentement ralentir. Une nouvel fois le projectile avait raté sa cible de plusieurs coudées. Faisant demi tour, elle relança sa jument, réitérant la tentative une énième fois.

Elle se concentra sur ce que lui avait dit Lydia, qu'il fallait que le cheval garde une vitesse constante et que les bras bougent en rythme. C'était un exercice extrêmement difficile, qui demandait précision et équilibre. Une nouvelle fois elle lâcha les rênes, orientant l'arme vers le mannequin de paille, se laissant aller à mouvoir son bassin avec confiance.

Elle lâcha la corde, le chanvre claqua, la flèche fila, le cheval fit un pas de côté. Tisis n'eut pas le temps de se rattraper, glissant de la selle au galop et manquant de peu de se prendre un coup de sabot dans la chute. Elle roula sur le sol, l'épaule la brûlant, alors que Caelia ralentissait un peu plus loin. Elle se redressa lentement, le monde semblant tourner autour d'elle, lui donnant le vertige. La silhouette de Lydia se rapprocha, se baissant vers elle. L'archère palpa l'épaule de la jeune fille qui grimaça, avant de la regarder dans les yeux.

"C'est bon tu n'as rien de cassé. Relève toi et recommence, sans tomber cette fois."

Regardant le mannequin, elle se rendit compte que cette fois-ci la flèche n'avait pas manqué sa cible. Certes elle n'avait pas touché le cœur ou la tête, mais elle avait touché. Se massant l'épaule, la jeune fille ramassa son arc avant de se rapprocher de Caelia. La jument semblait se sentir coupable, nichant sa tête dans le cou de sa maîtresse.

Tisis la flatta, avant de remonter en selle, grimaçant un peu, avant de recommencer l'entraînement.

***

Lydia et Tisis firent le tour des troupes disponibles, la jeune fille ayant expliqué à l'archère la mission qu'ils auraient. Cela avait été douloureux que de mettre son ami dans la confidence d'actions aussi sombres et répréhensibles, mais il valait mieux que ce soit elle qui l'en informe. Lydia n'avait pas fait de commentaire, s'étant contentée de suggérer une listes d'hommes capables qui ne se laisseraient pas aller à plus de cruauté que nécessaire. Il aurait en effet été dangereux que les soldats prennent plaisir à leur mission de ravages, car l'attention ne devait être attirée qu'avec modération et doigté.

Au final ce furent donc cinq groupes de dix hommes, qui devaient s'en prendre au terres de comtes différents. Tisis choisit des amis de son père, de préférence influents, ceux qui seraient le plus à même de condamner les actions de Tristan et de prendre la défense de la nouvelle duchesse.

Les ordres furent données, de fausses armures et armes de Valorian leur étant distribuées. Ils partirent finalement, sous le regard de Tisis. Le moment même où ils franchirent les portes du château, elle sut que le plan avait commencé. Il ne s'agissait plus d'un contrat de sang, mais d'un acte tangible.

La première pierre de l'édifice qu'était la guerre était posée. L'alliance secrète ne pouvait plus se défaire.

(Apprentissage de:
feinte - tir instinctif)

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 Sujet du message: Re: Château de Keresztur
MessagePosté: Ven 18 Mar 2011 21:19 
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La baronne profitait de l'absence de Tisis et de celle de Katalina pour songer. Elle ne savait que trop dans quoi elle venait de s'embarquer, il fallait prendre des risques pour assurer l'évolution de son domaine. Les plaines étaient souvent lieu de raids Orques ou d'entrainement militaire, volant la place aux paysans qui devaient se contenter d'endroits plus arides.

L'armée grandissait à mesure que les taxes écrasaient la population, déjà peu affluente. Le majeur problème était ici. Trop peu d'âmes pour tant d'ambition. Elle désirait tant pouvoir se séparer de l'aide du Roi, de la noblesse, disposer de terres plus vastes, d'avoir plus de soldats, pouvoir conquérir des lignes ennemies, tuer des ennemis par millier, brûler des mages renégats... Laisser une trace de sa vie dans ce monde. Le parchemin, le pacte entre Keresztur et le Duché était toujours sur la table. Traitant des engagements de chaque partie, une réelle alliance tombée du ciel. Il en faudrait d'autres... Songeait-elle.

Teresa vint la voir, elle avait assisté quelques étages plus bas aux nombreuses fouilles qui avaient enfin mené à quelque chose. Les valets avaient trouvé un comble qui pouvait correspondre à ce que la Baronne recherchait. Ensemble, elles descendirent dans les profondeurs de Keresztur, là où la pierre se faisait moite et mousseuse. Le sol glissait, Teresa manqua même de déraper. Les gouttes de la terre tombaient dans un petit bruit continuel qui rendait cette atmosphère presque sinistre. Les trois valets étaient assis à attendre leur compagnon, une corde était tirée afin de le retrouver facilement dans les boyaux souterrains. Un garde attendait Erzébeth, tous semblaient soulagés, il était clair que personne ne souhaitait la punition qu'elle imposerait en cas d'échec.

Elle fut conduite par un soldat qui suivait la corde, armés de torches et d'une outre de poix, ils s'enfonçaient encore plus dans l'épais manteau noir que la lumière avait maintenant peine à éclairer. Le valet creusait, la torche éclairait peu son visage, il grimaçait de peur et de fatigue, les traits de son visage lui donnaient une expression de dément, comme s'il venait de perdre l'esprit et était habité par la motivation de creuser jusqu'à Kendra Kâr.

Le garde lui tapota l'épaule, l'invitant à se décaler pour laisser Erzébeth passer. Sur tout le chemin, pendaient de petits pendentifs de bois qui étaient gravés au couteau. On voyait de reste de vie, de vieux livres rendus illisibles par l'humidité, il n'y avait plus qu'une compote de pages et de parchemins. Quelques os, des cruches brisées, des outils de gravure...

« On dirait que quelqu'un a été abandonné ici même...»

Tout laissait à croire qu'un être avait été emmuré dans ce sinistre alcôve. Le mortier sur les murs, les pendentifs, les restes de repas carnés qui ressemblaient affreusement à des os d'humains rongés... Elle tira une grimace tant l'atmosphère était dérangeante. Ses tympans commençaient à battre, le valet s'affolait et le soldat quant à lui, regardait dans toutes les directions. Les flammes perdaient de l'intensité lorsqu'un courant d'air venu de nul part fit trembler d'effroi le servant qui recula de plusieurs pas, se perdant dans l'ombre.

Erzébeth était pressée d'en finir, elle ne souhaitait pas voir par elle même cette créature, ne lui laisserait pas cette chance. Elle attrapa la poix des mains du garde pour verser le liquide épais et grisâtre sur les restes de l'ancienne vie du condamné, aspergeant les murs, le sol, les os... Rien ne devait être épargné par les flammes.

Tous deux reculaient, le plafond était bas et les flammes risquaient de leur sauter au visage s'ils restaient trop près, plutôt que de prendre ce risque, elle versait le reste sur une petite trainée du chemin, espérant que l'humidité ne diluerait pas trop le liquide inflammable et que son geste serait porteur.

La flamme embrassa la poix qui s'embrasa et courut jusqu'au repaire sinistre du mort vivant, les couloirs éclairèrent comme si le soleil lui même était venu dans cette pièce, les flammes léchaient le plafond sous les crépitements forts des arcanes qui tournaient à la cendre... C'en était probablement terminé de cette abomination...

Teresa s'approcha d'Erzébeth, elle tremblait et lui avoua s'être inquiétée pour elle, touchée par les mots de sa jeune chambrière, elle lui sourit sincèrement, presque étonnée que malgré sa fermeté habituelle elle puisse être aimée par ses sujets proches. Elle félicita les valets, récompensant leur travail par des couvertures, de la nourriture de choix ainsi qu'une somme de dix yus chacun. Rassurés d'avoir échappé à la mort, ils commencèrent à se détendre, exténués par ces longs travaux dans ces conditions pénibles, ils remontèrent tous ensembles à l'étage du personnel pour toucher la récompense.

Teresa restait dans l'ombre de sa maîtresse, rassurée elle aussi de savoir que cette mésaventure ne serait pas soldée par la perte de quatre valets. La Baronne elle, comprenait de plus en plus l'emprise que pouvait avoir la peur sur un être...

Elle se demandait si Tisis pouvait en être victime aussi. Erzébeth devait penser à une mission, une tâche à lui confier, quelque chose d'assez honorifique sans pour autant être capital, ce n'était pas les brigands qui manquaient après tout... Peut être chasser les bohémiens sur ses terres ? Ils ne faisaient rien de mal après tout, mais devenaient de plus en plus nombreux. Elle se voyait mal demander à sa nouvelle alliance un simple travail de ronde, c'était la corvée des soldats en formation... Tandis que sa chambrière lui contait un rapport oral de ce qui s'était passé dans le château, elle écoutait d'une oreille distraite trop occupée à se demander si elle avait bien fait de s'allier avec cette jeune femme. Elle ne connaissait même pas ses capacités au combat... Mais il se pouvait bien que ça change.

***


Erzébeth se tenait accompagnée de deux soldats de Zalina dans la cours principale destinée à l'armement et à l'entrainement à l'épée. Elles avaient beau être de bois ou émoussée, chaque coup méritait d'être douloureux. Car selon la Baronne, une leçon n'est apprise que lorsqu'elle est gratifiée de la douleur. Elle avait trouvé avec Katalina, désormais surnommée officiellement la vicieuse par les valets, un entrainement qui motiverait les archers...

Elle l'expliquerait plus tard à ses troupes, pour l'instant, elle attendait Dame Tisis, l'heure de l'entrainement allait venir et elle était impatiente de voir comment elle se débrouillerait, personne jusqu'à présent avait pris soin de la prévenir qu'elle se battrait contre la Baronne dans une joute militaire.

Le combat était à arme non égales, chacun des deux parties dispose d'une arme qui lui est propre, aussi, un lancier pouvait bien être confronté à un soldat régulier armée d'une épée. Pour cela les règles étaient simples, les armes sont légèrement émoussées car trempée dans un mélange de cire. Les protections étaient un blason de coton maillé et rembourré, une plaque de croute de cuir, un casque ouvert et des gants. Katalina patientait avec sa maîtresse. L'aube, Erzébeth savait que l'aube était toujours le moment préféré des assassins et des voleurs. C'est là que les gardes en sont à leur dernier quart et en général, avant les premiers rayons du soleil, le sommeil est au plus profond. Une des raisons pour laquelle elle souhait que le meurtre du frère de Victoire se déroule de nuit, avec des assassins qu'elle aurait formé elle même, avec sa méthode et ses exigences.

Elle prit la décision de se préparer avant même l'arrivée de Tisis, ne lui laisserait pas le temps de comprendre la situation, une fois habillée et armée, la jeune femme sera contrainte d'engager le combat immédiatement. Elle endossa par dessus sa robe de lin la combinaison humide de coton. Katalina se glissa derrière elle pour serrer les lanières de cuir qui s'entrecroisaient entre les mailles blanches. Par dessus, la croute de cuir plus rigide qui une fois serrait, faisait un poids considérable, elle était loin de s'en rendre compte, mais le matériel était si lourd qu'il n'avait presque rien à envier à une côte de mailles. En réalité, les tenues portaient de petites boules de plomb dans les armatures afin de se rapprocher le plus possible du poids porté par un soldat en mission...

Bottes, gants, et finalement le casque qu'elle porta sous son bras en attendant la Dame chevalier. Katalina portait presque solennellement la dague Scélérate trempée dans la cire noire de façon à ne pas entailler sa nouvelle alliée...

_________________
La petite ombre de la Mort à Elysian.

Alors, j'ai établi ma couche dans les charniers,
Au milieu des cercueils,
Où la Mort Noire tient le registre des trophées qu'elle a conquis.


Némésis d'Heartless


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