Dirigé de Karz :
Le gamin n’attend pas que tu l’aies rejoint, car à peine voit-il que tu es disposé à rejoindre le reste de la maisonnée pour le repas du matin qu’il détale pour aller rejoindre la table qu’il avait précédemment quittée, disparaissant aussi vite qu’il était venu, et te laissant par toi-même deviner le chemin qui est de toute manière bien loin d’être une épreuve digne d’un labyrinthe. Ainsi, quittant l’étable et ta compagne de nuit qui te couve un moment d’un regard tranquille et indifférent avant de reprendre ses riches activités, tu regagnes la pièces dans laquelle tu avais précédemment été installé pour découvrir pas moins de cinq personnes à la table que tu connais.
Deux de ces personnes, tu les connais, car il s’agit de la matrone et du blondinet, mais parmi celles que tu n’as pas encore vues, il y a pour commencer une jeune fille d’une douzaine d’années dont le visage un peu boudiné n’est pas sans rappeler celui de sa génitrice, de même que tout son corps, excepté que l’âge n’a pas malmené son physique qui est bien plus potelé que boudiné, ses formes généreuses n’étant pas dénuées de quelque chose d’agréable au regard. Que ce soit par timidité ou simplement par le principe du « on ne parle pas à un étranger », elle ne te regarde pas, se contentant de continuer de manger le plat à sa disposition, et qui semble être une sorte de gruau fait de céréales bouillies surmontées d’un œuf.
Un peu en retrait par rapport à cette enfant, tu peux remarquer une espèce de grande asperge qui n’a de toute évidence même pas encore atteint la vingtaine, mais qui te dépasse bien d’une demi tête, et donne l’impression d’avoir été tiré par la tête et par les pieds pour donner cet échalas au visage étiré et aux membres grêles. A ton arrivée, il te gratifie d’un coup d’oeil plutôt morne dans ta direction avant de s’en retourner s’occuper de sa becquetance qu’il avale par petites cuillérées rapides vite ingurgitées.
Enfin, il y a un homme manifestement dans la force de l’âge qui pourrait être la copie conforme de ton réveille-matin avec une bonne vingtaine d’années de plus, et qui est à n’en pas douter, se trouve être le chef de famille puisque, de concert avec celle qui ne peut être que sa femme, il te lance un regard entendu avant de s’exclamer :
« Ah, v’là not’ invité tout droit v’nu d’Exech ! V’nez donc Karz, il n’s’ra pas dit qu’Arnol n’aura point satisfait aux règ’ d’l’hospitalité ! V’nez vous asseoir et mangez un coup, ensuite, y’a quequ’chose dont j’voudrais vous parler ! »Malgré son allure débonnaire et accorte, tu peux sentir qu’il y a comme une inquiétude qui perce dans ses propos… non pas à ton égard, car il a au contraire l’air d’accueillir ta venue avec une réelle bonne humeur, mais plutôt comme si quelque chose le chiffonnait. Quoi qu’il en soit, il n’en montre pas davantage, et à l’image du reste de la famille occupée à se remplir l’estomac du met fort peu reluisant à disposition, il se remet à manger, te laissant occuper le seul siège restant, entre lui et le grand dadais, où une écuelle bien garnie a été mise à ton intention.